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Annexe : La définition de l’Education à la citoyenneté démocratique du Conseil de l’Europe

Dans le document Citoyenneté et réconciliation au Rwanda (Page 148-152)

D%DUCATION des sites de citoyenneté

5.3.4 Annexe : La définition de l’Education à la citoyenneté démocratique du Conseil de l’Europe

L’Education à la citoyenneté démocratique (ECD) est issue de programmes plus traditionnels comme l’éducation ou l’instruction civiques. L’ECD est une démarche qui privilégie l’expérience individuelle et la recherche de pratiques conçues pour pro-mouvoir le développement de communautés attachées à des relations authentiques. Elle concerne la personne et ses relations avec les autres, la construction d’identités personnelles et collectives, et les conditions du « vivre ensemble », pour ne citer que quelques exemples. Un des buts premiers de l’ECD est de promouvoir une culture de la démocratie et des droits de l’homme, une culture permettant aux individus de mettre en œuvre un projet collectif: la création d’un sens communautaire. Elle entend ainsi renforcer la cohésion sociale, l’entente et la solidarité. En tant que projet édu-catif, l’ECD vise toutes les personnes, indépendamment de leur âge ou de leur rôle dans la société. Elle dépasse le cadre scolaire, son premier cadre d’application. L’ECD est un processus d’apprentissage tout au long de la vie qui poursuit les buts suivants: participation, partenariat, cohésion sociale, accès, équité, responsabilité, et solida-rité. L’ECD est donc un ensemble de pratiques et d’activités développées à partir de la base, qui cherche à aider les élèves, les jeunes et les adultes à participer activement et de manière responsable à la prise de décisions dans leurs communautés. La parti-cipation est la clé de la promotion et du renforcement d’une culture démocratique fondée sur la conscience de valeurs fondamentales communes, telles que les droits

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de l’homme et les libertés, l’égalité dans la différence et la primauté du droit. Elle s’at-tache à offrir tout au long de la vie des possibilités d’acquérir, d’appliquer et de diffuser des connaissances, des valeurs et des compétences liées aux principes et procédures démocratiques dans de multiples cadres d’enseignement et d’apprentissage formels et informels.

(O’Shea, 2003)

 ,ÏLABORATION

DE

L’élaboration du programme de formation s’est faite par échange de cour-riers électroniques et a été l’occasion d’échanges assez intensifs entre Genève et Butare. Pour partager des références et des ressources d’une part, pour procéder à des mises au point sur des questions sensibles d’autre part. Du point de vue de notre recherche-action partenariale, cette phase était hautement significative puisque, en nous mettant en position de formaliser conjointement des conte-nus de formation, nous avons eu l’occasion de pointer quelques différences de perspectives qui, à l’issue de nos discussions, n’ont pas révélé de véritables diver-gences mais plutôt des postures différentes face à quelques questions critiques. S’agissant des références adoptées (faut-il le regretter ?), elles n’accusaient pas d’ancrages culturels différenciés : cela était dû peut-être au recours à internet qui constitue pour les chercheurs de Butare une ressource fortement sollicitée. Notons en synthèse quelques points sensibles de nos échanges.

La question du rapport entre citoyenneté, conscience morale et morale reli-gieuse a fait l’objet d’un débat entre nous à propos d’un curriculum de prépara-tion au module « Partager des convicprépara-tions et respecter celles des autres ». Ce travail de préparation mettait très opportunément l’accent sur l’intégrité morale et la tolérance entre religions et croyances ; il contenait également quelques postulats qui ne faisaient pas l’unanimité entre nous. Une citation de l’ancien président du Kenya Jomo Kenyatta rapportée dans le curriculum en question était au centre du débat. Kenyatta y présentait l’Eglise comme la conscience morale de la Nation 27.

27 « The church represents the “moral conscience of a nation”, and she is expected to spell out what is good or bad, right or wrong, in the public life of a given community. » (Cité par Elly Musafiri dans un document préparatoire).

 CITOYENNETÉ ET RÉCONCILIATION AU RWANDA

Un tel postulat pouvait-il être partagé, était-il compatible avec la notion de liberté de conscience telle qu’elle est affirmée dans la DUDH et reprise par la Constitu-tion rwandaise ? Quelle posture une telle considéraConstitu-tion impliquait-elle vis-à-vis d’autres croyances : l’islam, l’animisme, l’athéisme ? Mais surtout comment pou-vions-nous, dans cette formation, aborder ce que l’on peut considérer comme la faillite morale de l’Eglise pendant le génocide, une faillite qu’elle récuse ? Dans le cadre de cette formation, une posture non polémique s’imposait, mais une posture néanmoins réflexive et critique, ouverte aux sentiments des participants.

Nous avons eu un échange à propos du module « S’exprimer en public ». Il s’agissait de se mettre d’accord sur l’intention de ce module fortement lié à la fonction d’espace public démocratique que remplissent les dialogues menés au sein des associations. Notre manière de conceptualiser la question de la parole publique était peut-être à la fois en accord avec les pratiques de nos partenaires, qui pratiquent l’« éthique de la discussion » comme M. Jourdain fait de la prose et, en même temps, elle mettait l’accent sur les enjeux d’une expression personnelle et authentique, ainsi que sur l’importance de la pluriperspectivité qui s’exerce dans une assemblée publique, à la fois comme méthode et comme valeur.

Sur la question de la mémoire et de la réconciliation, nous nous sommes demandé dans quelle mesure il était possible de problématiser ces deux notions ; de tenir compte du fait que s’agissant de la vérité historique, de la possibilité d’un récit fédérateur, il y avait un débat ouvert. S’agissant d’une politique et d’une pratique personnelle et sociale de la réconciliation, il y avait lieu de mettre en évidence, là aussi, la place laissée à la créativité politique et à la pluralité des expé-riences. Pour autant, dans un contexte international qui est le lieu d’une véritable guerre idéologique autour du Rwanda et des conflits dans les Grands Lacs, face aux différentes facettes d’un « négationnisme ordinaire » présent dans la société, il importait d’assumer un discours ferme, porteur de la meilleure vérité possible. La contribution de ce module allait du reste se révéler décisive, puisque il était por-teur d’une clarté très attendue et restait en même temps ouvert à la complexité.

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Au terme de nos débats, un plan d’enseignement a été établi pour chacun des modules. L’ensemble de ces plans de modules constituait ainsi la première

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définition développée du contenu de notre formation ainsi qu’une somme de matériel didactique à l’intention des participants. Des chercheurs et enseignants du CCM ont été sollicités pour mettre sur pied la pédagogie adéquate. On trou-vera en annexe la liste des concepteurs et des enseignants.

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La première édition de la formation a été menée en août et septembre 2010. Dans chaque site deux sessions, respectivement de 3 et de 2 jours, ont été organi-sées. Les participants ont été transportés dans des lieux équipés pour l’enseigne-ment (mobilier, électricité). Les repas étaient organisés pour tous les participants. Du matériel didactique a été laissé à disposition de chaque site. Une rencontre entre sites a été organisée: elle a été l’occasion d’une véritable fête et a créé des liens de solidarité entre les associations. Une coopération s’est instaurée notam-ment entre les étudiants du SCUR et l’association de Karama à partir de cette rencontre. Un film, tourné pendant les sessions, est en voie de montage. Il est destiné à populariser l’expérience et à préparer le terrain pour un prolongement de l’expérience.

 ,ÏVALUATION

Pour évaluer cette première édition, nous nous appuierons sur trois sources : s

mation ;

s28 ;

s29.

De ces éléments, nous pouvons tirer en synthèse des enseignements déci-sifs pour d’éventuelles éditions futures. Ces enseignements sont de trois ordres: des enseignements sur l’adéquation du concept, sur l’expérience pédagogique et sur ce que révèle l’expression des participants quant à leurs préoccupations et interrogations liées au devenir de la société. A travers ce troisième volet, nous

28 Les sources écrites provenant des étudiants dominent ; il convient de mentionner cette disproportion.

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avons voulu lier l’aspect recherche et l’aspect formation de notre action. L’idée d’une co-construction de savoirs était ainsi concrétisée.

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