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Assurances Européennes Générales

Lorsque, fin août 2007, Pascal Guerrier prend ses fonctions de directeur Nord des Assurances Européennes Générales (AEG), il découvre une situation mana-gériale plus délicate que celle initialement prévue. Son prédécesseur, Jean-Robert Flavier, figure historique de l’entreprise, a quitté les AEG il y a trois mois pour intégrer le comité de direction d’une société financière concurrente, au grand désarroi de ses quatorze Inspecteurs Régionaux (IR) et de la centaine de collaborateurs œuvrant sur la moitié nord du territoire. Lors de ses premiers échanges électroniques et téléphoniques avec les IR, Pascal ressent très vite un malaise. Jean-Robert était manifestement un leader très charismatique, porteur d’une image forte, alors que lui-même n’est encore, aux yeux des cadres de France Nord, qu’un jeune manager, issu du sérail des grandes écoles, et peu familier du terrain. En termes de personnalité, Jean-Robert est de même un per-sonnage haut en couleurs, chaleureux et enthousiaste, volontiers provocateur et bourru. Pascal quant à lui présente plutôt un profil d’une compétence pointue mais réservée, et un style relationnel pondéré, fait d’écoute et d’analyse. À cette différence de personnalité viennent s’ajouter deux éléments préoccupants.

Le premier, d’ordre conjoncturel, tient dans le retournement annoncé d’une par-tie de l’activité épargne-retraite, sous les coups d’une concurrence de plus en plus agressive des autres compagnies d’assurance. Le second élément, d’ordre managérial est lié à diverses promesses – augmentations, promotions, temps libre supplémentaire – faites par Jean-Robert à ses meilleurs IR afin de les

« stimuler ». Or, une première approche de ces « promesses » semble montrer que la plupart d’entre elles ne pourront être tenues par l’entreprise. Jean-Robert a sans doute parlé trop vite, désireux de laisser après son départ l’image d’un

« patron » ayant fait se dépasser celles et ceux qu’on lui avait confiés… Pascal Guerrier est à présent conscient du caractère précaire de sa position managé-riale, face à une équipe orpheline de leader, en attente de signes de reconnais-sances impossibles à fournir et éclatée géographiquement sur quatorze régions.

Il décide donc, dès la mi-septembre, de proposer pour la deuxième semaine d’octobre la tenue d’un « séminaire stratégique » où se retrouveront tous les managers régionaux ainsi que certains cadres du siège représentants de servi-ces fonctionnels importants pour l’activité commerciale (RH, systèmes d’informa-tion, etc.). Afin de préparer ce séminaire, Pascal annonce son intention de

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visiter en personne les quatorze inspections régionales avant le séminaire, afin de rencontrer l’ensemble des inspecteurs régionaux et faire un point avec eux sur les priorités d’action. S’il est parfois intimidé devant des groupes importants, Pascal est tout à fait à l’aise dans la relation de face-à-face. Épaulé par une assistante efficace, il met son projet à exécution et seules deux inspections déclarent finalement ne pas pouvoir le recevoir avant la mi-novembre. À l’occa-sion de ses douze visites, Pascal noue des liens personnalisés avec chaque ins-pecteur régional, recueillant des idées, mesurant les écarts de performance et percevant peu à peu une image relativisée du « charisme » de Jean-Robert, que d’aucuns lui présentent désormais comme un grand professionnel certes, mais très autoritaire et manipulateur… Pascal en profite pour aborder en tête-à-tête le problème des « promesses intenables ». Cette nouvelle n’enchante pas les inté-ressés, mais la plupart se disent d’accord pour en reparler dans quelques semaines. Au bout de vingt jours, après douze visites, Pascal a pu créer une vraie relation de coopération avec huit IR, trois étant restés cordiaux mais plus réservés à son égard et un seul se braquant encore sur une position hostile. Il a de même à présent une vision très claire des points forts du réseau ainsi que des points de progrès et des projets de développements à mettre en œuvre. Il utilise désormais cette toute nouvelle compétence pour rassurer ses interlocu-teurs, tant en région qu’au siège, apparaissant comme un manager jeune, cer-tes, mais doté d’une écoute et d’un sens de la synthèse dont manquait parfois son prédécesseur. Lors du séminaire, mi-octobre, l’ensemble des IR se retrouvent en réunion avec Pascal, qui les connaît presque tous à présent. De par la qua-lité de relation créée lors de ses visites préparatoires et la cohérence des infor-mations recueillies, le diagnostic commercial de France Nord est réalisé en une journée par les IR et présenté le soir même au directeur commercial France du réseau, qui félicite collectivement l’équipe pour son travail. Le lendemain, Pas-cal propose la création de trois groupes transversaux IR / cadres du siège :

« action commerciale », « relation client » et « management France Nord ».

Chaque groupe travaillera à sa convenance, soit par télé-réunion soit par échanges sur l’Intranet, afin de lui proposer des éléments concrets d’améliora-tion sur ces trois thèmes avant les fêtes de fin d’année. À la fin du séminaire, les deux IR n’ayant pu recevoir Pascal lors de sa tournée préparatoire viennent lui demander s’il serait possible de fixer rapidement une date pour sa visite chez eux. Pascal leur confirme que c’est une excellente idée…

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C

E QU

IL FAUT RETENIR

Est leader celui qui est perçu comme tel par un groupe ; le leader, c’est celui ou celle que l’on a décidé de suivre.

Une équipe, c’est un groupe formalisé, une intuition d’appartenance et des talents complémentaires en vue de la réalisation d’un objectif.

La force d’un leader tient dans la perception qu’ont les équipiers de sa capacité à les aider à affronter une situation donnée.

Le rôle essentiel du leader est de développer la croyances du groupe en sa capa-cité à affronter efficacement les enjeux liés au contexte.

Une équipe est une entité vivante, qui passe du stade de la collection d’individus au groupe structuré puis à l’équipe synergique, dotée d’une identité et de modes de raisonnement et de décision communs.

Avoir confiance en son leader, c’est partager la conviction que ses comporte-ments demeureront cohérents, tant dans la relation avec l’équipe que dans la progression vers le but.

Pour l’équipe, le lien de confiance se construit à travers la compétence, la convic-tion, la fiabilité relationnelle et la force de position du leader dans son environ-nement.

Mobiliser une équipe, c’est mettre en cohérence les comportements de ses mem-bres à partir d’un but commun et autour de modalités d’action partagées.

Pour le leader, mobiliser consiste à élaborer l’architecture de performance qui permet aux membres de l’équipe de mettre en cohérence leurs attitudes et com-portements vers le but commun.

Agir en leader, c’est en toutes circonstances porter son attention sur deux dimensions : la conception du but et de l’action à mener pour l’atteindre ainsi que la mobilisation des acteurs sur ce but et leur capacité à l’atteindre ensemble.

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B

IBLIOGRAPHIE DE RÉFÉRENCE

Olivier BASSO, « Faire émerger les leaders : théorie et pratique », in Sociétal, n° 40, 2003.

Myriam BARNI, Manager une équipe à distance, Éditions d’Organisation, 2003.

Frank BOURNOIS et al. (dir.) , Comités exécutifs. Voyage au cœur de la dirigeance, Éditions d’Organisation, 2006.

Richard BOYATZIS, Les nouveaux défis du leadership, Village Mondial, 2006.

Jim COLLINS, De la performance à l’excellence, Village Mondial, 2006.

Olivier DEVILLARD, La dynamique des équipes, Éditions d’Organisation, 2003.

Alain DULUC, Leadership et confiance, éd. Dunod, 1999.

Bernard GALAMBAUD, L’initiative contrôlée ou le nouvel art du manager, EME, 1988.

Charles HANDY, « Pas d’organisation virtuelle sans confiance », in L’Expansion Management Review, n° 80, mars 1996.

HARVARD BUSINESS REVIEW, Le leadership, Éditions d’Organisation, 2000.

HARVARD BUSINESS REVIEW, Styles de leaders, Éditions d’Organisation, 2002.

Daniel HERVOUET, Mener des hommes pour la première fois, Éditions d’Organisation, 2005.

Edwin HOLLANDER, Leadership Dynamics, The Free Press, NYC, 1978.

Henri-Pierre MADERS, Manager une équipe projet, Éditions d’organisation, 2002.

Michel PETIT, A. KLESTA, H. ORMANDO, Management d’équipe, concepts et pratiques, éd.

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Bernard RADON, Guide du leadership, Dunod, 2007.

Stephen ROBBINS, David DE CENZO, Philippe GABILLIET, Management. L’essentiel des concepts et des pratiques, éd. Village Mondial, 2008.

STRATÉGIE

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Les fondamentaux

Par FRÉDÉRIC FRÉRY

S

TRATÉGIE

La stratégie d’entreprise est une allocation cohérente de ressources (financières, humaines, technologiques, physiques, etc.) qui engage durablement l’entreprise.

Elle consiste schématiquement à répondre à trois questions fondamentales :

Quel modèle de création de valeur déployer afin de générer un profit durable (quel est le modèle économique) ?

Comment éviter l’imitation de ce modèle de création de valeur par les concur-rents (quel est l’avantage concurrentiel) ?

Sur quel périmètre déployer ce modèle de création de valeur (choix de l’indus-trie, de la filière, des marchés, des produits et services) ?

Ce triptyque Valeur / Imitation / Périmètre (ou « modèle VIP ») résume les ques-tions essentielles que doit résoudre le stratège.

La stratégie n’est pas nécessairement délibérée : les choix d’allocation de ressources peuvent parfois résulter d’une succession de décisions opérationnelles. On parle alors de stratégie émergente, dont la logique n’est perceptible qu’a posteriori.