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Les boucliers humains (« juridiques » et « physiques »)

définition générale de « l’objectif militaire »

4. La notion de civil dans les conflits armés internationaux et non internationaux internationaux et non internationaux

5.3. Les différentes phases de la participation directe aux hostilités

5.4.2. Les boucliers humains (« juridiques » et « physiques »)

Par bouclier humain,603 en droit international humanitaire, on entend une personne dont le statut protégé (prisonnier de guerre,604 « personne protégée » ex article 4 de la CG IV,605 personne hors de combat, civil qui ne participe pas

600 SCHMITT, Michael N., “Targeting and Humanitarian Law”, Israel Yearbook on Human Rights, Vol. 34, 2004, pp. 59-104, p. 78.

601 HCJ, The Public Committee against Torture et al. vs. The Government of Israel et al., HCJ 769/02, jugement, 13 décembre 2006, § 37.

602 SCHMITT, M. N., “Targeting and Humanitarian Law”, p. 78.

603 Dans l’abondante doctrine sur le sujet, voir notamment : BALLESTERO, Manon, “Les boucliers humains volontaires : des civils ne participant pas directement aux hostilities ?”, Revue belge de droit international, No. 1-2, 2008, pp. 265-291 ; BOUCHIE DE BELLE, Stéphanie, “Chained to Cannons or Wearing Targets on their T-shirts : Human Shields in International Humanitarian Law”, IRRC, Vol. 90, No. 872, December 2008, pp. 883-906 ; DINSTEIN, Y., « Distinction and Loss of Civilian Protection in International Armed Conflicts » ; HAAS, Josiane, “Voluntary Human Shields : Status and Protection under International Humanitarian Law”, in ARNOLD, Roberta – HILDBRAND, Pierre-Antoine, International Humanitarian Law and the 21st Century’s Conflicts, Lausanne – Berne – Lugano, Editions interuniversitaires suisses, 2005, pp. 191-214 ; HENDERSON, Ian, The Contemporary Law of Targeting, Leiden-Boston, Martinus Nijhoff pubs., 2009, pp. 211-217 ; OTTO, Roland, “Neighbours as Human Shields? The Israeli Defense Forces’ ‘Early Warning Procedure’ and International Humanitarian Law”, IRRC, Vol. 86, No. 856, December 2004, pp. 771-786 ; SASSÒLI, Marco, “Human Shields and International Humanitarian Law”, in FISHER-LESCANO, Andreas – GASSER, Hans-Peter – RONZITTI, Natalino, Frieden in Freiheit, Baden-Baden, Nomos, 2008, pp. 567-578 ; SCHMITT, Michael N., “Human Shields in International Humanitarian Law”, pp. 17-59.

604 Article 23(1) de la CG III : « Aucun prisonnier de guerre ne pourra, à quelque moment que ce soit, être […] utilisé pour mettre par sa présence certains points ou certaines régions à l’abri des opérations militaires. »

605 Article 28 de la CG IV : « Aucune personne protégée ne pourra être utilisée pour mettre, par sa présence, certains points ou certaines régions à l’abri des opérations militaires. »

directement aux hostilités606) est exploité pour mener une « action hostile ».

Sans pour autant tromper la bonne foi de l’adversaire, comme c’est le cas pour la perfidie (cf. infra, Chapitre 5),607 on exploite néanmoins l’existence d’un droit et l’obligation de l’adversaire de le respecter pour obtenir un avantage militaire.608 La barrière physique du corps n’est qu’accessoire ;609 dans la majeure partie des cas, en effet, elle est insuffisante pour entraver une attaque (prenons, par exemple, toutes les attaques à l’arme lourde).

L’utilisation des boucliers humains est un phénomène qui traverse les époques610 et les typologies de conflits armés.611 Les personnes-boucliers peuvent être ressortissants de la partie au conflit qui les utilise, de la partie adverse ou, encore, être pacifistes et/ou neutres.612 Dans les conflits armés asymétriques contemporains, ont recours aux boucliers humains le « fort »,613

606 Article 51(7) du PA I : « La présence ou les mouvements de la population civile ou de personnes civiles ne doivent pas être utilisés pour mettre certains points ou certaines zones à l’abri d’opérations militaires, notamment pour tenter de mettre des objectifs militaires à l’abri d’attaques ou de couvrir, favoriser ou gêner des opérations militaires. Les Parties au conflit ne doivent pas diriger les mouvements de la population civile ou des personnes civiles pour tenter de mettre des objectifs militaires à l’abri des attaques ou de couvrir des opérations militaires. »

607 « […] Constituent une perfidie les actes faisant appel, avec l’intention de la tromper, à la bonne foi d’un adversaire pour lui faire croire qu’il a le droit de recevoir ou l’obligation d’accorder la protection prévue par les règles du droit international applicable dans les conflits armés […] ». Article 37(1) du PA I. BOUCHIE DE BELLE, S., “Chained to Cannons or Wearing Targets on their T-shirts”, p. 888.

608 MEGRET, Frédéric, « La diversification des acteurs impliqués dans les conflits armés : vers un dépassement de la ‘participation directe aux hostilités » : http://papers.ssrn.com/sol3/

papers.cfm?abstract_id=1479897. (Consulté le 21 août 2010).

609 L’exemple, qui nous paraît plus hollywoodien que réaliste, cité durant les réunions d’experts sur la notion de participation directe aux hostilités, porte sur la femme somalienne les mains levées cachant derrière sa robe deux miliciens qui sont en train de tirer des coups de feu. ICRC, Report of the Second Expert Meeting, p. 7.

610 On parle d’utilisation de boucliers humains déjà durant la guerre civile américaine, la guerre franco-prussienne de 1870 et lors des deux derniers conflits mondiaux. FUSCO, Paolo, “Legal Status of Human Shields”, Centro Studi per la Pace, 2003 : http://www.studiperlapace.it/view_

news_html?news_id=20050125105209. (Consulté le 22 aout 2010).

611 On relève la présence de boucliers humains dans une guerre symétrique telle que celle qui opposa l’Iran à l’Iraq (1980-1988), dans celle que nous pouvons décrire comme dissymétrique (cf. supra) entre la coalition conduite par les Etats-Unis contre l’Iraq en 1990-1991 ou contre la Yougoslavie de Milosevic en 1998, ainsi que dans celle asymétrique entre Israël et les groupes armés palestiniens.

SCHMITT, M. N., “Human Shields in International Humanitarian Law”, p. 19.

612 Ce dernier cas est notamment celui des observateurs onusiens, utilisés par les généraux serbes à Sarajevo, pour se défendre des attaques aériennes occidentales, en 1995.

613 « A titre d’exemple, l’armée israélienne a été accusée d’avoir utilisé des palestiniens comme boucliers humains sous différentes formes : en les maintenant dans les bâtiments où les soldats tiraient, en les obligeant à accompagner les soldats dans leurs véhicules ou encore, en se servant de civils palestiniens pour arrêter d’autres palestiniens recherchés, les forçant à entrer devant les soldats israéliens dans la maison censée abriter les personnes recherchées (tactique appelée

‘procédure de voisinage’) ». BALLESTERO, M., “Les boucliers humains volontaires”, p. 268. La Cour Suprême israélienne s’est exprimée, dans l’affaire Adallah sur ces “procedures de voisinage” : « it is clear that the army is not permitted to use local residents as a ‘human shield’ ». HCJ, Adallah – The Legal Center for Arab Minority Rights in Israel et al. vs. GOC Central Command, IDF, The Minister of Defense, The Prime Minister of Israel, HC 3799/02, 23 juin 2005, §§ 21-22.

le « faible »,614 et même la société civile, comme par exemple le groupe d’activistes pour la paix Human Shield Action to Iraq, regroupant des citoyens de plusieurs nationalités, munis de la liste de sites à protéger des attaques aériennes en Iraq (2003).615

En particulier, la partie « faible » au conflit armé asymétrique, consciente du fait qu’en exploitant les immunités afférentes aux personnes civiles, pose un obstacle militaire bien plus important à la partie « forte » au conflit asymétrique que si elle prend les armes.616 Dès lors elle n’hésite pas à faire du recours aux boucliers humains une méthode privilégiée de défense de ses miliciens et de ses objectifs militaires.617 En effet, aux risques concrets de violer le principe de proportionnalité, s’ajoute ainsi pour l’attaquant le dilemme d’ordre moral de viser consciemment des personnes désarmées, et l’éventualité fort probable d’une campagne médiatique extrêmement négative pour le soutien de l’opinion publique à la campagne militaire.618

Si l’utilisation de bouliers humains est interdite de façon absolue,619 tant dans les conflits armés internationaux que non internationaux (cf. infra, Chapitre 4, § 3.4.),620 s’apparente-t-elle pour autant à un acte de participation directe aux hostilités ?621 Quid en cas de « boucliers humains volontaires », lorsqu’une personne exploite elle-même son propre statut protégé pour s’interposer entre la cible et la flèche ?

5.4.2.1. « Boucliers juridiques »

Le plus souvent, l’utilisation de boucliers humains n’a qu’un impact juridique sur l’action militaire adverse, modifiant tout particulièrement les paramètres du principe de proportionnalité (cf. infra, Chapitre 3 § 5), en augmentant la gravité des pertes civiles attendues de l’attaque en question.622 En effet, dans ce

614 C’est l’exemple des membres du Hamas lançant un appel radio pour que les femmes du voisinage aillent à la mosquée pour protéger les quinze miliciens qui s’y sont enfermés contre une attaque israélienne imminente. Human Rights Watch, « Civilians Must Not Be Used to Shield Homes Against Military Attacks », Press Release, Jerusalem, 22 November 2006 : http://www.hrw.org/en/

news/2006/12/15/human-rights-watch-statement-our-november-22-press-release. Voir, SASSÒLI, M., “Human Shields and International Humanitarian Law”, p. 567.

615 « Boucliers humains pour l’Iraq » : http://www.cyberhumanisme.org/matiere/tousterriens/25.html.

(Consulté le 23 août 2010). BALLESTERO, M., “Les boucliers humains volontaires”, p. 270.

616 SCHMITT, M. N., “Human Shields in International Humanitarian Law”, p. 41.

617 SASSÒLI, M., “Human Shields and International Humanitarian Law”, p. 567.

618 SCHMITT, M. N., “Human Shields in International Humanitarian Law”, p. 22.

619 BOUCHIE DE BELLE, S., “Chained to Cannons or Wearing Targets on their T-shirts”, pp. 885-888.

D’un avis différent, MEGRET, F., « La diversification des acteurs impliqués dans les conflits armés », p. 17, pour lequel le droit international humanitaire n’interdit pas de se porter bouclier humain volontaire.

620 Etude sur le droit international coutumier, Règle 97.

621 “[T]he unlawfulness of an act has no bearing on its qualification as direct participation in hostilities.”

MELZER, N., “Keeping the Balance”, p. 869.

622 “Les attaques sans discrimination seront interdites. L’expression ‘attaque sans discrimination’

s’entend […] les attaques dont on peut attendre qu’elles causent incidemment des pertes en vies

cas, on ne peut conclure que le bouclier humain atteint le seuil de dommage infligé, condition nécessaire à la qualification juridique de l’« action hostile », puisque physiquement il n’empêche aucunement l’attaque, qui pourrait être menée à son terme, par exemple en cas d’inertie propre à l’exécution d’un ordre reçu. Par conséquent, aucune des personnes dont les actes font partie intégrante de l’action d’utilisation de ces boucliers humains ne peut être qualifiée comme participant directement aux hostilités, ni les planificateurs, ni les boucliers humains, qu’ils soient volontaires ou involontaires.623

Les théories selon lesquelles les boucliers humains volontaires sont à considérer comme des «combattants illégaux »,624 ou comme des civils qui participent directement aux hostilités,625 conduisent à des absurdités logiques.

Dans les deux perspectives, la présence de boucliers humains ne devrait aucunement modifier, sur la base d’une éventuelle violation du principe de proportionnalité, la possibilité de l’ennemi d’attaquer l’objectif choisi. Par conséquent, un acte qui ne peut avoir aucun type d’impact sur l’action militaire de l’ennemi ne peut pas être qualifié de participation directe aux hostilités.626

5.4.2.2. « Boucliers physiques »

Différemment, lorsque les boucliers humains entravent, par une barrière physique, les opérations militaires ennemies, ils atteignent le seuil requis de

« dommage infligé ». C’est le cas, notamment, d’une interposition massive de civils (famille, camarades de parti politique) organisée dans le but d’empêcher l’attaquant de cibler leur chef (de famille, de faction armée).627 Pour que ce recours aux boucliers humains soit qualifiable d’« action hostile » et pour que les personnes, dont les actes font « partie intégrante » d’une telle action (notamment les organisateurs), soient considérées comme participant

humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil, ou une combinaison de ces pertes et dommages, qui seraient excessifs par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu. » Article 51(4)-(5)(b) du PA I. ICRC, Interpretive Guidance, p. 57.

623 Ibid.

624 DINSTEIN, Y., The Conduct of Hostilities, p. 154 ; PARRISH, Richard, “The International Legal Status of Voluntary Human Shields”, présenté à la réunion annuelle du International Studies Association, Montréal, 17 mars 2004 : http://archive.allacademic.com/publication/search.php.

(Consulté le 11 août 2010) ; ANDERSON, Kenneth, “International Humanitarian Law and Human Rights : How Relevant Are They in Today’s Wars?”, Statement at the Conference of the Swiss Foundation for World Affairs, 19 March 2003 : http://www.sais-jhu.edu/swissfoundation march192003event.htm. (Consulté le 11 août 2010).

625 HCJ, The Public Committee against Torture et al. vs. The Government of Israel et al., HCJ 769/02, jugement, 13 décembre 2006, § 36 ; SCHMITT, M. N., “Human Shields”, p. 42 ; SCHMITT, Michael N., “Humanitarian Law and Direct Participation in Hostilities by Private Contractors or Civilian Employees”, Chicago Journal of International Law, Vol. 5, Winter 2005, pp. 511-546, p. 541 ; HENDERSON, Ian, The Contemporary Law of Targeting, Leiden-Boston, Martinus Nijhoff pubs., 2009, p. 218.

626 SASSÒLI, M., “Human Shields and International Humanitarian Law”, p. 573.

627 MELZER, N., Targeted Killing in International Law, p. 346.

directement aux hostilités, il faudrait encore que le critère de la « dynamique d’opposition entre parties au conflit » soit également rempli, ce qui par exemple n’était pas le cas des pacifistes internationaux du Human Shield Action to Iraq.

C’est à ce stade que la distinction entre boucliers humains volontaires et involontaires influence le résultat final, puisque les personnes qui, à mains nues, opposent ce type de résistance font « partie intégrante » de l’« action hostile », à moins qu’ils ne soient physiquement contraints de le faire contre leur propre gré. C’est le cas, notamment, d’une famille enchainée à la porte d’entrée d’une maison pour retarder l’évasion du milicien que l’on veut capturer.

Naturellement, comme nous le répéterons infra (cf. Chapitre 2, § 8.2), le principe de nécessité militaire lui-même impose que ces civils désarmés, qui néanmoins participent directement aux hostilités, soient appréhendés de la façon la moins onéreuse possible.628 Ainsi dans le cas d’un groupe important mais désarmé de secrétaires du Pentagone (de jure, cibles légitimes d’attaques) qui empêchent par leur résistance physique le ciblage d’un haut gradé de l’armée américaine, le principe de nécessité militaire impose à la partie qui en a les moyens d’arrêter les « boucliers physiques » volontaires plutôt que de les tuer.

5.4.3. Engins explosifs improvisés (IEDs) vs. Drones sans pilotes (UAVs): participation directe à leur fonctionnement

Très rudimentaires par définition, les engins explosifs improvisés (Improvised Explosive Devices ou IEDs) se sont révélés, selon le Pentagone, l’arme la plus meurtrière du « faible » au conflit armé asymétrique, du moins parmi celles employées contre les forces armées américaines.629 Côté « fort » (Etats-Unis et Israël in primis), pour réduire le nombre des pertes, on a énormément investi dans la robotisation de l’action militaire (cf. infra, Chapitre 4, § 2.2.3.).630 L’une des armes les plus sophistiquées que l’on ait conçues à cet effet est le drone sans pilote (Unmanned Aerial Vehicle ou UAV).631 En fait, et en dépit de son appellation, un tel appareil requiert un grand nombre de « pilotes ».

628 “[T]he kind and degree of force which is permissible against persons not entitled to protection against direct attack must not exceed what is actually necessary to accomplish a legitimate military purpose in the prevailing circumstances”. ICRC, Interpretive Guidance, p. 17,Recommendation IX.

629 ATKINSON, Rick, “IED – The Single Most Effective Weapon against our Deployed Forces”, Washington Post, 1 October 2007.

630 SINGER, Paul W., “Military Robots and the Laws of War”, The New Atlantis, Winter 2009, pp. 25-45, pp. 30-34.

631 “A powered, aerial vehicle that does not carry a human operator, uses aerodynamic forces to provide vehicle lift, can fly autonomously or be piloted remotely, can be expendable or recoverable, and […] carr[ies] a lethal or non lethal payload.” Department of Defense, Dictionary of Military and Associated Terms, Joint Publication 1-02, 2001, p. 577. JENKS, Chris, “Law from Above : Unmanned

« The U.S. Air Force is wresting with the manpower, training and cultural issues that surround the operation of unmanned aerial vehicles (UAVs). In his presentation to the Dubai International Air Chiefs Conference (DIAC) last November,[…] USAF [United States Air Force] commander General Norton Schwartz outlined [that]

‘Actually, they’re not unmanned vehicles–they’re very manpower-intensive’ […] ‘We are struggling to man the 50 orbits over Iraq and Afghanistan that we are approaching now’ he added. Schwarz produced a chart showing that each orbit by one of the USAF’s MQ-1 Predators or MQ-9 Reapers requires a total of 189 support personnel. »632

Toute proportion gardée, les IEDs mobilisent eux aussi un nombre important de compétences, de fonctions et donc de personnes différentes : le rassemblement ou la contrebande du matériel nécessaire pour sa fabrication (gazoline, fertilisant, fil en cuivre, téléphones portables ou walkies-talkies, etc.), l’assemblage et le stockage de ce matériel, le transport de cet engin explosif vers sa destination finale et, enfin, sa détonation au passage du convoi ciblé.633

Si dès l’assemblage de ces engins, il est possible d’identifier l’« action hostile » pour laquelle ils vont exploser, nous considérons que cette phase d’assemblage est « préparatoire », et donc que les actes qu’y sont reconductibles font « partie intégrante » de cette action et que les personnes qui y prennent part intégrante participent directement aux hostilités.634

De façon générale, contrairement aux IEDs, un drone est produit pour servir dans plusieurs opérations militaires, voire plusieurs « actions hostiles » et ce d’autant plus au vu de ses coûts de fabrication exorbitants.635 Il nous

Aerial Systems, Use of Force, and the Law of Armed Conflict”, North Dakota Law Review, Vol. 85, 2009, pp. 649-671.

Bien plus rudimentaires, le “faible” a également ses drones. Voir, SINGER, Paul W., “Defending against Drones – How Our New Favorite Weapon in the Way on Terror Could Soon Be Turned Against Us”, Newsweek, 8 March 2010 : http://www.newsweek.com/id/234114. (Consulté le 25 août 2010).

632 Disponible sur Internet : http://www.ainonline.com/news/single-news-page/article/usaf-chief-outlines-uavs-manpower-needs-23557/. (Consulté le 11 août 2010). Voir aussi JENKS, Chris, “Law for Above : Unmanned Aerial Systems, Use of Force, and the Law of Armed Conflict”, North Dakota Law Review, Vol. 85, pp. 649-671.

633 Sur l’évolution des IEDs, on peut lire que : « First-generation IEDs were relatively small and simple, often a 155mm or 152mm artillery shell hidden in a wall or embankment beside a road. Insurgents would run wires from the device to a hand-held trigger, which they could activate from a nearby hiding place. As US troops devised counter-measures to detect these IEDs, by spotting the wires or looking for suspicious individuals nearby, insurgents changed their approach and began using remote triggers such as garage-door openers and mobile phones to detonate the devices from greater distances.” HASHIM, Ahmed S., "Iraq's Sunni Insurgency", The International Institute for Strategic Studies, Adelphi Paper No. 402, 2009, p. 48.

634 Schmitt considère que l’acquisition du matériel nécessaire pour construire l’engin fait elle-même partie intégrante de l’« action hostile ». SCHMITT, M. N., “The Interpretive Guidance : A Critical Analysis”, Harvard National Security Journal, Vol. 1, 2010, pp. 5-44, p. 37.

635 Prendre pendant deux ans en leasing un drone Heron, de fabrication israélienne,a couté au Canada 94 millions de dollars. « Canada to Acquire Attack Drones : Air Chief », The Canadian Press, 6

semble dès lors raisonnable de faire débuter la phase préparatoire de son éventuelle « action hostile »636 à partir de son décollage (c’est-à-dire au moment du « déploiement » de l’engin vers son objectif). Par conséquent, entre le début et la conclusion de l’« action hostile » (qui pourrait coïncider avec l’atterrissage du drone à son retour), le commandant responsable, les personnes qui transmettent les ordres, les informaticiens qui conduisent le drone à distance, les spécialistes responsables de lancer les missiles, ainsi que les agents chargés d’illuminer la cible prennent tous une part directe aux hostilités, tout en étant très éloignés les uns des autres et de l’endroit où les conséquences de leurs actes se produisent.637

Tout automatisme est cependant à éviter.638 En effet, s’il est possible de remonter à l’« action hostile » spécifique, par exemple, à partir des appareils ou des armes dont le drone est doté, la phase préparatoire de cette action peut être anticipée au moment de l’armement du drone avec les pièces en question.639

A l’inverse, il se peut que le « faible » construise en série des engins explosifs improvisés. Les personnes impliquées uniquement dans la phase de construction, une phase qui relève du renforcement des capacités militaires d’une partie au conflit,640 ne participeront pas directement aux hostilités.

A propos de la perte de l’immunité de personnes qui assemblent les IEDs et font voler les drones, nous ajouterons les remarques suivantes.

Primo, ni la nature clandestine des actions militaires (opérations militaires et action de renforcement des capacités militaires) conduites par le « faible », ni le pouvoir que nous avons appelé de transsubstantiation (cf. Chapitre 1, § 3.2.2.), lié à la transformation de la fonction d’un bien de nature civile, ne sauraient justifier une interprétation qui qualifie « a priori l’assemblage de ces engins

March 2009 : http://www.cbc.ca/world/story/2009/03/06/cdn-drones.html. (Consulté le 25 août 2010).

636 Il n’est pas nécessaire que l’action pour laquelle le drone est engagé ait pour but de détruire forcément un objectif. Il peut aussi s’agir d’une mission de reconnaissance, pour autant que les informations récoltées servent, dans la même opération, à infliger à la partie au conflit adverse le

636 Il n’est pas nécessaire que l’action pour laquelle le drone est engagé ait pour but de détruire forcément un objectif. Il peut aussi s’agir d’une mission de reconnaissance, pour autant que les informations récoltées servent, dans la même opération, à infliger à la partie au conflit adverse le