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3.2 Paramétrisation de la couche limite convective

3.2.1 Approche classique : La diffusion turbulente

La première approche, appelée approche en K-diffusion, s’est développée par analogie avec la conduc- tion moléculaire. Pour résoudre les équations d’évolution de la température potentielle, de l’humidité et du vent, le flux vertical d’une de ces quantités,ψ, s’exprime en fonction du gradient vertical de ψ et d’un

coefficient de diffusionK selon :

w′ψ

= −K∂ψ∂z (3.10)

oùK est en m2 s1

et vaut typiquement entre 1 et 10. Le coefficient K est positif, ce qui signifie que

le flux est toujours opposé au gradient local. Il peut avoir une valeur différente suivant la variable ψ

considérée. Comment déterminer ce coefficient de diffusionK ?

Les fermetures d’ordre 0 et les relations de similitude

Une première approche consiste à n’utiliser aucune équation pronostique, mais à trouver des formu- lations empiriques pour exprimer chaleur, humidité et vent dans la couche limite, ou leur gradient, voire leur flux et leur variance. L’existence de ces relations empiriques est suggérée par de nombreuses obser- vations de la couche limite dont les caractéristiques sont fréquemment similaires. Ainsi pour une situation donnée, les relations de similitude s’établissent en trois temps : (i) sélectionner un certain nombre de va- riables pertinentes pour caractériser l’écoulement, (ii) combiner ces variables pour obtenir un nombre plus petit de variables sans dimension, (iii) trouver une relation empirique entre ces différentes variables adimensionnées à partir d’expérimentations. Si ces relations se vérifient sur quelques cas observés, alors on suppose qu’elle sont vérifiées de façon universelle pour toutes les situations proches de celle de

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CHAPITRE 3. LA COUCHE LIMITE ATMOSPHÉRIQUE CONVECTIVE ET SA PARAMÉTRISATION DANS LES GCMS : LE MODÈLE DU THERMIQUE NUAGEUX l’expérience. Par exemple, les échelles pertinentes auxquelles associer chaleur, humidité et vent dans la couche de surface sontL, u∗

,θ∗SLetq∗SL, alors que celles dans la couche mélangée sontzi,w ∗

,θ∗M L

etq∗M L, comme présenté dans la première partie de ce chapitre. Les relations de similitude diffèrent

donc pour les couches limites stable, neutre et instable, mais aussi pour la couche de surface et pour la couche mélangée. De nombreuses études ont été consacrées à l’établissement de relations de similitude, surtout dans la couche de surface, où les mesures sont plus faciles à effectuer et où la turbulence domine (Businger et al., 1971). Bien que moins physiquement fondées, il est possible d’établir des relations de similitude pour le coefficient de diffusionK au-dessus de la couche de surface. Par exemple, Holtslag et

Boville (1993) utilisent :

K = κwtz(1 −

z h)

2 (3.11)

oùκ est la constante de Von Karman, h la hauteur de la couche limite, et wtune vitesse caractéristique

proportionnelle àw∗

dans les cas instables, et proportionnelle àu∗

dans les cas neutres et stables.

Les fermetures d’ordre 1 et la théorie de la longueur de mélange

Dans les paramétrisations d’ordre 1, le calcul de K se fait par l’intermédiaire de la longueur de mé-

lange, introduite par Prandtl en 1925. La théorie de la longueur de mélange s’applique à des tourbillons plus petits que l’échelle verticale des variations des grandeurs considérées (l << [ψ1∂ψ∂z]−1

). On peut alors supposer qu’à une particule ayant subi un déplacement verticalz′, de l’ordre del, seront associées

les perturbations : ψ′ = −(∂ψ∂z)z′ (3.12) et u′ = −(∂u∂z)z′ (3.13) Si on suppose la turbulence isotrope, w′

est proportionnel àu′ , avecw′ = −u′ si ∂u∂z > 0 et w′ = u′ si ∂u ∂z < 0. Ainsi : w′ = |∂u∂z|z′ (3.14) et le flux de la quantitéψ s’exprime par :

w′ψ

= −z′2

|∂u∂z|(∂ψ∂z) (3.15)

La longueur de mélange l est une mesure de la distance moyenne parcourue par une particule dans le

processus de mélange qui génère le flux (l2= z′2), si bien que le flux deψ devient : w′

ψ′

= −l2|∂u∂z|(∂ψ∂z) (3.16)

Par analogie avec l’équation 3.10, on déduit l’expression du coefficientK : K = l2|∂u

∂z| (3.17)

Dans la couche de surface, la longueur de mélange est souvent définie parl2 = κ2z2mais d’autres défi-

nitions existent.

Les fermetures d’ordre 1 font donc dépendre K du cisaillement, mais pas de la stratification. Pour remé-

FIG. 3.18 – Fonction de distribution P(q) de l’eau sous-maille de moyenneq et de demi-largeur σ.

Les fermetures d’ordre 2 et l’équation pronostique de l’énergie cinétique turbulente

Les paramétrisations basées sur des équations pronostiques des variances se concentrent souvent sur l’évolution de l’énergie cinétique turbulente, qui fournit une information sur l’intensité de la turbulence, p

(e) étant utilisée à la place de w′

dans l’éq. 3.14. L’équation d’évolution de l’énergie cinétique tur- bulente fait intervenir différents termes traduisant les processus physiques qui génèrent, détruisent ou transportent la turbulence. Elle s’écrit :

∂e ∂t = −w ′u′∂u ∂z − w ′v′∂v ∂z + g θv w′θ′ v− ∂w′e′ ∂z − 1 ρ ∂w′p′ ∂z − ǫ (3.18)

les deux premiers termes de droite correspondent à la production de turbulence par cisaillement de vent, maximale en surface et en sommet de couche limite. Le troisième terme de droite est le terme de pro- duction ou destruction de turbulence par flottabilité. Si w′

θ′

v > 0, il y a production de turbulence, ce

qui est généralement le cas dans les2/3 inférieurs d’une couche limite instable. Le quatrième terme est

associé au transport d’énergie cinétique turbulente dans la couche limite, qui s’effectue généralement des basses couches vers le sommet de la couche limite. L’avant-dernier terme correspond à une redistribution de l’énergie par les perturbations de pression et le dernier terme à sa dissipation. En l’absence d’autres forçages, l’énergie turbulente est en effet transférée des structures les plus grosses vers les tourbillons les plus petits où elle se dissipe.

Dans la paramétrisation de la couche limite que nous utiliserons dans notre étude, le coefficient de diffu- sionK est défini selon Yamada (1983) :

Kψ = l

q

(2e)Sψ (3.19)

oùl est la longueur de mélange,p

(2e) l’estimation d’une vitesse typique et Sψune fonction de stabilité

qui s’exprime de façon différente selon la variableψ considérée mais qui dépend uniquement du nombre

de RichardsonRi, qui mesure l’importance relative des forçages mécanique et thermique.

Approche diffusive et nuages

Il n’existe aucune formulation empirique du coefficient de diffusionK dans des cas de couches li-

mites surmontées de stratocumulus ou de cumulus. Plusieurs études ont cependant testé la capacité des paramétrisations en K-diffusion à reproduire des situations nuageuses, en couplant la paramétrisation à un schéma de nuages diagnostique. Un tel schéma se base sur une distribution a-priori de l’eau totale dans la maille afin de déduire l’eau liquide et la fraction nuageuse associées à une valeur moyenne de l’eau totale et de l’humidité à saturation (fig. 3.18). Une grandeur souvent utilisée pour caractériser une distribution est son facteur d’assymétrie (“skewness” en anglais) :Sψ = ψ′3/ψ′23/2.

Ainsi, Bougeault (1985) teste la capacité de l’approche diffusive à reproduire des cas de stratocumulus au-dessus des océans en utilisant des distributions Gamma de l’eau totale et de la température potentielle liquide. Les caractéristiques des distributions sont calculées à partir des moments d’ordre 2 et 3 prédits

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CHAPITRE 3. LA COUCHE LIMITE ATMOSPHÉRIQUE CONVECTIVE ET SA PARAMÉTRISATION DANS LES GCMS : LE MODÈLE DU THERMIQUE NUAGEUX par les équations pronostiques d’un schéma en K-diffusion. Il obtient ainsi une valeur diagnostique de l’eau liquide moyenne dans la maille et de la fraction nuageuse à chaque niveau, qu’il couple ensuite à un schéma radiatif. Il obtient des caractéristiques de la couche limite en assez bon accord avec les obser- vations, sauf pour les profils des champs de vent horizontaux.

Bechtold et al. (1995) étendent ces études à la représentation des cumulus. Ils proposent une méthode per- mettant de représenter à la fois les régimes de stratocumulus et de cumulus, cela en utilisant un schéma diffusif avec une fermeture d’ordre 1.5 pour restreindre le nombre d’équations. Le schéma de nuages proposé se base sur une distribution du déficit à la saturation (Q1 = qt− qs), dont la variance, variable

non pronostique dans un schéma d’ordre 1.5, est paramétrisée en fonction des gradients deqtetθlet de

deux longueurs caractéristiques du mélange turbulent et de la dissipation. La distribution est obtenue par interpolation linéaire de deux cas extrêmes : le cas des cumulus d’alizé caractérisé par une distribution définie par une fonction exponentielle avec une skewness de 2 (Ψexp), et le cas des stratocumulus carac-

térisé par une distribution gausienne (Ψgauss). Ainsi :

P (Q1) =      Ψgauss pourQ1> 0

0.5[−Q1Ψexp+ (2 + Q1)Ψgauss] pour −2 < Q1 < 0

Ψexp pourQ1 < −2