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L’évolution de la méthode Jaques-Dalcroze : trois couches historiques La première couche : vers une articulation de la Rythmique – 1906

Les premières expériences

Rappelons qu’en 1892 Jaques-Dalcroze est nommé professeur, d’abord d’harmonie, puis de solfège supérieur au Conservatoire de Genève. Les premiers cours d’harmonie qu’il donne le font réfléchir sur l’incapacité des élèves à noter une succession d’accords sans l’oreille intérieure qui l’anticipe pour eux. Il raconte :

Je fus dès le début de mon enseignement effrayé du manque de sentiment harmonique de la plupart de mes élèves, faisant cependant tous partie des classes supérieures instrumentales et vocales du Conservatoire. […] Ces élèves parvenaient à créer correctement des cadences, mais sans rien révéler de leur musicalité. Et j’en arrivai peu à peu à me persuader que l’on ne peut créer des harmonies vraiment musicales que si celles-ci sont révélatrices d’un état musical harmonique intérieur (E.J.-D., 1935 : 5).

Plus tard il se souvient que « pour 9/10 des élèves, l’harmonie n’était qu’une question de mathématique et qu’ils n’entendaient pas les accords qu’ils écrivaient, d’où il résultait fatalement qu’ils n’étaient pas en état d’éprouver complètement les émotions musicales » (E.J.-D., 1916 : v).

Il continue :

Celles-ci, en effet ne sont pas uniquement d’ordre intellectuel. Elles agissent sensoriellement, elles mettent en vibration tout notre organisme. Si celui-ci n’est pas capable de vibrer intégralement, notre cerveau enregistre des sensations incomplètes. Je me dis donc qu’il convenait […] d’éduquer l’oreille de mes élèves et de leur enseigner la pratique de l’art avant de leur en inculquer la théorie (p. v).

Les lacunes des élèves étaient dues, selon lui, au fait que l’éducation musicale qu’ils recevaient avait pour but de former des virtuoses. Il plaint les jeunes étudiants de virtuosité qui « ne possèdent ni les dons de l’oreille ni ceux de l’émotion, se contentent d’imiter l’émotion du compositeur, sans être capables de la ressentir, et n’ont d’autre sensibilité que celle des doigts, d’autre volonté que celle des autres, d’autre faculté motrice qu’un automatisme péniblement acquis. La virtuosité musicale contemporaine s’est spécialisée dans une technique des doigts complètement isolée des facultés cérébrales et sentimentales. Elle n’est plus un moyen, elle est un but » (E.J.-D., 1909 : 63).

Il incrimine également la fragmentation des études musicales :

Celles de piano ne sont pas reliées à celles d’harmonie, celles d’harmonie ne le sont pas à celles des styles à travers les âges, celles d’histoire de la musique ne s’appuient pas sur celles de la connaissance de l’histoire générale des peuples et des individus (E.J.-D., 1942, cité par Dutoit-Carlier, 1965 : 312).

Il s’applique donc à inventer des exercices « destinés à reconnaître la hauteur des sons, à mesurer les intervalles, à scruter les sons harmoniques, à individualiser les notes diverses des accords, à suivre les dessins contrapuntiques des polyphonies, à différencier les tonalités, à analyser les rapports entre les sensations auditives et les sensations vocales, à développer les qualités réceptives de l’oreille, et – grâce à une gymnastique d’un nouveau genre s’adressant au système nerveux – à créer entre le cerveau, l’oreille et le larynx les courants nécessaires pour faire de l’organisme tout entier ce que l’on pourrait appeler une oreille intérieure… » (E.J.-D., 1898 : 10).

Son premier objectif est de remédier aux lacunes de l’éducation musicale du moment et de trouver une méthode pour rendre l’élève apte à expérimenter et à exprimer ses capacités musicales. Il cherche également le moyen de développer ses « facultés musicales […] de façon à le livrer plus tard aux études techniques instrumentales dans des conditions qui lui permettent de faire de cette technique un moyen de s’extérioriser » (E.J.-D., 1909 : 65).

La musicalité définie

Le musicien complet, écrit Jaques-Dalcroze, est celui qui transforme inconsciemment tous les événements de sa vie et de celle des autres en manifestations d’ordre sonore. Tout ce qu’il voit et tout ce qu’il écoute, tout ce qu’il ressent, tout ce qu’il devine devient musique (E.J.-D., 1945 : 99).

Une définition assez vague, en fait, si l’on ne se réfère pas aux facultés musicales qu’il considère vitales pour un musicien :

la finesse de l’oreille, la sensibilité nerveuse, le sentiment rythmique – c’est-à-dire le sentiment juste des rapports existant entre les mouvements dans le temps et les mouvements dans l’espace – et enfin la faculté d’extérioriser spontanément les sensations émotives (E.J.-D., 1909 : 64).

Autrement dit :

Pour être musicien complet, un enfant doit posséder un ensemble d'agents et de qualités d'essence physique et spirituelle qui sont, d'une part : l'oreille, la voix et la conscience du son, et de l'autre : le corps tout entier (ossature résonante, muscles, nerfs) et la conscience du rythme corporel (E.J.-D., 1907 : 37).

Il explique que la conscience du son nous permet de nous représenter, sans l’aide d’un instrument, les successions et les superpositions de sons, et que cette faculté peut être développée grâce à une éducation de l’oreille et de la voix. La conscience du rythme est l’aptitude à « nous représenter toute succession et toute réunion de fractions de temps dans toutes leurs nuances de rapidité et d'énergie » (p. 37), et elle se forme par une éducation corporelle et des expériences de « contraction et de décontraction musculaire, à tous les degrés d'énergie et de rapidité » (p. 37).

Par sa méthode, Jaques-Dalcroze voulait ‘musicaliser’ les élèves en éveillant « leur tempérament et leurs facultés auditives » (E.J.-D., 1923 : 23). La force de Jaques-Dalcroze était de ne pas tenir la musicalité comme une donnée à priori, mais comme une capacité qui peut se développer, contrairement aux méthodes en vigueur à son époque. La ‘musicalité’ ne fait pas partie des savoirs dont Robin (2003 : 30) retient « la capacité d’affirmer un fait connu, qui donne lieu à une explication et à une représentation explicite de l’objet » (cf. p. 6), mais son développement est généralement considéré comme partie intégrante de l’éducation musicale.

L’arythmie : une entrave à la musicalité

Au cours des premières expériences, comme il s’en souviendra plus tard, Jaques-Dalcroze comprend que « le perfectionnement des facultés d’entendement et d’appréciation de sonorité ne suffit pas à assurer la musicalité des étudiants » (E.J.-D., 1935 : 5). Il constate chez les élèves ce qu’il appellera un état d’arythmie musicale22, que traduisent des faiblesses d’exécution musicale telles que « l’incapacité de poursuivre un mouvement pendant tout le temps nécessaire à sa réalisation normale ; de l’accélérer ou de le ralentir quand il doit rester uniforme ; de ne pas savoir l’accélérer ou le ralentir quand il doit l’être ; de le saccader et de

22 Emile Jaques-Dalcroze consacre un chapitre du livre Souvenirs, Notes et Critiques (E.J.-D., 1942 : 71-84) à l’arythmie. Ce chapitre reprend un article « Remarques sur l’arythmie » qu’il avait écrit en 1932 pour Le Rythme (n° 33 : 3-13).

le morceler quand il doit être lié et inversement ; de le commencer ou de le terminer trop tard ou trop tôt ; de ne pas savoir enchaîner deux mouvements de natures différentes (un lent et un rapide, un souple et un rigide, un énergique et un doux) ; d’être incapable d’exécuter simultanément deux ou plusieurs mouvements contraires ; de ne pas savoir nuancer un mouvement, c’est-à-dire par exemple respecter le forte au piano ; de ne pas pouvoir l’accentuer métriquement et pathétiquement aux endroits fixés par la carrure ou par l’émotion musicale » (E.J.-D., 1910 : 20-21).

Il en conclut qu’il s’agit d’un défaut de compréhension ou de réalisation rythmique (Bachmann, 1984 : 109), « qu’il existe une connexion instinctive du rythme en toutes ses nuances, et du geste » (E.J.-D., 1907 : 41) et que « toutes les causes de l’arythmie musicale sont d’ordre physique » (E.J.-D., 1910 : 20).

Jaques-Dalcroze suggère trois causes possibles à ces défauts :

 Premièrement, « l’incapacité du cerveau à donner des ordres suffisamment rapides aux muscles chargés d’exécuter le mouvement » (p. 21). Selon lui le cerveau n’est pas capable de saisir assez rapidement les données rythmiques pour pouvoir les donner, ce qui veut dire que les connaissances rythmiques sont en cause.

 Deuxièmement, « l’incapacité du système nerveux à transmettre ces ordres fidèlement et calmement, sans se tromper d’adresse » (E.J.-D., 1910 : 21). Si le système nerveux ne peut pas transmettre les ordres bien conçus dans le cerveau, c’est que ce système n’est pas équilibré.

 Troisièmement, « l’incapacité des muscles à les exécuter irréprochablement » (E.J.-D., 1910 : 21). C’est-à-dire que les muscles auxquels les ordres sont transmis ne sont pas capables de réagir rapidement et correctement.

Bachman (1984 : 110-111) résume ces trois causes comme étant des problèmes d’émission, de transmission et d’effection. En bref, l’arythmie musicale vient d’un « manque d’harmonie et de coordination entre la conception du mouvement et sa réalisation » (E.J.-D., 1910 : 21).

Une éducation par la musique et pour la musique

Les trois catégories de lacunes constatées par Jaques-Dalcroze et exposées ci-dessus le conduisent à imaginer un premier corpus d’exercices pour

 Contraindre les muscles à exécuter avec précision, dans un temps donné, les ordres du cerveau, qu’il s’agisse d’action ou d’inhibition,

 Automatiser des séries de mouvements dans leurs multiples enchaînements,

 Allier des mouvements automatiques à des mouvements volontaires d’un ordre contraire,

 Eliminer en toute action motrice des innervations inutiles et provoquer l’équilibre des forces musculaires antagonistes,

 Individualiser les sensations musculaires et perfectionner le sens des attitudes (E.J.-D., 1910 : 22).

Le but des exercices ainsi créés serait de diminuer « le temps perdu entre l’ordre cérébral et la réalisation musculaire » (p. 22).

Il réfléchit encore : « il est deux agents corporels à l’aide desquels nous apprécions, nous comprenons, nous vivons, nous éprouvons la musique ; ces deux agents sont l’oreille, en ce qui concerne la sonorité, le système nerveux tout entier en ce qui concerne le rythme. » (E.J.-D., 1909 : 65), mais

Comme l'exercice de la musique demande le concours simultané de l'oreille, de la voix et de l'appareil musculaire, et qu'il ne saurait être question, au début des études musicales d'exercer à la fois tous ces agents musicaux, il convient de se demander lequel de ces agents doit être exercé en premier (E.J.-D., 1907 : 38).

Des deux éléments principaux de la musique qu’il identifie comme la sonorité et le rythme, Jaques-Dalcroze propose que l’éducation rythmique soit entreprise en premier. Le lecteur d’aujourd’hui est appelé à comprendre que pour Jaques-Dalcroze le mot ‘rythme’ veut surtout dire le rythme musical - non pas le rythme isolé du son - mais le rythme incarné dans un cadre mélodique et harmonique, soutenu par des accents agogiques et modulé par le phrasé. Par

‘système nerveux’, il entend les sources de perception chez l’être humain (auditive, kinesthésique, visuelle, tactile) ainsi que le système musculaire qui est contrôlé par le cerveau.

Ainsi, écrit-il, « Je me prends à rêver d'une éducation musicale dans laquelle le corps jouerait lui-même le rôle d'intermédiaire entre les sons et notre pensée, et deviendrait l'instrument direct de nos sentiments […] Et ce serait là à la fois une instruction pour le rythme et une éducation par le rythme » (E.J.-D., 1898 : 12).

Ayant constaté de bons résultats chez les adultes, il ouvre des cours pour les enfants en se disant qu’ils « n’ont pas le cerveau encombré de tous ces raisonnements et de toutes ces analyses qui sont les plus redoutables antagonistes de notre personnalité » (E.J.-D., 1916 : v), et donc qu’il y aura de meilleurs résultats chez eux. Mais il s’aperçoit que « ceux-ci obéissaient trop lentement, ceux-là trop vite aux commandements, que certains, capables d’accomplir aisément tel exercice dans un temps donné, ne pouvaient subitement en entreprendre un autre […] que d’autres encore, après avoir parfaitement débuté dans leur exécution corporelle, se troublaient au bout d’un moment et terminaient dans la confusion et le désarroi ce qu’ils avaient nettement et clairement commencé » (p. v). Il comprend alors que

« pour exécuter corporellement un rythme avec précision, il ne suffit pas d’avoir saisi intellectuellement ce rythme et de posséder un appareil musculaire capable d’en assurer la bonne interprétation. Il faut encore, et surtout, établir des communications rapides entre le cerveau qui conçoit et analyse et le corps qui exécute » (p. v). Et il conclut que c’est le bon fonctionnement du système nerveux qui permet à de telles communications de s’opérer dans l’organisme.

On peut donc suivre l’évolution de la logique de Jaques-Dalcroze :

1. Il constate ce qu’il appelle un manque de sensibilité musicale chez les élèves au Conservatoire. Ce sont des étudiants en cursus professionnel qui sont supposés viser une carrière dans le domaine de la musique, comme interprète, comme pédagogue ou comme compositeur. Il imagine des exercices pour développer l’oreille intérieure de ses étudiants, et pour intégrer leurs études musicales afin qu’elles soient moins fragmentées.

2. Il remarque aussitôt que les fautes d’exécution musicale viennent d’une lacune dans la compréhension ou la réalisation du rythme. Il commence à créer des exercices pour remédier aux lacunes rythmiques des élèves et pour harmoniser le système nerveux au niveau de l’émission et la transmission des commandes du cerveau, par des exercices de marche en battant la mesure.

3. Enfin, devant les difficultés physiques des élèves au niveau musculaire pour effectuer avec rapidité et précision les commandes du cerveau, il crée des exercices de ce que nous appelons ‘la conscience corporelle’ – exercices qui rendent l’élève conscient de sa musculature, et de l’effort nécessaire pour la mouvoir. Ces exercices sont empruntés à la gymnastique et à la danse, et sont considérés par Jaques-Dalcroze

comme préparation à la rythmique. Il les décrit, d’ailleurs, dans un article, La grammaire de la Rythmique (E.J.-D., 1926).

Il convient de s’arrêter brièvement sur ce dernier point. Les exercices prévus comme préparation à la rythmique sont, par exemple, des exercices pour le développement de l’élasticité, la contraction et la décontraction musculaire ; l’étude de la marche, des gestes, des attitudes corporelles, des points de départ et d’arrivée, de l’utilisation de l’espace, pour n’en citer que quelques-uns. Ce qui différencie ces exercices de toute étude artistique de mouvement est l’importance donnée par Jaques-Dalcroze aux « rapports entre mouvements instinctifs et mouvements volontaires […], entre la spontanéité du rythme et la discipline de la mesure » (Bachmann, 1984 : 182).

Ce sont des exercices qui se font sous l’influence de la musique, le plus souvent sa musique improvisée, car le principe fondamental de la rythmique est la conviction de Jaques-Dalcroze que la musique s’adresse à l’organisme directement et avant même toute prise de conscience.

Il donne à la musique le rôle d’éducateur et de facilitateur :

Si je bâtis tout mon système sur la musique, c’est que la musique est une force physique considérable, une résultante de nos fonctions animiques et expressives, qui, de par son pouvoir d’excitation et de régularisation, peut régler toutes nos fonctions vitales (E.J.-D., 1917 : viii).

Mais il ne s’arrête pas là. Il prévoit les conséquences d’une éducation musicale qui vise à harmoniser les facultés sensorielles, motrices, mentales et affectives de l’individu. Pour lui, un peuple bien éduqué dans les arts sera en mesure de créer une société plus élevée et plus humaine. Ces jeunes, éduqués artistiquement par une méthode qui réunit corps et esprit, deviendront des êtres humains harmonisés corporellement, intellectuellement, artistiquement et émotionnellement, et la société dont ils font partie pourra en effet en bénéficier.

C’est certainement une vision grandiose. Mais pourquoi la musique ? Jaques-Dalcroze envisage l’éducation par le rythme (la musique) comme éducation corporelle du système nerveux afin de rendre l’élève apte à posséder son corps, dans toutes ses dynamiques d’activité et repos, de force et souplesse, de contraction et décontraction ; il imagine la possibilité de réunir l’esprit et le corps en réduisant le temps entre les commandes du cerveau et les réalisations par le corps. Dans cette optique, la musique constitue le moyen privilégié.

Il ne faut pas oublier que pour Jaques-Dalcroze sa méthode était conçue pour servir à l’éducation musicale, car à ses yeux, la musique est toujours au premier plan, comme agent à la fois d’encadrement de l’action corporelle et de fusion du corps et de l’esprit :

En même temps qu’un moyen de réunir les composantes de l’être, elle [la musique] fournit un modèle toujours présent de l’achèvement de cette réunion [corps/esprit]. Car, dans la musique, les sons, les timbres et les rythmes, les nuances, les silences, les accents, les allures, les phénomènes physiques et dynamiques du monde sonore se trouvent combinés, ordonnés, superposés, mesurés, mis en forme par la pensée créatrice qui leur confère un sens dans la double acception de ce terme : direction et signification, par lesquelles l’œuvre musicale acquiert son individualité (Bachmann, 1984 : 23).

Dès le début, la rythmique est conçue comme éducation multidimensionnelle. Enracinée dans la pédagogie, la gymnastique, la danse, la musique, la philosophie et même la physiologie, elle se nourrit de tous ces domaines, et elle les touche tous, sans pour autant être définie par l’un ou l’autre d’entre eux. Si la détermination à réformer l’éducation musicale de son époque intervient en premier lieu, l’Education nouvelle qui fleurit en ce début du siècle lui donne un modèle pédagogique qu’il peut coupler à sa propre conception idéologique.

Sa réalisation met Jaques-Dalcroze sur le chemin d’une éducation corporelle, reposant sur les concepts culturels et philosophiques dont il est l’héritier, à savoir d’une part, l’évolution pendant le 19ème siècle de la notion du corps, d’autre part, la dualité philosophique corps/esprit.

L’être humain en harmonie physique, intellectuelle et émotionnelle, devient capable de mettre la musique en forme par sa pensée créatrice (Bachmann, 1984 : 23), libérée de toute entrave.

Telle est la pensée d’Emile Jaques-Dalcroze, en gestation pendant plusieurs années. Ce n’est qu’en 1906 qu’il se sent prêt à publier le résultat de sa réflexion sous la forme d’un manuel.

La méthode Jaques-Dalcroze formalisée - 1906

Les premières années, à partir en tout cas de 1892, constituent pour Jaques-Dalcroze un temps de recherche, de réflexion et de prise de conscience. Le concept de la rythmique est là, mais elle n’a pas encore trouvé sa forme. La première édition d’une méthode formalisée paraît en 1906, sous le titre Méthode Jaques-Dalcroze pour le Développement de l’instinct rythmique du sens auditif et du sentiment tonal en 5 parties. 8 Volumes :

Partie 1 : La Gymnastique rythmique, devait se faire en deux volumes. Un seul est sorti.

Partie 2 : Etude de la Portée musicale.

Partie 3 : Les Gammes et les Tonalités, le Phrasé et les Nuances.

Partie 4 : Les Intervalles et les Accords. Cette partie n’est jamais parue, mais elle a été intégrée à la Partie 3.

Partie 5 : L’Improvisation et l’Accompagnement au piano.

Deux volumes supplémentaires concernaient enfin : La Respiration et l’Innervation Musculaire et 84 Marches rythmiques pour une voix moyenne avec accompagnement de piano (ces dernières à utiliser de manière systématique pendant chaque leçon (voir Annexe 2A et 2B pour un exemple d’une leçon et deux marches).

Cette première mise en écriture de la méthode en fait essentiellement une méthode de Rythmique-Solfège. Il s’agit en tout cas de la formalisation des deux matières conceptualisées jusque-là. Le premier volume compte plus de plus de deux cent trente pages, rédigé avec une attention minutieuse. Au début, Jaques-Dalcroze explique les principes de la ‘Gymnastique rythmique’, et donne les principes élémentaires de sa méthode (E.J.-D., 1906 : viii) :

1. « Tout rythme est mouvement.

2. Tout mouvement est matériel.

3. Tout mouvement a besoin d’espace et de temps.

4. L’espace et le temps sont reliés par la matière qui les traverse dans un rythme éternel.

5. Les mouvements des tout petits enfants sont purement physiques et inconscients.

6. C’est l’expérience physique qui forme la conscience.

7. La perfection des moyens physiques produit la clarté de la perception intellectuelle.

8. Régler les mouvements, c’est développer la mentalité rythmique ».

Il reformulera ces principes à plusieurs reprises, les modifiant un peu, sans en changer pour autant l’essentiel, qui est, selon lui : le rythme est mouvement. Le mouvement est quelque

Il reformulera ces principes à plusieurs reprises, les modifiant un peu, sans en changer pour autant l’essentiel, qui est, selon lui : le rythme est mouvement. Le mouvement est quelque