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Mária HAJNALOVÁ : Département d’Archéologie, Université Constantin le Philosophe, Nitra Avec la participation de K. MRKVIČKOVÁ, T. PECHÁČKOVÁ et T. ŠPINKOVÁ : université Masaryk, Brno

En 2018, notre activité s’est concentrée sur l’ana- lyse d’échantillons en provenance de deux chantiers actuellement actifs, La Chaume (université de Brno) et, dans une moindre mesure, Les Sources de l’Yonne (université de Durham). Nous avons également consa- cré une partie de notre temps à tamiser par flottation des prélèvements issus d’autres chantiers et à préparer des échantillons issus de différents chantiers en vue du dosage du radiocarbone.

FLOTTATION

Durant notre présence à Bibracte, du 30 juillet au 25 août, notre équipe a traité 49 échantillons sur un peu plus de six jours au hangar de L’Échenault, où un système de flottation conforme aux prescrip- tions des spécialistes est désormais opérationnel (Goláňová 2017, p. 80-82). Les échantillons traités par flottation proviennent des fouilles de 2018 de quatre équipes – tchèque, polonaise, britannique et française (cf.  référentiel, ill. 1). En outre, un échantillon gorgé d’eau provenant de la fouille du puits au Theurot de la Roche (Chantier 40) a été trié et échantillonné en vue de prélèvements pour datation au radiocarbone.

ANALYSES DE LABORATOIRE Chantier de La Chaume

Avant la campagne 2018, soixante échantillons provenant de la fouille de La Chaume en 2017 ont été analysés en laboratoire à l’université de Nitra. Avec les vingt-quatre échantillons qui avaient déjà été traités (Goláňová 2017, p. 81-82), c’est un total de quatre-vingt-quatre échantillons de la campagne 2017

qui a été analysé, fournissant plus de 2 1 000 frag- ments de charbon de bois, 2 479 graines carbonisées et 579 graines non carbonisées (cf.  référentiel, ill. 2). Si les graines non carbonisées reflètent la végétation actuelle, les graines carbonisées (cf. référentiel, ill. 3) et le charbon de bois dénotent l’évolution de l’activité humaine du site depuis la fin de l’âge du Fer. On doit néanmoins s’interroger sur l’origine et la datation des aiguilles d’épicéa et de sapin carbonisées relevées principalement dans le petit fossé [105, 131, 139, 155] et les couches qui recouvrent le comblement du grand fossé [105, 109], l’épicéa étant réputé avoir été intro- duit récemment dans le Morvan. Pour cette raison, des aiguilles d’épicéa et un grain d’amidonnier de l’échan- tillon 120 – UF [131] – ont été datés par dosage du radiocarbone (cf. infra).

Comme la datation des couches est encore en cours, l’assemblage des graines carbonisées est ici considéré provisoirement comme un seul ensemble, en prêtant toutefois attention à l’origine spatiale des découvertes – par exemple leur association avec le remplissage du grand fossé. Globalement, les taxons carbonisés appartiennent à dix céréales cultivées, quatre légumi- neuses, probablement une espèce fruitière cultivée et trente-six taxons sauvages. Parmi les céréales, l’orge mondée (Hordeum vulgare) et le millet commun (Pani-

cum miliaceum) sont les plus nombreuses et les plus

répandues. L’épeautre (Triticum spelta) et l’amidonnier (T. dicoccum) dépassent en nombre le blé tendre/dur (T. aestivum s.l.) dans les contextes autres que le grand fossé [180]. La majorité des grains d’avoine (Avena sp.) est associée au remplissage supérieur du petit fossé et à de la céramique médiévale. Les très petites quanti- tés d’engrain (T. monococcum), de millet des oiseaux (Setaria italica), de seigle (Secale cereale) et d’orge nue (Hordeum vulgare var. coeleste/nudum) pourraient indi-

Cette synthèse s’appuie sur les données présentées dans le référentiel analytique du rapport intermédiaire 2018 du programme quadriennal de recherche 2017-2020 sur le Mont Beuvray.

SÉLECTION ET DOCUMENTATION DES ÉCHANTILLONS POUR LE DOSAGE DU RADIOCARBONE

En collaboration avec A. Lachambre et C. Cle- ment-Demange, deux lots d’échantillons ont été sélectionnés pour le dosage du radiocarbone. Un premier lot contient des échantillons provenant des fouilles de 2017 et 2018 à La Chaume, où des échan- tillons à courte durée de vie de restes végétaux ont été sélectionnés dans le but de préciser la date de création du grand fossé et la cinétique de son rem- plissage. Le matériel disponible était rare, fragmenté et mal conservé (principalement en raison des tem- pératures élevées pendant la carbonisation ?), et il y avait un risque qu’il contienne une très petite quantité de carbone datable. La datation de ces échantillons a donc été négociée avec le laboratoire de physique des faisceaux d’ions de l’École polytechnique fédé- rale de Zurich (EPFZ), qui dispose d’instruments de mesure très sensibles. Envoyés en fin de campagne estivale, ces huit échantillons ont pu être mesurés pen- dant l’automne (cf. référentiel, ill. 6). Six datations se situent dans l’intervalle prévu de l’occupation tardive de l’âge du Fer (345calBC-5calAD), une autre se réfère au Moyen-Âge (1048-1220 calAD). La dernière mesure, associée aux aiguilles d’épicéa et de sapin, (cf. supra) fournit une date postérieure à 1950, plus précisément situable dans les plages 1959-1962 ou 1982-1984 après calibration (I. Hajdas, EPFZ, comm. pers.). Ce résultat est important pour deux raisons. Tout d’abord, il ne contredit pas le scénario d’une introduction récente de l’épicéa dans le Morvan, comme on en convient généralement (Jouffroy-Bapicot 2013). Ensuite, il montre que des très petits charbons ont pu s’infil- trer de 50 cm dans le sol du sommet du Beuvray, provoquant une pollution des assemblages archéobo- taniques. Il faudra donc être vigilant à l’avenir dès lors qu’une identification faite à partir d’un très petit char- bon paraîtra surprenante et la conforter par un dosage du radiocarbone.

La deuxième série d’échantillons provient de fouilles dans diverses zones de l’oppidum (cf.  réfé- rentiel, ill. 7). Ils ont été sélectionnés dans le but de vérifier si la datation AMS d’éléments organiques de courte durée de vie (graines, coquilles de noisettes, brindilles) pouvait contribuer à la chronométrie de la séquence archéologique de Bibracte (recherche doc- torale d’A. Lachambre sous la direction de Ph. Barral et Ph. Lanos). Sur la base des contextes archéologiques et de la disponibilité du matériel, A. Lachambre a sélectionné quarante-deux échantillons possibles. Tous ont été étudiés au microscope, ce qui a conduit à la sélection de trente d’entre eux, auxquels on a quer qu’il ne s’agit pas à proprement parler de restes de

céréales volontairement cultivées. Les restes de balle (50) sont dominés par des glumes d’épeautre et d’ami- dionnier, mais on y trouve aussi des épillets d’engrain et des entre-nœuds de rachis d’orge, de seigle et de blé nu. Les bases de lemme d’orge mondée indiquent la présence d’une variété à quatre rangs (H. vulgare var.

tetrastichon). Parmi les rares trouvailles de légumi-

neuses, les plus nombreuses sont les graines de lentille (Lens culinaris). Le pois (Pisum sativum) est attesté dans trois prélèvements, la féverolle (Vicia faba) et la gesse (Lathyrus sativus) dans un seulement. On a iden- tifié à deux reprises de probables fragments de pépins de raisin (Vitis vinifera). Les semences de plantes sau- vages correspondent principalement à la végétation rudérale et à des adventices de parcelles cultivées. La végétation des clairières et des lisières est représentée par le noisetier (Corylus avellana) et la ronce (Rubus

fruticosus). Une évaluation plus approfondie, intégrant

l’interprétation taphonomique et économique de cet ensemble et sa corrélation avec les autres indicateurs environnementaux et archéologiques examinés, sera finalisée après l’étude des échantillons prélevés dans les couches les plus profondes du grand fossé lors de la campagne 2018.

Chantier des Sources de l’Yonne

Au cours du mois d’août 2018, les travaux de laboratoire se sont concentrés sur l’analyse de neuf prélèvements traités par flottation et deux échantil- lons de charbon prélevés sur le chantier des Sources de l’Yonne en 2018 (cf. référentiel, ill. 4). Les rejets de tamis ont été triés par les étudiants de Brno. Globalement, l’assemblage analysé peut être carac- térisé comme pauvre, avec seulement 133 graines, 17 restes de balle et environ 2 500 fragments de char- bon (cf.  référentiel, ill. 5). Seulement trois taxons sont présents parmi les plantes cultivées : le millet commun (Panicum miliaceum), le millet des oiseaux (Setaria italica) et l’avoine (Avena sp.). Le spectre des plantes sauvages est plus large. Les plus com- munes sont les semences de plantes à petites graines (Poaceae) provenant de prairies. La conservation des graines est médiocre, de sorte que la majorité d’entre elles ne peuvent être déterminées avec préci- sion. Les espèces les plus précisément déterminées peuvent également être associées à des espaces semi-naturels (Poa annua, Stellaria graminea, Vero-

nica serpyllifolia, Veronica teucrium) ou humides

(Scirpus sp., Carex sp.). Les plantes adventives et rudérales (Fallopia convolvulus, Echinochloa/Seta-

ria/Digitaria) sont moins nombreuses, tout comme

les arbustes de lisières (Rubus cf. fruticosus, Sambu-

127 BIBRACTE Centre archéologique européen

RappoRtinteRmédiaiRe 2018 dupRogRammequadRiennaldeRecheRche 2017-2020 suRle mont BeuvRay 2 - lesgRoupesdetRavailetleuRsactions - étudesnatuRalistes

étudesaRchéoBotaniques (inteRvention 873)

ajouté six autres échantillons du chantier des Sources de l’Yonne et du profil sédimentaire de La Bise à l’Âne (cf. référentiel, ill. 7). Les échantillons ont été envoyés en septembre au laboratoire ISOTOPTECH de Debre- cen (Hongrie), au terme d’un processus qui nous aura occupé durant huit journées complètes. Les résultats des mesures, qui nous sont parvenus en décembre, seront commentés dans le prochain rapport scienti- fique annuel.

OBJECTIFS DE LA CAMPAGNE 2019

En cette fin d’année 2018, l’analyse archéobo- tanique de dix échantillons prélevés dans le grand fossé de La Chaume durant l’été 2018 est en cours de finalisation à Nitra. En 2019, avant la campagne de fouilles, les résultats relatifs au sondage 1 du chantier

de La Chaume, comprenant les résultats archéo- logiques et les contributions d’autres approches naturalistes, seront regroupées de façon à prépa- rer le manuscrit d’un article. Si le temps le permet, neuf échantillons prélevés dans le sondage 2 de La Chaume et dix échantillons provenant des Sources de l’Yonne seront triés, taxonomiquement identi- fiés et quantifiés avant le début de la campagne de terrain 2019, qui se focalisera sur la flottation et les analyses en laboratoire de nouveaux échantillons, en donnant la priorité aux échantillons prélevés par l’équipe de l’université de Brno. En préalable à cette campagne, nous effectuerons un séjour de recherche de quatre mois à Bibracte, d’avril à juillet, à l’invitation du laboratoire Chrono-environnement de Besançon, ce qui devrait nous permettre d’établir une nouvelle synthèse de l’important corpus archéo- botanique de Bibracte, dans la suite de celle publiée en 2011 (Wiethold 2011).

bibliographie

Goláňová 2017 : GOLÁŇOVÁ (P.). — La Chaume. In : GUICHARD (V.) dir. — Rapport intermédiaire 2017 du programme quadriennal de recherche 2017-2020 sur le mont Beuvray. Glux-en-Glenne : Bibracte - Centre archéologique européen,

2017, p. 61-88 [en ligne], Rapport de recherche : https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-01671478).

Jouffroy-Bapicot et al. 2013 : JOUFFROY-BAPICOT (I.), VANNIÈRE (B.), GAUTHIER (É.), RICHARD (H.), MONNA (F.),

PETIT (C.). — 7000 years of vegetation history and land-use changes in the Morvan Mountains (France): A regional synthesis. The Holocene23, 12, p. 1888–1902.

Wiethold 2011 : WIETHOLD (J.). — Bibracte, Nièvre et Saône-et-Loire : les recherches carpologiques depuis 1989 :

agriculture et alimentation végétale du second âge du Fer, du début de l’époque gallo-romaine et du Moyen Âge. In : WIETHOLD (J.) dir. — Carpologia. Articles réunis à la mémoire de Karen Lundström-Baudais. Glux-en-Glenne : Bibracte, 2011, p. 221-252 (Bibracte ; 20).

InterventIon 885

Étude paléo-environnementale d’un fond de vallon