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I. Ouverture au dialogue interreligieux : l’exemple des papes depuis Vatican II

4. Benoît XVI

Josef Ratzinger, qui n’avait pas vu d’un bon œil la rencontre d’Assise, au point de la boycotter la première fois en 1986 et de ne pas considérer important de s’y rendre en tant que Pape pour le vingtième anniversaire en 2006, amorce son pontificat dans cette même ligne. Pas un mot sur cette question dans son premier message Urbi et Orbi, lorsqu’il fut nommé pape, et rien non plus lorsqu’il s’adresse aux membres du collège cardinalice. Il faudra attendre le quatrième discours, devant des délégués des autres Églises et communautés ecclésiales ainsi que des autres traditions religieuses le 25 avril 2005, pour qu’il aborde forcément cette thématique en rappelant le désir de l’Église de « construire des ponts d’amitiés avec les fidèles de toutes les religions »40. Orientant la

raison d’être de ce dialogue vers la recherche d’un bien authentique, peu de cas fut toutefois fait d’un enrichissement mutuel, par exemple. Si la « paix à construire » demeure la finalité première du dialogue41, elle l’est d’un point de vue d’abord pratique.

39 Ainsi en fût-il encore lors de son dernier discours au corps diplomatique le 10 janvier 2005, – un peu moins de trois mois avant de disparaître – le pape réitérait encore, pour répondre au défi de la paix, sa conviction dans la force du dialogue : « En tant que diplomates, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, vous êtes par profession – et certainement aussi par vocation personnelle – les hommes et les femmes de la paix. Vous savez de quels moyens dispose la société internationale pour garantir la paix ou pour la réinstaurer. Comme mes Prédécesseurs, je suis moi- même intervenu publiquement à de nombreuses reprises, en particulier par le Message annuel pour la Journée mondiale de la Paix, mais aussi par la diplomatie du Saint-Siège. Je continuerai à le faire, pour indiquer les chemins de la paix et pour inviter à les parcourir avec courage et patience : à la volonté de puissance on doit opposer la raison, à l’affrontement par la force la confrontation par le dialogue, aux armes pointées la main tendue : au mal le bien » (Jean-Paul II 2005, §7).

40 Pour la citation entière : « Je m’adresse à présent à vous, chers amis des différentes traditions religieuses, et je vous remercie sincèrement de votre présence lors de l’inauguration solennelle de mon Pontificat. Je présente mes saluts cordiaux et affectueux à vous tous et à ceux qui appartiennent aux religions que vous représentez. Je suis particulièrement reconnaissant de la présence parmi nous de membres de la communauté musulmane, et j’exprime ma satisfaction pour le développement du dialogue entre musulmans et chrétiens, tant au niveau local qu’international. Je vous assure que l’Église désire continuer à construire des ponts d’amitié avec les fidèles de toutes les religions, dans le but de rechercher le bien authentique de chaque personne et de la société dans son ensemble » (Benoît XVI 2005).

41 « Toutefois, la paix est également un devoir pour lequel tous les peuples doivent s’engager, en particulier ceux qui se réclament des traditions religieuses. Nos efforts pour nous rencontrer et promouvoir le dialogue constituent une précieuse contribution pour construire la paix sur de solides fondements » (ibidem).

On se souviendra que Ratzinger fut nommé dès 1981 préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF)42, laquelle Congrégation eut plusieurs démêlés avec la théologie des religions.

Davantage de notifications, voire de condamnations ou d’écrits sur des thèmes touchant à l’interreligieux, furent prononcées, en comparaison des autres lieux théologiques43. C’est peu dire

que du point de vue doctrinal, le domaine de l’interreligieux ne cesse de causer de grands tracas aux autorités romaines en général, et à Ratzinger en particulier44. Des éléments trop essentiels à

la foi chrétienne sont de fait remis en cause par plusieurs théologiens qui réfléchissent à la raison d’être du pluralisme religieux, à ses incidences sur la compréhension chrétienne du salut et au rapport que ces deux éléments pourraient induire dans les relations interreligieuses.

C’est dans cette optique de la protection du dépôt de la foi qu’il faut lire la déclaration Dominus Iesus – sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Église, rendue publique le 6 août 2000. Parce que « De la pratique et de la théorisation du dialogue entre la foi chrétienne et les autres traditions religieuses, naissent de nouvelles questions ; [et qu’] il faut les affronter en parcourant de nouvelles pistes d’investigation », le Cardinal Joseph Ratzinger a finalement rédigé ce document pour, explique-t-il, « rappeler aux Évêques, aux théologiens et à tous les fidèles catholiques certains contenus doctrinaux essentiels, qui puissent aider la réflexion théologique à découvrir peu à peu des solutions conformes aux données de la foi et aptes à répondre aux défis de la culture contemporaine » (CDF 2000, §3). Les théologiens, aux yeux de Ratzinger et de la CDF, vont trop loin et menacent le statut de la vérité en christianisme :

La pérennité de l’annonce missionnaire de l’Église est aujourd’hui mise en péril par des théories relativistes, qui entendent justifier le pluralisme religieux, non seulement de facto,

mais aussi de iure (ou en tant que principe). Elles retiennent alors comme dépassées des

vérités comme par exemple le caractère définitif et complet de la révélation de Jésus-Christ,

42 Cette Congrégation, la plus ancienne des neufs Congrégations, et appelée à l’origine « Sacrée Congrégation de l’Inquisition romaine et universelle », fut fondée en 1542 pour défendre l’Église des hérésies. Rebaptisée par Paul VI du nom qu’on lui connaît, la tâche propre de la CDF depuis 1988 « est de promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique : tout ce qui, de quelque manière, concerne ce domaine relève donc de sa compétence » (CDF 1988).

43 Depuis 1998, trois théologiens de l’interreligieux (Jésuites tous les trois) ont fait l’objet de notifications officielles sur leurs écrits : Anthony de Mello (24 juin 1998), Jacques Dupuis (24 janvier 2001) et Roger Haight (13 décembre 2004). On pourra aussi mentionner les démêlées de Peter C. Phan, pour son livre Being Religious Interreligiously. Asian Perspectives on Interreligious Dialogue, ainsi que Claude Geffré, à qui Rome a refusé de donner son assentiment pour la remise d’un doctorat Honoris Causa au théologien dominicain à Kinshasa (CDF 2018).

44 Peter Phan, qui n’est pas tendre à l’égard de l’ancien archevêque de Munich, énumère quelques sanctions instituées par celui-ci et qui confirme sa réticence au dialogue interreligieux : « Without enmeshing in ecclesiastical politics, one could mention Ratzinger’s
 1990 warning against Eastern forms of meditation; his description of Buddhism as a sort of “a spiritual auto-eroticism”; […] the marginalization of archbishop Michael Fitzgerald, former President of the Pontifical Council for Interreligious Dialogue; the absorption of this council into the Pontifical Council for Culture (later re-instated as a separate council); […] statements on the necessity of “reciprocity” in interreligious dialogue (coded words to the effect that unless non-Christians, especially Muslims, change their policies toward and treatments of Christians, dialogue with them should be suspended); the 2009 lifting of excommunication for a Lefebvrite bishop who has denied the Holocaust; and statements that seem to question the permanent validity of God’s covenant with the Jews and reiterate the necessity of mission toward them » (Phan 2010, 11).

la nature de la foi chrétienne vis-à-vis des autres religions, l’inspiration des livres de la Sainte Écriture, l’unité personnelle entre le Verbe éternel et Jésus de Nazareth, l’unité de l’économie du Verbe incarné et du Saint-Esprit, l’unicité et l’universalité salvifique du mystère de Jésus- Christ, la médiation salvifique universelle de l’Église, la non-séparation, quoique dans la distinction, entre le Royaume de Dieu, le Royaume du Christ et l’Église, la subsistance de l’unique Église du Christ dans l’Église catholique (ibid., §4).

Cette déclaration fit l’effet, pour Richard Bergeron et bien d’autres théologiens engagés dans les questions du pluralisme religieux, d’un « coup de massue »45. En situant le dialogue

interreligieux dans un mode d’accompagnement à la mission de l’Église46, le document lui

reconnaît « une attitude de compréhension et un rapport de connaissance réciproque et d’enrichissement mutuel, dans l’obéissance à la vérité et le respect de la liberté » (ibid., §2). Toutefois, précisera le document – se basant en cela sur l’encyclique Redemptoris Missio de Jean- Paul II – « Le dialogue […], tout en faisant partie de la mission évangélisatrice, n’est qu’une des actions de l’Église dans sa mission ad gentes. La parité, condition du dialogue, signifie égale dignité personnelle des parties, non pas égalité des doctrines et encore moins égalité entre Jésus-Christ – Dieu lui-même fait homme – et les fondateurs des autres religions » (ibid., §22).

À lire les premiers écrits du pape Benoît XVI, son conservatisme (ou son désintérêt ?) à l’égard des questions interreligieuses demeure sensiblement le même que lorsqu’il était préfet de la CDF. La première encyclique Deus caritas est (2005) ne fait mention que trois fois du dialogue, et jamais sur le mode interreligieux. Le mot religion revient pourtant six fois dans celle-ci, mais les quatre premières occurrences font référence aux traditions religieuses antiques, et les deux dernières aux rapports entre religions et état ; rien donc sur les rapports interreligieux. Même le thème de l’évangélisation s’estompe pratiquement (deux occurrences) pour être remplacé ici par l’amour – thème naturellement central de l’encyclique47.

Parce que l’amour est central dans l’œuvre d’évangélisation, Benoît met en garde contre certaines dérives : d’une part, « L’activité caritative chrétienne doit être indépendante de partis et d’idéologies » (ibid., §31b), mais d’autre part, « la charité ne doit pas être un moyen au service de ce qu’on appelle aujourd’hui le prosélytisme. L’amour est gratuit. Il n’est pas utilisé pour parvenir à d’autres fins » (ibid., §31c). À propos du prosélytisme, et à cette même première période de son pontificat, le pape insistera pour rejeter définitivement cette manière de mettre en œuvre la

45 « Ce texte qui se veut un rappel des doctrines essentielles de la foi est en réalité un coup de massue sur la tête des théologiens des religions et il jette sur eux un soupçon d’hérésie qui les atteint dans leur crédibilité ! » (Bergeron 2001).

46 « La tâche ecclésiale d’annoncer Jésus-Christ, “chemin, vérité et vie” (cf. Jn14,6) emprunte aujourd’hui encore la voie du dialogue interreligieux qui ne remplace certainement pas la missio ad gentes mais l’accompagne plutôt, à cause de ce “mystère d’unité” » (CDF 2000, §2).

47 « Toute l’activité de l’Église est l’expression d’un amour qui cherche le bien intégral de l’homme : elle cherche son évangélisation par la Parole et par les Sacrements, entreprise bien souvent héroïque dans ses réalisations historiques; et elle cherche sa promotion dans les différents domaines de la vie et de l’activité humaines » (Benoît XVI 2005, §19).

mission. À la messe d’inauguration d’Aparecida, la Ve conférence générale de l’épiscopat latino-

américain et des Caraïbes à laquelle se référera souvent son successeur, le pape François – présent ce jour-là en tant qu’archevêque de Buenos Aires et président du comité de rédaction du document final –, Benoît XVI insiste sur l’amour de Dieu, comme amour qui donne vie et qui suscite l’élan missionnaire, pour rappeler que :

L’Église ne fait pas de prosélytisme. Elle se développe plutôt par « attraction » : comme le Christ « attire chacun à lui » par la force de son amour, qui a culminé dans le sacrifice de la Croix, de même, l’Église accomplit sa mission dans la mesure où, associée au Christ, elle accomplit chacune de ses œuvres en conformité spirituelle et concrète avec la charité de son Seigneur (2007a).

Sa deuxième encyclique, Spe salvi (2007) ne comporte pas beaucoup d’éléments sur la mission ou sur le dialogue interreligieux. Sur le premier terme, seules Joséphine Bakhita (Benoît XVI 2007b, §3) et Marie sont évoquées comme missionnaires (ibid., §50), alors que le mot évangélisation est absent de l’encyclique. Il est néanmoins intéressant de relever que pour Benoît XVI, le christianisme ne doit pas s’entendre comme « une bonne nouvelle », au sens d’une information, d’un contenu à comprendre, mais plutôt, en reprenant le vocabulaire des linguistes, comme un message « performatif » : « Cela signifie que l’Évangile n’est pas uniquement une communication d’éléments que l’on peut connaître, mais une communication qui produit des faits et qui change la vie » (ibid., §2). À propos du second terme, seul le dialogue avec l’ère moderne est évoqué, et une seule fois (ibid., §22). De même, rien n’indique dans cette encyclique une conscience (ni une reconnaissance) des autres religions dans le monde. Le terme religion, qui revient encore six fois dans la lettre, est cinq fois employé pour désigner les traditions religieuses néotestamentaires, et une sixième fois à l’intérieur d’une citation de Kant, qui estime que le christianisme est destiné à devenir la « religion universelle » (ibid., §19).

Enfin, dans son exhortation apostolique Sacramentum caritatis (2007), une seule mention du dialogue interreligieux est faite. Mais celui-ci n’est pas entendu sur le mode de la rencontre fraternelle, comme le suggérait son prédécesseur, mais plutôt sur le mode du défi et de la confrontation48.

Est-ce donc une surprise si ce pape a, pour un temps finalement, fusionné – ou annexé ? – le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et le Conseil pontifical pour la culture49 ?

48 « Il résulte de tout ce qui a été dit que le Mystère eucharistique nous met en dialogue avec les différentes cultures, mais aussi en un sens il les défie. Il faut reconnaître le caractère interculturel de ce nouveau culte, de cette logiké latreía. La présence de Jésus Christ et l’effusion de l’Esprit Saint sont des événements qui peuvent constamment se confronter à toute réalité culturelle, pour y mettre le ferment évangélique. Cela comporte en conséquence l’engagement de promouvoir avec conviction l’évangélisation des cultures, dans la conscience que le Christ lui-même est la vérité de tout homme et de toute l’histoire humaine » ((Benoît XVI 2007c, §78).

49 Alors que Jean-Paul II, lors de sa grande réorganisation de la Curie romaine en 1988, avait transformé le Secrétariat pour les non-chrétiens en Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, un an après avoir été élu Pape le 11 mars 2006, Benoît XVI décide « d’unir » les deux dicastères pour le dialogue interreligieux et pour la culture en un seul

Impossible à dire. Mais ce qui a changé la vision de Benoît XVI sur le dialogue interreligieux tient sans doute à la controverse provoquée par son discours à Ratisbonne le 12 septembre 2006, et à la colère déclenchée chez de nombreux musulmans. La rencontre qui s’ensuivit avec 22 ambassadeurs et plusieurs représentants du monde musulman, le 25 septembre 2006 (Benoît XVI 2006), amorça chez le pontife romain une conversion de son regard sur le dialogue. La mention du dialogue entre culture et entre religions, absente de son discours au corps diplomatique le 9 janvier 2006, apparaît finalement le 8 janvier 2007 suite à la polémique de Ratisbonne, où il reconnaît sa « prise de conscience croissante » de l’importance du sujet50. Elle revient encore six

fois dans son discours du 7 janvier 200851. Puis lors de son allocution aux Nations Unies en avril de

la même année, Benoît XVI se montre finalement convaincu de la nécessité du dialogue : Le dialogue doit être reconnu comme le moyen par lequel les diverses composantes de la société peuvent confronter leurs points de vue et réaliser un consensus autour de la vérité concernant des valeurs ou des fins particulières. […] Les Nations unies peuvent compter sur les fruits du dialogue entre les religions et tirer des bénéfices de la volonté des croyants de mettre leur expérience au service du bien commun. Leur tâche est de proposer une vision de la foi non pas en termes d’intolérance, de discrimination ou de conflit, mais en terme de respect absolu de la vérité, de la coexistence, des droits et de la réconciliation (Benoît XVI 2008b).

Jusque-là, les motivations de Benoît XVI pour le dialogue restent néanmoins plus sociopolitiques que théologiques52. C’est encore l’orientation générale que prend sa troisième

encyclique, Caritas in veritate (2009) de se focaliser « sur le développement humain intégral dans la charité et la vérité ». Dans ce texte, profondément ancré dans la doctrine sociale de l’Église et à ce compte, réclamant le dialogue avec la société, les sciences sociales et les croyants des autres

Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et de la culture, dont le Cardinal Poupard fut dès lors président. Devant les multiples protestations, le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux reverra finalement le jour le 1er septembre 2007 sous l’égide du cardinal Jean-Louis Tauran.

50 « Je voudrais mentionner en premier lieu la prise de conscience croissante de l’importance du dialogue entre les cultures et entre les religions. Il s’agit d’une nécessité vitale, en particulier en raison des défis communs concernant la famille et la société » (Benoît XVI 2007d).

51 D’abord envisagé pour solutionner les conflits au Liban, au Myanmar et au Kenya, le dialogue interreligieux est finalement nommé comme tel : « Cette prise de conscience pourrait aider, entre autres, à orienter les initiatives de dialogue interculturel et inter-religieux. Ces initiatives sont toujours plus nombreuses et elles peuvent stimuler la collaboration sur des thèmes d’intérêt mutuel, comme la dignité de la personne humaine, la recherche du bien commun, la construction de la paix et le développement. A cet égard, le Saint-Siège a voulu donner un relief particulier à sa participation au dialogue de haut niveau sur la compréhension entre les religions et les cultures et la coopération pour la paix, dans le cadre de la soixante-deuxième Assemblée générale des Nations unies (4-5 octobre 2007) » (Benoît XVI 2008, §9).

52 On notera dans ce sens cette réflexion dans une lettre personnelle du Pape à Marcello Pera à propos de son dernier livre : « In recent days I had the chance to read your new book, Why We Should Call Ourselves Christians. For me it made for fascinating reading. […] Particularly significant for me is also your analysis of the concepts of interreligious and intercultural dialogue. You explain with great clarity that an interreligious dialogue in the strict sense of the word is not possible, although the intercultural dialogue on the cultural consequences of the basic religious decision has become all the more urgent. While a true dialogue on the latter is not possible without setting one’s own faith aside, it is necessary to address in a public debate the cultural consequences of basic religious decisions. Here dialogue, mutual correction and reciprocal enrichment are possible and necessary » (Benoît XVI cité dans Phan 2010, 12).

traditions religieuses, l’évocation des thèmes traditionnels de la mission est rare53 et

foncièrement liée aux enjeux de développements54. Proposant de « conjuguer l’amour avec la

vérité », l’encyclique offre sans cesse un jeu de miroir entre les deux termes. Cela lui permet d’éclairer à la fois l’annonce – comme un témoignage de vie, et comme le résultat de la rencontre de l’amour dans la vérité (Benoît XVI 2009, §4) –, mais également le dialogue comme engendré par le désir de vérité : « La vérité est, en effet, lógos qui crée un diá-logos et donc une communication et une communion » (ibidem). Ici, pour le dire autrement, c’est en ce dialogue pétri d’exigence d’amour et de vérité que le pape propose d’aborder et de comprendre les problèmes auxquels nous sommes confrontés55. Condition essentielle du dialogue, cette exigence de vérité permet

d’éviter le relativisme culturel duquel Benoît XVI se méfie (ibid., §26), et même de réintégrer la loi naturelle en l’élevant au rang de « loi morale universelle » et « fondement solide de tout dialogue culturel » dans la mesure où « de multiples et singulières convergences éthiques se trouvent dans toutes les cultures » (ibid., §59).

En insistant sur la collaboration entre foi et raison, le pontife se montre finalement très