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Cette recherche constitue une étude scientifique inédite consacrée exclusivement à l’étude de l’intégration des entreprises privées au sein d’une action publique transnationale dans le contexte de l’Afrique subsaharienne contemporaine, à partir de l’exemple du VIH/sida. Il s’agit d’un objet de recherche fécond, dans la mesure où elle permet de repenser le rôle de l’ « économie politique », dans un contexte façonné par l’ « économie morale ». Une méthodologie qualitative a été choisie pour traiter cette problématique. L’objectif était d’analyser d’une part, l’interaction des entreprises privées avec les autres acteurs, co- construisant collectivement l’action publique (Hassenteufel 2011) et d’autre part, l’articulation de ces enjeux macro avec des enjeux micro, suscités par les initiatives privées mises en œuvre au sein des entreprises privées. Alors que jusqu’à présent, la littérature scientifique traitant de l’implication des entreprises privées dans la lutte contre le VIH/sida a essentiellement adopté une méthodologie quantitative et biomédicale, cette approche qualitative permettra de mettre au jour des phénomènes jusque là pris pour acquis, et d’adopter une posture critique vis-à-vis du présupposé épistémologique, attribuant aux entreprises privées une rationalité purement économique. Ainsi, je souhaite remettre en cause l’homo economicus au cœur des études

majoritaires de santé publique. L’approche qualitative est également privilégiée afin de tenter de combiner les échelles d’analyse diverses micro, méso et macro, qui animent autant la construction de l’action publique transnationale que l’organisation des entreprises internationales et multinationales.

D’autre part, j’ai choisi d’effectuer une comparaison asymétrique avec le Cameroun, utilisé comme un « cas de contrôle ». En effet, ce pays présente à la fois des similitudes avec la Côte d’Ivoire (épidémie généralisée, forte dépendance à l’aide internationale, capitale économique sous régionale) et des différences (régime politique stable, bailleurs en présence) qui permettront de valider ou de nuancer les hypothèses de recherche.

Cette recherche est structurée en huit chapitres, répartis en trois grandes parties.

La première partie, intitulée « Les entreprises privées dans la lutte contre le VIH/sida : positionnement théorique, épistémologique et méthodologique » vise à définir mon inscription théorique, présenter le contexte scientifique dans lequel mon étude s’inscrit et expliciter ma démarche méthodologique. Dans un premier temps, l’enjeu consiste à montrer la manière dont l’étude des entreprises privées dans la lutte contre le VIH/sida en Côte d’Ivoire représente un angle d’analyse marginal, original et fécond pour appréhender les dynamiques sous-tendant la construction de l’action publique transnationale en contexte africain (Chapitre 1). Dans un second temps, il s’agit de présenter de manière détaillée la méthodologie de recueil des données sur le terrain, de l’échantillon et de la démarche comparative entre la Côte d’Ivoire et le Cameroun, ainsi que des limites rencontrées (Chapitre 2).

La deuxième partie, intitulée « Politisation et ‘dé-différenciation’ des entreprises privées au sein de l’action publique de lutte contre le VIH/sida » est le premier volet de restitution du travail de terrain. Cette partie s’appuie sur un travail comparatif entre la Côte d’Ivoire et le Cameroun. Elle aborde la problématique essentiellement d’un point de vue macrosociologique, se focalisant sur l’interaction constante entre les entreprises privées et leur environnement dans les processus ayant conduit la mise en œuvre de leurs programmes. Dans un premier temps, j’analyse les facteurs qui ont conduit à la mise en œuvre des programmes VIH/sida des entreprises privées, en distinguant les facteurs que j’appellerai « bioéconomiques » (préserver leur capital humain), sociaux (préserver leur cohésion sociale) et symboliques (valoriser leur image) (Chapitre 3). Dans un second temps, je mets en évidence la manière dont le rôle des

entreprises privées au sein de l’action publique est déterminé par leur positionnement au sein d’une configuration d’acteurs plus large. Pour ce faire, je m’appuie sur la comparaison entre leurs initiatives dans la lutte contre le VIH/sida et pour l’accès aux ARV au début des années 2000 avec celles se développant actuellement dans la prévention et la prise en charge de l’hépatite virale B (Chapitre 4). Dans un troisième temps, je traite de la manière dont les entreprises privées ont été insérées au sein des cadres des actions publiques nationales et des paradoxes, impasses, ou points aveugles de cette politisation « contre-nature » (Chapitre 5). Enfin, je questionne le processus par lequel les entreprises privées peuvent, ou pas, encore apporter des modèles alternatifs dans la lutte contre le VIH/sida, malgré le contexte d’aide internationale massive. Pour ce faire, j’étudie particulièrement leur rôle dans le cadre du défi actuel majeur de la décentralisation de la prise en charge du VIH/sida (Chapitre 6).

La troisième partie, intitulée « ‘Re-différencier’ les entreprises privées dans la lutte contre le VIH/sida » est le second volet de restitution du travail de terrain. Elle se positionne d’un point de vue microsociologique et s’attache à démontrer la spécificité des entreprises privées, à partir de leurs pratiques. Dans un premier temps, j’insiste sur l’ambivalence profonde des entreprises privées qui se présentent à la fois comme un lieu d’efficacité et un lieu de coercition. Je m’appuie ici sur l’exemple de la pratique du dépistage du VIH/sida (Chapitre 7). Dans un second temps, j’analyse l'impact social, sociétal et politique des entreprises privées. Je tente de mettre en exergue les contradictions, les tensions et les paradoxes auxquels ces acteurs privés font face, en étant multi-positionnés du local au global, se devant de réconcilier des exigences néolibérales, morales, managériales et sociales (Chapitre 8). Je soulignerai ainsi la « différenciation » intrinsèque de cet acteur, nécessitant une « re-différenciation » tant épistémologique que politique.

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Partie I:

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