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DEVELOPPEMENT DURABLE ET VALORISATION DES PFNL, ETAT DES LIEUX EN CHIQUITANIE

2. La Chiquitanie dans le contexte bolivien

2.5. Le territoire chiquitanien et ses acteurs

2.5.2. Acteurs locaux et mouvements sociaux

Dans ce chapitre nous présentons les principaux acteurs locaux de la région chiquitanienne ainsi que les mouvements sociaux dans lesquels ils s’inscrivent. Ces derniers peuvent être des groupements soit corporatistes, de type syndical, soit territoriaux donc attachés à un lieu et souvent également à une culture.

Les chiquitanos d’aujourd’hui

A l’époque précolombienne les indigènes dans la zone de la Chiquitanie étaient organisés en petites tribus dispersées, comme c’est généralement le cas pour les peuples nomades vivants principalement de chasse et de cueillette. En zone rurale, les chiquitanos d’aujourd’hui continuent de s’organiser en groupes comprenant de quelques familles à plusieurs dizaines, mais ils se sont sédentarisés. Wittine et Hurtado (2006) définissent les communautés chiquitaniennes actuelles comme « des entités socio-culturelles et spatiales

dans lesquelles un ensemble de familles exerce un contrôle organisé du territoire communautaire et de ses ressources naturelles, qui constituent la base principale de la gestion de leur système productif ». Le peuple chiquitanos comprendrait d’après le PDOT

(2009) environ 120 000 personnes, réparties entre les villes et 371 communautés. Il est néanmoins probable que ces dernières sont plus nombreuses, puisqu’il y aurait 105 communautés chiquitaniennes rien que dans la commune de San Ignacio, une cinquantaine dans celle de Concepción et près d’une trentaine dans celles de Lomerio et San José d’après leurs PMOT, soit 215 communautés rien que dans ces quatre communes sur lesquelles se centre notre étude.

La formation des communautés chiquitaniennes actuelles a commencé à la fin du XIXème siècle, principalement par des familles fuyant l’esclavage auquel elles étaient soumises dans les haciendas ou dans les exploitations de caoutchouc. Elle s’est accentuée après la guerre du Chaco et surtout après la réforme agraire, qui libéra finalement les indigènes de l’esclavage. Ainsi si certaines communautés se formèrent dans des zones isolées, à la recherche de tranquillité et de terres libres, d’autres se formèrent à côté ou au sein des haciendas où les chiquitanos travaillaient auparavant et tachèrent d’obtenir des terres en propre possession (Tonelli Justiniano 2004; Rivas Flores 2009).

Dans la littérature les descriptions de ces communautés indiquent généralement que les familles ont des activités économiques diversifiées, pratiquant l’agriculture sur brûlis sur des surfaces dépassant rarement 2 hectares, l’élevage, la chasse-pêche-cueillette et complétant ces activités de subsistance avec la vente de main-d’œuvre masculine hors de la communauté (Wittine et Hurtado 2006). Nous verrons plus en détail dans le chapitre 7.1 l’évolution des modes de vie des familles chiquitaniennes.

De nos jours et selon la loi INRA N°1715, les terres communautaires d’origine (TCO) et les propriétés communautaires sont inaliénables, indivisibles, irréversibles, collectives,

insaisissables et imprescriptibles (cf. chapitre 2.3.3). Cela dit, l’organisation des communautés chiquitaniennes est fondamentalement différente de celle des communautés interculturelles et mennonites, dans la mesure où les chiquitanos gèrent traditionnellement leurs terres en commun. Sur toute la superficie dotée à la communauté, ses membres peuvent pratiquer librement les activités de chasse, pêche et cueillette pour leur subsistance. Lorsque les terres aptes aux activités agricoles ne manquent pas, les membres de la communauté sont également libres d’exercer l’agriculture et l’élevage où bon leur semble. Ils ont le droit d’usage exclusif de leur parcelle agricole le temps qu’ils l’exploitent, puis celle-ci retourne au domaine commun une fois abandonnée en friche. Des normes internes et spécifiques existent néanmoins pour la gestion des ressources clés, selon la nécessité ressentie par les communautés, comme nous le développerons plus loin (cf. chapitre 7.1).

Figure 33 : Un dirigeant de la communauté San Miguelito de Santa Rosa devant les bâtons représentant les différents postes du cabildo - Photo Claire Vennetier, 2012

Chaque communauté possède son propre règlement interne, définissant entre autres le rôle de ses dirigeants et les

devoirs de ses membres. En termes d’autorité, plusieurs systèmes coexistent. D’une part, chaque communauté à son propre « cabildo », système d’organisation hérité du temps des missions jésuites, qui comprend plusieurs dirigeants nommés « caciques » chargés d’organiser la vie de la communauté. Le premier cacique est celui qui détient l’autorité de convoquer les membres de la communauté et de présider les réunions ; le second casique est son

suppléant. Selon le degré d’organisation de la communauté il peut de plus exister plusieurs

casiques de grade inférieur, chargés de s’occuper de thèmes précis (cf.

Figure 34). Ils sont élus à la majorité par les membres de la communauté, pour une durée d’un an renouvelable. Le cabildo inclut un autre poste, celui de « corregidor », attribué par la sous-préfecture, généralement à une personne relativement âgée et respectée au sein de la communauté, pour une durée indéfinie. Il est chargé de faire respecter l’ordre dans la communauté ; c’est lui par exemple qui se charge d’exécuter les sanctions lorsqu’un membre de la communauté en viole le règlement. Le « leader religieux », choisi par la paroisse, fait également partie du cabildo et se charge d’organiser la vie religieuse de la communauté. Finalement chaque communauté élit également un représentant d’OTB (Organisation Territoriale de Base)47 pour une durée d’un an renouvelable, qui a pour rôle de

47

D’après le témoignage de membres de communautés chiquitaniennes anciennes, avant le système d’OTB, mis en place en 1998, chaque communauté était représentée par un « maire politique » (alcalde politico),

les représenter auprès des collectivités locales et des différentes instances gouvernementales. Notons que d’après nos observations, les fonctions des caciques, du

corregidor et du représentant d’OTB ne sont pas toujours clairement séparées dans la

pratique. En effet il est courant qu’une des autorités assume les fonctions des autres, soit par volonté de prédominer, soit par défaut face à la passivité de ceux-ci.

Figure 34 : Structure organique du cabildo de la communauté Palmarito de la Frontera – Extrait du livre consignant le règlement de la communauté

Au-delà du cadre communautaire, les chiquitanos ont créé leurs propres mouvements sociaux. Au niveau municipal ou provincial, ils s’agglutinent en centrales (Centrale Indigène Chiquitanienne de Concepción -CICC-, Centrale Indigène des Communautés de Lomerio -CICOL-, Association des Cabildos Indigènes de San Ignacio de Velasco -ACISIV-, etc.). Ces centrales sont affiliées à l’Organisation Indigène Chiquitanienne (OICH), elle-même affiliée au niveau départemental à la Centrale des Peuples Ethniques de Santa Cruz (CPESC), finalement affiliée au niveau national à la Centrale Indigène des Peuples de l’Orient Bolivien (CIDOB). L’organisation de ce réseau est complexifiée par le fait qu’il existe des divisions internes. On observe en particulier une césure entre ceux qui suivent la ligne gouvernementale et ceux qui s’y opposent. La CIDOB s’est ainsi scindée en deux et les membres des échelons inférieurs du réseau naviguent de l’un à l’autre selon leurs convictions, intérêts ou affinités. Globalement les organisations d’indigènes des Terres Basses sont plutôt légalistes, répugnant à employer la violence pour arriver à leurs fins (Arreghini 2011). La CIDOB est notamment connue pour faire connaître ses revendications au travers de l’organisation de longues marches en direction de La Paz où siège le gouvernement.

d’abord imposé et extérieur à la communauté (période 1945-1966) puis membre de la communauté (1966-1998).

Il est intéressant d’observer que dans le recensement de 2012, les chiquitanos ont revendiqué leur origine ethnique de manière beaucoup plus importante que dans les recensements passés. Les chiquitanos se placent ainsi troisièmes en terme de taille de groupe ethnique (87 885 membres auto-identifiés), loin derrière les aymaras (1 191 352) et quechuas (1 281 116), mais devant les guaranis (58 990) (INE 2013). Cela peut traduire un certain renforcement ou une revalorisation de l’identité chiquitanienne, même si les chiffres sont à prendre avec prudence étant donné les déficiences de ce recensement.

Les éleveurs bovins privés

Les éleveurs bovins privés, essentiellement blancs et métis, commencèrent à s’installer en Chiquitanie en s’appropriant les pâturages des anciennes missions jésuites et en récupérant les bovins dispersés. Bénéficiant d’une conjoncture propice à l’élevage durant de longues périodes au cours du XIXème et du XXème siècles, les éleveurs se multiplièrent et étendirent leurs activités dans les pâturages naturels de la région (Tonelli Justiniano 2004). A partir des années 1970 l’élevage commença à s’étendre au-delà, avec la conversion de parcelles forestières en pâturages artificiels (Killeen et al. 2008).

De nos jours les éleveurs privés représentent une population non négligeable de la Chiquitanie, dont ils occupent une superficie encore moins négligeable. En 2011 d’après FEGASACRUZ (2012), il y avait 10 733 producteurs bovins en Chiquitanie, détenant 1 610 720 têtes de bétail. Leur découpage de la région chiquitanienne est cependant différent du nôtre et inclut notamment les communes de San Julian, Cuatro Cañadas et Pailon où l’agro-élevage est particulièrement développé. Selon notre découpage que nous avons justifié dans le chapitre 2.1.1, ces chiffres baissent à 5 016 éleveurs détenant 983 059 têtes de bétail (cf.

Tableau 6). La Chiquitanie abriterait ainsi 18% des éleveurs bovins privés du département de Santa Cruz et 34% du cheptel détenu par cette catégorie d’éleveurs.

Quant à l’occupation territoriale des éleveurs, celle-ci n’est pas connue actuellement mais le sera probablement après publication des résultats du recensement agricole de 2013. Néanmoins en nous basant sur le principe de la FES, qui veut que les propriétés d’élevage aient une charge animale d’au moins 0,2 tête de bétail par hectare, nous pouvons estimer que celles-ci occupent en Chiquitanie environ 5 millions d’hectares au maximum (983 059 / 0,2).

Les propriétés d’élevage actuelles, contrairement aux haciendas mixtes qui prédominaient avant la réforme agraire de 1953, ne sont généralement pas un lieu de vie et de production diversifiée. L’élevage bovin y est l’activité dominante voire exclusive et la majorité des propriétaires n’y résident pas, leur préférant la ville.

En termes d’organisation, une partie des éleveurs est affiliée aux associations municipales d’éleveurs. Chacune des communes citées dans le

Tableau 6 possède sa propre association d’éleveurs (AGACON à Concepción, AGASIV à San Ignacio, etc.). Celles-ci sont affiliées aux fédérations d’éleveurs départementales (FEGASACRUZ pour Santa Cruz), elles-mêmes affiliée à la Confédération d’Éleveurs de Bolivie au niveau national (CONGABOL). FEGASACRUZ est également affiliée à la Chambre d’Agro-élevage de l’Orient (CAO).

Tableau 6 : Nombre d’éleveurs bovins et taille de leur cheptel en Chiquitanie en 2011

Province Commune Producteurs Têtes de bétail

Velasco San Ignacio 489 250 730 San Miguel 384 26 467 San Rafael 137 39 330 Ñuflo de Chavez Concepción 297 87 105 San Javier 483 158 902 San Ramon 154 31 840

San Antonio de Lomerio 172 6 034

Guarayos El Puente 618 66 448

Urubicha 54 21 626

Chiquitos Roboré 349 27 283

San José 1413 91 420

Angel Sandoval San Matias 507 139 513

German Busch Puerto Suarez 114 38 369

Puerto Quijarro 17 4 026

TOTAL 5 188 989 093

Source : FEGASACRUZ (2012) – élaboration propre

Au niveau municipal, les activités clés des associations d’éleveurs sont l’organisation des foires (remates) facilitant la commercialisation du bétail, ainsi que des campagnes régulières de vaccination (ce qui permet d’ailleurs d’avoir des données actualisées de la taille du cheptel). Elles constituent un cadre d’interaction entre les éleveurs plus qu’une forme de représentation locale, les interactions avec les gouvernements municipaux étant généralement limitées. Elles peuvent néanmoins recevoir certains projets comme le projet pilote d’élevage à moindre impact environnemental mené actuellement par la préfecture de Santa Cruz.

Au niveau départemental, FEGASACRUZ veille depuis 1966 aux intérêts des éleveurs en leur fournissant un appui dans les domaines juridique (obtention des titres fonciers), technique (vétérinaire) et commercial (organisation des foires). Elle ne fournit pas ni n’organise une assistance technique quant aux pratiques d’élevage, le laissant aux organismes publiques (comme le CIAT) et aux entreprises privées. Elle représente les éleveurs auprès du gouvernement départemental dans le cadre de quelques programmes clés comme ceux de prévention de la fièvre aphteuse et des incendies.

CONGABOL et la CAO ont quant à elles un rôle de représentation des producteurs auprès du gouvernement national, avec lequel elles organisent des tables de travail. Les thèmes qui ont été ou sont actuellement sur la table des négociations sont par exemple la loi 337 et le programme de production d’aliments et de reforestation (cf. chapitre 2.4.4), l’accélération de la distribution des titres fonciers par l’INRA, la diminution de la fréquence des contrôles de la FES de tous les 2 à tous les 5 ans (cf. chapitre 2.3.3), la régularisation de la machinerie agricole importée ou encore la possibilité de changer la norme technique obligeant à réaliser des haies coupe-vent pour les remplacer par des îles de végétation.

Globalement les éleveurs bovins cherchent à défendre leurs intérêts par la voie légale, en négociant avec le gouvernement par l’intermédiaire de leurs associations. Ils

n’organisent pas d’actions médiatiques ou violentes, comme les blocages de routes dont certains secteurs de la population sont très friands.

Les communautés interculturelles

A partir de la réforme agraire de 1996, le gouvernement bolivien a cessé de distribuer des terres à titre individuel et privilégié la dotation de titres communautaires (cf. chapitre 2.3.3). Ainsi en Chiquitanie, où la colonisation par les populations provenant de la zone occidentale du pays est un phénomène relativement récent puisqu’il ne s’est intensifié que depuis la fin des années 1990, la majorité des terres distribuées l’a été sous forme communautaire, c'est-à-dire qu’elles ne peuvent être légalement divisées, hypothéquées, expropriées ou encore vendues.

Le nombre exact de communautés interculturelles existant actuellement en Chiquitanie est inconnu, du fait qu’elles se multiplient rapidement et que peu d’entre elles ont été régularisées. Selon leurs PMOT, élaborés il y a environ 5 ans, les communes de Concepción et San Ignacio n’abritaient ainsi que 7 et 11 communautés interculturelles régularisées. Selon des sources non officielles ces communes n’abriteraient actuellement pas beaucoup plus de ce type de communautés régularisées (environ 20 pour San Ignacio) mais les non-régularisées seraient au moins quatre fois plus nombreuses.

D’après Killeen et al. (2008) durant les premières années suivant la création d’une communauté interculturelle, ses membres suivent généralement une logique économique de subsistance. Ils se concentrent ensuite progressivement sur l’agriculture de rente orientée vers les marchés nationaux et internationaux, à mesure qu’ils augmentent leur niveau de mécanisation et de techniques agricoles. Les parcelles initialement laissées en friches après quelques années de culture sur brûlis sont alors récupérées pour une agriculture plus intensive.

D’une manière générale, la logique économique des membres des communautés interculturelles se focalise sur la maximisation de la production et des profits agricoles (Tafforeau 2010). Les produits forestiers jouent un rôle très réduit et sont « exterminés » au fur et à mesure que les familles étendent leurs superficies agricoles (Killeen et al. 2008).

D’après l’étude de Tafforeau (2010) sur plusieurs communautés interculturelles installées en Chiquitanie (commune de San Ignacio de Velasco), celles-ci sont à un stade intermédiaire par rapport à l’évolution du système agraire des colons d’origine andine plus anciens observée dans une zone comme San Julian par exemple. Les familles se consacrent d’une part à quelques cultures de rente, principalement sésame et cacahuète, destinées au marché national et international et cultivées avec un niveau encore relativement faible de mécanisation. D’autre part elles continuent de cultiver à petite échelle des produits similaires à ceux que l’on rencontre chez les chiquitanos (riz, manioc, maïs, banane plantain) pour leur consommation et la vente des excédents sur les marchés locaux. Les surfaces cultivées par famille dans ces communautés sont d’environ 9 hectares en moyenne mais peuvent atteindre la trentaine d’hectare pour certaines familles.

Les colons ont créé leurs organisations propres, en particulier la Confédération Syndicale de Colonisateurs de Bolivie (CSCB), qui représente les zones de colonisation anciennes et récentes. A l’échelle supérieure un grand nombre de colons sont également affiliés à la Confédération Syndicale Unique de Travailleurs Paysans de Bolivie (CSUTCB),

défendant la paysannerie andine et scindée entre quechuas et aymaras, ou encore au Mouvement des Sans Terres (MST).

Ces grands mouvements sociaux cachent une multitude de petites organisations. A l’échelle inférieure on observe ainsi une forte dynamique de création, affiliation ou encore scission des organisations des colons, comme nous le verrons dans notre cas d’étude en chapitre 7.3. En outre contrairement aux organisations des chiquitanos et des éleveurs privés, qui sont territorialisées à leur base selon le cadre administratif classique (par commune, département, etc.), il existe une grande multiplicité du côté des colons. Leurs organisations recherchent parfois une assise dans le cadre administratif classique, mais plus généralement elles sont affiliés par corporatisme, zone d’origine ou encore orientation politique. On a donc affaire à un réseau d’acteurs très complexe et dynamique.

Une autre caractéristique des mouvements sociaux constitués par les colons est qu’ils utilisent des méthodes de revendication plus violentes, n’hésitant pas par exemple à organiser des blocages de routes et à entrer en confrontation directe avec les forces de l’ordre.

Les ayoreos

Les chiquitanos ne sont pas l’unique « peuple » autochtone de la Chiquitanie. Il existe également une population ayoreode, parlant zamuco, qui n’a pas été « réduite » dans les missions à l’époque des Jésuites comme les autres tribus, qui furent fondues en un seul peuple. Leur attitude guerrière a d’ailleurs longtemps effrayé les chiquitanos, qui se référaient à eux jusqu’à une époque récente sous le terme de « sauvages ». Malgré les efforts de nombreuses institutions publiques et privées pour les « civiliser », beaucoup d’ayoreos ont conservé un mode de vie en partie nomade, non basé sur la création d’excédents et l’accumulation et dans lequel la chasse et la cueillette continuent d’occuper une place importante (Riester et al. 2002). Il existe notamment un groupe d’environ 800 individus se déplaçant entre le Paraguay et Santa Cruz (PDOT 2009).

Les ayoreos ont créé leur propre organisation de représentation, nommé Centrale Ayorea Native de l’Orient Bolivien (CANOB) et affilié au CEPESC. D’après le PDOT (2009) de Santa Cruz, la population totale ayoreode approche les 5 000 individus. Outre les populations nomades, une partie des ayoreos vit à Santa Cruz et dans les centres urbains chiquitaniens et une autre partie dans une quinzaine de communautés rurales. Ils bénéficient en outre de quatre TCO pour une superficie totale de 244 736 hectares.

Les agro-entrepreneurs

L’agro-industrie s’est développée en Bolivie à partir des années 1950, avec l’appui du gouvernement aux entrepreneurs cruceños comme étrangers. Encore aujourd’hui, la Bolivie reste un pays attractif pour les agro-entrepreneurs étrangers, étant donné que les terres y sont environ dix fois moins chères qu’en Argentine ou au Brésil et le diesel environ trois fois moins cher (INESAD 2013). Avec la saturation des meilleures terres agricoles, situées dans la « zone intégrée » proche de Santa Cruz de la Sierra, les agro-entrepreneurs recherchent peu à peu de nouvelles terres agricoles, entres autres en Chiquitanie. Le potentiel agricole des sols de cette région est néanmoins très faible (cf. chapitre 2.1.2), limitant pour l’instant le développement de l’agriculture commerciale intensive à quelques zones.

Les agro-entrepreneurs ont créé une multitude d’organisations de producteurs selon leur type de production, comme par exemple l’association nationale de producteurs d’oléagineux et blé (ANAPO), l’association de producteurs de maïs et sorgho (PROMASOL) ou encore les fédérations de producteurs de canne à sucre. Celles-ci ont des filiales dans les diverses zones de production. Elles sont en outre affiliées à la Chambre d’Agro-élevage de l’Orient (CAO), à laquelle appartiennent aussi les diverses associations d’éleveurs.

Les communautés mennonites

Les colons mennonites appartiennent à une secte chrétienne fondée en Allemagne par un certain Meno à l’époque de la réforme protestante. Ils ont été attirés en Bolivie dans les années 1950 par la politique de « marche vers l’Orient » du gouvernement, qui leur a vendu des terres à très bas prix (Roca 2001), ainsi que par son attitude permissive puisqu’il tolère leur isolement culturel volontaire (pratiques endogames, écoles propres, etc.). Au départ installés au sud et au nord-est de la ville de Santa Cruz de la Sierra, les communautés mennonites se sont rapidement multipliées. Au début des années 2000 on estimait déjà leur population en Bolivie à 5 000 à 7 000 familles, occupant une superficie de 500 000 hectares de terres (Ministerio de Desarrollo Sostenible 2005). Plusieurs dizaines de communautés sont actuellement installées en Chiquitanie, notamment dans les communes de San José, San Ignacio et Concepción.

Bien qu’ils soient organisés en communauté, les mennonites divisent leurs terres en parcelles familiales qu’ils exploitent séparément. Ils font appel essentiellement à la main-d’œuvre familiale, ce qui est facilité par leur fort taux de fécondité. Ils font néanmoins