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Les travaux publiés

1. Le cadre professionnel

2.8. La documentation exploitée 164

2.8.5. Les travaux publiés

2.8.5.a. La lecture : entre la corvée et l’ oisiveté

La lecture d’ouvrages publiés et les recherches bibliographiques sont des piliers fondamentaux de la connaissance et, à terme, de la sagesse archéologique. Connaître son sujet, ou du moins se rendre compte de l’étendue des lacunes dans son propre savoir, représente un travail de fond qui n’est jamais fini. Il nécessite l’absorption d’un nombre croissant de publications dont le volume et le degré de spécialisation exigent des connaissances de plus en plus larges mais aussi de plus en plus approfondies, d’où la tendance vers une spécialisation de plus en plus pointue des chercheurs. L’archéologue peut se féliciter d’une discipline qui conserve, malgré les tendances actuelles, un fond humaniste dans sa vision du monde.

L’accès à l’information a été facilité par la mise en ligne des catalogues des bibliothèques universitaires et d’autres centres de recherches et par la numérisation d’un nombre croissant d’ouvrages. On peut désormais lire et télécharger les dix volumes du Dictionnaire raisonné de Viollet-le-Duc dans un facsimilé du premier tirage, aussi bien que les différentes versions de la Recepte Véritable… de Bernard Palissy ou encore, avec un peu de chance, les petits articles rares dans les revues des sociétés savantes les plus obscures. Tout en préservant les documents d’origine de l’usure des consultations répétées et des passages clandestins dans des photocopieuses surannées, la technique a supprimé les contraintes des horaires des bibliothèques, la corvée des fiches de classement et les frustrations des accès restreints à bon nombre de documents précieux186. Pour peu que l’on possède une tablette dotée d’une connexion sans fil ou, du moins, une carte

186 Heureusement d’ailleurs car la politique actuelle vis-à-vis de la culture, des sciences humaines et des services publics n’est pas faite pour allonger les heures d’ouverture ou embaucher du personnel qualifié pour aider le chercheur dans ses demandes d’ouvrages spécialisés.

mémoire d’une capacité adéquate, le chercheur peut se promener avec une portion non négligeable des connaissances totales des sociétés du passée qu’il étudie.

En contrepartie, car, rien n’est gratuit, l’avènement de cette ère numérique radieuse s’est accompagné d’une augmentation exponentielle des publications scientifiques, en partie poussée par une culture de recherche où il faut « publier ou mourir », augmentation concomitante avec une multiplication des supports éditoriaux en ligne187. Le chercheur doit alors trouver ses références, les trier, les classer sur des supports et dans des formats qui lui permettent de les accéder le moment voulu : le système de classement de fiches cartonnées ne suffisant plus, il doit s’approprier de nouveaux outils de recherche, se familiariser avec des interfaces et des logiques différentes dont l’apprentissage et l’utilisation sont pour le moins chronophages. A l’occasion, il faut arriver à lire et à digérer ces publications.

Sans succomber à la « tyrannie du temps réel188 » qui exige la consommation des nouveautés dès leur parution, le chercheur doit quand même se tenir au courant des recherches en cours qui sont pertinentes à ses propres thématiques mais aussi celles des domaines annexes, surtout dans un contexte où le travail en réseau et la transversalité sont de mise. On est donc confronté à une situation contradictoire entre une culture grandissante de l’utilitaire et de la rentabilité immédiate qui incite à toujours privilégier ce qui est sûr et directement exploitable, opposée à la nécessité de se confronter à l’inconnu et de prendre le « risque » de perdre du temps sur des lectures qui ne sont pas directement liées au sujet (voir encore Morel 2007). Avec le temps, ce sont ces lectures « oisives » (en apparence seulement) qui permet d’élargir et d’approfondir la culture générale du chercheur, et c’est justement ce substrat de culture générale qui lui permet de donner du sens à son travail et de le mettre en perspective. En tout cas, l’archéologue chercheur doit lire et la diminution progressive des temps d’étude et de documentation avant et après les phases de travail de terrain ne vont pas dans le sens d’une amélioration de la qualité de la recherche ou du développement de ses connaissances et de ses capacités de les exploiter.

2.8.5.b. La bibliographie pour les édifices du corpus

En tant qu’archéologue de terrain, l’essentiel de la documentation consultée consiste en les ouvrages publiés qui constituent les bibliographies à la fin de chaque rapport. Ces listings ne sont pas exhaustifs car, en règle générale, les références sont orientées vers les objectifs principaux de chaque intervention. Ce n’est pas le lieu d’exposer toutes les publications lues, consultées ou simplement feuilletées et l’auteur renvoi le lecteur sur les DFS joints en annexe comme pièces justificatives (chapitre annexe 1).

En ce qui concerne les édifices du sud du Berry étudiés en dehors du cadre préventif, la recherche des carrières et l’identification des pierres potentiellement employées dans les constructions a fait appel à plusieurs travaux publiés. Pour les carrières et les pierres de

187 Voir Kuchenbuch 2004 : 11-13 à propos des dérives possibles de ce « trop-plein » d’information numériques.

188 Article de Paul Virilio « La tyrannie de l’instant », parue dans l’Humanité du 22 Février 2002 : http://www.humanite.presse.fr/journal/2002-02-22/2002-02-22-29345

construction exploitées dans la région, le premier répertoire consiste en un catalogue des matériaux de construction publié en 1878 (Catalogue… 1878) et un répertoire des carrières de pierre en activité en 1889 (Debray, Durand-Claye 1890). Ces ouvrages de base ont été complétés par des recherches dans les mémoires statistiques départementaux publiés au cours du XIXe siècle en vue du développement économique des départements (Dalphonse 1804 ; Fabre 1838 ; Lejosne 1869, par exemple). Le dépouillement de ces ouvrages est souvent fastidieux mais a pu apporter des renseignements sur les activités d’extraction, des grandes carrières bien sûr mais aussi des productions de petite taille ou d’une faible importance économique. Ces mentions peuvent être très succinctes mais l’esprit administratif de l’époque permet au moins d’identifier des productions par commune avec parfois des indications sur le volume des productions et leur transport. Ce dernier aspect parle peu des transports par chemin mais ce n’est pas pour rien si le Répertoire des carrières de 1889 détaille les prix des matériaux au mètre cube et la proximité des gares ou des ports – le chemin de fer était en train de bouleverser les réseaux de distribution des matériaux de construction et les notions de rentabilité par rapport à la distance entre une carrière et les lieux de consommation étaient en train de changer.

A côté des publications « institutionnelles » du XIXe siècle, il y a un corpus imposant de travaux historiques et archéologiques réalisés par des érudits et des chercheurs des sociétés savantes. Ce n’est pas le lieu d’en dresser un bilan complet mais la période de la fin du XIXe siècle a vu la réalisation de beaucoup de travaux archéologiques et historiques dont des divers dictionnaires historiques dont chaque département semble être doté. Pour la région Centre, on compte l’Histoire et statistique monumentale pour le Cher (Buhot-de-Kersers 1875-1898) pour le Cher, le Dictionnaire Historique de l’Indre (Hubert (E) 1985), et le Dictionnaire géographique, historique, … de l’Indre-et-Loire… (Carré de Busserolle 1878-1884) pour la Touraine, pour ne citer que les plus connus.

Ces travaux érudits sont le produit de leurs temps et sont soumis à certaines précautions.

La part historique et biographique est importante, orientée sans doute par la formation des érudits de l’époque. Les considérations sur l’architecture sont faites d’un point de vue monumental et de l’Histoire de l’Art, avec peu de références aux constructions modestes ou domestiques, et les remarques sur les origines des matériaux mis en œuvre sont encore moins fréquentes. Il y a aussi tendance à « recycler » des ouvrages historiques plus anciens et rares sont les sources citées avec des cotes d’archives ! Pour le Berry, ce sont les écrits des historiens Jean Chaumeau (1566) et Gaspard Thomas de la Thaumassière (1691), avec ceux du géographe Nicolas de Nicolay (1567) qui forment la base historique. Malgré, ou à cause d’un certain esprit « encyclopédique », ces ouvrages restent incontournables pour leurs apports relatifs aux sources écrites, surtout pour des documents ayant disparu suite aux vicissitudes du temps.

En parallèle à la réalisation de ces dictionnaires historiques ou géographiques, les mêmes chercheurs ont produit un grand nombre d’études historiques et archéologiques publiées sous la forme de monographies ou dans des fascicules des revues des sociétés savantes. On y trouve des études micro-régionales, des monographies sur des villes ou des édifices, la transcription et l’étude de cartulaires d’établissement religieux, des études ou des inventaires archéologiques. La qualité