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Comparaison des données Chandra avec les études précédentes

6.3 Contraindre l’activité passée de Sgr A ? grâce aux observations

7.1.2 Comparaison des données Chandra avec les études précédentes

Les données Chandra ont une meilleure résolution angulaire que les données XMM mais ne possèdent malheureusement pas la même surface efficace. Ainsi, nous n’avons pas jugé pertinent de reproduire une analyse spectrale complète, telle qu’elle a été faite avec les observations XMM-Newton (Ponti et al., 2010; Capelli et al., 2012). En revanche, l’utilisation d’un modèle spectral simple et contrai-gnant, permettant d’extraire le flux de la raie Kα du fer neutre pour des spectres présentant peu de statistiques, s’avère crucial pour exploiter au mieux la haute résolution angulaire de nos données. La réduction des données Chandra a été présentée à la Section 3.1.2. Nous présentons ici le modèle

FIGURE7.4 – Graphique présentant une vue de dessus des régions centrales de la Galaxie. La position de Sgr A?

est renseignée par l’étoile noire au centre de l’image. Le plan Galactique est représenté par l’axe horizontal et la ligne de visée par l’axe vertical. La couleur des nuages renseigne la tendance des variations de leur émission à 6.4 keV : croissante (rouge), constante (cyan), décroissante (bleu) ou une absence d’émission dans la raie Fe Kα (vert). Sgr B2 est placé devant le plan du trou noir, en accord avec la position déterminée par Reid et al. (2009). Les positions des autres nuages ont été déduites de celle de Sgr B2 en supposant qu’ils étaient tous illuminés par un seul et même événement de luminosité constante (cf. Section 6.3.3). La parabole délimitant le début de l’événement est en train d’atteindre la structure de Bridge et correspond à un signal émis il y a environ 400 ans, tandis que la parabole traçant la fin de l’événement est en train de quitter Sgr B2 et G0.11–0.11 et correspond à un signal émis il y a environ 100 ans. Ce scénario ainsi que la figure sont issus de Ponti et al. (2010).

spectral que nous avons choisi pour l’analyse du complexe Sgr A, ainsi que la méthode d’ajustement permettant de construire les courbes de lumière. La comparaison de nos résultats avec les courbes de lumière produites par les études précédentes nous a permis de valider notre modèle et notre méthode d’analyse.

Modèle spectral et ajustement des données Chandra

L’ensemble des données Chandra utilisées dans cette analyse est résumé dans la Table 3.2. Afin de contraindre la variabilité de la raie Fe Kα, nous cherchons à étudier la forme spectrale de l’émission en l’ajustant avec un modèle simple. Pour cela, les spectres doivent avoir une statistique suffisante. J’ai donc regroupé les différents pointés selon l’année d’observation et restreint l’analyse spectrale aux neuf années suivantes : 2000, 2002, 2004, 2005, 2006, 2008, 2009, 2010 et 2011.

Je me suis ensuite basée sur les analyses spectrales réalisées avec les données XMM (Ponti et al., 2010; Capelli et al., 2012) et Suzaku (Koyama et al., 2007; Nobukawa et al., 2010) afin de choisir un modèle et une bande d’énergie pertinents pour notre analyse. Les études précédentes ont montré que, dans la bande d’énergie 2–10 keV, le spectre du complexe Sgr A est compatible avec un spectre

de réflexion superposé à une composante thermique pouvant être modélisée par deux plasmas de températures 1 et 6.5 keV (Muno et al., 2004). J’ai choisi de restreindre l’analyse spectrale à la bande d’énergie 4–7.1 keV dans laquelle la composante de réflexion est maximale (cf. Figure 6.3), tandis que la contribution du plasma froid est réduite. De plus, l’intervalle considéré ne contient aucune raie instrumentale, l’estimation du fond choisie (cf. Section 3.1.2) y est donc pertinente.

Le modèle le plus simple s’ajustant à nos données est constitué d’une raie d’émission Fe Kα gaus-sienne additionnée à une composante diffusée en loi de puissance et à une émission thermique carac-térisée par un plasma à 6.5 keV (cf. Figure 7.5 pour un exemple de spectres extraits dans la région du Bridge). En toute rigueur, la composante diffusée est en partie absorbée à basse énergie. Néan-moins, la faible statistique des spectres et la bande d’énergie choisie ne permettent pas de déterminer simultanément et précisément l’indice de photon de la loi de puissance et la densité de colonne l’ab-sorbant. C’est pourquoi j’ai décidé d’utiliser une loi de puissance simple pour modéliser l’émission du continu, même si la valeur de son indice n’a de ce fait pas de signification physique. J’ai donc ajusté les données spectrales entre 4 et 7.1 keV avec le modèle Xspec suivant,

GAUSSIAN+POWERLAW+APEC. (7.1)

GAUSSIAN modélise l’émission de la raie de fluorescence Fe Kα, elle est définie par trois para-mètres : son énergie, sa largeur et son flux en photons cm−2s−1. POWERLAW modélise l’émission du continu, elle est définie par son indice de photon et sa normalisation à 1 keV, exprimée en pho-tons cm−2s−1keV−1.APECmodélise le plasma chaud, il est défini par sa température, sa normalisa-tion en cm−5, ainsi que par la métallicité du milieu qui, sauf mention contraire, sera fixée aux valeurs solaires.

Afin que l’ajustement du modèle soit le plus stable possible, j’ai cherché à réduire le nombre de para-mètres libres. Pour ce faire, j’ai d’abord identifié les parapara-mètres constants dans le temps ou dans l’es-pace. La composante thermique possède une distribution spatiale qui n’est pas précisément connue. En revanche nous savons que son émission peut être considérée comme constante. J’ai donc fixé la température du plasma à 6.5 keV (Koyama et al., 2007) puis, pour chaque région, j’ai utilisé une normalisation unique ajustée sur l’ensemble des années. Par ailleurs, la résolution des spectres que nous étudions ne permet pas de mettre en évidence de modification physique concernant la largeur ou l’énergie de la raie de fluorescence. Ainsi, les variations détectables de ces deux paramètres sont uniquement liées à la calibration des observations. Pour une année d’observation donnée, la largeur et l’énergie de la raie du fer seront considérées comme identiques pour toutes les régions étudiées. Pour chaque année, j’ai donc fixé ces paramètres aux valeurs préalablement ajustées sur les spectres extraits de la région du Bridge.

Le signal de réflexion est donc la seule composante de l’émission qui peut varier au cours du temps, induisant ainsi des variations corrélées de la raie Fe Kα et de la loi de puissance (le continu). Afin de caractériser ces variations, pour chaque région j’ai ajusté simultanément les 9 × 3 + 1 paramètres restant libres sur les neuf ans de couverture spectrale. Les paramètres libres sont la normalisation du plasma chaud et, pour chacune des neuf années, l’amplitude de la raie du fer, l’indice et la norma-lisation de la composante continue. L’ajustement a été réalisé en utilisant une statistique du χ2avec une variance de Gehrels (Gehrels, 1986). L’ensemble des ajustements ont produit des χ2 réduits de l’ordre de un, permettant de construire des courbes de lumière du flux contenu dans la raie du fer pour différentes régions (cf. Figures 7.6 et 7.7, puis Section 7.2). Les erreurs sur les flux sont données par l’intervalle de confiance de l’ajustement à 1 σ.

FIGURE7.5 – Les spectres du Bridge et les ajustements correspondants pour les années 2002 (aucune illumi-nation forte n’est vue dans le Bridge), 2008 (l’illumiillumi-nation commence dans la région la plus à l’ouest, B1 sur la Figure 7.3) et 2011 (l’illumination atteint la région à l’est du Bridge, B5). Le flux de la raie Fe Kα croit significativement au fil des années.

TABLE7.1 – Paramètres spectraux obtenusapour la région du Bridge en 2002, 2008 et 2011.

Paramètres unités 2002 2008 2011

Fe Kα – normalisation 10−5ph cm−2s−1 3.8 ± 0.1 6.0 ± 0.3 8.5+0.2−0.3

Continub– indice de photon 0.5 ± 0.1 0.2 ± 0.1 0.0 ± 0.1

Continub– normalisation 10−5ph cm−2s−1keV−1 3.3 ± 0.1 4.3 ± 0.2 5.6 ± 0.2

aLes neuf spectres correspondant aux neuf années d’observation ont été ajustés simultanément (χ2

gehrels/ d.d.l. = 1148 / 1395), donnant pour chaque année le flux de la raie Fe Kα, l’indice de photon du continu et sa normalisation. Pour cette région, la normalisation

du plasma à 6.5 keV vaut (1.83 ± 0.08) × 10−3cm−5. Les autres paramètres ont été fixés tel qu’indiqué dans la Section 7.1.2.

bL’émission du continu est modélisée par une loi de puissance simple. L’interprétation physique de ses paramètres est donc ambiguë.

Variations temporelles à l’échelle des nuages et comparaison avec les études précédentes

La raie d’émission du fer neutre Kα des nuages moléculaires est fortement variable dans les régions internes de la Galaxie, ce qui prouve qu’une part importante de l’émission diffuse est due au phéno-mène de réflexion. Etudier ces variations est donc crucial pour contraindre l’événement à l’origine de l’illumination. La tendance générale de ces variations a déjà été caractérisée sur certaines structures en considérant des échelles de l’ordre de la minute d’arc (Ponti et al., 2010; Capelli et al., 2012), et il nous a semblé nécessaire de reproduire ces résultats avec les données Chandra, afin de valider notre méthode d’analyse. Pour cette première étape de mon travail, j’ai donc utilisé les régions définies par Ponti et al. (2010) et représentées sur la Figure 7.3.

Des exemples de spectres et les ajustements correspondants obtenus pour la région du Bridge sont présentés sur la Figure 7.5. Ces trois courbes correspondent à trois périodes spécifiques (2002, 2008 et 2011), mettant en avant l’illumination progressive de la structure moléculaire. Les neuf spectres de la région entière du Bridge ont été ajustés simultanément, comme expliqué précédemment. Les valeurs obtenues correspondant aux trois spectres présentés à la Figure 7.5 sont indiquées dans la Table 7.1. Les courbes de lumière complètes obtenues pour le Bridge (et pour ses sept sous-régions définies sur la Figure 7.3) sont présentées sur la Figure 7.6. J’ai superposé les valeurs obtenues par Ponti et al. (2010) à ces courbes afin de permettre une comparaison directe. Ainsi, pour les années

concernées, les résultats des ajustements sont parfaitement compatibles avec l’analyse XMM1 et ce, pour toutes les régions. Notre nouvelle caractérisation spectrale ajoute également trois points sup-plémentaires (2000, 2010 et 2011) aux courbes de lumière correspondant au flux de la raie Fe Kα des différentes régions, augmentant de ce fait la signification statistique des variations. A l’échelle des nuages étudiés (quelques minutes d’arc), le flux de la raie Fe Kα dans le Bridge a significative-ment augsignificative-menté (la régression linéaire est 20 σ plus pertinente que l’ajustesignificative-ment constant). De plus, nous rapportons l’illumination de la région B5 en 2011, confirmant la propagation du signal le long du Bridge telle que l’avait prédite Ponti et al. (2010), ainsi qu’un début de décroissance du flux des régions B1 et B3, indiquant pour la première fois que l’événement est relativement bref.

Les courbes de lumière complètes obtenues pour les nuages MC1 et MC2 sont présentées sur la Fi-gure 7.7. Le flux de la raie Fe Kα dans le nuage MC2 a clairement diminué (6.8 σ), ce qui confirme la tendance suggérée par Capelli et al. (2012). L’émission totale du nuage MC1 ne montre pas de variation significative (2.7 σ et tombe à 1.8 σ si le point de 2000, situé 3 σ en dessous de l’ajus-tement constant, est ignoré). En ce qui concerne le nuage G0.11–0.11, également étudié par Ponti et al. (2010), trop peu d’observations Chandra présentent une couverture complète de la région pour que nous puissions tirer des conclusions sur la variation de l’émission du nuage dans son ensemble (cf. Table 3.2 et Figure 7.14). Néanmoins, la tendance globalement décroissante a été caractérisée par nos analyses à plus petite échelle (cf. Section 7.3).

Ainsi, notre caractérisation des variations sur des échelles de quelques minutes d’arc reproduit et affine les variations temporelles décrites dans les travaux précédents utilisant les données XMM. Ceci valide notre méthode d’analyse et notamment l’usage d’un modèle simplifié pour représenter le spectre des structures moléculaires entre 4 et 7.1 keV. Nous pouvons donc utiliser ces outils sur de nouvelles régions et en particulier sur des régions plus petites.