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Autres aspects du rite

Islam Théologie et philosophie

II. Les éléments du rituel

II.3. Autres aspects du rite

Nous nous sommes intéressés dans cette catégorie seulement aux rites qui font appel à une célébration collective et qui exigent la participation d’un nombre relativement élevé de personnes. Les rites les plus connues en Algérie sont les Waadas, Zerdas et Nechras et nous pouvons déjà établir entre elles trois niveaux de différences :

- Au niveau de l’aire d’expression, puisque les waadas et les Nechras ont surtout cours dans les grandes agglomérations urbaines-Waadas dans l’algérois et Nechras dans le constantinois –cependant que les Zerdas spécifient les campagnes.

- Au niveau de l’utilisation, les premières poursuivant une finalité immédiate (guérison, prospérité…) les secondes obéissant à une demande plus expressément religieuse. - Au niveau de leur fonctionnement, puisque les moyens mis en œuvre dans les villes

font dans l’ostentation, alors que dans les campagnes ils perpétuent la règle de la simplicité traditionnelle.

30 A.Bell « l’Islam mystique »in Revue Africaine, Vol. 69, Op.cit, P109.

31 A.Bell « l’Islam mystique »in Revue Africaine, Vol .69, Op.cit, P110.

32 Terme employé entre autres par Chambert H –Guillot Loire et Claude, « Le culte des saints dans le monde musulmans », Edition École française d’extrême orient, Paris 1995, P107.

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II.3.1. L’ Waadas : Une promesse au divin

Dans l’étymologie arabe le mot Waada vient du verbe Wa’aada qui signifie « promettre quelque chose, s’engager à quelque chose ».Dans les usages musulmans, il est habituel qu’un bon croyant s’engage solennellement auprès du créateur à l’accomplissement d’une waada si l’un de ces vœux venait à être exaucé.

Par translation lorsque Le fidèle sollicite les faveurs du saint il est amené à faire des

offrandes qui varient selon l’importance du saint et les moyens du solliciteur. C’est le procédé courant pour concilier ses bonnes grâces et obtenir une faveur spéciale. Il est cependant important de souligner que si cette offrande s’accompagne du sacrifice d’un animal, celle-ci est exclusivement destinée à Dieu33.

Dans la pratique algéroise les waadas prennent un caractère de véritables liturgies patronnées par des familles aisées, ce qui n’exclut pas la participation des gens de souche modestes qui ont sont bien souvent les véritables consommateurs.

Noureddine Toualbi34 qualifiera la wadaa algéroise de rite résolument hétérodoxe, une reproduction d’un paganisme antique, car en dépit de l’invocation d’Allah, elle fait appel à un ordre cosmique peuplé de forces surnaturels auxquels on va s’adresser dans une perspective de pratiques existentielles dans le but de guérir, s’assurer un sucées, une prospérité…etc. Elle durera plusieurs jours et s’échelonnera ente les sacrifices, les repas communiels et conduit même à des manifestations de transes et de possessions.

II.3.2. La Nechra : l’expulsion du mal.

Selon Émile Dermenghem La nechra est le sacrifice proprement dit d’expulsion du mal. Le mot vient de la racine nachara qui veut dire étendre, déployer, disperser, répandre, divulguer, revivifier, éloigner la maladie ou l’enchantement.

La fonction d’une nechra est en principe, exclusivement médico-magique .Elle est destinée à la guérison des maladies mais dans la pratique, cette fonction n’est pas limitative puisque l’efficacité d’une nechra s’étend aussi à la prophylaxie magique : elle est appelée a combattre le mauvais œil, lever les sortilèges ou tout simplement assurer le succès35.

La nechra est donc pour ces raisons une pratique qui dans l’imaginaire collectif, précipite le bonheur en neutralisant les forces hostiles du cosmos.

33Noureddine Toualbi « Religions, rites et mutations », Entreprise Nationale du Livre, Alger, 1984, P114.

34Noureddine Toualbi « Religions, rites et mutations », Op.cit, P115.

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Au Maghreb la nechra serait le sacrifice d’une poule36, ou d’un coq, d’un bouc ou d’une chèvre, on peut dire aussi « donner la nechra » pour une offrande en argent à des fins analogue. Sans qu’il faille en faire une règle générale, c’est plutôt semble-il dans le Tell que ces sacrifices sont particulièrement nombreux et que le mot nechra est étendu à tout sacrifice de volaille à des sanctuaires. Ces sanctuaires sans ceux dont le saint est vénéré comme une âme humaine qui continue à vivre mystiquement et commande aux forces surnaturelles que sont les génies37 La plupart de ces sanctuaires se retrouvent associé à une source d’eau. Ainsi deux profils d’espace cosmique, l’eau et la sainteté, sont-ils jumelés pour donner lieu à un point cosmique complexe dans l’étendue de la nature.38Nous pourrons citer pour Constantine et sa région Sidi Merzoug (coqs noirs),Lalla Fridja, Sidi Mimoun (coqs rouges),sidi Mohamed el Ghorab, Ain el Ghaba ,En Tunisie, Sidi el Garsie de Takouna.

II.3.3. La zerda : Un pèlerinage festif.

Terme berbère, il est employé pour distinguer l’action spécifique du festoiement qui suit un événement heureux : naissance, réussite professionnelle, guérison après une longue maladie…Quoique n’ayant pas son juste équivalent arabe, on substituera parfois au terme

zerda celui de waada, mais entre les deux actions les différences au niveau culturel sont fort

importantes. Une zerda prend toujours valeur religieuse car elle et invariablement conçue en l’honneur d’un wali. En outre, elle met en acte trois motivations différentes, encore que complémentaires :

- Elle est d’abord comme el waada signe de reconnaissance quand elle sanctionne la réalisation d’un projet .Dans ce cas la zerda acquitte la personne d’une dette religieuse contractée auprès du saint vénéré.

- Elle conclut un pèlerinage rituel dédiée à un wali, en parlera alors de Moussem célébrées généralement le jour de la naissance ou de la mort du saint. Ce jour-là des foules de centaines voire des milliers de fidèles pour les grands saints, se pressent dans les sanctuaires édifiés autour de leurs tombes. Ce culte qui est fait habituellement suite à une transmission héréditaire à travers les générations, renouvelle régulièrement la part de baraka dont chacun des membres du groupe pèlerin se croit détenteur.

36 On n’emploie pas ce mot pour le mouton, victime abrahamique ni pour les bovidés et les chameaux. Il s’agit au fond d’une victime offerte aux forces surnaturelles Jnouns, considérés comme la source occulte du mal ou à un saint qui commande à ses forces. Émile Dermenghem « Le culte des saints dans l’Islam maghrébin », op.cit, p 157.

37 Émile Dermenghem « Le culte des saints dans l’Islam maghrébin »Edition Gallimard, Paris 1954, P159

38 Siham Bastandji « Le rite citadin de la Nechra à Constantine: Une Dimension thérapeutique et ludique, un tourisme

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- Elle revêt également un caractère ludique, un repas en commun a lieu et les visiteurs étrangers seront conviés. Revêtir des vêtements neufs ou propres, se livrer à des réjouissances diverses (jeu de la poudre Baroud, a chevaux ou à pied, danses diverses, etc.) constituent des rites de passages ou des manifestations de joie qui l’accompagne assez souvent.

Tout comme les noces, la zerda est un moment de permission provisoire. L’élimination des barrières conventionnelles crée un certain type de communication impossible en temps ordinaire.

Il s’agit en fait d’une association, pour ne pas dire alliance, de deux registres ; la fête populaire et la cérémonie religieuse. Elle est le lieu où sacré et profane se côtoient.

Figure 3 : Schéma récapitulatif des rites de la zaouïa. Les Rites de la zaouïa

Les Rites confrériques Culte des saints

Ziara Oudaa Zerda Hadra Rites initiatiques Nechra Rites de passage

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