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UN ENJEU DE FORMATION AUJOURD'HU

3. BILAN DE L'ATELIER

3.1 Caractéristiques des productions

La production du groupe s'est réalisée au cours de six activités en liaison avec les trois objectifs énoncés.

1. Utilisation d'histoires de malades

Il s'agit de deux textes, l'un présentant les attitudes sociales et les réactions psychologiques d'une femme après mastectomie, et l'autre présentant les comportements d'un homme issu d'une culture où "on ne parle pas" de certaines parties du corps car plus ou moins liées à des pratiques sexuelles. Ces textes, en amenant les participants à imaginer et à établir des présupposés de dialogues, leur ont permis de faire émerger leurs propres représentations du corps, de la maladie et de la santé. Les participants ont identifié les implications sociales de l'image du corps, la notion de croyance concernant la maladie et l'importance des valeurs traditionnelles.

2. Une lecture philosophique

La lecture d'un texte de Canguilhem a permis d'évoquer, comment l'individu construit sa propre normativité à partir de l'adaptation à son milieu, puis d'analyser la frontière entre santé et maladie, normal et pathologique.

Cette lecture clôturait la production relative au premier objectif. Les deux activités suivantes ont permis aux participants de percevoir et d'analyser les éléments nécessaires à la vie et participant à la notion de santé.

3. Des extraits de film

Il s'agissait d'initier une réflexion sur l'importance du dialogue et du contact avec le corps dans la prise en charge d'un malade, même inconscient. Les participants devaient regarder ces images avec la consigne de répondre à la question : "quels sont les messages que le corps enregistre ?". Ces images et ces dialogues n'ont pas été utilisés en interaction et le ressenti des participants n'a pas été sollicité.

4. Présentations de travaux scientifiques

Un résumé des travaux de Rosenberg (1992) et de Mary Carlson et Felton Earls (1997) rapporte l'existence et la grande fréquence de pathologies somatiques et psychiatriques chez des enfants roumains placés en orphelinat pendant la période Ceaucescu. Ils font l'hypothèse du rôle des carences psychoaffectives dans la survenue de ces pathologies. Les auteurs décrivent les mécanismes par lesquels le toucher induit une augmentation de certains neurotransmetteurs cérébraux associée au développement neuronal et montrent comment un taux élevé de glycocorticoïdes, produits par le stress aigu et/ou chronique peut inhiber ces processus. Ils s'appuient sur des travaux antérieurs de Sparling.

Ces présentations voulaient illustrer l'importance des interactions entre corps, psychisme et relations sociales dans l'état de santé d'un individu. Toutefois, elles ont suscité de fortes réactions, parmi les participants, centrées essentiellement sur l'aspect non éthiques de ces recherches. La discussion, qui a suivi, n'a pas permis de discuter du rôle de ces mécanismes dans l'état de santé des enfants actuellement en âge scolaire.

5. Définition de la santé

Les définitions données sont très personnelles. Elles traduisent chez les participants, soit la perception d'un état, soit d'une dynamique. Nous rapportons les définitions proposées : L'absence de maladie et de douleurs - La fonctionnalité des organes - La maîtrise du "mouvement" et la possibilité de faire son travail - Un état optimum de bien-être physique, psychique et social - Un état d'équilibre qui dépend de la totalité de la personne - Une autonomie physique, psychique et sociale - Se construire en fonction de sa réalité et de ses rêves dans l'ensemble des circonstances de la vie.

6. Les enjeux pédagogiques

Le débat a été orienté par ces questions : 1/Quels seraient vos choix ? 2/Pour quelle période scolaire ? 3/Comment les élèves peuvent-ils s'approprier ses savoirs et compétences ? 4/Quels peuvent être les acteurs de l'éducation à la santé ? 5/Quel temps donné dans le programme ? Hors programme ? 6/Quelle matière, disciplines pratique ? 7/Quelle progression ?

Tous les groupes de travail s'accordaient à penser qu'une éducation doit amener l'apprenant à choisir des comportements (une disposition à) adaptés aux objectifs de santé. Il s'agit de l'acquisition d'une compétence par opposition à l'acquisition de connaissances. Ces compétences ne peuvent s'acquérir que par l'expérience. L'information ne suffit pas. À l'école, cette éducation demande une formation transdisciplinaire. La participation des parents est requise.

Des différences se sont toutefois exprimées, en fonction de la nationalité, dans la mise en œuvre des programmes. En Suisse, l'éducation se fait à l'extérieur de l'école. En Belgique, un décret fixe clairement le rôle de l'école et chaque établissement définit un projet d'éducation à la santé et à l'environnement. En France, les textes de recommandations produits par l'Éducation Nationale sont ambitieux (MEN 1998). Ils n'indiquent toutefois pas comment faire, privilégiant espérances et intentions.

3.2 Synthèse des discussions

Appartenance à un système de santé :

Il apparaît clairement que les deux systèmes de santé discutés correspondent à deux modèles médicaux différents, le système biomédical et le système biopsychosocial. Dans le premier, la santé est appréhendée comme l'absence de maladie, elle-même définie comme un problème organique (biophysiologique), objectivable, déterminée par une ou plusieurs causes qui doivent être identifiées et traitées. Le second modèle ajoute plusieurs éléments : il existe un continuum entre la santé et la maladie ; la santé y est définie comme un état de bien-être physique, mental et social, et pas comme l'absence de maladie (définition OMS) ; la santé y est à la fois objective (contrôlable par des mesures bio-physiologiques) et subjective (en tant que volet d'une construction personnelle et/ou sociale, variant selon les groupes et les périodes) ; la santé concerne l'individu ainsi que son entourage et la société ; la santé peut être abordée sous différents angles : maintien d'un état existant, prévention d'un état non souhaitable, soins et traitement d'un état de maladie avérée (l'exemple du diabète a été abordé), réhabilitation…

Modèles d'éducation :

À ces deux modèles de représentation du modèle de santé correspondent deux modèles d'éducation. Le premier modèle se caractérise par une logique classique d'enseignement, centrée sur l'enseignant, et utilisant des méthodes "transmissives" et inductives des savoirs à acquérir. Ce modèle est illustré par l'enseignement formel, habituel des institutions classiques, où les objectifs et les contenus de formation sont prédéfinis par des experts et où le but est la transmission de savoirs. Le deuxième modèle s'inscrit dans une logique d'apprentissage où l'acteur principal est la personne qui apprend. Le contenu de la formation vise l'acquisition de savoirs et de compétences. Le but à atteindre est une action définie par l'apprenant ou conjointement par l'apprenant et le formateur.

Les acteurs :

Tous les intervenants auprès des enfants et des adolescents sont concernés par leur éducation : les parents, les enseignants, les éducateurs, les membres des mouvements de jeunesse et les intervenants du champ de la santé, médecins, infirmières scolaires, psychologues. Le problème est celui de la définition des responsabilités, des rôles et des territoires. Quel que soit le pays, un besoin de coordination est exprimé car les enjeux de ces quatre groupes d'intervenants sont différents. Il a toutefois été souligné que ce qui est important est d'atteindre les objectifs, quelles que soient les personnes ou les institutions qui les réalisent.