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C ONCLUSION DU CHAPITRE 4

5.2. E TUDE DE LA PERFORMANCE BOURSIERE A COURT TERME

5.2.1. Méthodologie des tests

5.2.2.2. Autres analyses complémentaires

Notre échantillon total est composé de titres et de types de transfert aux caractéristiques disparates. Tous les titres ne partent pas du même marché, de plus ils n’arrivent pas tous non plus sur le même marché. Nos sociétés n’exercent pas toutes dans les mêmes secteurs d’activité. De surcroît, le mode de transfert est différent selon les titres. En effet, certaines sociétés procèdent à une mise en vente d’actions nouvelles ou anciennes concomitamment au transfert, tandis que d’autres changent juste le marché de cotation de leurs titres sans vente d’actions.

Pour contrôler ces différents effets, nous procédons à une analyse complémentaire en régressant en coupe transversales les RAMC sur plusieurs variables dichotomiques et des variables de taille (capitalisation boursière et nombre d’actions en circulation). Par ailleurs, nous testons également la réaction du marché en fonction de la probabilité de transfert estimée ex ante. Si les marchés sont considérés comme efficients, on devrait s’attendre à ce que la réaction soit plus forte pour les entreprises dont le transfert n’avait pas été anticipé.

Les RAMC ont été estimées sur les fenêtres [0, 1], [1, 5], [1, 10] et [1, 30]. Ces fenêtres ont été choisies pour la simple raison que c’est sur ces fenêtres que les tests sont statistiquement significatifs (excepté pour le dernier). Les RAMC utilisées sont celles obtenues à partir des rentabilités anormales calculées par le modèle de marché avec estimation du bêta par la méthode de Scholes et William (1977). Nous procédons tout d’abord à une régression par la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO) de ces RAMC séparément sur chaque variable, puis à une régression linéaire multivariée avec l’ensemble de nos variables toujours par la méthode MCO de la façon suivante :

»¾Õ8%,¿Ý;ŽÁ = 3 + 'È=5••B%+ K¾Oà%+ -8 ˜˜%+ 7 á˜B <B> %,á µ

á&®

+ º »Ô™¾%+ •% 5— 20 Où •% représente le terme d’erreur. ˜B <B> %,á désigne les deux variables de secteur à savoir la technologie et la finance. Le choix de ces deux secteurs se justifie par le fait que le secteur de la technologie est la plus représentée (25%) et que les sociétés financières présentent des caractéristiques qui nécessitent qu’on les examine à part. L’échantillon de titres transférés utilisé pour ces régressions est l’échantillon total (71 titres).

Tableau 5-4 : Description des variables utilisées dans les régressions

Variables Description Expression

SHARE

SHARE représente le nombre de titres en circulation juste avant le transfert. Il n’inclut pas les titres émis lors du transfert.

˜â¾»

= ln Nombre dactions avant le transfert

POST_SHARE

POST_SHARE désigne le nombre

d’actions transférées (comprend les nouvelles actions émises lors du transfert).

Ô˜È_˜â¾»

= ln ¼Nombre d+ Nouvelles actions actions avant le transfert

émises ½

CAP_EST

mesure la capitalisation boursière moyenne des sociétés pendant la période d’estimation.

8¾ _ ˜È

= ln ¼Capitalisation bourside la période destimationère moyenne ½

CAP mesure la capitalisation boursière

des sociétés juste avant le transfert.

= ln ¼de lCapitalisation boursiannée précédant le transfert½ère çin

TECH TECH représente les sociétés du

secteur des technologies.

TECH prend

1 - si la société appartient au secteur des technologies ;

0 - si non

FIN FIN représente les sociétés du

secteur de la finance.

FIN prend

1 - si la société appartient au secteur de la finance

0 - si non

AUG

Cette variable décrit si la société à procéder à une augmentation de capital lors du transfert ou non.

AUG égale

1 - si augmentation 0 - si non

CESS

La variable CESS décrit si les anciens actionnaires ont cédé des parts lors du transfert.

CESS égale 1 - si cession 0 - si non

PROBA Cette variable mesure la probabilité

de transfert

Elle est égale à la probabilité estimée sur des données de l’année précédant le transfert

- Présentation des résultats des régressions univariées

Effet taille

Plusieurs auteurs en finance, notamment Fama et French (1992 et 1993) et Lakonishok et al. (1994), ont mis en évidence des anomalies dans l’évaluation des rentabilités des actifs

risqués. L’une de ces anomalies est liée à la taille, c’est-à-dire à la capitalisation boursière des titres. Ces auteurs observent, contrairement aux enseignements du MEDAF, que le risque systématique105

ne suffit pas à lui seul pour expliquer les rentabilités espérées d’un titre. Ils trouvent que sur le long terme, les rentabilités moyennes ajustées par rapport au risque systématique des titres de petite capitalisation sont plus élevées que celles des titres à forte capitalisation.

Ahern (2009), dans son étude de la robustesse des modèles d’étude événementielle, met en évidence des biais de spécification, des différents modèles d’étude d’événement communément utilisés, liés aux caractéristiques des titres (la capitalisation boursière, les rentabilités antérieures et le ratio book-to-market). Selon lui, les rentabilités anormales des titres de petite taille auraient tendance à devenir négatives, car l’estimation des rentabilités anormales par le modèle de marché par exemple aurait pour conséquence la génération de rentabilités « normales » très élevées. Ainsi, la petitesse de la taille des titres peut amoindrir l’ampleur de la réaction du marché.

Les résultats de nos différentes régressions des RAMC sur les variables de taille mettent en évidence un lien négatif entre les RAMC et la taille des titres (voir annexe D). Ce lien n’est cependant pas statistiquement significatif aux différents seuils classiques de significativité. Ces résultats réfutent donc les conclusions d’Ahern (2009). Mais ils peuvent peut-être s’expliquer par le fait que la majeure partie des titres de notre échantillon sont quasiment tous de petite taille et en moyenne de taille comparable.

Effet sectoriel

Dans les années 1990, les valeurs technologiques ont connu une période de forte croissance. L’indice NASDAQ, qui est composé de valeurs de haute technologie, a augmenté de 580% entre le début de 1995 et mars 2000. La forte croissance des valeurs technologiques, qui a certainement permis à ces sociétés de transférer plus facilement le marché de cotation de leurs titres, a surement aiguisé l’intérêt des investisseurs pour ces actions. Notre échantillon étant composé à 25% de valeurs technologiques, notre étude de la réaction du marché lors d’un transfert de marché de cotation a peut-être été biaisée par la période de boom et la bulle internet des années 2000 qu’ont connu ces valeurs.

Les résultats de nos régressions montrent l’existence d’un lien positif entre les RAMC et

105 Le MEDAF affirme qu’il existe un lien positif et linéaire entre les rentabilités attendues d’un titre et son bêta (risque systématique) et que le bêta est suffisant pour expliquer la rentabilité d’un titre.

l’appartenance au secteur de la technologie. Le marché réagit donc au transfert de façon très positive lorsque la société vient du secteur des technologies. Toutefois, cette relation n’est significative que pour les RAMC de l’intervalle 0 à 1. Ce résultat confirme partiellement notre intuition que l’appartenance sectorielle, surtout au secteur de la technologie, peut affecter le comportement des investisseurs à l’occasion d’un transfert de marché de cotation. Par ailleurs, les régressions des différentes RAMC sur d’autres variables sectorielles ne donnent pas de résultats probants. Les coefficients ne sont pas significativement différents de zéro.

Effet de la vente d’actions nouvelles ou anciennes

Il ressort des études sur la réaction du marché lors d’une émission d’actions nouvelles que l’annonce se traduit par une baisse des cours. Sur le marché américain, cette baisse atteint 3%106. Sur le marché français, Gajewski et Ginglinger (2002) et Ducassy (2001) aussi, mettent en évidence un impact négatif des émissions d’actions. Pour Myers et Majluf (1984), ce comportement du marché peut s’expliquer par le fait que les agents interprètent l’émission de nouvelles actions comme un signe de surévaluation des cours des titres. Par conséquent, ils anticipent donc une baisse de cours quand une émission d’actions nouvelles est annoncée.

Certaines de nos sociétés, concomitamment au transfert, émettent des actions nouvelles ou vendent une partie des actions existantes. Ces sociétés réalisent souvent de telles opérations afin d’atteindre le seuil minimum de diffusion d’actions exigé par le marché cible107. Les titres transférés par la mise en vente d’actions représentent environ 30% de notre échantillon total (71 titres). Il est donc primordial pour nous, pour les raisons ci-dessus, de vérifier l’impact de ce mode sur la réaction du marché. Pour cela, nous avons effectué deux analyses : une étude d’événement avec un sous-échantillon constitué uniquement de titres transférés sans vente d’actions (46 titres) et une régression des RAMC sur les variables dichotomiques AUG et CESS dont les descriptions sont données dans le tableau 5-4.

Le résultat de l’étude d’événement montre que les RAMC sont plus élevées quand on exclut les titres ayant procédé à une augmentation de capital ou à une cession d’actions lors de l’opération de transfert (voir tableau annexe B-7). Les RAMC atteignent leur pic à 8% aux alentours de la date 4 (contre 6,74% pour l’échantillon total108). Les titres transférés par le

106 Voir par exemple Asquith et Mullins (1986), Kalay et Shimart (1987) et Eckbo et Masulis (1992).

107 Par exemple, les sociétés qui veulent s’introduire sur le SM de la bourse de Paris doivent avoir au minimum 10% de leurs titres dans le public.

108

mode de transfert sans vente d’actions (transfert sec) gagnent environ 1,26% le lendemain de l’annonce du transfert contre 1,12% pour l’échantillon total. Les RAMC de ces titres sur les cinq et dix premiers jours après l’annonce sont également supérieures à celles de l’échantillon total (3,33% contre 3,07% et 4,09% contre 2,48%). Par contre, l’effondrement des RAMC est toujours constaté, mais cette fois d’une moindre ampleur.

Quant aux résultats de la régression des RAMC [0, 1] sur les différentes variables (AUG et CESS), ils mettent en évidence une relation entre les RAMC [0, 1] et la variable AUG. Ainsi, le marché réagirait négativement à l’annonce du transfert d’une société qui émettrait de nouvelles actions lors du transfert. Ce résultat est conforme à ceux des différentes études menées sur la réaction du marché à une augmentation de capital. En revanche, la relation entre les différentes RAMC et la variable cession d’actions n’est pas significative.

Effet des marchés d’origine et d’arrivée

La différence d’organisation, de fonctionnement et de qualité entre les différents marchés de la bourse de Paris peut entraîner une réaction du marché différente selon le marché de départ ou d’arrivée. Nous supposons que le marché réagira différemment quand le transfert se fait entre un marché non réglementé (HC ou ML) vers un marché plus réglementé et exigeant (NM, SM, PM, Alternext ou Eurolist) ou quand il se fait entre deux marchés réglementés. Pour tester cette hypothèse, nous régressons les RAMC sur la variable dichotomique TRANS_MR qui prend la valeur 1 si le transfert est fait entre deux marchés réglementés et 0 par ailleurs.

Les résultats trouvés ne montrent aucune différence significative de réaction quand le transfert se fait entre un marché non réglementé et un marché réglementé ou entre deux marchés réglementés. La différence de qualité et de niveau de protection et de sécurité entre les différents marchés d’Euronext Paris n’est peut-être pas assez significative pour expliquer la réaction du marché observée. Une autre explication possible de ce résultat peut venir du fait que le nombre de titres qui ont transféré entre deux marchés réglementés est très faible dans notre échantillon total. Ce chiffre est seulement 10 titres (environ 14% des transferts), il est certainement statistiquement moins élevé pour créer une différence de réaction.

Effet de la reforme d’Euronext

La reforme d’Euronext en 2005 a permis la création d’un marché unique regroupant tous les titres qui étaient sur les marchés réglementés (NM, SM et PM) de la Bourse de Paris. Un nouveau marché, Alternext, a également été créé pour permettre aux petites et moyennes

entreprises dynamiques d’avoir accès à un marché organisé et réglementé109.

Nous pensons que cette reforme pourrait affecter la réaction du marché lors d’un transfert de marché de cotation, car la reforme a apporté beaucoup d’amélioration dans la qualité, la transparence et la liquidité des marchés.

En créant une variable divisant notre échantillon en deux groupes (transfert réalisé avant et après la reforme), nous avons vérifié par la régression si la réaction du marché était différente avant et après reforme. Les résultats montrent une relation significative entre la réaction du marché et la réforme de 2005. La réaction du marché est plus favorable pour les opérations de transfert réalisées après la réforme d’Euronext de 2005 (création d’Eurolist et d’Alternext) qu’avant la reforme. Ceci est peut-être dû au fait que la reforme a amélioré la qualité des marchés organisés et réglementés (Alternext et Eurolist) et a changé la perception des agents sur la différence de qualité entre les marchés.

Anticipation du transfert et réaction du marché

Si les marchés sont considérés comme efficients, l’anticipation du transfert d’une entreprise par le marché devrait se traduire par une réaction nulle ou du moins faible à l’annonce. Les intervenants sur les marchés sont censés avoir intégré cette information dans leur stratégie. Selon cette hypothèse, la réaction du marché à l’annonce du transfert de ces sociétés ne devrait pas être très élevée comparativement à celle des entreprises dont le transfert n’aurait pas été anticipé. En outre, si le transfert a été anticipé par le marché, une étude d’événement centrée autour de la date d’annonce officielle (obtention du visa de l’AMF dans notre cas) ne permettrait pas de détecter les conséquences de ce transfert.

Pour tester donc cette hypothèse nous analysons, à travers une régression linéaire, si la probabilité de transfert calculée ex ante peut affecter le niveau des RAMC ex post. Ce sont les probabilités de transfert estimées dans le chapitre 4 qui sont utilisées dans ce test. Pour cause de données manquantes, la probabilité de transfert n’a pu être estimée que pour 31 entreprises sur les 71 de notre échantillon total.

Le résultat de la régression met en évidence une relation négative, mais statistiquement non significative entre la probabilité de transfert et les différentes RAMC. Il ne permet donc pas d’affirmer que le marché réagit moins fortement à l’annonce du transfert des entreprises qui ont forte probabilité de transférer qu’à celle présentant une faible probabilité de transfert.

109

- Résultats des régressions multivariées

Dans la première étape de notre série de tests complémentaires sur les déterminants de la réaction du marché à court terme, nous avons analysé les effets séparément. Dans cette sous-section, ces effets sont examinés simultanément. L’échantillon utilisé dans nos régressions est l’échantillon total.

Le tableau 5-5 ci-dessous récapitule les résultats de ces différentes régressions. A cause de nombreuses données manquantes de la variable PROBA, nous avons effectué deux séries de plusieurs régressions multivariées. Dans la première série nous n’incorporons pas parmi les variables explicatives la variable PROBA. Cette variable est intégrée dans les régressions de la deuxième série. Les résultats de nos régressions mettent en évidence que nos différentes variables explicatives ne sont pas significatives pour expliquer les RAMC estimées sur les cinq et dix premiers jours après l’annonce. Par contre, elles semblent plus pertinentes pour expliquer les RAMC calculées sur deux premiers jours.

Globalement, la taille, le fait de vendre des actions lors du transfert et la possibilité d’anticiper le transfert semblent affecter négativement les RAMC. Le marché accueille plus favorablement l’annonce du transfert des entreprises appartenant aux secteurs de la technologie et de la finance ou transférées d’un marché moins réglementé vers un plus réglementé. De même, les transferts réalisés après la reforme de 2005 sont accueillis par le marché plus favorablement que ceux faits avant cette reforme.

Ces résultats sont globalement conformes aux résultats trouvés dans nos analyses univariées. Il faut cependant noter le niveau très faible de nos RK, ce qui réduit la pertinence de nos résultats. Les éléments avancés n’arrivent pas à expliquer complètement le fléchissement des RAMC. Dans la section qui suit, nous allons, dans un premier temps, examiner la performance à long terme des titres transférés afin de vérifier si ce déclin constaté à court terme n’est pas simplement temporaire ; et dans un second temps, essayer de trouver des explications possibles à la réaction du marché.