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PierreCASPARDet Pénélope CASPARD-KARYDIS

Ladurée devie moyenne decesrevues estdedixansexadement (10,1),quelleque soit la catégorie à laquelle ellesappartiennent. Ce chiffreconstitue une moyenne entrelesrevueséphémèresquidurent moins de deux ans(un tiersdutotalsontdans cecas)etd'autres que leur longévité transformeenvéritablesinstitutions :6,3%des revuesvivent plusde trenteans,lesrecordsétantatteintsparleJournald'éducation (1815-1926), leManuel généralde l'Instructionprimaire (1832-1939), leJournal desinstituteurs(1858-1940) etlaRevuepédagogique(1878-1940).

Si l'onétablitlabalance entre la natalité et la mortalité desrevues,etsil'on raisonne en termesdestocks, onvoit(tableau 2)quelenombretotaldesrévuesdisponibles chaque année a connu une croissance presquecontinue; avant 1830, l'instituteur n'avaitàsadispositionqu'une ou deuxrevuesprofessionnelles;de1830à 1879,il s'en offre à lui de huit à douzeen moyenne, unetrentaineaprès 1880et, après

1920,plusd'unecinquantaine.

Tableau 2

:

Stock des revues existantes

(moyenneannuelle,pardécennie)

1810-1819 1820-1829 1830-1839 1840-1849 1850-1859 1860-1869 1870-1879 1880-1889 1890-1899 1900-1909 1910-1919 1920-1929 1930-1939

Pressepédagogiqueetformation continue des instituteurs(1815-1940)

Cetteabondanceéditoriale a toujours frappélesobservateurs. En1889,ledirecteur du Muséepédagogique,ArtidorBeurier, la juge« surprenante» ;en 1939 encore, A.Ferréécritqu'elleconstitue un « sujetd'étonnement,d'envie etd'admiration ». Il

apparaîtentous cas que,parsa massemême,cette pressea nécessairementjoué un rôleimportant dans laformationcontinue desmaîtres. Demêmequeleurdurée devie moyenne n'estpas négligeable,ces revues n'atteignent pasun public confi¬

dentiel. Si 30 % d'entre elles ont une vocation départementale, régionale voire locale, 70%s'adressentà l'ensembledesinstituteurs deFrance. 31 % sontéditées pardeséditeurscommerciaux,parmilesquelsfigurentlesplusgrandsnomsdel'édi¬

tion scolaire ef, parfois, de l'édition toutcourt : Hachette, Colin, Delagrave, Belin, Dupont, Nathan, Hatier, Larousse,Alcan,etc. Les autressont éditéespardes asso¬

ciationsd'envergure diverse(delasimpleamicalerégionale à depuissantes institu¬

tions comme laSociétépour l'Instruction élémentaire ou laLiguede l'Enseignement), par l'Administrationefdivers établissementspublics (crééen 1879, leMuséepéda¬

gogique,ancêtre del'INRP,publie une douzaine detitresjusqu'en 1940,parmiles¬

quels la prestigieuse Revuepédagogique[1878-1940]),ou par desindividus plus ou moins identifiables, le plus souvent instituteurs, parfois libraires, hommes de lettres, journalistes... Les tirages deces revuesne sontque rarement connus; lors¬

qu'ils le sont, ils atteignentparfoisdes niveaux impressionnants : à un Bulletin de l'Association coopérativedesinstituteurs del'arrondissement de Barbezieux (6), tiré à.. . 120exemplairesen 1924, on peut opposer maints tirages beaucoupplus consi¬

dérables:telsceuxdeL'Instituteurprimaire(Belin, 1879-1900 :20000ex.), L'Insti¬

tuteurrépublicain (1907-1914: 25000ex.)ou LeNouveaucertificat d'étudespri¬

maires (Delagrave, 1918-1940 : 37000ex.), chiffres remarquables si l'on songe que de 1890 à 1940lenombredes instituteurset institutricespublics nedépassait paslacentainede milliers,etque chaque école recevaitdéjàgratuitementle Bu//e-110 tindel'instructionprimairedesondépartement,comportantsouventuneimportante

partie pédagogique(7).

Par-delàcetteévolutionglobale, lapartpriseparchacundes troistypesde revues (Pédagogie-Cours-Innovation) a évolué d'unefaçon spécifique, permettant decarac¬

tériser trois grandesphases successives.

LES TROIS ÂGES DE LA PEDAGOGIE

Une première période couvre les premières décennies du XIXe siècle, jusqu'à la fin des années 1850. Elle voit le primat des journaux de pédagogie générale (cf. tableaux 1 et2). Lecontexte est celuid'un immense transfert de la responsabi-6 - Barbezieux(Charente) compteaujourd'hui5000habitants.

7 - Ces90 bulletins départementauxn'ontpasétéretenusdans le présentcorpus,leurobjec¬

tifpremier étantd'ordreadministratif.Cf.La Pressed'éducation...,op. cit.,t. 1,pp.298-306 ett. 4, pp.362-363.

RECHERCHEet FORMATION 23 - 1996

Pressepédagogiqueetformation continue des instituteurs(1815-1940)

Cetteabondanceéditoriale a toujours frappélesobservateurs. En1889,ledirecteur du Muséepédagogique,ArtidorBeurier, la juge« surprenante» ;en 1939 encore, A.Ferréécritqu'elleconstitue un « sujetd'étonnement,d'envie etd'admiration ». Il

apparaîtentous cas que,parsa massemême,cette pressea nécessairementjoué un rôleimportant dans laformationcontinue desmaîtres. Demêmequeleurdurée devie moyenne n'estpas négligeable,ces revues n'atteignent pasun public confi¬

dentiel. Si 30 % d'entre elles ont une vocation départementale, régionale voire locale, 70%s'adressentà l'ensembledesinstituteurs deFrance. 31 % sontéditées pardeséditeurscommerciaux,parmilesquelsfigurentlesplusgrandsnomsdel'édi¬

tion scolaire ef, parfois, de l'édition toutcourt : Hachette, Colin, Delagrave, Belin, Dupont, Nathan, Hatier, Larousse,Alcan,etc. Les autressont éditéespardes asso¬

ciationsd'envergure diverse(delasimpleamicalerégionale à depuissantes institu¬

tions comme laSociétépour l'Instruction élémentaire ou laLiguede l'Enseignement), par l'Administrationefdivers établissementspublics (crééen 1879, leMuséepéda¬

gogique,ancêtre del'INRP,publie une douzaine detitresjusqu'en 1940,parmiles¬

quels la prestigieuse Revuepédagogique[1878-1940]),ou par desindividus plus ou moins identifiables, le plus souvent instituteurs, parfois libraires, hommes de lettres, journalistes... Les tirages deces revuesne sontque rarement connus; lors¬

qu'ils le sont, ils atteignentparfoisdes niveaux impressionnants : à un Bulletin de l'Association coopérativedesinstituteurs del'arrondissement de Barbezieux (6), tiré à.. . 120exemplairesen 1924, on peut opposer maints tirages beaucoupplus consi¬

dérables:telsceuxdeL'Instituteurprimaire(Belin, 1879-1900 :20000ex.), L'Insti¬

tuteurrépublicain (1907-1914: 25000ex.)ou LeNouveaucertificat d'étudespri¬

maires (Delagrave, 1918-1940 : 37000ex.), chiffres remarquables si l'on songe que de 1890 à 1940lenombredes instituteurset institutricespublics nedépassait paslacentainede milliers,etque chaque école recevaitdéjàgratuitementle Bu//e-110 tindel'instructionprimairedesondépartement,comportantsouventuneimportante

partie pédagogique(7).

Par-delàcetteévolutionglobale, lapartpriseparchacundes troistypesde revues (Pédagogie-Cours-Innovation) a évolué d'unefaçon spécifique, permettant decarac¬

tériser trois grandesphases successives.

LES TROIS ÂGES DE LA PEDAGOGIE

Une première période couvre les premières décennies du XIXe siècle, jusqu'à la fin des années 1850. Elle voit le primat des journaux de pédagogie générale (cf. tableaux 1 et2). Lecontexte est celuid'un immense transfert de la responsabi-6 - Barbezieux(Charente) compteaujourd'hui5000habitants.

7 - Ces90 bulletins départementauxn'ontpasétéretenusdans le présentcorpus,leurobjec¬

tifpremier étantd'ordreadministratif.Cf.La Pressed'éducation...,op. cit.,t. 1,pp.298-306 ett. 4, pp.362-363.

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PierreCASPARD etPénélope CASPARD-KARYDIS

lité des communes etde l'Égliseversl'Etat,dansl'organisation de l'enseignementpri¬

maire. Lespédagogues émergent alors comme intellectuelsorganiques del'institu¬

tion scolaire, etfontde lapresseprofessionnelleunvedeur privilégiéde la popula¬

risationdeleurs idées. Cesannéessont cellesd'uneréflexion pédagogiqueintense, s'appliquantaussi bien àdesproblèmesd'ordrethéorique(la période voit, notam¬

ment, la naissancede l'histoiredel'éducationetdel'éducation comparée) quepra¬

tique (tournantnotamment autour des modes et des moyens d'enseignement). Les

deuxtiers des revues existantàcettepériode(cf.tableau3) s'attachent, principale¬

mentou exclusivement, à l'exposé decesdébats,auxquels universitairesethommes politiques participenten nombre.

Tableau 3

:

Revues disponibles, par genre et par période

(en %)

1815-1859 1860-1909 1910-1939

PÉDAGOGIE

65,8 32,2 27,5

Cours 30,9 45,3 21,5

Innovation 3,2 22,4 50,9

Total 100 100 100

La deuxièmepériodecouvrelesannées 1860à 1909. Ellevoittriompherlapréoc¬

cupationd'une organisation rigoureusedespratiquesenseignantes,au moins à un triple plan :agencementstriddescoursetdes classesà l'intérieurd'un systèmedes¬

tiné àformeruntout harmonieusement achevéetclossurlui-même (8);définition de contenus d'enseignement visant àdonner auxenfantsdu peuple une connaissance sommaire mais encyclopédique du monde, tout enfaisantd'euxdeshommes et des citoyens respectueux d'une morale rationnelle, laïque et républicaine; invention, enfin, de toute une panoplie d'exercices scolaires permettant l'acquisition et le contrôle desconnaissanceset desaptitudes:problèmes, rédadions, dictées, narra¬

tions, résumés, récitations... Ce primat de l'exercice setrouve encore accentué, à

partirdesannées 1880, par lerôleaccordéaucertificat d'études etàsaprépara¬

tion,qui rétroagissentsurl'ensembledes classesduprimaire(9).

Il fautvoir, danscerôle croissantde l'exerciceetdel'examen, l'effetd'un mouve¬

ment qui

-

comme toujours

-

affecte à la fois l'intérieur ef l'extérieur de l'école.

8 - Àla différencedes périodes précédenteetsuivante, lapresses'adresse alors presque exclusivement aux instituteurs, en délaissant toutautrepublic (famille, enseignants d'autres niveaux).

9 - Lecertificat d'études sanctionne la findes étudesprimaires,versl'âge de 12 ou 13ans.

La(meilleure)moitiédes élèvesysont présentés, leurpréparation mobilisantunebonnepar¬

tiedesénergies enseignantes.Cf.Brigitte Dancel,Enseignerl'histoire à l'écoleprimairedela IIIeRépublique,Paris,PUF,1996;l'ouvrages'attache à suivre,auplusprès, lespratiquesdes maîtres etdes élèves.

RECHERCHEetFORMATION 23 - 1996 111

PierreCASPARD etPénélope CASPARD-KARYDIS

lité des communes etde l'Égliseversl'Etat,dansl'organisation de l'enseignementpri¬

maire. Lespédagogues émergent alors comme intellectuelsorganiques del'institu¬

tion scolaire, etfontde lapresseprofessionnelleunvedeur privilégiéde la popula¬

risationdeleurs idées. Cesannéessont cellesd'uneréflexion pédagogiqueintense, s'appliquantaussi bien àdesproblèmesd'ordrethéorique(la période voit, notam¬

ment, la naissancede l'histoiredel'éducationetdel'éducation comparée) quepra¬

tique (tournantnotamment autour des modes et des moyens d'enseignement). Les

deuxtiers des revues existantàcettepériode(cf.tableau3) s'attachent, principale¬

mentou exclusivement, à l'exposé decesdébats,auxquels universitairesethommes politiques participenten nombre.

Tableau 3

:

Revues disponibles, par genre et par période

(en %)

1815-1859 1860-1909 1910-1939

PÉDAGOGIE

65,8 32,2 27,5

Cours 30,9 45,3 21,5

Innovation 3,2 22,4 50,9

Total 100 100 100

La deuxièmepériodecouvrelesannées 1860à 1909. Ellevoittriompherlapréoc¬

cupationd'une organisation rigoureusedespratiquesenseignantes,au moins à un triple plan :agencementstriddescoursetdes classesà l'intérieurd'un systèmedes¬

tiné àformeruntout harmonieusement achevéetclossurlui-même (8);définition de contenus d'enseignement visant àdonner auxenfantsdu peuple une connaissance sommaire mais encyclopédique du monde, tout enfaisantd'euxdeshommes et des citoyens respectueux d'une morale rationnelle, laïque et républicaine; invention, enfin, de toute une panoplie d'exercices scolaires permettant l'acquisition et le contrôle desconnaissanceset desaptitudes:problèmes, rédadions, dictées, narra¬

tions, résumés, récitations... Ce primat de l'exercice setrouve encore accentué, à

partirdesannées 1880, par lerôleaccordéaucertificat d'études etàsaprépara¬

tion,qui rétroagissentsurl'ensembledes classesduprimaire(9).

Il fautvoir, danscerôle croissantde l'exerciceetdel'examen, l'effetd'un mouve¬

ment qui

-

comme toujours

-

affecte à la fois l'intérieur ef l'extérieur de l'école.

8 - Àla différencedes périodes précédenteetsuivante, lapresses'adresse alors presque exclusivement aux instituteurs, en délaissant toutautrepublic (famille, enseignants d'autres niveaux).

9 - Lecertificat d'études sanctionne la findes étudesprimaires,versl'âge de 12 ou 13ans.

La(meilleure)moitiédes élèvesysont présentés, leurpréparation mobilisantunebonnepar¬

tiedesénergies enseignantes.Cf.Brigitte Dancel,Enseignerl'histoire à l'écoleprimairedela IIIeRépublique,Paris,PUF,1996;l'ouvrages'attache à suivre,auplusprès, lespratiquesdes maîtres etdes élèves.

RECHERCHEetFORMATION 23 - 1996 111

Pressepédagogiqueetformationcontinue des instituteurs(1815-1940)

Intérieur : c'est l'affirmation de la valeur formative intrinsèque d'exercices bien conçus, c'est-à-dire excluant, en principe,le psittacisme et la pure mémoire (10).

Extérieur : c'est l'application effective, pour une massed'emplois de plus en plus grandeauxniveaux moyensetinférieurs del'économie, desservicesetde l'admi¬

nistration,duprincipedurecrutement méritocratique,parexamensetconcours, posé avecforce depuis leXVIIIesiècle(11). Accessoirement

-

maissignificativement

-

les

exercicesécritsapparaissentaussicommeunmoyenprivilégié

a

évaluationdes per¬

formances del'institution scolaire elle-même,voired'une évaluationcomparativedes systèmesscolairesdans lesdifférents pays:on exhibedestravaux d'élèves dansles Expositions universelles, Ferdinand Buisson publiant, par exemple, plusieurs gros volumes de« Devoirs d'écoliers» français etétrangers(12),etc. Les revues péda¬

gogiques de la période participent puissamment à ce mouvement, par la place qu'ellesaccordentauxénoncésd'exercicesetà la publication de devoirs modèles, qui constituent de plusenpluslatramedetoutletravail depréparationdesaclasse parl'instituteur(13).Autotal,durantcettepériode,prèsdela moitiédesrevuesdes¬

tinéesaux instituteurs(45,3%)seconsacrentprincipalement,voire exclusivement, à uneguidancequotidienne, tandis quelepourcentagedesrevuesderéflexionpéda¬

gogiquechutedemoitié. Enfin, unquartdesrevues, etc'estunphénomènepresque entièrementnouveau, tententde promouvoirles innovationspédagogiques, dansle sensprécédemmentdéfini: cettemontéeenpuissanceannoncedéjà lapériodesui¬

vante.

Cettetroisième etdernièrepériodecouvrelesannées 1910-1939.Ellessontcarac¬

térisées par l'attention accordée à l'invention et à l'innovation pédagogique sous toutesleursformes. Lesrevuesapportantuneaidequotidienne àl'instituteurchutent de plus demoitié, passant à 21,5%dutotal (en stock) età 10% (en création): il

12 sembleque l'écoleprimairesoit désormais suffisamment sûrede son organisation

10 - Sur lerôlecroissantdesexercicesàcetteépoque,voirPierreCaspard(Dir.), Travaux d'élèves. Pour unehistoiredespedormancesscolaireset deleur évaluation,XIXe-XXesiècles, spécialdeHistoirede l'éducation, Paris,INRP, 1992, 192p.

1 1 - Dominique Julia(Dir),Auxsourcesde lacompétenceprofessionnelle.Critèresscolaires etclassements sociaux danslescarrièresintellectuelles enEurope, XVIlp-XlXe siècles, Paeda-gogicahistorica(Gand),1994,1,467p.

12 - Ferdinand Buisson, Devoirsd'écoliersaméricains recueillisà l'Exposition de Philadel¬

phie (1876), Paris, 1877; Devoirs d'écoliers français recueillisà l'Exposition universelle de Paris(1878),Paris, 1879;Devoirsd'écoliersétrangersrecueillisà l'Exposition universelle de Paris(1878),Paris, 1879.

13 - Cecivaudraitaussipour l'enseignement secondaire. Parexemple,quandsecréel'en¬

seignementsecondairedes jeunesfilles(1880),larevueL'enseignementsecondairedesjeunes filles(Delalain, 1882-1940) consacre beaucoup d'énergie à«inventer»des sujetsadaptésà cettenouvellepopulation scolaire,dontelle publiedesdevoirs-modèles,accompagnésdecor¬

rigés.

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Pressepédagogiqueetformationcontinue des instituteurs(1815-1940)

Intérieur : c'est l'affirmation de la valeur formative intrinsèque d'exercices bien conçus, c'est-à-dire excluant, en principe,le psittacisme et la pure mémoire (10).

Extérieur : c'est l'application effective, pour une massed'emplois de plus en plus grandeauxniveaux moyensetinférieurs del'économie, desservicesetde l'admi¬

nistration,duprincipedurecrutement méritocratique,parexamensetconcours, posé avecforce depuis leXVIIIesiècle(11). Accessoirement

-

maissignificativement

-

les

exercicesécritsapparaissentaussicommeunmoyenprivilégié

a

évaluationdes per¬

formances del'institution scolaire elle-même,voired'une évaluationcomparativedes systèmesscolairesdans lesdifférents pays:on exhibedestravaux d'élèves dansles Expositions universelles, Ferdinand Buisson publiant, par exemple, plusieurs gros volumes de« Devoirs d'écoliers» français etétrangers(12),etc. Les revues péda¬

gogiques de la période participent puissamment à ce mouvement, par la place qu'ellesaccordentauxénoncésd'exercicesetà la publication de devoirs modèles, qui constituent de plusenpluslatramedetoutletravail depréparationdesaclasse parl'instituteur(13).Autotal,durantcettepériode,prèsdela moitiédesrevuesdes¬

tinéesaux instituteurs(45,3%)seconsacrentprincipalement,voire exclusivement, à uneguidancequotidienne, tandis quelepourcentagedesrevuesderéflexionpéda¬

gogiquechutedemoitié. Enfin, unquartdesrevues, etc'estunphénomènepresque entièrementnouveau, tententde promouvoirles innovationspédagogiques, dansle sensprécédemmentdéfini: cettemontéeenpuissanceannoncedéjà lapériodesui¬

vante.

Cettetroisième etdernièrepériodecouvrelesannées 1910-1939.Ellessontcarac¬

térisées par l'attention accordée à l'invention et à l'innovation pédagogique sous toutesleursformes. Lesrevuesapportantuneaidequotidienne àl'instituteurchutent de plus demoitié, passant à 21,5%dutotal (en stock) età 10% (en création): il

12 sembleque l'écoleprimairesoit désormais suffisamment sûrede son organisation

10 - Sur lerôlecroissantdesexercicesàcetteépoque,voirPierreCaspard(Dir.), Travaux d'élèves. Pour unehistoiredespedormancesscolaireset deleur évaluation,XIXe-XXesiècles, spécialdeHistoirede l'éducation, Paris,INRP, 1992, 192p.

1 1 - Dominique Julia(Dir),Auxsourcesde lacompétenceprofessionnelle.Critèresscolaires etclassements sociaux danslescarrièresintellectuelles enEurope, XVIlp-XlXe siècles, Paeda-gogicahistorica(Gand),1994,1,467p.

12 - Ferdinand Buisson, Devoirsd'écoliersaméricains recueillisà l'Exposition de Philadel¬

phie (1876), Paris, 1877; Devoirs d'écoliers français recueillisà l'Exposition universelle de Paris(1878),Paris, 1879;Devoirsd'écoliersétrangersrecueillisà l'Exposition universelle de Paris(1878),Paris, 1879.

13 - Cecivaudraitaussipour l'enseignement secondaire. Parexemple,quandsecréel'en¬

seignementsecondairedes jeunesfilles(1880),larevueL'enseignementsecondairedesjeunes filles(Delalain, 1882-1940) consacre beaucoup d'énergie à«inventer»des sujetsadaptésà cettenouvellepopulation scolaire,dontelle publiedesdevoirs-modèles,accompagnésdecor¬

rigés.

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Pierre CASPARDetPénélopeCASPARD-KARYDIS

pédagogique,desescontenusetdesesméthodes,poursepasser, au moinsrelati¬

vement,decegenre de littérature,d'autantquela grandemajoritédes maîtres en exercice entrelesdeux guerresa désormaisétéformée dans lesécolesnormalesde la République.

En revanche,des remises en cause ou descontestations d'origines diverses appa¬

raissent.Lesunesproviennent, mécaniquement, de laréadionà certainsexcèsdela période précédente : ainsi, on dénonce l'application irréfléchie, par les maîtres paresseux,des modèlesqueleur fournissentlesrevues. D'autresdécoulentdestra¬

vaux portantsurlapsychologiedel'enfant,lasociologiedel'éducation, la docimo-logie et, plus généralement, les « sciences de l'éducation » qui se sont affirmées depuisledébut du siècle: nombrederevuessefontl'échode leurstravaux,et pré¬

conisentleschangementspédagogiques quileursemblentendécouler.Unetroisième sourcederemise encauserésidedanslesinnovationsquienvahissentlasociétéenvi¬

ronnanteenmatière de médias telles lecinémaou laradio,quel'onsepréoccupe trèstôtd'utiliserau service de l'école. Enfin,lecontextesociopolitique etidéologique de lapériode,auxplansnational comme international,estfavorable,parlui-même, àl'innovation pédagogique:communisme,socialisme,syndicalisme,fascisme, paci¬

fisme,suscitentadhésions ouréactionschezlesinstituteurs,y compris dans l'exercice deleur métierdontilsinfléchissent lesensetla pratique, toutenfaisantpasserau second plan la luttecontrele cléricalisme, dont, désormais, lesmanifestations sco¬

laires prennent surtout la forme d'une émulationdans la conquête des loisirs des jeunesau moyend'Auvrespériscolaires et demouvementsdejeunesse(14).

Globalement, cettepresse «innovante »représentedésormaisplusdela moitiédes revues (en stock) et près des deux tiers (encréation): ledécalage entre lesdeux chiffres montresondynamisme, maisaussi sarelativefragilité,fautedesoutiensins¬

titutionnelssuffisants. Elleexerceson adiondansdifférentesdiredions. Unpremier ensemblederevuestraitedescontenusd'enseignement dansunetriple perspedive: promotion curriculairequiviseunedéfenseetillustration de matièresd'enseignement jugées comme excessivement délaissées: dessin, musique, gymnastique, travail manuel, hygiène...; création curriculaire qui entend introduire desenseignements non prévus parles programmes: leslobbiesdesespérantistes etdes sténographes sontparticulièrementadifs,cesderniersayant parfoispartieliéeaveclespromoteurs d'uneréforme del'orthographe; entismecurriculaire, quitented'infléchirlesdisci plines traditionnelles ou de leurdonneruncontenupartiellement nouveauou origi¬

nal: ainsi, plusieurs revues s'attachent à promouvoir l'histoire et la géographie locales,ou l'histoireetlagéographiede l'Empirecolonialfrançais; d'autres veulent introduireàl'école le pacifisme, la Bible (laïcisée...)oul'antialcoolisme.Cesdiverses

14 - Une pressesurabondantes'intéressealors àl'élève«après»ou«autour de»l'école.

Ellen'estpaspriseencomptedanslecorpusicianalysé.

115

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pédagogique,desescontenusetdesesméthodes,poursepasser, au moinsrelati¬

vement,decegenre de littérature,d'autantquela grandemajoritédes maîtres en exercice entrelesdeux guerresa désormaisétéformée dans lesécolesnormalesde la République.

En revanche,des remises en cause ou descontestations d'origines diverses appa¬

raissent.Lesunesproviennent, mécaniquement, de laréadionà certainsexcèsdela période précédente : ainsi, on dénonce l'application irréfléchie, par les maîtres paresseux,des modèlesqueleur fournissentlesrevues. D'autresdécoulentdestra¬

vaux portantsurlapsychologiedel'enfant,lasociologiedel'éducation, la docimo-logie et, plus généralement, les « sciences de l'éducation » qui se sont affirmées depuisledébut du siècle: nombrederevuessefontl'échode leurstravaux,et pré¬

conisentleschangementspédagogiques quileursemblentendécouler.Unetroisième sourcederemise encauserésidedanslesinnovationsquienvahissentlasociétéenvi¬

ronnanteenmatière de médias telles lecinémaou laradio,quel'onsepréoccupe trèstôtd'utiliserau service de l'école. Enfin,lecontextesociopolitique etidéologique de lapériode,auxplansnational comme international,estfavorable,parlui-même, àl'innovation pédagogique:communisme,socialisme,syndicalisme,fascisme, paci¬

fisme,suscitentadhésions ouréactionschezlesinstituteurs,y compris dans l'exercice deleur métierdontilsinfléchissent lesensetla pratique, toutenfaisantpasserau second plan la luttecontrele cléricalisme, dont, désormais, lesmanifestations sco¬

laires prennent surtout la forme d'une émulationdans la conquête des loisirs des jeunesau moyend'Auvrespériscolaires et demouvementsdejeunesse(14).

Globalement, cettepresse «innovante »représentedésormaisplusdela moitiédes revues (en stock) et près des deux tiers (encréation): ledécalage entre lesdeux chiffres montresondynamisme, maisaussi sarelativefragilité,fautedesoutiensins¬

titutionnelssuffisants. Elleexerceson adiondansdifférentesdiredions. Unpremier ensemblederevuestraitedescontenusd'enseignement dansunetriple perspedive: promotion curriculairequiviseunedéfenseetillustration de matièresd'enseignement jugées comme excessivement délaissées: dessin, musique, gymnastique, travail manuel, hygiène...; création curriculaire qui entend introduire desenseignements non prévus parles programmes: leslobbiesdesespérantistes etdes sténographes sontparticulièrementadifs,cesderniersayant parfoispartieliéeaveclespromoteurs d'uneréforme del'orthographe; entismecurriculaire, quitented'infléchirlesdisci plines traditionnelles ou de leurdonneruncontenupartiellement nouveauou origi¬

nal: ainsi, plusieurs revues s'attachent à promouvoir l'histoire et la géographie locales,ou l'histoireetlagéographiede l'Empirecolonialfrançais; d'autres veulent introduireàl'école le pacifisme, la Bible (laïcisée...)oul'antialcoolisme.Cesdiverses

14 - Une pressesurabondantes'intéressealors àl'élève«après»ou«autour de»l'école.

Ellen'estpaspriseencomptedanslecorpusicianalysé.

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