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Analyse des caractéristiques socio professionnelles

Dans le document Médecins là-bas, infirmier-ère-s ici (Page 60-62)

De cette première présentation, nous pouvons relever plusieurs éléments : une a moins de 30 ans (Leila), une plus de 50 ans (Daravanh) et les cinq autres ont de 32 à 39 ans (Mamadou, Mohamed, Nadia, Hanja et Fathia). Six sur sept ont moins de 40 ans. Ce sont des personnes qui ont déjà une maturité et une expérience de vie. Ils/elles sont également à une période de la vie où les projets de fonder une famille peuvent émerger ; ce qui sera le cas de Fathia, Hanja et Nadia.

Trois ont eu un-e parent-e enseignant-e, une mère enseignante en français et deux pères en langue arabe (Leila, Mohamed et Mamadou). Les autres viennent d’un milieu populaire. Dans la fratrie, la majorité d’entre eux/elles sont ceux/celles qui ont réussi du point de vue des diplômes. Ces médecins sont en mobilité sociale ascendante dans leur pays. Ils/elles ont obtenu une reconnaissance institutionnelle et familiale.

Une a totalisé six ans d’expérience professionnelle (Hanja), la plupart n’ont pas d’expérience professionnelle salariée ou libérale médicale dans leur pays d’origine car ils/elles sont venu-e- s rapidement en France leur diplôme de généraliste en poche. Ils/elles sont arrivé-e-s l’année de leur diplôme ou l’année d’après..

La plus âgée (Daravanh) a travaillé dans le commerce longtemps avant d’exercer à nouveau dans le milieu de la santé en tant qu’aide-soignante. Un homme (Mohamed) a travaillé pendant trois/quatre ans dans le commerce dès son arrivée en France. Le commerce fait partie des domaines d’activité souvent familiers aux migrant-e-s. Avec les crises économiques récentes, ce sont les domaines de la sécurité, du bâtiment et de l’aide à la personne qui sont souvent investis - et laissés ? - par les migrant-e-s127. Deux conjoints des femmes médecins (le mari de Nadia et celui d’Hanja occasionnellement) travaillent ou ont travaillé dans la sécurité. Quatre femmes (Nadia, Hanja, Daravanh et Fathia) sur cinq ont fondé une famille hétérosexuelle de un à quatre enfants ; la moyenne est de deux enfants. Un des médecins homme est père et garde sa fille à tour de rôle avec son ex compagne (Mamadou). Tous et toutes ont bénéficié d’un réseau familial ou d’interconnaissances pour s’installer de manière immédiate à leur arrivée. Deux femmes et deux hommes sont venu-e-s seul-e-s en France. Les autres sont venu-e-s accompagné-e-s de leur conjoint-e. Une seule a rencontré son futur mari en France de la même région natale qu’elle (Nadia). Un est célibataire sans charge d’enfant (Mohamed) et une femme vit en couple sans enfant (Leila).

En termes de statut de migrant-e-/citoyen-ne, trois sur sept ont la nationalité française, trois ont une carte de résident de 10 ans et un, un visa « vie privée vie familiale ». A la fin du temps 2, deux autres personnes continuaient à demander la nationalité française (Mamadou et Fathia) notamment pour l’accès aux postes hospitaliers.

Quatre médecins sur sept expriment leur regret de ne pas avoir fait de spécialité. Deux ont déjà exercé dans une spécialité, Hanja au planning familial à Madagascar, Mamadou en gynéco obstétrique à Conakry.

En termes d’aisance orale lors de l’entretien, quatre médecins maitrisent très bien la langue française ; deux maitrisent partiellement la langue française, un est réservé ; mais tous/toutes se sont rendu-e-s disponibles au regard du temps passé lors des entretiens. Ils ont tous été d’accord pour le 2ème temps.

Le temps de l’arrivée en France se vit différemment pour chacun. De multiples variations se font jour : la personne arrive-t-elle seule ou accompagnée ? Connait-elle du monde dans le

127 LENDARO A., « L’origine et le genre », Hommes et migrations [en ligne], 1292|2011, mis en ligne le 31

pays d’arrivée ? A-t-elle à traverser une cohabitation ? Nous sommes au premier temps du « rester ».

Il y a une situation atypique dans ce groupe en termes d’année d’arrivée en France et de reprise d’une activité professionnelle dans le champ de la santé, c’est Daravanh qui est en France depuis 14 ans. Les autres sont là depuis le début des années 2000, deux sur six sont là depuis 2004/2005 et quatre entre 2008 et 2013. Daravanh, la plus âgée n’a repris contact avec le milieu du soin à travers l’exercice aide-soignant qu’à partir de 2005. Il s’était déjà écoulé du temps entre son exercice professionnel au Cambodge et son premier poste d’aide-soignante en France. Nous pouvons supposer que les personnes qui travaillent dans le milieu du soin en France rapidement au regard de la fin de leurs études médicales dans leur pays d’origine auront quelques repères familiers de l’organisation d’un service de soin ; et cette familiarité facilitera leur capacité d’adaptation à un autre milieu de soin, français en l’occurrence.

Nous nous proposons à présent d’exposer des éléments tirés des entretiens et qui nous semblent trouver écho à l’analyse croisée genre, « race » et classe présentée en amont.

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Analyse thématique en tenant compte de la théorie de

l’intersectionnalité genre, « race » et classe

Nous souhaitons montrer comment à différents temps, lieux et contextes traversés par ces médecins migrant-e-s, entre ici, là-bas, ici et là-bas, peuvent s’articuler les expériences migratoires au prisme de la théorie de l’intersectionnalité genre, « race » et classe. Nous avons trouvé des éléments discursifs qui faisaient écho avec des rapports sociaux de domination et de subordination en lien avec l’ethnie, le genre et l’intégration professionnelle du travail du care. Ils nous ont semblé résonner avec les problématiques de mobilités multiples liées à la migration, à la confrontation de cultures professionnelles entre celle d’origine (médecin) et celle de transit (aide-soignante) et aussi dans le processus de vulnérabilisation qui touche ces personnes lors du déclassement, de la « voix professionnelle empêchée » et où genre, « race » et classe se trouvent imbriqué-e-s.

Au travers de cette analyse, nous aborderons le premier temps de la migration « partir » en relevant les motifs migratoires puis nous regarderons le vécu du travail du care, la problématique de la reprise d’études dans le couple, la symbolique de l’accouchement dans le rapport à l’identité sociale et collective et la figure emblématique de la mère.

Dans le document Médecins là-bas, infirmier-ère-s ici (Page 60-62)