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Les accords bilatéraux et notamment l’Accord sur la libre circulation des personnescirculation des personnes

« nationalité » au niveau régional

B. Les accords bilatéraux et notamment l’Accord sur la libre circulation des personnescirculation des personnes

200. Les accords bilatéraux conclus entre la Suisse et l’Union européenne sont entrés en vigueur le 1erjuin 2002672suite à leur ratification par les Etats membres de l’Union. La Convention AELE révisée, entrée en vigueur à la même date, étend aux pays de l’Association européenne de libre échange l’essentiel des acquis des nouveaux accords bilatéraux. Ces accords touchent sept domaines différents, au nombre desquels il convient en particulier de mentionner la libre circulation des personnes673, qui est régie par l’ALCP et ses annexes674pour les relations de la Suisse avec l’Union européenne675et avec les Etats membres de l’AELE676. L’objectif général de cet instrument international est d’accorder les mêmes conditions de vie, d’emploi et de travail que celles accordées aux nationaux, mais aussi, et plus spécifiquement, le droit d’entrée et de sortie, de séjour et le droit d’accès à une activité économique677. Les ressortissants de l’UE/AELE678ne sont dès lors en principe plus soumis à la législation ordinaire en matière de droit des étrangers679.

201. L’Accord sur la libre circulation des personnes est directement applicable680. Loin de n’être constitué que de dispositions programme, les règles qu’il

672 RO 2002 1527.

673 Les autres domaines sont le transport terrestre et aérien, l’agriculture, les marchés publics, les obstacles techniques au commerce, la recherche. Voir FELDERDANIEL, Appréciation juridique et politique du cadre institutionnel et des dispositions générales des accords sectoriels,in FELDERDANIEL/KADDOUSCHRISTINE(éd.), Accords bilatéraux Suisse-UE (Commentaires), Bâle 2001, p. 117-148 ; KADDOUSCHRISTINE, p. 79ss ; ZÄCH ROGER, Gesamtüberblick,in THÜRERDANIEL/WEBERROLFH./ZÄCHROGER(éd.), Bilaterale Verträge Schweiz-EG, Ein Handbuch, Zurich 2002, p. 3-15. Rappelons que, bien qu’étant distincts, les sept accords ne forment qu’un tout, dans la mesure où, en vertu de la clause guillotine, la dénonciation de l’un des accords entraîne l’annulation des six autres.

674 Les annexes et protocoles font partie intégrante de l’Accord (art. 15 ALCP).

675 Belgique, Danemark, Allemagne, Grèce, Espagne, France, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Autriche, Portugal, Finlande, Suède, Royaume-Uni. Il sied de noter que malgré l’élargissement à dix nouveaux Etats membres (Estonie, Lituanie, Lettonie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie, République tchèque, Hongrie et Chypre) opéré en date du 1ermai 2004, l’application de l’ALCP n’a pas été automatique. En effet, l’extension de l’ALCP a été soumise au référendum facultatif. Le peuple l’ayant toutefois acceptée en date du 25 septembre 2005 (FF 2005 6467), l’ALCP s’applique, depuis le ler avril 2006, également aux nouveaux membres de l’Union (RO 2006 979). KÄLINWALTER,Freizügigkeitsabkommen, p. 17.

676 La Norvège et l’Islande en vertu d’un amendement à la Convention instituant l’AELE, le Lichtenstein par un protocole bilatéral spécial annexé à la Convention instituant l’AELE.

677 Art. 1 let a à d ALCP.

678 Mais également les membres de leur famille, indépendamment de leur nationalité, sont autorisés à séjourner en Suisse en vertu des dispositions sur le regroupement familial (art. 3 Annexe I ALCP).

679 La réglementation ordinaire sur le droit des étrangers s’applique toutefois aux ressortissants de l’UE/AELE, mais seulement de manière limitée, c’est-à-dire lorsque l’Accord sur la libre circulation des personnes contient une lacune ou si la législation nationale est plus favorable (art. 1 LSEE ; art. 2 al. 2 et 3 LEtr).

680 KÄLINWALTER, Freizügigkeitsabkommen, p. 19 ; MACHOLIVIER, p. 342. L’applicabilité directe est l’aptitude d’une règle de droit à conférer par elle-même aux particuliers, sans qu’aucune mesure interne d’exécution ne soit nécessaire, des droits et des obligations dont ils peuvent se prévaloir devant les autorités de l’Etat où cette règle est en vigueur, AUERANDREAS/MALINVERNIGIORGIO/HOTTELIERMICHEL,Volume 1, n° 1307, p. 464 ; FILLIEZFABRICE, p. 192 ; KADDOUSCHRISTINE, p. 110 ; MACHOLIVIER, p. 341 ; MARESCAUXMARIE-HÉLÈNE, p. 16s.

JAAC 2000 (64) n° 20, p. 273. ATF 124 III 90 = JT 1998 I 272L.X., cons. 3a ; ATF 120 Ia 1 = JT 1996 I 627

contient s’adressent directement aux particuliers concernés et sont suffisamment précises pour pouvoir être appliquées en tant que majeure d’un syllogisme681, notamment du fait de la reprise des règles matérielles concernant la libre circulation des personnes telles qu’elles sont en vigueur au sein de l’Union682.

202. L’Accord sur la libre circulation des personnes n’entrera en vigueur de façon définitive et complète que progressivement683, soit après la période transitoire de douze ans. Il faut dès lors distinguer trois phases d’application de l’Accord dans le temps. La première phase a débuté le 1er juin 2002 et a duré deux ans. Elle se caractérisait par la forte réglementation qui subsistait pour l’accès à une activité économique684. Durant ladeuxième phase, qui a débuté le 1erjuin 2004 et qui perdura jusqu’en 2007, la priorité des travailleurs indigènes et le contrôle des conditions de rémunération ont été supprimés et remplacés par des mesures d’accompagnement, mais les contingents préférentiels ont été maintenus685. Latroisième phase, de 2007 à 2014, voit désormais la libre circulation des personnes introduite à titre d’essai. La Suisse pourra toutefois faire valoir pendant ces sept ans la clause de sauvegarde unilatérale afin de contrôler l’immigration des ressortissants de l’UE en réintroduisant des contingents si le nombre de nouveaux titres de séjour délivrés aux salariés et indépendants est supérieur, pour douze mois, à la moyenne des trois années précédentes de plus de 10%686. Il convient de noter que l’ALCP est conclu pour une durée limitée687.

203. Au sens large, le but de l’Accord sur la libre circulation des personnes est d’accorder un droit à l’égalité de traitement entre les ressortissants des Etats membres quant aux conditions de vie, d’emploi et de travail688. Pour y parvenir, l’un des moyens prévus par l’Accord689est d’instituer le droit de séjourner dans l’une des parties contractantes, droit qui est intimement lié au à celui d’accès à une activité

Verband Studierender an der Universität Zürich, Robert Hurst, Christine Ritzmann et Philipp Aregger, cons.

5b ; ATF 119 V 171X., cons. 4b.

681 FILLIEZFABRICE, p. 194s ; NGUYENMINHSON,Etrangers, p. 338 ; NGUYENMINHSON,Accord, p. 137. FF 1999 5440, p. 5651.

682 FILIEZFABRICE, p. 195. Par ailleurs, l’Accord fait également référence au droit communautaire, dans la mesure où les parties contractantes se sont engagées à faire le nécessaire afin que des droits et obligations équivalents à ceux contenus dans les actes juridiques de la Communauté européenne auxquels il est fait référence s’appliquent dans leurs relations (art. 16 § 1 ALCP). Ce sont les « normes équivalentes ». En d’autres termes, l’Accord renvoie à certains règlements et directives du droit communautaire qui ne sont donc pas directement applicables, puisque la législation suisse ne comporte aucun renvoi à l’acquis communautaire en matière de libre circulation des personnes. Art. 4 § 2 Annexe I ALCP : Règlement 1251/70, Directive 75/34/CEE. Art. 5 § 2 Annexe I ALCP : Directives 64/221/CEE, 72/194/CEE, 75/35/CEE.

Art. 22 § 2 Annexe I ALCP : Directive 97/71/CE. NGUYENMINHSON,Accord, p. 138.

683 FF 1999 5440, p. 5464.

684 Art. 10 § 2 ALCP. Il s’agissait, plus précisément, du maintien pour la Suisse de contingents préférentiels, le principe de la priorité des travailleurs indigènes et le contrôle des conditions de rémunération et de travail.

685 Art. 10 § 3 ALCP.

686 Art. 10 § 4 ALCP.

687 Art. 25 § 2 ALCP.

688 Art. 1 let. d ALCP. KADDOUSCHRISTINE, p. 80.

689 Art. 1 let. a ALCP.

Chapitre 6 La citoyenneté de l’Union ou la « nationalité » au niveau régional

économique690. L’Accord traite également du droit de séjour du prestataire de service691 et de celui de la personne n’exerçant pas d’activité lucrative692. Dès lors, l’Accord reprend les trois types d’autorisations prévues par le droit communautaire693, soit l’autorisation de courte durée694, l’autorisation de séjour695et l’autorisation pour travailleur frontalier696. Les personnes concernées bénéficient donc d’un véritable droit à l’obtention d’un titre de séjour, bouleversant ainsi les fondements classiques du droit des étrangers697. L’Accord prévoit également le droit au regroupement familial698: les conjoints et les enfants à charge de moins de vingt-et-un ans ainsi que les ascendants et descendants à charge, quelle que soit leur nationalité, ont le droit de prendre domicile chez le travailleur et le conjoint et les enfants sont également autorisés à exercer une activité économique699.

204. L’Accord sur la libre circulation des personnes prévoit encore des droits servant à la correcte mise en œuvre de la libre circulation des personnes. Il en va ainsi de l’interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité, au cœur de la libre circulation des personnes700, et de la mobilité géographique701. Concernant le premier de ces droits, l’art. 2 ALCP prévoit que « les ressortissants d’une partie contractante qui séjournent sur le territoire d’une autre partie contractante ne sont pas, dans l’application et conformément aux dispositions [de l’]accord, discriminés en raison de leur nationalité »702. S’agissant de la mobilité géographique, c’est-à-dire le changement de lieu de travail et de séjour, les ressortissants des parties contractantes ont le droit de se déplacer librement sur le territoire de l’Etat

690 Art. 4 ALCP.

691 Art. 5 ALCP.

692 Art. 6 ALCP.

693 NGUYEN MINH SON, Etrangers, p. 359 ; NGUYEN MINH SON, Accord, p. 157. Par ailleurs, l’autorisation d’établissement n’est pas connue en droit communautaire, mais existe tout de même pour les ressortissants de l’UE/AELE, et ce en vertu de la législation ordinaire sur les étrangers, puisqu’elle est plus favorable que l’acquis communautaire sur ce point (art. 1 LSEE). En effet, l’autorisation d’établissement inconditionnelle et de durée indéterminée. FF 1999 5440, p. 5660. NGUYENMINHSON,Accord, p. 158

694 Elle est prévue pour les séjours d’une durée inférieure à une année. Art. 6 § 2, 27 § 1 Annexe I ALCP.

695 Elle est conçue pour les séjours qui sont destinés à être permanents. Elle est octroyée pour les séjours d’une durée supérieure à une année et est valable cinq ans et est prolongée d’office pour une durée de cinq ans au moins. Art. 6 § 1 phrase Annexe I ALCP.

696 Art. 7, 28, 13, 32 Annexe I ALCP.

697 Voir l’art. 4 LSEE : « L’autorité statue librement […] sur l’octroi de l’autorisation de séjour ou d’établissement ». KÄLINWALTER,Freizügigkeitsabkommen, p. 23 ; MACHOLIVIER, p. 333s.

698 Art. 7 let. d ALCP ; art. 3 Annexe I ALCP. KÄLINWALTER,Freizügigkeitsabkommen, p. 27.

699 FF 1999 5440, p. 5617.

700 NGUYENMINHSON,Accord, p. 144 : « […] il ne peut y avoir une libre circulation des personnes effective que dans la mesure où les ressortissants des Etats membres de l’UE sont traités de manière égale aux nationaux ».

701 La mobilité professionnelle, c’est-à-dire le droit d’exercer la profession de son choix, fait également partie des droits conférés par l’ALCP (art. 8, 14, 30, 34 Annexe I ALCP).

702 Voir à ce sujet HANGARTNERYVO, Der Grundsatz der Nichtdiskriminierung wegen der Staatsangehörigkeit im Freizügigkeitsabkommen der Schweiz mit der Europäischen Gemeinschaft, PJA 2003, p. 257-269.

d’accueil703, les titres de séjour étant valables pour l’ensemble du territoire, donc en l’occurrence pour l’ensemble de la Suisse704, de sorte que les intéressés ne doivent plus requérir l’assentiment de l’autorité cantonale compétente. A cet égard, les ressortissants communautaires sont traités comme les Suisses qui bénéficient de la liberté d’établissement705.

205. Le Traité instituant la Communauté européenne a ajouté une dimension politique aux droits découlant de ce traité du fait de la création de la citoyenneté de l’Union, dont l’élément le plus important est sans conteste la libre circulation des personnes706. Même si l’Accord connaît une acception large de la libre circulation des personnes, il n’y inclut cependant pas une telle dimension politique707.