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Civilités & rivalités cérémonielles

Robert VUARIN (1994) a montré que l’accès à cette richesse qu’est le potentiel de solidarité des réseaux urbains passait pour un individu donné par la maîtrise du croisement de son réseau amical, n’teri sira la « voie de mes amis » avec son réseau familial, n’fa sira la « voie de mes parents », croisement dont le tissage effectif ne peut s’effectuer qu’à l’occasion des grandes cérémonies familiales urbaines. Mais ainsi qu’on va le voir, ce « croisement cérémoniel » va réaliser une interaction paradoxale entre la logique normative de la transmission communautaire et la logique agonistique de l’échange social don/contre-don, entre la solidarité et la rivalité.

Les cérémonies familiales (baptêmes173, mariages174 et funérailles) sont en effet au coeur de la sociabilité des Bamakois et des Bobolais. Elles sont l’occasion de se retrouver, de re- tisser les liens, de se donner des cadeaux175, des « contributions176 » et des « participations » mutuelles, qui ont pour propriété de construire le collectif de solidarité qui se mobilisera lorsqu’un des membres appellera au secours (Ibid. : 89). La solidarité se manifeste par le fait de rendre un service, de contribuer aux cérémonies, de participer, etc., qui constituent autant de témoignages de civilité177 et de sociabilité. Ainsi, une femme mariée gère ses participations en fonction de ses « dettes » juru et de ses créances dans les échanges sociaux avec ses invitées ou ses invitantes. Elle se tient au courant chaque jour

173 « rasage de tête » denkundi, « dation du nom à l’enfant » dentogoda.

174 La dot est la dépense masculine par excellence. Elle se compose des prestations matrimoniales initiales et des cadeaux qui scellent « le contrat » furu. L’ensemble constitue le « trésor du mariage » furu nafolo que la femme recevra en totalité le jour de la « noce » kônyô où elle rejoindra son époux.

175 L’ensemble des cadeaux reçus constitue le « trésor du baptême » denkundi nafolo.

176 Ka dèmè « aider », ka fara « partager », ka boloma fara « aider, donner un coup de main ».

177 La civilité est un critère d'évaluation des comportements individuels ou collectifs en société à partir d’un ensemble de règles normatives qui règlent les comportements ; elle permet le jugement sur les conduites effectives et les modes et les styles de vie.

des « événements » (baptême, mariage, deuil) dans son entourage, et ceux-ci font l’objet des conversations féminines avant comme après la cérémonie. De même, deux ou trois fois par semaine, un homme se rend au baptême du dernier–né d’un parent (« du père »

fa sira, « de la mère » ba sira), d’un ami, d’un voisin ou collègue de travail (teri sira), ou

pour venir présenter ses condoléances dans une cérémonie de levée du deuil du 7è ou du 40è jour. Chaque jour, dans son grin où il retrouve ses amis pour boire le thé et discuter les nouvelles circulent et chacun informe les autres des « événements » qui s’annoncent. Cette sociabilité cérémonielle est ancienne, mais en ville, sa nature symbolique a changé. Les dons se sont monétarisés et leur valeur a grandi tandis que les participations se sont démultipliées. Traditionnellement, cette forme ritualisée de l’échange social mobilisait la solidarité des membres de la famille étendue afin que son chef puisse défier de manière ostentatoire les chefs des autres familles étendues du village. Mais, là où autrefois les représentants de collectifs lignagers échangeaient des symboles de lien et de pouvoir, ce sont aujourd’hui des individus en leur nom propre ou en celui de leur famille élargie qui construisent ainsi leur « réseau relationnel » (jama-tigiya) et souvent aussi leur « entregent », leur « capital social » (mogo-tigiya). Ainsi que nous le verrons plus bas (VII.4) la participation à ces différentes formes de sociabilité cérémonielle — bien que coûteuse en temps et en argent — est le principal indicateur de civilité des citadins. Une « bonne » participation est récompensée par une bonne réputation, tandis que les manquements sont sanctionnés par le discrédit. Il convient de retenir ici qu’aucun événement privé ne peut advenir chez un citadin sans faire l’objet d’un investissement public à la fois économique et relationnel. Tout ce qui augmente ou diminue la famille doit faire l’objet d’une cérémonie offerte au public178.

VII.4.1 La civilité cérémonielle

Au Mali comme au Burkina Faso, l’activité cérémonielle s’appuie sur une tradition très ancienne de dons rituels qui marquaient les cérémonies lignagères sanctionnant le passage du cycle de vie. Mais aujourd’hui, l’activité cérémonielle urbaine s’écarte radicalement de ces traditions. En premier lieu, par la « sur-monétarisation » des prestations cérémonielles dont la valeur était originellement symbolique du statut social. En second lieu, les acteurs et leurs logiques ne sont plus les mêmes : là où les représentants des collectifs lignagers échangeaient des symboles statutaires, ce sont aujourd’hui des individus qui, en leur nom ou en celui de leur famille conjugale, affirment et revendiquent publiquement leur richesse personnelle en s’affrontant « à coups » de marchandises. Aujourd’hui, les cérémonies urbaines sont devenues le lieu d’expression d’une formidable tension entre les deux logiques sociales, à la fois antinomiques et complémentaires, qui animent toute la socialité urbaine : la concurrence distinctive des clients nourrissant la rivalité agonistique des patrons179 d’une part, et la solidarité familiale et la transmission communautaire d’autre part.

Aujourd’hui en ville, la sociabilité cérémonielle masculine180 s’exprime surtout à l’occasion des grandes funérailles pendant lesquelles, la présence des simples relations et des

178 « L’assemblée du baptême » denkundi-jama.

179 Les patrons entre en concurrence pour capter le plus grand nombre possible de clients de qualité. Les clients potentiels entre en concurrence pour se mettre au service du patron considéré comme le plus puissant et le plus capable. 180 La sociabilité féminine se manifeste surtout aux baptêmes. En ce qui concerne les baptêmes, Robert VUARIN (1993, 1994) a montré que la participation aux cérémonies est pour beaucoup de bamakoises un enjeu et une préoccupation constante. Une femme pense quotidiennement à la prochaine cérémonie, à sa « dette » à l’égard de l’hôte (c’est-à-dire au déséquilibre, en sa défaveur, dans la réciprocité des cadeaux), aux moyens et aux ressources dont elle disposera pour y tenir sa « place » c’est-à-dire la position sociale acquise dans le jeu des échanges cérémoniels. À l’inverse, être « invitante », c’est mettre en jeu sa réputation. Mais inviter, ou être invitée, coûte cher car il faut apporter des contributions dans une surenchère de contre-dons qui doivent surpasser les dons reçus. L’enjeu est tel qu’en janvier

lointaines connaissances du défunt est presque obligée. Mais en dehors du cercle étroit des parents proches, des amis et de quelques camarades et collègues, la participation des hommes y semble plus « intéressée » socialement que celle des femmes. Car les hommes instrumentalisent les cérémonies de leurs connaissances et amis : ils utilisent les cérémonies, et en particulier les funérailles, pour remonter les filières relationnelles des réseaux de leurs amis, dans l’espoir d’atteindre un individu qui pourrait, en cas de besoin, constituer un « recours » jigi.

En effet, la sécurisation quotidienne de l’existence de tout citadin dépend du fait de disposer de nombreuses relations sociales extra familiales et surtout d’avoir de « l’entregent » (VUARIN, 1994). En effet, l’Etat a échoué à créer des instances de sécurité sociale extra-familiales et extra-communautaires susceptibles de rallier les individus les aidant ainsi à passer du statut de sujet membre d’un collectif familial ou communautaire à celui de citoyen membre d’une collectivité territoriale (VUARIN, 1993; MARIE, 1995). Cette incapacité de l’Etat a, bien sûr, favorisé le maintien des identités collectives et des appartenances communautaires, régionales, ethniques ou religieuses. Par ailleurs, le fonctionnement de l’Etat selon un mode « néo-patrimonial » de redistribution181 clientéliste (MEDART, 1991) a encore renforcé la dépendance des citadins vis-à-vis de leurs liens communautaires. On peut considérer que c’est la raison majeure pour laquelle la société civile reste organisée, fondamentalement, sur la base de groupes locaux de parenté (grandes familles, quartiers) affiliées à des collectifs communautaires (clans, ethnies) ou religieux qui constituent des séries de réseaux verticaux qui s’emboîtent en intégrant de vastes clientèles. Il est incontestable que cette situation a contribué à retarder pour longtemps l’émergence d’une forme de citoyenneté.

Mais aujourd’hui, les liens familiaux et communautaires ne suffisent plus, à eux seuls, à fournir toutes les ressources de solidarité nécessaires à la sécurisation de la vie quotidienne en ville. Les gens « se cherchent » comme on dit et aujourd’hui plus qu’hier, pour s’en sortir, il faut pouvoir recourir à des « étrangers » avec lesquels on n’a aucun lien social, mais qui sont bien placés dans les structures de la société globale : il faut avoir de l’entregent (VUARIN).

Pour le citadin, avoir de l’entregent, c’est disposer d’un capital de relations sociales qui est l'incarnation de l’estime qu’il suscite et du crédit de confiance dont il dispose. Les cérémonies familiales fournissent l’occasion de rencontrer des gens puissants ou aisés ou simplement « bien placés » et il ne faudrait pas manquer la chance de se faire présenter et se faire ainsi connaître d’un personnage qui pourrait être utile un jour. C’est ainsi que dans le cours d’une cérémonie, tout invité se trouve en position d’évaluer, en nombre et en qualité, les patrimoine et capital social de son hôte, et de s’en faire reconnaître, si ce n’est de s’en réclamer ; Car, comme on dit à Bobo, « tout le monde se connaît ! » ou bien « on se sait ! » et quand on ne se connaît pas, on fait tout pour savoir qui est l’inconnu. La logique communautaire de la solidarité et la logique clientéliste de la dette imposent de savoir précisément qui est qui, qui réside dans cette ville et qui fréquente qui : on ne sait jamais !

1997, à Bandiagara, afin de « ne pas tout perdre », une femme a gardé secret le décès de son enfant alors que ce dernier venait de mourir le matin même de la cérémonie de son baptême. On a laissé les visiteuses apporter des bénédictions et des présents, alors que les hommes de la famille étaient déjà au cimetière ! Face à cette puissante contrainte sociale qui pèse sur elles, les femmes mettent en oeuvre des stratégies de sélection des invitées et des invitantes considérées comme prioritaires et adoptent des stratégies de renforcement des réseaux qui privilégient tel ou tel aspect de leur sociabilité auquel elles sont plus particulièrement intéressées.

181 C’est, en effet, par le canal des identités familiales ou des appartenances religieuses et ethniques que les fonctionnaires octroyaient aides financières, emplois, prébendes, passe-droit, interventions et faveurs diverses qui permettaient d’inscrire les acteurs individuels dans le système social global (MARIE, 1995)

La stratégie bobolaise ou bamakoise pour avoir de l’entregent consiste donc à croiser les réseaux familiaux et amicaux en invitant ses relations aux cérémonies familiales. Les relations du réseau familial d’un citadin sont héritées dans sa famille ; la capacité de solidarité qu’elles représentent constitue en quelques sortes le « patrimoine social » de l’invitant. Par contre, les relations extra familiales ont été acquises et choisies, le réseau qu’elles constituent peut être considéré comme le « capital social » de l’invitant. En se plaçant à l’intersection où se croisent « son patrimoine social » et son « capital social », le citadin renforce son insertion dans chacun d’eux et exerce ainsi un meilleur contrôle du tissage des relations entre ses réseaux personnels. En effet, en occupant ce nexus relationnel, il se trouve en position d’exercer un contrôle décisif sur le tissage des relations qui pourraient éventuellement se nouer182 entre les membres des deux réseaux. Cette position de patronage est très avantageuse car elle met ceux qui se sont rencontrés grâce à lui dans l’obligation inextinguible d’exprimer leur gratitude à celui qui est à l’origine de ce bienfait.

Une cérémonie réussie rassemble donc des éléments des parentèles paternelles et maternelles avec des amis, des voisins, des connaissances professionnelles ou politiques personnelles183. Que ce soit pour un baptême musulman, un mariage catholique ou des funérailles païennes, la communauté familiale organisatrice est toujours honorée de la présence d’un public nombreux184 à un événement « privé ». Les circonstances sont alors favorables à l’approfondissement des rapports entretenus avec des connaissances qui demeuraient jusqu’alors plus superficielles. Mais pour être sûr que vos « étrangers » (amis, camarades et collègues, connaissances et relations) qui ont été conviés à participer à votre cérémonie familiale vont honorer l’invitation, il faut, au préalable, avoir participé dignement à leurs propres cérémonies. Or, l’entrée dans le cycle urbain de la réciprocité cérémonielle comporte des risques. D’abord des risques de refus qui donnent « la honte », ou des risques de ne pouvoir répondre à la hauteur du défi ostentatoire des cadeaux donnés par les autres, ce qui donne aussi la honte (OUATTARA, 1999).

Pour minimiser ces risques, le citadin doit procéder à un véritable calcul stratégique qui consiste à évaluer sa position au sein de ses différentes sphères de sociabilité et le rôle qu’il veut y jouer. Il est alors conduit à croiser les attentes185 de ceux dont il veut faire ses amis avec ses propres obligations, et inversement.

VII.4.2 Une logique ostentatoire et agonistique

Les cérémonies familiales constituent la principale circonstance où l’ostentation est socialement acceptée et elles consistent en de véritables mises en scènes publiques des solidarités communautaires, amicales et clientélistes où il est légitime de se mettre en

182 mariages, amitiés, aides et recours, etc.

183 Le réseau des relations familiales étendu à l’ensemble des collectifs communautaires (gens originaires du même village, du même clan, de la même ethnie) présente un avantage incomparable : il constitue un gisement de ressources sociales plus nombreuses et diversifiées que celles offertes par la parentèle. En effet, et même si les collectifs des riches ne communiquent pas avec ceux des pauvres, dans tout réseau de parenté, chacun se trouve en rapport avec des personnes différentes en termes de niveau de revenu, de qualification et de secteur professionnel. La solidarité entre ces personnes de statut différent s’exprime par des témoignages de sociabilité et de solidarité effective : une aide en travail et contribution avec un plat.

184 Les capitaux économiques et symboliques sont si inextricablement mêlés que l’exhibition de la force matérielle et symbolique représentée par la présence d’invités prestigieux est de nature à apporter, en soi, des profits matériels dans une économie où la « bonne renommée » constitue la seule garantie économique (BOURDIEU 1979 : 204).

185 L’attente peut être définie comme une espérance de réciprocité, puisque dans un échange social institué, les attentes de l’un correspondent aux obligations de l’autre et réciproquement. L’identification des attentes des autres lui permet d’élaborer des stratégies sur la manière de participer et de contribuer, qui sont entièrement contingentes à la situation du réseau dans lequel il est inséré.

scène186 et de « se faire voir ». Car les Burkinabè comme les Maliens ne s’adonnent pas à cette civilité tiède, cette économie de l’urbanitéet de la socialité où l’on peut disparaître « à moindres frais symboliques » (PELLEGRINO et.al. 1991: 25). L’espace commun de la cérémonie familiale est un espace social que chacun espère traverser en sortant de son anonymat, en étant reconnu dans ses identités et salué par ses connaissances.

Il est ainsi fréquent de constater le blocage intégral d’une rue par l’installation, en plein milieu, d’une vaste tente qui servira à célébrer une cérémonie familiale dont personne dans la ville ne doit ignorer la tenue. « Notre » rue devient l’espace de la fête qu’on organise à l’occasion des cérémonies familiales. La faire ailleurs, plus loin, dans une salle des fêtes par exemple, priverait la famille organisatrice du prestige social qu’entraîne le déroulement de la fête dans « son » espace limitrophe. Cette forme temporaire d’appropriation de l’espace public se produit plus rarement dans le centre ville économique et administratif que dans les quartiers périphériques de résidence où il constitue une dimension majeure de la manière d’habiter. À cause du caractère agonistique exaspéré qu’ont prises les cérémonies urbaines sous l’effet de l’inflation monétaire des dons que font circuler les prétendants à une position de patronage, on peut sans hésiter, je crois, les qualifier de potlatch urbain.

VII.4.3 Le cadeau & la dépense

En ce qui concerne la participation matérielle, les gens préfèrent parler de « cadeau » ou de « contribution » plutôt que de don. Derrière ce choix, il y a l’idée que le cadeau est un gage de reconnaissance de la qualité de la relation sociale qu’il a pour fonction de symboliser187. Ainsi, tout le monde s’attend à ce que chaque invité « donne » à un niveau financier jugé en correspondance avec son niveau de vie et avec le degré d’intimité relationnelle qu’il entretient avec la personne invitante directement concernée par la cérémonie. Ainsi, quels que soient le statut social et la régularité des ressources des citadins, la monétarisation188 de la sociabilité cérémonielle oblige chacun à une quête permanente de moyens qui explique d’une part, la pression qui pèse sur la solidarité familiale et d’autre part, l’exaspération de la concurrence individuelle pour l’appropriation des ressources de toutes sortes. À Bobo-Dioulasso et à Bamako, les gens expriment cet état de fait en disant qu’ils « se cherchent »189 .

Le jeu cérémoniel urbain est tout entier fondé sur une logique de distinction qui se manifeste par l’exhibition ostentatoire de la valeur différentielle des signes de statut qui a pour conséquence d’engendrer une dynamique de « générosité » concurrentielle. Rien n’est laissé au hasard : la manière dont on est véhiculé sur les lieux, les tenues qui sont portées, les dons qui sont apportés (tasses, couvertures, pagnes, billets craquant neufs,…) et l’exhibition dont ils sont l’objet, etc., signalent des différences de classe et de statut

186 Il est ainsi fréquent de constater le blocage intégral d’une rue par l’installation, en plein milieu, d’une vaste tente qui servira à célébrer une cérémonie familiale dont personne dans la ville ne doit ignorer la tenue. Le « six mètres » limitrophe devient l’espace de la fête privée qu’on organise. La faire ailleurs, plus loin, dans une salle des fêtes par exemple, priverait la famille organisatrice du prestige social qu’entraîne le déroulement de la fête dans « son » espace de vie.

187 Le cadeau est indissociable de la relation concrète par laquelle il circule. Très explicitement, il manifeste la valeur symbolique « ajoutée » qui cristallise l’état de la valeur du lien social dont le donateur veut témoigner. Plus que tout autre transfert, il est interprétable en termes de symbole et sa valeur est essentiellement symbolique.

188 Les dépenses cérémonielles constituent une raison majeure de la participation des femmes aux tontines dont les ressources sont suffisamment importantes pour équilibrer les dépenses cérémonielles.

189 « Se chercher », c’est d’abord, et avant tout, « chercher l’argent » en s’engageant dans une course quotidienne au gain monétaire. Avoir de l’argent c’est pouvoir faire face à ses obligations sociales la tête haute, inviter à ses propres cérémonies, se rendre à celle des autres « avec les pieds et avec les mains » (VUARIN ,1994), rendre des services à ses parents, amis et voisins et être digne d’en bénéficier, etc.

évaluées selon un code de signification propre à une sémiologie locale de la richesse et du pouvoir, où le cadeau est un exposant du statut social.

Le don cérémoniel est donc aussi et surtout une dépense190 qui investit l’objet acquis, approprié et donné de sa valeur différentielle de signe et qui fonctionne comme un défi qui n’a de sens que dans la sphère cérémonielle constituée par des rivaux qui se considèrent a priori comme des pairs. Car le cadeau cérémoniel n’est pas simplement