De plus en plus de déchets à gérer et à exploiter à Dakar et à Addis Abäba
Encadré 1. Définition des ordures ménagères selon les pouvoirs publics sénégalais*
5- les résidus en provenance des écoles, casernes, hôpitaux, prisons ou tous bâtiments publics groupés sur des emplacements déterminés, dans des récipients réglementaires (à
1.2.2. À Addis Abäba : une composition plutôt stable depuis 20 ans
Concernant Addis Abäba, nous disposons également de plusieurs caractérisations de la composition des déchets solides. Nous en retenons également trois, celles de 1988, de 1997 et de 2010. Le rapport NUPI de 1988 (op cit.) établit une moyenne des différents types de déchets d’après une enquête réalisée au sein de trois classes de revenus différents (« Low income », « Medium income » et « High income »). Les résultats apparaissent sur les figures 9.a, 9.b et 9.c ci-‐dessous. Selon les données de l’Addis Ababa Health Bureau de 1997, reprises dans le rapport NUPI de 2003, on note quelques évolutions (voir figure 9.b), notamment la diminution de la part des déchets verts (branchages et restes de nourriture) et l’augmentation de celle des plastiques, des papiers, et dans une moindre mesure, de la ferraille. On note également l’apparition de l’aluminium même si le pourcentage reste anecdotique (0,02 %), ainsi que des os, bien qu’ils ne soient pas représentés compte tenu de leur faible part.
Enfin, selon le rapport de l’Addis Ababa City Governement (AACG) de février 2010, Overview of Addis Ababa city solid waste management system, les ordures additiennes seraient composées de plus de 60 % de fines113, de 15 % de déchets recyclables et de 25 % de déchets
non recyclables selon le détail présenté sur la figure 9.c. De manière générale, la composition des déchets a évolué mais n’a pas été considérablement modifiée.
113 Les fines sont des particules dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres. Elles sont désignées sous le terme
de « PM 2,5 » (d’après la terminologie anglaise particulate matter). En rudologie, les fines sont généralement constituées de sables ou de matières combustibles telles que les cendres.
Figures 9.a.b.c. L’évolution de la composition des ordures d’Addis Abäba en 1988, 1997 et 2010
Sources : NUPI, 1988 ; AAHB, 1997 ; AACG, 2010 ; réalisation A.P., 2013
Figure 10. Synthèse de l’évolution de la nature des déchets à Dakar
Sources : Seck,1997 ; Diallo pour VIE, 2007 ; Diawara, 2009 : 548 ; réalisation A.P., 2013
Figure 11. Synthèse de l’évolution de la nature des déchets à Addis Abäba
Sources : NUPI, 1988 ; AAHB, 1997 ; AACG, 2010 ; réalisation A.P., 2011
Les cercles en pointillés rouges indiquent les évolutions concernant la nature de déchets qui intéressent notre sujet, notamment l’augmentation de la part des plastiques à Dakar et la diminution de celle des déchets fermentescibles à Addis Abäba.
En guise de synthèse, à partir des graphiques 10 et 11, retenons les points suivants : -‐ Les fines sont prépondérantes dans la composition des ordures ménagères additiennes. Les déchets fermentescibles composent près de la moitié des ordures des ménages sénégalais.
-‐ Aujourd’hui, 25 % des déchets seraient organiques à Addis Abäba (contre 35 % en 2004) et de 40 % à 48 % à Dakar114 selon la saison (voire 20 % d’après les résultats obtenus
dans le cadre du programme PURE). Les déchets organiques connaissent une diminution de leur part relative dans les deux villes. La part de déchets fermentescibles est ainsi moins importante à Addis Abäba qu’à Dakar, malgré l’utilisation massive de l’eucalyptus dans les pratiques quotidiennes (Ayerbe, Guitton, Pierrat, 2012) et des amas de branches de tchat dans les marchés. À Dakar, comme à Addis Abäba, cette part est faible comparée à celle d’autres capitales d’Afrique tropicale115. La consommation de produits « modernes » dans les
grandes villes en développement pourrait expliquer cette baisse, au profit d’autres consommables.
-‐ Cette diminution de la part des déchets organiques dans les deux villes s’effectue au profit d’une augmentation d’autres matériaux : au premier chef le papier, le plastique116
et le caoutchouc. Concernant le plastique, selon Haylu, habitant du quartier d’Awaré à Addis Abäba, « avant, il n’y avait pas de sac en plastique, les gens utilisaient des paniers fabriqués en eucalyptus. Mais une entreprise indienne a importé le festal et c’est devenu le grand fléau » (entretien de novembre 2012).
-‐ L’ensemble des fines ne cesse d’augmenter à Addis Abäba. On peut supposer qu’il existe une corrélation entre le volume des fines et les importants travaux de construction réalisés dans la capitale éthiopienne depuis dix ans.
-‐ À Dakar, on note l’importance de la part du textile, matière commodément valorisable.
Les évolutions décrites dans ce premier chapitre modifient les enjeux de la gestion des déchets. À Dakar comme à Addis Abäba, l’augmentation des quantités à gérer et le changement de la nature de ceux-‐ci nécessitent de renouveler les techniques de gestion. Ainsi, les changements relatifs à leur nature impulsent leur valorisation.
114 À la fin de la saison des pluies appelée hivernage, qui dure de juin à octobre, on constate une augmentation de
la part des déchets verts.
115 À Antananarivo, par exemple, la part des déchets organiques peut atteindre 80 % durant la saison des pluies de
novembre à février (Pierrat, 2006).
116 En 2012 nous avons constaté une invasion des festal dans les marchés d’Addis Abäba : les vendeurs ne
confectionnent plus de petites pochettes en papier journal de la taille d’une dosette correspondant à un certain prix de vente. Les petits festal transparents servent désormais de contenant. Les festal noirs de taille et de qualité moyenne sont vendus 1 birr et les jaunes, plus grands et plus solides made in Ethiopia sont vendus 3 birrs. Le birr est la monnaie éthiopienne (ou ETB) [Ethiopian Birr]. 1 birr équivaut à 0,04 euro (ou 1 euro équivaut à 24,63 birrs) en juin 2013.
Conclusion
La caractérisation du « gisement » de déchets selon une approche chronologique a permis de mettre en évidence deux évolutions : les quantités produites sont de plus en plus importantes et leur nature est de plus en plus diverse. Les matériaux « récents » et facilement valorisables de cette production africaine, tels que les plastiques, les cartons et papiers ou encore les métaux ferreux et non-‐ferreux, connaissent une hausse de leur part relative.
Dans quelle mesure ces nouvelles caractéristiques complexifient-‐elles la gestion des déchets et comment la valorisation des déchets s’inscrit-‐elle dans ce contexte?
CHAPITRE 2