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DEUXIEME PARTIE : L’ANALYSE DU CORPUS

CHAPITRE 2. LA VISITE DE CHARLES DE GAULLE EN ARGENTINE

2.2 LA VISITE DE CHARLES DE GAULLE EN ARGENTINE : INTRODUCTION A L’ANALYSE DES JOURNAUX

2.2.1 LA VISITE SELON CLARIN

2.2.1.3 L’ACCUEIL RESERVE AU PRESIDENT FRANÇAIS ET LE RECIT DES INCIDENTS : CRITIQUE ET DEFINITION DU PERONISME

Devant l’impossibilité d’empêcher l’accueil de CDG par les péronistes pendant sa visite en Argentine, Clarín fait de la réception donnée par les manifestants péronistes au président De Gaulle en Argentine un sujet central, comme le prouvent les six aires scripturales493 que nous avons pu repérer dans notre corpus. Ces manifestations peuvent être considérées comme des événements produits pendant le déroulement de l’événement-visite, mais doivent être interprétées dans le contexte du voyage du chef de l’Etat français. En effet, même si la construction des incidents semble être structurellement proche du fait divers494, le traitement

donné par CL dévoile le positionnement politique495 de la rédaction. Nous verrons donc

comment ces épisodes dans l’événement-visite mettent en lumière l’identité discursive anti-péroniste du journal. Les récits sur les incidents à Buenos Aires et à Córdoba mettent en scène

des manifestants péronistes496 essayant d’approcher le président français en portant des affiches

et en scandant des refrains. Ils finissent par s’affronter aux forces de l’ordre qui cherchent à les repousser. Nous pouvons donc résumer le schéma actantiel général du récit comme suit :

Schéma actantiel du récit de Clarín

492

Dans le sens de relater.

493

Il s’agit des aires scripturales 7, 8, 9, 10, 11 et 12.

494

Nous ne pouvons pas affirmer qu’il s’agisse d’un fait divers à part entière car si l’on suit Roland Barthes il devrait pouvoir se suffire à lui-même s’agissant d’une information « totale » au caractère immanent. BARTHES, Roland (1964) Essais critiques. Paris : Editions du Seuil.

495

La portée politique des manifestations a un caractère saillant et sert soit à défendre une position, soit à la critiquer.

496

Il s’agit de partisans ayant répondu à l’appel fait par Perón d’accueillir CDG comme si c’était lui-même.

Destinateur: le message de Perón aux péronistes

Objet: assimiler CDG à Perón pour encourager le retour

de Perón Destinataires: les péronistes Adjuvants: les syndicats ? Sujets:

les manifestants péronistes

Opposants: les forces de l’ordre

Quant à la construction de l’accueil donné au président français à l’aéroport de Buenos Aires, nous n’avons considéré que les aires de scription n 7 et n 8 car des pages497 du journal manquaient dans les archives consultées. Dans le premier cas, le S-E de l’article intitulé «Se Brindó a De Gaulle una Recepción Digna de un héroe»498 révèle «(…) la llegada de una gruesa columna que portaba carteles de la Unión Obrera Metalúrgica, encabezada por dos personas que

hacían sonar insistentemente los bombos»499 et ajoute que : «la manifestación acató

ordenadamente (aunque sin dejar de cantar estribillos) la disposición de no cruzar la calzada

(…)»500. Le scripteur-énonciateur suggère alors l’appartenance des manifestants au Parti

péroniste à travers les allusions au syndicat métallurgique, aux bombos et aux refrains scandés par la foule. Par ailleurs, la voix énonciative cherche à imaginer des troubles là où, en apparence, il n’y en a pas, comme nous pouvons le voir ci-dessous :

«La manifestación acató ordenadamente (aunque sin dejar de cantar estribillos) la disposición de no cruzar la calzada (…)»

 Relateur : aunque

 assertion de base (A1) = «La manifestación acató ordenadamente (...) la disposición de no cruzar la calzada (…)». L’élément constitutif commun concerne l’attitude des manifestants qui adhèrent aux ordres impartis.

 assertion implicite (A2) = si les manifestants ont obéi et ont agi de façon organisée, nous serions à même de penser qu’aucun signe de désordre ne se manifesterait. Or, l’assertion restrictive remet en question cette idée.

 assertion restrictive (A’2) = «(aunque sin dejar de cantar estribillos)». Il s’agit d’une rectification négative qui corrige en quelque sorte l’adverbe de manière «ordenadamente» et qui vise à souligner que l’ordre n’était pas total. Les parenthèses fonctionnent comme une incise qui vient, d’une part, rappeler les origines péronistes des gens qui défilent et, d’autre part, exprimer l’agacement de la voix énonciative qui aimerait (comme nous l’avons déjà vu) diluer l’identité péroniste dans la foule.

Résultat : A1 (bien que A’2) présuppose A2

497

Il manque notamment les pages 11 à 32, ainsi que la page 40, elles sont annoncées à la Une du 4 octobre 1964.

498

De l’AS n 7. Trad : « De Gaulle a eu une Réception Digne d’un Héros ».

499

Trad : « l’arrivée d’une grosse colonne (de manifestants) portant des affiches de l’Union Ouvrière Métallurgique à la tête de laquelle se trouvaient deux personnes qui faisaient retentir de façon insistante leurs bombos ».

500

Trad : « la manifestation a accepté de façon ordonnée (quoi que sans arrêter de chanter des refrains) la disposition de ne pas traverser la chaussée ».

N’étant pas encore désignés explicitement comme péronistes par le récit de CL, les manifestants semblent suivre partiellement les instructions données par les forces de l’ordre, tout en continuant à résister face aux interdictions.

Comme nous venons de le voir, si le récit sur les manifestations à l’aéroport n’est, a priori, ni explicitement critique, ni directement attribué aux péronistes, nous observons pourtant dans

l’encadré 6501 intitulé «Cita un Comentario de CLARIN la TV Francesa»502 que le

méta-énonciateur se livre à une réprobation croissante concernant les manifestants dans les rues de

501

Paru le 6 octobre à la page 17 et faisant partie de l’aire scripturale n 8.

502

Trad : « La TV française cite un commentaire de CLARIN ».

Aire scripturale n° 7 : 4 octobre 1964, page 9. Article 3 : «Se Brindó a De Gaulle una Recepción Digna de un Héroe».

Buenos Aires. Ecrit par l’équipe de correspondants503 du journal en France, cet encadré valide le récit du journal sur les incidents survenus à l’aéroport de Buenos Aires lors de l’arrivée du président français à travers le regard d’un média audiovisuel français. En effet, il s’agit de la reprise par la télévision française d’un article publié par CL dont le titre est «Unánime

Condena»504 et qui critique les actions menées par des groupes vraisemblablement péronistes505.

Cette mise en abyme comporte donc trois niveaux : le premier correspondant à l’article d’origine de CL (dire 1), le second à l’émission de la télévision française (dire 2) et le dernier à l’encadré (dire 3) reprenant les dires 1 et 2, comme nous pouvons le voir dans le tableau ci-dessous :

Niveaux de la mise en abyme Média Corpus

Dire 1 : article d’origine «Unánime condena»

Presse argentine : Clarín

Commentaire sur les incidents et prise de position

(in absentia)

Article du 4 octobre 1964 introuvable dans les archives Dire 2 :

Reprise audiovisuelle de l’article de CL

Télé française : source non consignée Reprise d’une citation de CL

(in absentia)

Média et émission non renseignés Dire 3 :

(encadré 6 : «Cita un Comentario de CLARIN la TV Francesa»)

Presse argentine : Clarín

Article concernant la citation à partir du commentaire

(in praesentia)

Aire scripturale n 8 du 6 octobre 1964

Cet enchâssement dévoile l’intention de CL de valider son propre récit tout en le légitimant par le biais de la presse française reproduisant ainsi, une fois de plus, l’importance accordée par les milieux intellectuels argentins au regard européen506. Dans ce sens, selon CL l’«acostumbrada objetividad»507 de la télévision française lui permet de retracer une «exacta dimensión del suceso»508, comme si la référence aux origines du média audiovisuel et la citation faite de CL par ce dernier étaient les gages de l’appréhension impartiale des faits. La force du récit est telle que les trois énonciations condamnent par trois fois509 «los episodios protagonizados por grupos antisociales, que respondiendo a directivas expresas trataron en toda forma de empañar el brillo

503

«(De nuestra corresponsalía)». Nous pouvons y déceler la présence du méta-énonciateur dans l’utilisation de l’adjectif possessif de la première personne du pluriel. Clarín assume entièrement l’énonciation de la mise en abyme et se positionne clairement contre les manifestations péronistes lors de l’arrivée de CDG.

504

Trad : « Condamnation unanime ». Cet article publié dans Clarín le 4 octobre 1964 fait partie des aires scripturales manquantes dans les archives et dans notre corpus dont nous avons précédemment parlé.

505

Il est vrai que le péronisme n’est pas explicité ici non plus, mais la référence faite aux «directivas expresas» renvoie directement au mot d’ordre lancé par Perón depuis son exil madrilène.

506

Le regard strabique, voir § Introduction.

507

Trad : « son objectivité habituelle ».

508

Trad : « dimension exacte de l’événement ».

509

de la recepción tributada al general De Gaulle»510. Quant aux incidents eux-mêmes, rien n’est dit sur leur nature, mais juste sur les auteurs dont les comportements s’écartent des règles socialement acceptées et qu’il faut rattacher aux péronistes, comme nous l’avons signalé quelques lignes auparavant. Le récit de CL oscille entre la relativisation des incidents classés dans la sphère des faits divers511 et la dénonciation d’une instrumentalisation politique car «no ha sido

otra cosa que una maniobra electorera, burda, mezquina y torpe»512 dont la «finalidad estaba a

la vista : se trataba de capitalizar electoralmente el enorme caudal de admiración, respeto y

simpatía que acompaña al héroe de Francia en su gira por América»513. La mise en abyme sert

donc à réprouver l’intention des péronistes de s’approprier le voyage de CDG.

510

Trad : « les épisodes ayant pour protagonistes des groupes antisociaux qui, suivant des directives claires, essayèrent de toutes les façons possibles de troubler l’éclat de la réception donnée au général De Gaulle ».

511

«-que es del mero orden de la crónica policial-». Trad : «-qui relève tout simplement de l’ordre de la chronique policière-». Ce commentaire donné en incise cherche à minimiser l’effet des manifestations, en accord avec le programme discursif de CL.

512

Trad : « cela n’a été qu’une manœuvre électoraliste, grossière, mesquine et maladroite ».

513

Trad : « (la) finalité était flagrante : il s’agissait de capitaliser électoralement l’énorme flux d’admiration, de respect et de sympathie qui entoure le héros dans sa tournée par l’Amérique (latine) ».

Aire scripturale n° 8 : 6 octobre 1964, page 17. Encadré 6 : «Cita un Comentario de Clarín la TV Francesa».

Le récit de la deuxième série d’incidents impliquant des péronistes à Córdoba se décline en plusieurs étapes dans les rues du centre-ville, devant la CGT et devant le Palais de Justice. Le numéro du 7 octobre 1964 lui consacre 4 aires de scription514.

Tout d’abord, la Une du 7 octobre515 se présente comme un échantillon du projet discursif de CL

car elle oppose deux encadrés : l’un signalant la gravité de la manifestation dans le cadre de la visite de CDG et l’autre la condamnation et la relativisation officielle de l’incident.

Ainsi, l’encadré 7 présente-t-il une «manifestación Política (…)»516 qui «provocó Graves Hechos:

Hubo 29 Heridos y Numerosos Detenidos. Entre Ellos Vandor»517, alors que l’encadré 8 indique

514

Que nous désignons comme AS 9, AS 10, AS 11 et AS 12.

515

Correspondant à l’aire scripturale 9 de notre corpus.

516

Trad : « (une) manifestation politique ».

Aire scripturale n° 9: 7 octobre 1964, Une. Encadré 7: «Incidente». Encadré 8 : «Condenación».

par la voix du président Illia : «fue un pequeño grupo sectorizado, el que pretendió empañar sin

conseguirlo, un acto fraterno»518. Ces incidents graves semblent donc avoir été provoqués par les

péronistes, même si leur nom n’est pas (encore) évoqué, comme l’arrestation d’Augusto Timoteo Vandor, le leader syndical péroniste, le suggère. Nous voyons donc que le récit de Clarín oscille, tout le long du numéro du 7 octobre, entre deux pôles opposant des faits graves provoqués par des manifestants violents à une relativisation discursive des conséquences.

Dans ce sens, l’aire scripturale 10519 reproduit ce balancement bipolaire. Structurée autour de la thématique des incidents à Córdoba, cette page présente trois articles520, un encadré521, une

photo et une légende qui se répondent et se complètent. Les titrailles522 mettent l’accent sur la

violence des manifestations et leurs conséquences tout en désignant les péronistes, à travers des euphémismes, comme les responsables des troubles. Dans ce sens, le plan américain de la photo523, située dans la partie supérieure droite de l’aire scripturale, renforce l’idée d’action des manifestants, doublée par la légende524 qui rend explicitement les péronistes coupables de la violence. Cette image semble donc résumer l’esprit de toute l’aire scripturale. En effet, l’article 4

intitulé «Manifestaciones de Tipo Político : Hay Heridos y Detenidos»525 met en scène, depuis le

chapeau, des manifestants «identificados con el régimen despuesto (SIC) en 1955»526 qui ont provoqué des «violentos disturbios»527. Par ailleurs, le surtitre «Disturbios en Córdoba»528, ainsi que les intertitres «Hechos sangrientos»529, «Clima de tensión»530, «Más disparos»531 amplifient la sensation de violence. Dans le corps de l’article 4, deux acteurs sont confrontés : les manifestants péronistes et la police. L’origine des problèmes est signalée comme un «clima de

tensión surgido en Córdoba al producirse la llegada de legiones de adictos a la ex dictadura»532.

La voix énonciative dépeint des scènes de guerre, depuis l’attaque de l’article, opposant un 517

Trad : « (…) elle provoqua des faits graves : il y eut 29 blessés et beaucoup de gens arrêtés, parmi lesquels Vandor ».

518

Trad : « Ce fut un petit groupe déterminé qui prétendit troubler, sans y parvenir, un acte fraternel ».

519

Elle correspond à la page 20 du 7 octobre 1964, sous la rubrique « Information ».

520

Que nous avons désigné comme les articles 4, 5 et 6.

521

Il s’agit de l’encadré n 9.

522

Notamment le chapeau et les intertitres de l’article n 4.

523

Il est impossible de restituer fidèlement le sens de la photo étant donné la faible qualité du matériel d’origine (micro-film).

524

«(…) Grupos de manifestantes, identificados con el régimen despuesto en 1955, provocaron serios disturbios que no empañaron el brillo de la jornada». Trad : « (…) Des groupes de manifestants, identifiés au régime déchu en 1955, ont provoqué des incidents sérieux qui n’ont pas troublé l’éclat de la journée ».

525

Trad : «Manifestations de type politique : Il y a des gens blessés et arrêtés».

526

Trad : « identifiés avec le régime déchu en 1955 ».

527

Trad : « des troubles violents ».

528

Trad : « Emeutes à Córdoba ».

529

Trad : « Faits sanglants ».

530

Trad : « Climat de tension ».

531

Trad : « D’autres coups de feu ».

532

groupe de péronistes qui «lanzaban piedras»533 aux forces de l’ordre armées, qui répondaient par des bombes lacrymogènes, tiraient des coups de feu534 et avançaient dans des chars d’assaut. La disproportion des scènes est étonnante et semble être construite à charge contre les péronistes qui sont, selon le récit de CL, les responsables de l’«infernal desorden»535. Si la seconde partie de l’article reconstruit l’ordre des incidents en précisant que la police agit en lançant des bombes lacrymogènes, face au refus des péronistes de se disperser et que les manifestants rétorquent en lançant des pierres, la focalisation du récit sur la prétendue violence des péronistes est flagrante.

Le récit des incidents fait des rues de la ville méditerranéenne536 un champ de bataille où les péronistes résistent aussi en proférant des «gritos de hostilidad»537 face à ce que Clarín désigne comme une fusillade. Comme le récit du S-E s’attelle à rendre les péronistes responsables des débordements, l’arrivée des présidents français et argentin au Palais de Justice est présentée comme hautement surveillée face à la violence et devant l’impuissance «de los cuatro policías franceses de la ‘Sureté’»538 à enrayer les dangers. En outre, en énonçant que : «El tiroteo fue presenciado por el enviado especial de Clarín desde una de las ventanas del Palacio de Justicia, en cuyo interior se vivían momentos de zozobra ante el matiz violento que había tomado la tumultuosa manifestación de unas dos mil personas (…)»539, le S-E dramatise la scène en attribuant la responsabilité des débordements aux péronistes. Construit sous la forme d’un fait divers, cet article se poursuit dans l’aire scripturale n 11 dans laquelle d’autres faits de violence ayant eu lieu à Córdoba sont pointés. Ce fut le cas des troubles devant la CGT où «se había concentrado casi un millar de personas que lanzando gritos de ‘viva De Gaulle’ y ‘viva Perón’ consiguieron romper el cordón policial y abalanzarse sobre el vehículo»540 et «resutó (SIC) con una pequeña herida en el dedo índice de la mano derecha el presidente Arturo Illia»541. Ainsi

533

Trad : « (ils) lançaient des pierres ».

534

Tout d’abord deux coups de feu tirés en l’air, puis trente autres selon le texte, mais ces derniers atteignirent des manifestants et les blessèrent.

535

Trad : « désordre infernal ».

536

La ville de Córdoba est connue sous les noms de «ciudad mediterránea» (car elle est située au milieu des terres) ou de «la Docta» (car il s’agit de la ville qui eut la première Université fondée en 1613 et qui resta la seule pendant presque deux siècles).

537

Trad : « (des) cris d’hostilité ».

538

Trad : « des quatre policiers français de la ‘Sûreté’ ».

539 Trad : « L’envoyé spécial de Clarín fut témoin de la fusillade depuis l’une des fenêtres du Palais de Justice, à l’intérieur duquel on vivait des moments d’angoisse devant la tournure violente que la manifestation tumultueuse d’environ deux mille personnes avait prise ».

540

Trad : « un millier de personnes environ s’était concentré lançant des cris ‘vive De Gaulle’ et ‘vive Perón’ et a réussi à briser le cordon policier et à se jeter sur le véhicule ».

541

définie, l’action des péronistes semble passer, sans escales, des scansions des refrains politiques à une tentative d’agression contre le président argentin. Le pouvoir de la résistance péroniste et la faiblesse du gouvernement argentin semblent amplifiés. Par ailleurs, si le bilan des blessés est précisé dans l’encadré 9 de l’AS 10, l’espace de scription n 11 présente un encadré

intitulé : «Interpelación» 542 où la question de la responsabilité de la police et du

gouvernement543 face à la violence est abordée. Or, la présence de cet encadré ne suffit pas à contrecarrer la mise en scène de CL à charge contre les péronistes visible tout le long du numéro du 7 octobre.

542

Trad : « Interpellation ».

543

Le sénateur Pablo Miguel du MIR y consigne une «manifestation bruyante, mais pacifique» et demande une interpellation au Ministre du Gouvernement de Córdoba.

Aire scripturale n° 10 : 7 octobre 1964, page 20. Article n° 4: «Manifestaciones de Tipo Político : Hay Heridos y Detenidos». Article n° 5: «Un balance con serias críticas». Article n° 6: «Condenó los Episodios el Presidente de la Nación». Encadré n 9 : «29 Heridos».

Le programme discursif de Clarín face aux incidents de Córdoba fait surface dans l’article 5 de l’AS 10 intitulé «Un balance con serias críticas»544. Ecrit par Juan Bellveser, correspondant du journal argentin en France, il a recours à la presse française en vue de faire valider le récit de CL. Les citations des journaux Le Monde, Le Figaro et L’Aurore montrent un président français «decepcionado»545 par le manque de contact avec de vrais étudiants à l’Université de Buenos Aires. Cette critique au gouvernement d’Illia se poursuit à travers la référence à France Soir selon

lequel «De Gaulle estaba furioso»546 parce que «se extrañaba de que las autoridades argentinas

no hubieran sabido evitar las tumultuosas manifestaciones y los desórdenes que ocurrieron en torno mismo del automóvil en el que él iba»547. Si le gouvernement argentin apparaît encore comme incapable d’assurer la protection de l’hôte français face à l’avancée des péronistes, le scripteur-énonciateur semble vouloir les mettre à l’écart ne serait-ce que par le discours en soutenant que : «el general De Gaulle tiene a Perón en mediocre consideración y por eso le desagradaba ver unido su nombre al del ex dictador. A los ojos del general De Gaulle, Perón sigue siendo un demagogo populachero y el hombre que durante la guerra se mostró favorable a los alemanes. Pero puede pensarse que el general De Gaulle se sintió decepcionado también por la debilidad del gobierno argentino (…)»548.

544

Trad : « Un bilan avec des critiques sévères ».

545

Trad : « déçu ».

546

Trad : « De Gaulle était furieux ».

547

Trad : « il s’étonnait du fait que les autorités argentines n’aient pas su éviter les manifestations tumultueuses et les désordres survenus autour même du véhicule dans lequel il se trouvait ».

548

Trad : « le général De Gaulle a une médiocre considération pour Perón et c’est pour cela qu’il lui déplaisait de voir son nom lié à celui de l’ancien dictateur. Aux yeux du général De Gaulle, Perón continue d’être un démagogue populacier et l’homme qui pendant la guerre se montra favorable aux Allemands. Mais il est possible de penser que le général De Gaulle a été également déçu par la faiblesse du gouvernement argentin ».