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Les bénéfices perçus de la collaboration école-famille dans divers contextes

Dans les pays industrialisés, depuis la démocratisation de l’éducation au début des années 1960, la collaboration école-famille est vue comme l’une des stratégies prometteuses pour soutenir la réussite scolaire des élèves. Au Québec, dans le rapport de la Commission royale d’enquête sur l’éducation, Parent (1966) incitait les enseignants à dialoguer et à travailler de concert avec les parents pour soutenir le travail scolaire des élèves. Aujourd’hui, comme mesure d’intervention auprès des élèves de milieux défavorisés, des élèves en difficulté d’apprentissage et en adaptation scolaire, la collaboration école-famille figure dans la quasi-totalité des plans d’intervention de l’actuel ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS, 2009) et l’ancien ministère de l’Éducation du Québec (MEQ, 2003, 2004). Ces différents plans d’interventions considèrent les parents comme membres actifs dans l’apprentissage des enfants. Aux États-Unis, suite au rapport Coleman présenté en 1966, plusieurs dispositifs ont été mis en place, notamment dans les écoles de milieux défavorisés, pour rapprocher l’école de la maison afin de bonifier le rapport au savoir des élèves. Au début du millénaire, la plupart de ces écoles parviennent à relever le défi de la réussite pour tous grâce à une étroite collaboration avec la famille (Lewis & Paik, 2001). Elles développent une nouvelle philosophie de l’éducation intégrant la réussite scolaire dans une véritable perspective écologique. Grâce aux activités élaborées (programmes de littératie familiale et de mathématique) pour susciter la participation des parents, le milieu scolaire parvient à développer un esprit de coopération intégrant école-famille-communauté et une culture de respect des valeurs familiales (Epstein, 2001, 2010, 2011; Froiland & Davison, 2014; Harvard Family Research Project, 2007; Henderson & Mapp, 2002; Howard & Ford, 2007; Padak & Rasinski, 1997). Par ce fait, la réussite scolaire devient l’affaire de toute une communauté éducative engagée pour le bien-être de l’enfant (Carey, Lewis, Farris, & Burns, 1998; Epstein, 2010, 2011; Henderson & Mapp, 2002) dans la mesure que les interactions entre les acteurs concernés permettent de l’efficacité au niveau des interventions destinées auprès des élèves (Beaumont, Lavoie, & Couture, 2010).

En Europe, notamment en France, des dispositifs de relais ont été mis en place pour rapprocher les parents de l’école, et l’impact de ces dispositifs se révèle généralement positif sur la réussite des élèves (Millet & Thin, 2012; Périer, 2007). Cependant, ces dispositifs, au format diversifié, sont de plus en plus questionnés, dans leurs objectifs et leur cogestion (Bautier & Rayou, 2009; Vieille-Grosjean, 2009). En plus de favoriser une connaissance mutuelle et une plus grande confiance entre les milieux scolaire et familial, notamment en contexte défavorisé (Mellouk, 2007), la collaboration école-famille s’avère bénéfique autant pour l’élève, les parents, que pour les enseignants.

• Pour l’élève, un mésosystème fort (interaction-école-famille) constitue un facteur de protection face à l’échec. En effet, lorsque l’école et la famille entreprennent des actions concertées autour des besoins des élèves, ces derniers deviennent plus performants dans leur apprentissage et adoptent des comportements plus adéquats envers l’école (Epstein, 2005; Haris & Goodall, 2007). Ainsi, l’élève fait preuve d’un plus grand engagement dans ses activités scolaires, engagement qui est susceptible de contrebalancer l’effet négatif du faible statut socioéconomique des parents sur sa réussite (Harvard Family Research Project, 2007). Une présence parentale à l’école, si minime soit-elle, lie le milieu scolaire à l’espace familial et prolonge symboliquement la vie de l’élève dans l’univers de la famille (Périer, 2005; Thin, 1998). Au-delà des performances scolaires, la collaboration école- famille reflète pour l’élève le sens que ses parents attribuent à l’école.

• Pour les parents, en plus d’offrir une plus grande opportunité de participation dans les activités scolaires de leurs enfants, une étroite collaboration avec l’école constitue une importante source d’informations, de transformation et de formation pour la famille (Epstein & Salinas, 2004; Salyers, 2014; Sheldon & Epstein, 2004). L’accès à la communication permet, en outre, aux parents de trouver l’aide nécessaire pour soutenir leurs enfants dans leurs apprentissages à domicile et de mieux connaître les attentes de l’école envers eux. Elle constitue, entre autres, une excellente stratégie pour éviter des situations conflictuelles entre ces deux institutions partenaires dans le processus éducatif des jeunes et des enfants. En plus

d’être informés des difficultés et des progrès de leurs enfants (Kanouté, 2007), les parents tendent à avoir des attentes plus élevées envers ces derniers (Risko & Walker-Dalhouse, 2009).

• Pour l’enseignant, selon van Zanten (2001), comme pour Duru-Bellat & van Zanten (2012), il est plus facile d’éduquer lorsque les normes familiales complètent celles de l’école ou font front commun en faveur de l’éducation des enfants. En ce sens, en plus de garder l’enseignant informé du vécu de l’enfant dans son milieu familial (Dunne & Gazeley, 2008), la collaboration école-famille renforce la communication avec les parents et permet de développer « des attitudes plus positives » à l’égard de leurs habiletés comme éducateurs (Deslandes & Bertrand, 2003; Salyers, 2014) et de s’ouvrir mutuellement l’un à l’autre (Bouveau, Cousin, & Favre-Perroton, 2007). Enfin, de manière générale, selon Kalubi (2008), la collaboration école-famille constitue une source de créativité qui fait émerger des compétences multiples permettant de développer un contexte scolaire favorable à l’apprentissage et à la réussite des élèves. D’après Cox (2005), cette collaboration accroît le taux de participation des parents dans des activités scolaires et aide à prévenir les difficultés de comportement chez des élèves à risque et augmente leur chance de réussite. Macdonald (2008) souligne que lorsqu’elle est bien vécue, elle tend à revaloriser la profession enseignante et la parentalité en vue de renforcer les acquis scolaires des élèves. En fait, lorsque l’école mobilise les parents autour des actions visant à renforcer la réussite des élèves, les résultats de ces derniers s’améliorent, et ce, indépendamment de leur statut socioéconomique et culturel (Haris & Goodall, 2007; Henderson & Mapp, 2002). Malgré tous les bénéfices perçus pour le développement et la persévérance scolaire des élèves (Duval, Dumoulin, & Michel, 2014; Poncelet & Lafontaine, 2011), bien qu’elle semble promouvoir l’égalité des chances de réussite des élèves (Epstein, 2011; Glasman & Besson, 2005; Jeynes, 2014), la collaboration entre l`école et les parents demeure toutefois complexe et multidimensionnelle. Dans bien des cas, elle est difficile à établir (Beaumont, & al., 2010) et ses effets, difficiles à mesurer. Toutefois, malgré sa complexité et ses bénéfices difficiles à cerner, nous pensons que dans un contexte comme celui d’Haïti, il est pertinent de ne pas

négliger les retombées d’une collaboration école-famille, redéfinie ou réinventée, sur la réussite scolaire.