En Côte d’Ivoire comme au Cameroun, certaines ONG et associations ont développé des stratégies auprès des entreprises privées, en arborant deux casquettes : celle d’activiste (prévention et lutte contre la discrimination) et celle de commercial (recherche de ressources complémentaires aux revenus irréguliers de l’aide internationale). En Côte d’Ivoire, nous pouvons citer des organisations telles que Ruban Rouge, Ecoform, Amepouh, Femmes+, OHASA, AIMAS, ou encore Eden Service, etc. Il existe tout un continuum d’associations, des plus bénévoles aux plus commerciales. J’en ai distingué trois types : les activistes, les intermédiaires et les commerciales.
Du côté des « activistes », certaines associations de personnes vivant avec le VIH/sida (Amepouh, Femmes +) effectuent des témoignages auprès des employés d’entreprises, de manière bénévole.
De manière intermédiaire, certaines associations qui étaient initialement positionnés sur le créneau des « communautés » ont développé des stratégies auprès des entreprises privées dans une double logique militante et financière. L’association Ruban Rouge174 est un exemple particulièrement fort de ce type de stratégies (cf. Encadré 11).
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173 Par exemple, c’est ainsi que le Centre Médical des Roseaux, situé à Akwa à Douala, agit en étroite
collaboration avec l’association communautaire et médicale SWAA-Littoral, via l’interface clé du Dr Henriette Meilo, exerçant dans les deux structures. L’association SWAA-Littoral est composée de 4 unités opérationnelles : 1) prévention et mobilisation communautaire, 2) unité médicale de consultations gynécologiques, pédiatriques et dermatologiques, 3) unité counselling pour le dépistage au sein d’hôpitaux, 4) unité sociale, avec le recrutement et la prise en charge gratuite de patients indigents.
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Ruban Rouge est une association de prévention et de prise en charge psycho-sociale et thérapeutique. Elle propose des consultations sur RDV, des visites à domicile, de la massothérapie, une proposition de conseil et dépistage volontaire (CDV) fixe et mobile.
Encadré'11'Étude'de'cas':'Ruban'Rouge.'Stratégies'commerciales'd'une'association' communautaire'(Côte'd’Ivoire)'
Créée en 1994, l’association Ruban Rouge a développé une offre de formation auprès des entreprises privées, à partir de 2002. Elle s’est fait accréditer comme centre de formation auprès du Fonds de développement pour la formation professionnelle (FDFP), leurs formations au VIH/sida pouvant ainsi être payées, par l’intermédiaire de ce fonds. Ruban Rouge est ainsi intervenu auprès d’une vingtaine d’entreprises privées et publiques175
, leur proposant des services variés : formation de pairs éducateurs et du personnel dirigeant, sensibilisations, études CAP (connaissances, attitudes et pratiques), élaboration de plans d’action, dépistage.
Plus récemment, elle a été un partenaire de la création de la « ligne 116 Info sida », en octobre 2011, en partenariat avec la Fondation MTN, le Pepefar et JHU/CCP176
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Cette source de revenus privés a permis de compléter les financements des partenaires extérieurs tels que Solidarité sida, Sidaction, Aides, la Fondation de France, le Fonds Marie, Esther, la Mairie de Paris, Equilibre & populations, l’USAID/Pepfar, Geneva Global ou EGPAF. Au moment de l’enquête, la plupart de ces financements (sauf Esther), avaient pris fin ou avaient été bloqué suite à la crise post électorale, mettant l’association dans de fortes difficultés financières, d’autant que son siège social, situé au cœur de la rue Princesse de Yopougon avait été pillé au cours des événements.
Son président, Raoul Boka, a également été choisi comme le coordinateur du volet « secteur privé » du Round 9 du Fonds mondial, géré par l’ONG Alliance-CI, illustrant un acteur multi-positionné entre le « forum d’action publique », le « forum des entreprises privées » et le « forum des professionnels du VIH/sida ».
A l’autre extrémité du continuum se trouvent les organisations d’orientation plus commerciales. Je prendrai ici l’exemple du Groupement d’intérêt communautaire (GIC),
Maléo santé + (anciennement Maléo social marketing), implanté au Cameroun et qui s’est
avéré être un acteur majeur de l’accompagnement des entreprises privées dans leurs programmes VIH/sida (cf. Encadré 12).
Encadré'12'Étude'de'cas':'Maléo'santé'+.'Marketing'du'VIH/sida'et'«'label'VIH/sida'»' (Cameroun)'
Créé en 2002, ce Groupement inter communautaire (GIC) issu du secteur de l’agriculture, s’est rapidement reconverti autour des enjeux du VIH/sida. Son objectif était de fournir une expertise technique aux entreprises privées, en réaction au flot d’ONG et d’associations sida sur le marché. Maléo santé + a connu un pic d’activités à partir de 2004. Ce GIC s’est distingué par son approche marketing, fondée pour répondre aux besoins et exigences spécifiques du secteur privé. Certains activistes du VIH/sida lui ont ainsi reproché d’avoir participé à commercialiser un « label VIH/sida », en proposant des « formations bonne conscience » de quelques jours aux entreprises qui souhaitaient afficher, à moindre frais, un engagement dans la lutte, sans pour autant s’adapter à leur contexte, ou proposer un suivi adéquat.
L’activité de Maléo santé + a connu une forte croissance de ses activités au moment où des conventions avaient été signées entre des entreprises privées et le comité national de lutte contre le VIH/sida (CNLS) (Chapitre 5). Depuis que la manne s’est tarie, son activité a décru. Au moment de mon enquête (2011), Maléo santé + était au chômage technique.
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175 Sitarail, Sotra, Sodefor, Filtisac, Centre des métiers ruraux, Prosuma, CFAO, Unilever, Telecel, Banque
mondiale, Lonaci, IPS, SOGB, TRCI, Ivoire Coton, CICR, PALM-CI, Laborex, ADM Cococa, BHCI, entreprises du Ministère de l’économie et des finances (ECOMCI), PSCN, (ex combattants), CNPS, Sodeci, etc.
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Les parties prenantes de ce partenariat sont : MTN pour la communication, Pepefar pour le matériel, JHU/CCP (Johns Hopkins University Center for Communication Programs) pour l’assistance technique (supports de communication, formation et suivi) et Ruban Rouge pour le personnel.