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La célérité de l’indemnisation en cas d’accident de la circulation

§1 Les divergences de traitement des victimes (illustrations)

A) La célérité de l’indemnisation en cas d’accident de la circulation

161 - En cas de préjudice corporel découlant d’un accident de la circulation, l’assureur est tenu de présenter une offre d’indemnisation dans le délai de huit mois à compter de l’accident619.

Toutefois, si l’assureur n’a pas été informé de la consolidation dans les trois mois de l’accident, il ne peut présenter qu’une offre provisionnelle620. Dès qu’il est informé de la

consolidation, il dispose alors de cinq mois pour présenter une offre définitive621.

Quelle que soit la nature du dommage, l’assureur est tenu de présenter à la victime une offre d’indemnité dans le délai de trois mois à compter de la demande d’indemnisation qui lui est présentée622. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n’est pas clairement établie, ou lorsque le

616 Ibid. 617 Ibid. 618 Ibid. 619 Cf. Infra, n° 151. 620 Cf. Infra, n° 151. 621 Cf. Infra, n° 151 . 622 Cf. Infra, n° 151 .

dommage n’a pas été entièrement quantifié, l’assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande623.

162 - En principe, le point de départ du délai est le jour de l’accident624. Toutefois, dans

certains cas, il peut courir à compter de la demande d’indemnisation présentée par les ayants droit autres que les héritiers et le conjoint ou à compter du jour où le fonds de garantie a reçu les éléments justifiant son intervention625.

Selon la Convention d’indemnisation et de recours corporel automobile (IRCA), applicable aux accidents de la circulation survenus à compter du 1er avril 2002, c’est à l’assureur du

véhicule de faire une offre d’indemnisation aux passagers (y compris le conducteur) et aux victimes heurtées par le véhicule assuré. Cette convention est inopposable aux victimes, qui peuvent s’adresser à l’assureur de leur choix626.

L’offre d’indemnisation par l’assureur, au cœur du débat en l’espèce, doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice627. Tel n’est pas le cas si le courrier fait état d’une offre

provisionnelle de 25 000 francs, sans autres précisions628. De ce fait, la victime a droit à la

réparation intégrale de son préjudice, selon les règles du droit commun.

Selon l’article R.211-40 du Code des assurances, l’offre doit comporter l’évaluation de chaque poste de préjudice, les créances de chaque tiers payeur et les sommes qui reviennent au bénéficiaire. En outre, elle doit être accompagnée de la copie des décomptes produits par les tiers payeurs. La présentation de cette offre n’interdit pas au juge des référés d’accorder une provision d’un montant supérieur629.

163 - A l’absence d’offre, la jurisprudence assimile l’offre insuffisante630. Une offre

manifestement insuffisante doit être sanctionnée comme une absence d’offre631.

La notion d’offre insuffisante n’a pas été clairement définie par la loi. Par exemple, l’offre a été jugée insuffisante en raison de la comparaison entre les offres faites à l’amiable (50 000

623 Cf. Infra, n° 151 .

624 L. tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des

procédures d'indemnisation, 5 juillet 1985, n° 85-677, art. 12. 625 Ibidem.

626 Civ. 2ème, 15 novembre 2001, n°00-16888. 627 Op. cit. note 624, p. 103.

628 Civ. 2ème, 8 septembre 2005, n° 04-16484. 629 Civ. 2ème, 15 mai 1992, n°90-14261. 630 v., Civ. 2ème, 3 décembre 1997, n°96-11046. 631 Civ. 2ème, 10 avril 2008, n°07-11836.

francs) et celles faites en cours de procédure (808 000 francs), alors que la gravité des blessures apparaissait clairement632. En revanche, l’offre n’est pas insuffisante si elle a été

faite sur la base d’un rapport d’expertise fixant le taux de déficit fonctionnel à 10 %, alors même qu’un rapport ultérieur l’a fixé à 33 %633.

Lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal634.

164 - La sanction prévue à l’article L.211-13 du Code des assurances porte sur la somme allouée par le juge en l’absence d’offre, ou sur la somme offerte par l’assureur en cas d’offre tardive. Dans ce dernier cas, la pénalité a pour assiette la somme offerte par l’assureur et non l’indemnité fixée par le juge635.

En cas d’offre tardive, la pénalité expire au jour de la présentation de cette offre et non de la décision fixant le préjudice636. Une victime peut demander pour la première fois en cause

d’appel que l’indemnité allouée soit assortie d’un intérêt au double du taux légal pour l’offre tardive car cette demande n’a pas le même objet que la demande de fixation du préjudice et n’est donc pas soumise à l’autorité de la chose jugée637. Dès lors, les hypothèses de pénalité

sont nombreuses.

165 - A l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation a jugé que la pénalité prévue par l’article L.211-13 du Code des assurances n’est pas contraire au principe de l’article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits et libertés fondamentales et n’est donc pas anticonstitutionnelle. De l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits et libertés fondamentales découle le principe de proportionnalité et d’individualisation des peines. En vertu du principe de proportionnalité, la sanction doit être graduée en fonction de la gravité du manquement à la règle et en vertu du principe d’individualisation, la sanction doit s’adresser à une personne déterminée dans une

632 Civ. 2ème, 23 janvier 2003, n°00-18324. 633 Civ. 2ème, 17 mars 2011, n°10-16103.

634 Loi tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des

procédures d'indemnisation, 5 juillet 1985, n° 85-677, art. 16. 635 Civ. 2ème, 16 décembre 2004, n°02-19450.

636 Civ. 2ème, 3 mai 2006, n°05-12617. 637 Civ. 2ème, 22 mars 2012, n°10-25184.

situation donnée638. En effet, la pénalité de l’article L.211-13 du Code des assurances est

proportionnelle aux sommes en jeu et à la durée du manquement de l’assureur.

En outre, il convient de rappeler que cette procédure d’offre d’indemnisation tend à favoriser l’indemnisation rapide des victimes d’accidents de la circulation. Pour obtenir une réduction de la pénalité, l’assureur doit en faire la demande au juge, mais cette réduction ne constitue qu’une simple faculté pour lui639. Celui-ci peut la réduire, mais non la remettre totalement en

cause640. Comme la clause pénale, la peine doit être suffisante pour inciter l’assureur à

respecter le délai légal.

Il semblerait que les cas dans lesquels le juge décide d’une réduction de la pénalité soient peu nombreux. Tel a été le cas lorsque la victime doit apporter la preuve de son préjudice économique réel en fournissant des documents comptables et fiscaux641.

Selon l’esprit de la loi, la notion d’offre manifestement insuffisante doit être interprétée de manière restrictive642. Pour autant, la jurisprudence tend à banaliser cette notion dès lors

qu’elle est inférieure à la somme allouée en justice, quel que soit le temps écoulé entre cette offre et la fixation judiciaire du préjudice (lequel est réévalué au jour de la décision) et abstraction faite des éventuels nouveaux postes de préjudice réclamés en justice par la victime. La chambre criminelle a considéré que cette pénalité ne constituait pas une peine au sens de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme643. En effet, selon G. Viney, il s’agit d’une

« sorte d’amende civile » dont le juge peut moduler le taux et pour l’application de laquelle il dispose d’une très grande liberté puisqu’il apprécie pratiquement à sa guise l’insuffisance manifeste de l’offre644. Toutefois, l’article L.211-14 mérite en lui-même une question

prioritaire de constitutionnalité en raison du caractère imprécis et arbitraire de la notion d’offre « manifestement insuffisante », qui déclenche la pénalité prévue par ce texte645.

Un assureur et le Bureau central français soutiennent que les dispositions de l’article 16 de la loi 85-677 du 5 juillet 1985 reproduit à l’article L.211-13 du Code des assurances sont contraires à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789. Dans une décision du 3 février 2011 au sujet de la constitutionnalité de l’article L.211-13 du Code des assurances, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a refusé de renvoyer

638 Cf. Infra, n° 92.

639 Crim., 6 novembre 1991, n°90-86519. 640 Civ. 2ème, 28 juin 1995, n°93-18465. 641 Civ. 1ère, 4 mars 1997, n°94-19707.

642 « Loi du 5 juillet 1985 », Gaz. Pal., n° spécial 1988, , p.32. 643 Crim., 20 septembre 2011, n°11-82013, QPC.

644 Geneviève VINEY, « L’indemnisation des victimes d’accident de la circulation », LGDJ, n°94, 1992, p.116. 645 Civ. 2ème, 20 sept. 2011, n° 11-82013, obs. James LANDEL, RGDA, n°2012-01, 1er janvier 2012, p. 69.

la question de la constitutionnalité de l’article L.211-13 du Code des assurances au regard de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 au Conseil constitutionnel au motif que la question n’est pas nouvelle et n’est pas sérieuse au regard du principe constitutionnel de la nécessité des peines646. A supposer que la disposition contestée

soit une peine au sens de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le montant de la majoration du taux de l’intérêt légal est proportionnel aux sommes en jeu et à la durée du manquement de l’assureur et peut être arrêté par la présentation d’une offre d’indemnisation régulière ou réduit par le juge en raison de circonstances non imputables à l’assureur.

B) La relative rapidité de l’indemnisation des victimes d’un accident médical grave

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