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Introduction du chapitre 2

Encadré 7. La diplomatie de la canonnière

3. Les coûts du point de vue du système monétaire et financier international

3.1. La centralité du système bancaire

Si les défauts affectent les investisseurs étrangers, il en est de même pour les investisseurs domestiques, notamment le secteur bancaire (Beim & Calomiris, 2000 ; Sturzenegger & Zettelmeyer, op. cit.). Les premiers démontrent qu’un défaut augmente la probabilité d’une crise bancaire davantage que l’inverse. Ces résultats sont néanmoins à prendre avec précaution.

Les effets les plus importants d’une crise de dette semblent être ceux qui touchent le secteur financier domestique. Dès lors que les banques sont fortement exposées à la dette du pays (c’est-à-dire qu’elles détiennent une part importante de la dette), le défaut peut provoquer une crise bancaire ou tout du moins un resserrement des octrois de prêts aux entreprises privées, qui en retour renforce l’effet récessif du défaut sur l’économie réelle. En effet, Rochet (2008) rappelle que les banques sont la source principale de liquidité pour le tissu entrepreneurial. Dans la même optique, Ondo Ndong & Scialom (2008) écrivent :

« La dette bancaire constitue le moyen d’échange le plus répandu dans les économies de marché et la confiance absolue des déposants dans la valeur de la monnaie bancaire

est essentielle au bon fonctionnement du système de paiement. Certains agents n’ont pas d’autres sources de financement externe alternatives au crédit bancaire. Ainsi, ce qui distingue fondamentalement la faillite bancaire de la faillite d’une entreprise […] c’est qu’elle peut affecter le système financier dans son ensemble via le canal des expositions interbancaires, le canal informationnel et/ou le canal du crédit. »

Selon Borensztein & Panizza (op. cit.), un défaut souverain peut conduire à une crise bancaire ou à un rationnement du crédit de trois façons différentes.

 Un défaut peut entraîner un effondrement de la confiance dans le système financier domestique, qui en retour engendre une course aux retraits de la part des déposants (run).

 Même en l’absence de phénomène de run, le défaut impacte négativement le bilan des banques, spécialement si la part de la dette qu’elles détiennent est importante.

 Le défaut s’accompagne généralement d’une fragilisation des droits des créanciers qui sapent leur confiance et réduit leur aptitude à prêter de nouveau. Le défaut peut donc également engendrer une contraction de la demande.

En conséquence, les restructurations de dette ont un impact négatif sur l’économie domestique en raison de leur effet perturbateur sur le système financier domestique. En fonction de la taille et du type de restructuration menée, les banques sont affectées de différentes manières via la structuration de leur bilan (i.e. l’actif, le passif, Cf. infra, le poids des créances douteuses), leur exposition au risque de change et de taux, la mise en place d’un gel des dépôts bancaires qui perturbe le fonctionnement du système de paiement, la

raréfaction de la liquidité qui affecte le marché interbancaire et exacerbe la contraction du crédit, enfin la promptitude à faire face à un phénomène de fuite vers la qualité (flight to quality).

Schématiquement, les établissements bancaires sont exposés à deux types de crise (Boyer & al., 2004).

La première forme de crise bancaire se manifeste par le passif du bilan. Habituellement, elle prend les traits d’une panique bancaire issue du caractère aléatoire des retraits des clients : l’anxiété de certains déposants qui retirent leurs avoirs peut déclencher un mouvement en chaîne de demande de retraits, alors même que la banque n’est pas considérée comme insolvable. Cette manifestation repose sur la polarisation des anticipations. Dans ce cas précis, l’illiquidité reflète ou engendre l’insolvabilité de la banque, si le phénomène se généralise au système bancaire domestique.

La crise par l’actif constitue la seconde forme de crise, et repose sur l’irréversibilité de la relation de prêt. Dans le cas où un choc impact négativement la rentabilité ou le respect des échéances des remboursements pour les prêts consentis avant le choc, alors la banque fait face à un risque de solvabilité qui, lui-même, peut déclencher un phénomène de run.

Les deux types de crise produisent le même effet, elles précipitent la banque vers la faillite. La banqueroute d’un établissement, par contagion, peut se transmettre au système bancaire dans sa totalité, et de ce fait provoquer son effondrement. Par la suite, les systèmes de paiement et du crédit sont affectés, les dysfonctionnements constatés impliquent une défiance généralisée et une élévation du degré d’incertitude qui, si elles s’avèrent extrêmes, provoquent une dépression ou une crise systémique.

Les établissements bancaires sont donc vulnérables aux mouvements de panique, résultant d’une anticipation pessimiste d’une partie de leurs déposants quant au niveau de liquidité, ce qui conduit l’économie vers un équilibre, lui

aussi, pessimiste caractérisé par une perte de confiance vis-à-vis de l’ensemble des banques, une contraction, voire l’arrêt, des octrois de crédit, en conséquence une dégradation de l’activité économique. Cet enchaînement part d’une banque locale pour se propager à l’ensemble du système bancaire domestique.

Boyer & al. (op. cit.) distinguent trois facteurs de déclenchement des crises bancaires.

 La localisation d’un choc ou d’une défaillance qui se propage à l’ensemble du système bancaire et, par voie de conséquence, à l’économie toute entière.

 La procyclicité des activités bancaires. Mishkin (1991) montre ainsi que lors de la phase ascendante du cycle, les banques ne font pas d’effort de discrimination entre bons et mauvais emprunteurs, spécialement ils portent peu d’attention à la qualité de leurs collatéraux, lorsqu’ils accordent des crédits. L’exposition excessive aux risques accroît la brutalité du renversement du cycle. De plus, la réglementation qui impose le provisionnement des pertes lors de la phase descendante du cycle dégrade le capital, donc l’offre de crédit, ce qui, en retour, accroît la procyclicité du crédit et fragilisent d’autant plus les systèmes bancaires.

 L’occurrence d’un choc macroéconomique de forte amplitude qui ne peut être absorbé par le pays et dépasse la résilience du système