Licence Cinéma, Université Paris 8
Créée en 1969, l’Université de Paris 8 Vincennes a mis en place une forme d’enseignement qui privilégie « la démocratisation de l’accès au savoir et de production de connaissances ancrés dans les enjeux du monde contemporain ». Le cursus cinéma de l’Université Paris 8 a été créé en 1984. Ce qui caractérise cette université, de façon commune à toutes leurs disciplines « de la licence au doctorat, est d’articuler étroitement création, formation et recherche290 ».
Cette formation dispense un enseignement articulant à la fois théorie et pratique des arts et, au sein de la théorie, à la fois approche esthétique et approche historique. Elle permet l’acquisition d’une culture générale, théorique et pratique, du cinéma et de l’audiovisuel (initiation à la recherche universitaire et à ses méthodes / connaissance générale, théorique et pratique, des processus de production, d’analyse, de création, de réalisation et de diffusion / expériences préprofessionnelles sous forme de stages).
Durant les trois années du cursus Licence (750 étudiants sur l’ensemble du cursus licence), les étudiants suivent un cours de méthodologie de la recherche. Ce cours aborde tout d’abord la question de ce qu’est la recherche, avec une approche des lieux de recherche comme la bibliothèque, puis concerne ensuite un parcours dans les archives cinématographiques, une connaissance de différents lieux de partenariats, etc. Des travaux permettent aux étudiants de mettre en œuvre les éléments de ce cours durant ce cursus.
Ateliers d’écriture de scenarii : Après une analyse de projets, un travail de réflexion sur ce qu’est un scénario, les
étudiants ont à écrire un projet de scénario original.
Projet d’exposition : En Licence 1 – auparavant en Licence 2 – les étudiants ont à préparer un projet d’exposition
sur le cinéaste à l’étude. L’exemple cité concernait Pialat. Le projet nécessite que les étudiants effectuent une recherche documentaire, bibliographique et filmographique, à partir de laquelle ils construisent le projet d’exposition en effectuant leurs choix et en les argumentant.
Film autobiographique. En Licence 3, les étudiants ont un cours sur le film autobiographique. Ce cours est validé
par la réalisation artistique d’un film autobiographique que chaque étudiant doit présenter : il est libre d’en choisir la forme, le mode d’expression, etc.
Dossier documentaire. Plusieurs travaux ont été mentionnés, mais l’exemple que je présente concerne le cours de
culture en histoire du cinéma. Les étudiants ont un dossier d’une dizaine de pages à réaliser, travail élaboré qui comporte, en étape préalable, la rédaction d’une note d’intention qui présente méthode, problématisation et théorisation.
Mémoire de licence 3 : Ce mémoire de fin d’étude compte un minimum de 30 pages. Il permet la validation de la
licence, mais est pris en compte pour l’accès au master. Il est accompagné par un docteur, enseignant sans poste, mais est validé par un enseignant titulaire.
École d’art de Rennes
La formation dans les écoles d’art est très spécifique en ce que, dès la première année il n’y a que des travaux personnels. Ce qui est demandé aux étudiants est une originalité, un regard personnel sur les éléments que sont les volumes, la couleur, etc. Et cela, pour l’école de Rennes, est présent dès le concours d’entrée, où le jury recherche quelle est la part personnelle de l’étudiant dans les
travaux demandés. Ainsi, tout travail de dessin est évalué selon le critère de l’originalité, et non seulement de la qualité de reproductibilité du modèle. Si c’est un travail de copie, ce qui sera intéressant sera l’originalité qui s’en dégage, ce que l’étudiant a retiré de son observation attentive du tableau copié, son regard personnel. Il s’agira donc d’une création originale. Les étudiants sont ainsi considérés « en recherche » dès la première année : éducation par l’expérience artistique, éducation au regard. Les travaux « techniques » n’existent pas en tant que cours, mais en tant que ressources pour la réalisation des projets, les ateliers fournissant ainsi des apports techniques ou technologiques qui sont aussitôt contextualisés dans des projets.
Les cours qui concernent l’histoire de l’art, l’histoire des civilisations, ceux qui jettent un regard sur l’art du passé, donnent eux-mêmes lieu à des travaux de recherche.
Les étudiants ont des « exposés » à faire, présentations d’œuvres ou de questions artistiques qui les intéressent. Ils décident de leur sujet, à partir d’une liste proposée par l’enseignant ou à leur propre choix. Ils doivent mener une recherche, une enquête par des lectures ou des rencontres, et présenter ce travail, l’expliquer. Ce qui compte là aussi c’est leur regard original et leur réflexion critique : qu’est-‐ce qui les a intéressés, ou si cela ne les a pas intéressés, ils doivent dire pourquoi, faire des commentaires d’œuvres certes très personnels, mais par un regard critique fondé.
Faculté des Arts, Université de Melbourne
La Faculté des arts de l’Université de Melbourne comprend deux institutions : le Conservatoire de musique de Melbourne et le Victorian College of Arts (VCA), institut qui réunit théâtre, danse, musique contemporaine, film d’animation, film et télévision, comédie musicale, production, écriture de scénarios (Screenwriting), arts visuels. Cette Faculté des Arts fait partie de l’Université de Melbourne, réputée être la première université d’Australie291. Le dispositif qui a particulièrement
retenu mon attention est mis en œuvre par le Victorian College of Arts. Il est développé au premier semestre des études, et concerne tous les étudiants de première année, à l’exception des étudiants en arts visuels. Cela représentait en 2013-2014 un ensemble de 105 étudiants.
« Concept and creativity » : L’objectif principal du cours est d’amener les étudiants, dès le premier semestre de
leurs études, à conduire une réflexion sur la nature de ce que signifie pour eux ce que c’est qu’une pratique artistique, en soi mais surtout pour ce qui les concerne directement. Ainsi sont interrogées les représentations qu’ils en ont en ce tout début de leur cursus. Le cours comprend une alternance de séances pour toute la promotion et d’ateliers en sous-‐groupes interdisciplinaires d’une vingtaine d’étudiants. Les séances permettent à des intervenants de présenter un sujet ou de soulever des aspects de cette question de la nature de la pratique artistique. Les ateliers sont conduits par les tuteurs. Ils permettent d’une part aux étudiants d’approfondir ce qui leur a été communiqué lors des séances en grand groupe ; d’autre part, les ateliers sont le lieu pour les tuteurs de lancer les deux projets que les étudiants ont à réaliser en parallèle (voir ci-‐dessous). A la fin du cours, l’étudiant doit écrire un memento par lequel il exprime quelles sont ses intentions sur son chemin artistique personnel, quels types de travaux il voudrait mener, enfin estimer ce qui le pousse à avancer, c’est-‐à-‐dire exprimer comment il se voit en tant qu’artiste. Pour les tuteurs, ce memento n’a aucun caractère programmatique, encore moins performatif : c’est une photo de l’instant, que l’étudiant conserve, et qui pourra, à l’occasion, lui permettre de faire un retour réflexif sur son parcours. L’objectif de ce dernier travail est que l’étudiant se sente libre d’aller vers ce qui lui tient à cœur : « there is no wrong artist »292 ! Ce dernier travail doit être réalisé, mais il n’est pas évalué.
291 Selon le classement de Shanghai 2014
292 La transcription littérale est impossible. Le sens est qu’il n’y a pas de voie ou d’expression artistique choisie par un
Les deux projets sont :
1/ La création d’un Pecha Kucha293. Cette forme minimaliste nécessite un travail de recherche sur le sujet choisi et la façon dont on veut le communiquer par ces vingt images et le discours qui peut les accompagner. La forme artistique est libre, la seule contrainte est le nombre d’images et la durée de la présentation. Par groupes interdisciplinaires de 4 étudiants environ, ils ont à déterminer un sujet, concevoir leur projet, le soumettre, et le réaliser. La présentation se fait devant toute la promotion, et un bilan réflexif est fait dans l’atelier suivant.
2/ Une étude individuelle sur un artiste qui intéresse l’étudiant ou sur une œuvre d’art qui le touche, qu’il aura découvert dans un des lieux d’exposition de la ville ou ailleurs. L’étudiant est encouragé à aller développer son analyse en profondeur et il est accompagné dans ce sens. Un écrit de 1.000 mots est à remettre.
Outre l’intérêt que présente l’objectif premier de ce cours, d’autres intérêts en découlent : travail collectif, interdisciplinaire, mise en réflexion dès ce stade d’études, et création de liens entre tous les étudiants de la promotion. On retrouve là ce qui était une des caractéristiques du projet du Royal Conservatoire of Scotland. Une des « difficultés » de ce cours est la diversité des publics qui va de très jeunes danseurs (généralement moins de 18 ans au départ de leurs études) et d’autres étudiants beaucoup plus avancés en maturité comme ceux en théâtre. Mais le travail en sous-groupes et la conduite du projet collectif permettent une circulation productive de la parole et que la diversité des points de vue ainsi s’exprime, faisant de cette difficulté initiale une richesse. Enfin il est important de bien comprendre qu’aucun des étudiants concernés par ce cours n’appartient à ce domaine des arts visuels. Il s’agit donc là d’une décentration importante par rapport à leur discipline. C’est cette décentration qui permettra à l’étudiant, en fin du cours de jeter un regard nouveau sur sa propre conception de l’artiste, c’est du moins ce qui en est attendu.