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Mobiliers et chronologie

ANALYSE À PARTIR DES LAMES MINCES

La description des pâtes met en évidence un premier élément remarquable concernant la proportion et la taille des grains. En effet, certains échantillons présentent une abondance de sables mélangés à l’argile, pouvant atteindre occasionnellement des dimensions plu- ri-millimétriques. À l’inverse, certaines catégories se caractérisent par une faible fréquence des sables ne dépassant jamais la taille du millimètre.

Les céramiques concernées par une forte abondance de grains de grande taille sont plus particulièrement les types PSFINA, PSFINB, MICACB et PSGROS. Notons par ailleurs, que les types PEINTC PEINTC_2 et PEINTC_3 se caractérisent par des sables fins relative- ment fréquents à l’intérieur de la pâte.

Toutefois, ces deux critères ne semblent pas être les plus per- tinents dans la caractérisation des pâtes. Cette différence dans la morphologie des éléments figurés présents dans la matrice peut trouver des explications dans les variations naturelles de sables dans l’argile exploitée. De plus, elle peut également être liée à des procédés distincts dans le traitement de la ressource dans la chaîne opératoire de production de céramiques (décantation ou dégrais- sage), afin de faciliter leur mise en forme et/ou leur cuisson (Orton

et al.1993, p. 114). Ces critères ne semblent pas pertinents pour dis-

tinguer des ateliers, mais doivent être gardés en mémoire pour aider à leur reconnaissance.

La question de la provenance des ressources peut être évoquée en fonction des éléments caractéristiques mis en évidence par la description pétrographique. Nous constatons que la détermination des sables permet la reconnaissance quasi exclusive pour tous les échantillons de quatre minéraux particuliers, dont les proportions varient d’une pâte à l’autre. Il s’agit plus particulièrement des quartz, des feldspaths plagioclases, de la muscovite et de la biotite. Ces minéraux sont assez caractéristiques des sables et des argiles issus de l’altération de roches granitiques ou tout au moins magmatiques. Les différentes proportions relevées entre ces éléments peuvent témoigner de ressources plus ou moins mobilisées, plus ou moins proches de la source d’origine, certains minéraux comme la biotite se dégradant facilement. Toutefois, il reste difficile de caractériser une provenance précise des argiles en raison des divers traitements et des adjonctions de sables qu’elles ont pû subir.

Pour l’oppidum de Bibracte, lieu de découverte de ces vaisselles céramiques, la détermination de la nature pétrographique permet toutefois d’envisager une origine régionale, voire supra-régionale, à défaut de pouvoir localiser plus précisément les ateliers de pro- duction. Ces derniers, systématiquement implantés à proximité des ressources nécessaires à la fabrication des céramiques, sont donc à rechercher dans une vaste zone concernant le Massif Central et sa périphérie.

Quelques éléments permettent cependant de regrouper certaines pâtes et de caractériser de cette manière des zones de production. Si les céramiques concernées n’appartiennent pas for- cément au même atelier, une exploitation des mêmes ressources naturelles peut tout au moins être envisagée.

indifférenciés. De plus, une forte abondance de grains de biotite infra- millimétrique est mise en évidence sur les parois externe et interne.

La lame mince montre une forte abondance de quartz mono- et polycristallins de tailles variées. De même, les minéraux les plus fréquents sont des plagioclases altérés, des baguettes de muscovite aciculaire, appartenant aussi bien aux fractions fines de la granulo- métrie qu’aux plus grossières. Cette lame présente également une importante porosité répartie à l’intérieur de la pâte. Les oxydes fer- riques appartiennent exclusivement à la fraction micrométrique, mais sont peu présents, à l’instar des minéraux de biotite oxydés. PSFINB (B990.9.553.49 ; ill. 14)

L’analyse macroscopique de cette pâte beige au cœur réduit gris foncé, où la porosité est légèrement marquée, montre des élé- ments figurés répartis sans tri avec une fraction fine dominante dans un intervalle de tailles variant du silt au sable moyen (compris entre 0,004 et 1 mm). La proportion de ces grains peut être estimée comme proche de 10-15 %. Les éléments sont émoussés à arrondis et leur nature permet de mettre en évidence la présence de quartz, d’oxydes ferriques rouges et une de micas (biotite et muscovite). La paroi externe de cette céramique se caractérise également par la présence de biotite infra-millimétrique.

La lame mince se caractérise par une abondance de quartz et de plagioclases, dont les tailles varient à l’intérieur des gammes granulométriques définies macroscopiquement. Les autres éléments figurés déterminés restent ponctuels et sont identifiés comme des minéraux de muscovite et de biotite oxydée appartenant à la fraction fine des grains. Des oxydes ferriques, peu présents, sont également reconnus.

MICACB (B2003.9.8749.7 ; ill. 15)

La pâte de couleur orange, au cœur réduit gris clair, se carac- térise par une matrice hétérogène qui possède des linéations bien marquées, notamment en raison des nombreuses vacuoles présentes. Les éléments figurés, répartis dans l’ensemble de la céramique, avec une granulométrie comprise entre le silt et le sable grossier (entre 0,004 mm et 2 mm), sont émoussés à arrondis et ont une proportion proche de 15-20 %. Il est possible d’observer des grains de quartz, de feldspath, de muscovite, de biotite, de nodules argileux, ainsi que des oxydes ferriques de tailles variées.

L’analyse microscopique a permis l’identification de quartz mono- et polycristallins très abondants et de tailles variées, associés à de très nombreux minéraux de biotite, parfois de grandes dimen- sions, souvent altérés, déformés et oxydés. De nombreux oxydes de fer automorphes sont également présents. Plus rarement, des baguettes de muscovite, des plagioclases altérés et des nodules argileux lenticulaires (plus clairs que la matrice) sont observés. Une orientation des minéraux selon le façonnage semblent privilégiée à l’intérieur de ce tesson, soulignée notamment par les baguettes de biotite oxydées et les nombreuses vacuoles.

PSGROS (tessonnier ; ill. 16)

Cet échantillon se caractérise par une matrice de couleur grise. Les éléments figurés visibles sont assez grossiers, de la taille des sables, et ils sont présents dans l’ensemble de la pâte avec une proportion proche de 10-15 %. Les grains déterminés peuvent être rattachés à des quartz, des feldspaths, de la muscovite, de la biotite et des oxydes ferriques rouges. Pour ce qui concerne les parois externe et interne de la céramique, il est intéressant de noter la présence de muscovite pluri-millimétrique.

L’observation en lame mince montre que les minéraux les plus abondants correspondent à des quartz monocristallins et polycris-

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Catégorie : PSFINB Forme : Pot (P12a) N° de l’objet : B990.9.553.49

1 cm

TALON LAME MINCE

Observations réalisées au microscope polarisant LEICA DM EP

Lumière Polarisée Non Analysée (LPNA) Lumière Polarisée Analysée (LPA)

biotite quartz oxyde ferrique quartz quartz 1 cm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm quartz 500 µm plagioclase muscovite biotite oxyde ferrique vacuole muscovite vacuole muscovite vacuole plagioclase

1 cm

Observations réalisées au microscope polarisant LEICA DM EP

Lumière Polarisée Non Analysée (LPNA) Lumière Polarisée Analysée (LPA)

biotite quartz oxyde ferrique quartz quartz 1 cm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm quartz biotite biotite nodule argileux vacuole muscovite vacuole vacuole oxyde ferrique

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Catégorie : PSGROS Forme : Marmite (M1) N° de l’objet : Tessonnier

1 cm

TALON LAME MINCE

Observations réalisées au microscope polarisant LEICA DM EP

Lumière Polarisée Non Analysée (LPNA) Lumière Polarisée Analysée (LPA)

vacuole plagioclase muscovite vacuole muscovite biotite quartz biotite oxyde ferrique 1 cm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm 500 µm plagioclase quartz

reconnaissance de biotite oxydée de grande taille telle que définie par l’analyse microscopique. S’il n’est pas possible de localiser un atelier de production précis, il est intéressant de noter que ce type de pâte est tout à fait semblable à celui reconnu pour une jatte/écuelle à bords éversés et panse carénée datée de La Tène D2a et deux tegulae du Ier

siècle. mises au jour sur le site d’Alésia (Chevalier 2018). Cette observa- tion indique que l’atelier de production doit se trouver dans le Morvan, en raison de la nature pétrographique particulière des pâtes. De plus, l’analyse de la diffusion des tuiles romaines montre que ces matériaux sont très rarement trouvés au-delà d’un rayon de 60 kilomètres autour de l’atelier de production (Darvill, McWhirr 1984).

DISCUSSION

La présente étude montre l’intérêt de caractériser la nature pétrographique du mobilier en terre cuite. Au final, six groupes sont reconnus en fonction de la présence, de l’abondance et de la taille de certains minéraux particuliers présents dans les pâtes. Il a de fait été possible de mettre en évidence que le mobilier concerné est pro- duit dans une aire régionale, au sens élargi du terme, autour du lieu de consommation qu’est l’oppidum de Bibracte.

Si les résultats obtenus ne permettent toujours pas de localiser les ateliers de production, l’analyse microscopique ne reflète finale- ment qu’une détermination des sables présents dans les céramiques sans pour autant caractériser les argiles employées. Pour ce faire, et pour approcher la localisation des ateliers, d’autres méthodes pour- raient être envisagées afin de caractériser ces ressources naturelles. Nous préconisons ainsi d’avoir recours à la diffractométrie de rayons X ou encore à l’analyse chimique pour déterminer précisément la nature des argiles employées. Il pourrait ainsi être possible de regrou- per plus finement les catégories de céramiques selon la nature de l’argile utilisée, voire même de localiser les différents affleurements qui sont susceptibles d’avoir été mobilisés.

Ainsi, les trois exemplaires de céramique PEINTC provenant de différents endroits de l’oppidum de Bibracte, présentent de grandes similitudes, sans toutefois être complètement homogènes. Ces tessons se caractérisent par une pâte dans laquelle les sables sont principalement infra-millimétriques et très abondants. Les échantillons (B2003.34.94) et (B2004.7.7042.1) se définissent par la reconnaissance de rares baguettes de muscovite aciculaires fines sans observations de biotite, quand l’échantillon (B2006.39.122.6) présente des baguettes de muscovite plus fréquentes associées à de rares minéraux de biotite. Si les trois tessons ont un engobe de couleur bordeaux, seul l’individu (B2006.39.122.6) permet d’obser- ver des minéraux de muscovite pris dans ce revêtement. De fait, si les exemplaires PEINTC_2 et PEINTC_3 semblent pouvoir être corré- lés, le tesson PEINTC montre clairement qu’une variabilité s’exprime dans les pâtes caractéristiques de cet ensemble.

La catégorie de céramique PCLUSTR se distingue également en raison de l’absence totale de muscovite et de biotite à l’œil nu et microscopiquement, par comparaison avec les autres échantillons de ce corpus.

Les descriptions pétrographiques de PGFINH et PGFINLF montre que ces deux céramiques peuvent être rapprochées en rai- son des ressources naturelles semblables utilisées. L’argile possède une même texture et une même couleur à la cuisson, tandis que les éléments figurés ont les mêmes tailles, morphologies et natures. Ainsi, seul le façonnage semble pouvoir différencier véritablement ces deux catégories typologiques.

L’individu PSGROS ne se distingue des autres échantillons que par la présence de muscovite de grande taille (millimétrique), présente en abondance. Ce tesson permet donc de définir l’emploi d’une ressource argileuse clairement distincte.

Enfin, la catégorie de céramiques MICACB se distingue éga- lement des autres échantillons du corpus, cette fois en raison de la

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Delencre, Garcia 2012 : DELENCRE (F .), GARCIA (J .-P .) . — Méthodologie et enjeux de l’analyse des matériaux de

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