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Encadré 6. Plan du Chapitre

2. Une approche par la performance

1.1. Les différents coûts liés au lobbying

Les différentes approches du lobbying des entreprises par les coûts convergent autour de trois thématiques : les coûts économiques, les coûts de transaction, les coûts d’agence.

1.1.1 Les coûts économiques

Notre propos est bien-entendu centré sur le coût du lobbying pour l’entreprise dans une approche microéconomique. Cependant, il est intéressant de constater en préambule que l’action politique des groupes d’intérêt est également considérée comme une source de coûts sur le plan macroéconomique.

a. Une approche macroéconomique relayée par la science politique

Des résultats de recherche en économie du bien-être mesurent l’impact global du lobbying au sein de la société (Greffe 1997). L’activité des groupes de pression y est généralement considérée comme générant un coût social qu’il convient, au pire de minimiser, au mieux d’optimiser.

Un coût social à minimiser

Si certains ont vu dans l’existence des groupes de pression une source de pluralisme, plusieurs critiques d’ordre général pèsent sur les groupes de pression. Ils travailleraient dans l’ombre et occulteraient les débats. En outre, leur action peut cacher une exacerbation des corporatismes qui rend les choix plus difficiles et moins soucieux de l’intérêt collectif. Enfin, la multiplication des groupes de pression serait une source de conservatisme et de statu quo plutôt que de progrès.

Ces dernières années, un effet négatif des groupes de pression à été souligné : la hausse des dépenses publiques et le fléchissement des taux de croissance. Par exemple, pour Olson (1978), on peut expliquer les rythmes de la croissance des dépenses publiques par la place plus ou moins importante des groupes de pression. Son explication est simple : les groupes de pression se constituent et s’organisent pour obtenir des transferts à leur profit, ce qui débouche sur l’alourdissement des dépenses mises au budget de l’Etat. Cette première explication est renforcée par d’autres arguments :

1. lorsque le corps électoral s’étend, le niveau de revenu des nouveaux électeurs est plutôt situé au-dessous de la moyenne ce qui stimule les demandes de redistribution ;

2. plus la redistribution est égalitaire, plus la concurrence entre les groupes de pression les incite à proposer de nouveaux programmes redistributifs pour conserver leur influence ou l’augmenter ;

3. les groupes de pression opposent une rigidité à la baisse des rémunérations de leurs membres, ce qui alourdit les coûts de production, affaiblit la productivité et freine le développement.

Cette théorie peut se vérifier dans l’histoire des dernières décennies. Ainsi, l’Allemagne, l’Italie et le Japon ont connu une croissance de leurs dépenses plus faibles que celle des Etats-Unis et du Royaume Uni. Cela correspond également à une forte différence dans le nombre et l’importance des groupes de pression. Dans les trois premiers pays, les groupes de pression ont été détruits au lendemain de la seconde guerre mondiale et s’y sont reconstitués lentement et faiblement, alors que dans les seconds de tels groupes n’ont fait que se renforcer au lendemain du conflit mondial. Olson (1978), qualifie ce phénomène de sclérose institutionnelle. Il y voit la cause de la forte croissance des budgets de redistribution et compte tenu de leur caractère improductif de la faiblesse relative des taux de croissance du PIB. Cependant, cette thèse souffre de nombreuses interrogations. Au cours de la décennie 1980, une remise en cause profonde de nombreux programmes redistributifs, notamment dans les pays victimes de la sclérose institutionnelle, est intervenue. La rigidité nominale à la baisse des rémunérations a aussi laissé place à des baisses de salaire effectives. Enfin, certains pays voués a priori à la sclérose institutionnelle y échappent du fait de leur système institutionnel comme la Suisse par exemple. La correspondance qui peut exister à certains moments entre la sclérose institutionnelle et la faiblesse des taux de croissance ne peut pas être assimilée à une relation de cause à effet.

Un coût social à optimiser

En allant plus avant, il existe des recherches qui affirment que le lobbying peut être certes générateur de coûts mais aussi de bénéfices sociaux ; un niveau de coût optimal existerait (Lee, 1985).

En effet, les activités dites de recherche de rente sont en général source de deux coûts pour la société : le coût des ressources utilisées pour la recherche de rente puis le coût de la rente elle-même (lorsqu’elle consiste à une appropriation non optimale économiquement). Cependant, dans certains cas cette rente peut être créatrice de valeur pour la société. On ne parle alors plus de rente mais de meilleure répartition de l’activité entre l’Etat et les agents privés. Par exemple, une entreprise privée pourra se révéler plus compétitive que l’Etat pour la production de l’électricité. Dès lors, l’existence de cette recherche de rente par le biais d’une action politique d’un groupe d’intérêt privé doit être jugée sous l’angle « coût » (de la recherche de rente qui peut être supporté en partie par la société) et « bénéfice » (création de valeur sociale par l’obtention de la rente). Si la balance est positive, le lobbying se révèle créateur de valeur pour la société. Lee (1985) estime ainsi que seul un quart des activités de recherche de rente se traduisent par une perte nette pour la société. Il va encore plus loin en tentant de déterminer le niveau moyen du coût marginal du lobbying (c’est à dire en fait le

volume des activités de lobbying) qui maximise la création de valeur en découlant pour la société. Il se base sur l’hypothèse qu’une situation optimale serait celle où les activités étatiques seraient toutes efficientes et lobbying inutile mais qu’elle n’existe pas en information imparfaite. Il recherche donc une solution dite de « second best ». L’idée générale est que l’on peut déterminer un coût optimal entre un coût très élevé qui sera prohibitif même si l’existence de la rente est créatrice de valeur et un coût très faible si les activités de l’Etat étaient quasiment efficientes.

Le corollaire de cette conclusion est qu’il ne faut pas oublier de rajouter le coût de recherche de rente à la création de valeur privée lorsque l’on souhaite déterminer le domaine d’activité optimal de l’Etat : celui ci serait peut-être plus étendu dans une telle optique.

b. Une approche microéconomique au sein de l’entreprise lobbyiste

Le coût des facteurs de production

De manière générale, les coûts économiques sont liés au prix des facteurs utilisés par l'entreprise pour l’action de lobbying en fonction de la quantité de ces facteurs. On peut distinguer, comme pour toute activité productive, le facteur travail du facteur capital.

Une étude de Keim et Zeithaml (1986) évoque cette notion en modélisant les calculs qui décident l’action politique individuelle (en autres, le lobbying de l’entreprise). Cette modélisation est fondée sur une approche « coût / bénéfice » :

1. les coûts sont les ressources actuelles ou potentielles dépensées par l’individu pour s’engager dans l’action politique ;

2. les bénéfices sont séparés sur le modèle du « public choice » entre les bénéfices individuels et les bénéfices collectifs1.

Les deux auteurs distinguent des actions politiques générant des coûts élevés (pour analyser des lois complexes, suivre des votes avec amendement ou d’autres procédures centrales). En revanche, des modes d’information politique moins coûteux existent : les interviews télévisées, les lettres de communication des élus, les rapports publics, les grands titres des journaux, les campagnes de publicité politique, les programmes et les slogans des partis politiques… Le concept d’ignorance politique, développé par certains chercheurs (Downs, 1957 ; cité dans Keim et Zeithaml, 1986), implique que les lobbyistes peuvent choisir des sources d’information parfois moins onéreuses.

1

Nous reviendrons sur cette dimension du modèle dans la deuxième partie de ce chapitre consacré à la performance du lobbying.

Des tentatives d’évaluation

Encadré 7.

Coût de la veille informationnelle ou « monitoring » : un exemple au niveau européen

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