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Chapitre 2. RECENSION DES ÉCRITS

2.1 L’offre de services de santé et de services sociaux

2.1.3 Adéquation des services en santé et sociaux

Au Québec, il a été nommé que plusieurs mesures et programmes ont été mis en place ces dernières années pour répondre aux objectifs de réduction des méfaits pour les personnes usagères de drogue par injection. Les programmes de santé publique et les organismes communautaires visent à offrir des services de proximité aux PUDI en misant surtout sur la distribution de matériel d’injection et la prévention des ITSS pour des personnes les plus désaffiliées (Noël et al., 2008). Des services d’injection supervisée sont aussi accessibles depuis mai 2017 à Montréal. Pourtant, malgré plusieurs avancées au Québec, les services de santé et sociaux tardent à s’adapter au caractère chronique des problèmes des PUDI (par ex. : le VIH, le VHC, la dépendance, les troubles mentaux). Bien qu’il y ait des services de proximité et spécifiques pour rejoindre les PUDI essentiellement pour offrir des soins préventifs, il ne se fait que très peu de suivi systématique pour celles-ci comme pour d’autres personnes présentant des problèmes de santé chroniques ou une vulnérabilité sociale sauf pour certaines PUDI suivies pour leur VIH ou autres problèmes de santé spécifiques (Gilbert, 2009; Noël et al., 2008). Alors que la population dite générale perçoit également des écarts dont le manque d’accès à un médecin de famille et la longue attente pour des services de santé (Champagne et al., 2018; Pineault et al., 2008), on peut soupçonner que ces difficultés ne peuvent être qu’accentuées pour des personnes vulnérables, dont celles qui sont itinérantes, qui ont des troubles mentaux ou les PUDI. Un autre problème soulevé est celui de l'insuffisance des ressources offrant des services de santé spécifiques aux PUDI. Par exemple, bien que le TDO (méthadone ou buprénorphine/naloxone) et la distribution du matériel d’injection stérile constituent les deux pratiques jugées les plus efficaces pour prévenir les ITSS chez les PUDI (Bordier Høj et al., 2018; Brown et al., 2007; CDC, 2007; CDC, 2012), au Canada, seulement 20 à 30 % des personnes dépendantes aux opioïdes pour lesquelles un TDO serait bénéfique y ont accès, faute de places disponibles (Brogly et al., 2003). Selon une récente étude réalisée sur le requis de services en TDO à Montréal, seulement 39 % des personnes le nécessitant auraient accès au TDO, ceci étant nettement en deçà de ce qu’on retrouve entre autres en Suisse qui a un taux à 80 % de couverture relié à la demande (Perreault et Archambault, 2017). De plus, même si l’accès au matériel d’injection stérile est lié à la réduction de

la transmission du VIH (Bruneau et al., 2011) celui-ci est demeuré limité à Montréal pendant plusieurs années. Des experts estimaient en 2002 que la distribution ne répondait qu’à 10% des besoins réels en termes de matériel d’injection nécessaire pour éviter que s’effectue le partage de matériel (Morissette et Leclerc 2002). Quant aux thérapies en réadaptation en dépendance, au Québec, les processus d’admission pour l’évaluation et l’entrée en traitement résidentiel ou en désintoxication sont souvent très longs, allant de quelques mois à une année (Poliquin, 2017b). Ce manque de disponibilité immédiate des ressources en toxicomanie empêche la prise en charge en temps opportun nécessaire afin de réduire les risques à la santé associés à ce mode de vie (Milloy et al., 2009). Ceci est d’autant plus inquiétant lorsque l’on prend en considération le sentiment d'urgence qui imprègne le quotidien des personnes qui font usage de drogues par injection et leurs difficultés particulières à se projeter dans l'avenir en soutenant dans la durée des projets autres que la consommation (Bourgois, 1998; Olivenstein, 1970).

Pour ce qui est du traitement du VHC, selon de récents rapports ministériels québécois, un très faible pourcentage de PUDI reçoit une attention médicale appropriée pour procéder à l’évaluation de cette infection (INESSS, 2015; INSPQ, 2017). Alors que 63 % d’entre elles ont des anticorps positifs au VHC (Leclerc et al., 2018), une prévalence qui croît avec les années d’usage, à peine 13 % recevraient le traitement pour leur hépatite C si elles sont mono-infectées et 2 % seraient traitées pour leur infection au VHC si elles sont co-infectées avec le VIH (INESSS, 2015; INSPQ, 2015; Parent et al., 2011). Les critères d’admission pour l’entrée en traitement du VHC demeurent toujours très restrictifs malgré que plusieurs études récentes aient démontré que l’abstinence totale aux drogues n’est pas nécessaire puisque des consommateurs actifs de drogues obtiennent des taux de succès du traitement équivalents à ceux de personnes abstinentes (Bruggmann et al., 2017; Grebely et al., 2017; Grebely et al. 2006a; 2006b; Sylvester, 2009). Parmi les problèmes identifiés se trouvent les déficits en ressources financières et humaines dédiées aux soins des PUDI dans le réseau de santé publique et la quasi-absence d’équipes interdisciplinaires vouées à leur offrir des soins et services (Gilbert, 2009; INESSS, 2015; Noël et al., 2007). Des efforts sont toutefois déployés pour mettre sur pied des équipes interdisciplinaires et en réseau adaptées afin de favoriser la réussite du traitement du VHC comme ceci a été fait avec succès pour le traitement du VIH chez les PUDI (INSPQ, 2012; INSPQ, 2015; Noël et al., 2008). De ce fait, des avancées se profilent à l’horizon pour accroître l’accès aux traitements du VHC au Québec surtout que les nouveaux traitements ont des taux de réussite supérieurs à 90 % contrairement à des taux en deçà de 50 % avant ces percées thérapeutiques (Dore et al., 2016; Grebely et al., 2016a; Grebely et al., 2016b; INESSS, 2015; Morris et al., 2017). L’INESSS (2015) soulève la faible orientation des personnes atteintes vers les équipes qui traitent

l’hépatite C et recommande d’accroître les interventions de proximité afin de joindre les personnes les plus désaffiliées afin d’améliorer la cascade de soins.