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Le comportement non-verbal en négociation

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Master

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Le comportement non-verbal en négociation

CHOLLET, Fanny

Abstract

Cette étude a testé si les signaux du visage permettent à des observateurs externes d'obtenir des informations spécifiques quant aux résultats obtenus des négociateurs et quant à la sympathie ressentie par leurs adversaires. Nous avons également investigué le rôle des compétences émotionnelles dans cette capacité de décodage. Nous postulons que les signaux du visage permettent d'établir de bonnes estimations sur les résultats d'une négociation et que les compétences émotionnelles prédisent la précision de celles-ci. Nous postulons également que les compétences émotionnelles médiatisent la relation entre l'auto-évaluation de la performance et la précision des estimations. Les résultats ont démontré que les estimations faites par les participants ne corrèlent pas de manière significative avec les scores réels obtenus. De plus, parmi les compétences émotionnelles, seule la reconnaissance des émotions a une valeur prédictive significative et ce, uniquement pour la précision des estimations de la sympathie. Pour terminer, aucun lien de médiation n'a été retrouvé. Ce travail relève [...]

CHOLLET, Fanny. Le comportement non-verbal en négociation. Master : Univ. Genève, 2021

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:156340

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Le comportement non-verbal en négociation

Mémoire de master

PSYCHOLOGIE CLINIQUE INTEGRATIVE PSYCHOLOGIE AFFECTIVE

PAR

Fanny Chollet

Fanny.Chollet@etu.unige.ch

Directeur du mémoire Dr. Marcello Mortillaro Prof. David Sander

Jury

Prof. Didier Grandjean Dr. Marcello Mortillaro Prof. David Sander

Genève, le 17 août 2021

Université de Genève

Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation Section de psychologie

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2 RÉSUMÉ

Cette étude a testé si les signaux du visage permettent à des observateurs externes d’obtenir des informations spécifiques quant aux résultats obtenus des négociateurs et quant à la sympathie ressentie par leurs adversaires. Nous avons également investigué le rôle des compétences émotionnelles dans cette capacité de décodage. Nous postulons que les signaux du visage permettent d’établir de bonnes estimations sur les résultats d’une négociation et que les compétences émotionnelles prédisent la précision de celles-ci. Nous postulons également que les compétences émotionnelles médiatisent la relation entre l’auto-évaluation de la performance et la précision des estimations. Les résultats ont démontré que les estimations faites par les participants ne corrèlent pas de manière significative avec les scores réels obtenus.

De plus, parmi les compétences émotionnelles, seule la reconnaissance des émotions a une valeur prédictive significative et ce, uniquement pour la précision des estimations de la sympathie. Pour terminer, aucun lien de médiation n’a été retrouvé. Ce travail relève toutefois la pertinence de considérer les compétences émotionnelles dans le processus de décodage du comportement non-verbal.

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3 Déclaration sur l’honneur

Je déclare que les conditions de réalisation de ce travail de mémoire respectent la charte d’éthique et de déontologie de l’Université de Genève. Je suis bien l’auteur-e de ce texte et atteste que toute affirmation qu’il contient et qui n’est pas le fruit de ma réflexion personnelle est attribuée à sa source ; tout passage recopié d’une autre source est en outre placé entre guillemets.

Genève, le 17 août 2021

Fanny Chollet

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4 Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier le Dr. Marcello Mortillaro pour sa disponibilité et ses précieux conseils, mais également pour ses corrections et sa confiance. Il m’a permis de réaliser mon travail de recherche dans les meilleures conditions.

Je souhaite également remercier le Prof. David Sander et le Prof. Didier Grandjean pour le temps qu’ils vont consacrer à la lecture et à l’évaluation de ce travail.

Je remercie Cora Aguirre et Fatma Lassoued qui grâce à leur étude m’ont permis la création des vidéos utilisées dans ce projet.

J’adresse aussi mes remerciements à tous les étudiants, mes pairs, qui ont participé à cette étude.

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5 Table des matières

1.Introduction ... 7

2. Partie théorique ... 9

2.1 La communication de l’émotion ... 9

2.1.1 Expression et perception des émotions ... 9

2.1.2 Théories des émotions de base ... 10

2.1.3 Théories de l’appraisal ... 11

2.1.4 Comparaison des deux approches ... 11

2.2 L’intelligence émotionnelle et les compétences émotionnelles ... 12

2.2.1 Origines et définition de l’intelligence émotionnelle ... 12

2.2.2 Trait EI (mixed) ... 13

2.2.3 Ability EI ... 14

2.2.4 Geneva Emotional Competence Test ... 16

2.3 La négociation ... 17

2.3.1 Définition et historique de la recherche en négociation ... 17

2.3.2 Le rôle des émotions dans la négociation ... 18

2.3.3 Les compétences émotionnelles dans la négociation ... 20

3. Présentation de la recherche et des hypothèses théoriques ... 21

Objectif de recherche 1 ... 22

Objectif de recherche 2 ... 23

Objectif de recherche 3 ... 23

Objectif de recherche 4 ... 24

4. Méthode ... 25

4.1 Population ... 25

4.2 Procédure ... 26

4.3 Matériel ... 26

4.2.1 1ère partie : Geneva Emotional Competence test ... 26

4.2.2 2ème partie : Tâche d’analyse vidéo ... 27

5. Résultats ... 28

5.1 Présentation des variables ... 28

5.2 Résultats des analyses statistiques ... 30

5.2.1 Objectif de recherche 1 ... 30

5.2.2 Objectif de recherche 2 ... 30

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5.2.3 Objectif de recherche 3 ... 31

5.2.4 Objectif de recherche 4 ... 33

6. Discussion et conclusion ... 34

6.1 Retour sur les hypothèses théoriques ... 34

6.2 Limites et perspectives ... 36

6.3 Conclusion ... 38

Références ... 39

Annexes ... 49

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7 1.Introduction

Dans nos interactions sociales quotidiennes, qu’elles s’établissent avec un ami, un membre de notre famille, un collègue de travail ou encore avec un inconnu, des compétences en communication semblent nécessaires pour décrypter et faciliter nos relations. En effet, certaines études ont par exemple démontré l’importance des habiletés communicationnelles pour une satisfaction conjugale plus élevée (Ledermann et al., 2010 ; Litzinger & Gordon, 2005). Bien qu’il ne s’agisse pas du seul facteur contributif, la qualité de la communication, qui passe en partie par le partage de pensées et de ressentis, a son rôle dans la résolution de conflit, la compréhension des messages transmis ainsi que dans l’intimité du couple (Haris & Kumar, 2018). D’autres recherches ont également évalué ce lien dans le monde organisationnel et ont pu constater qu’une bonne communication managériale amène une plus grande satisfaction et un engagement plus prononcé chez les employés (Paksoy et al., 2017). Elle permet aussi d’optimiser la performance de chacun et d’augmenter en conséquence la productivité d’une entreprise (Giri & Kumar, 2010). En contexte de négociation, qui est un processus dans lequel on s’engage fréquemment au travail, ces compétences vont être essentielles pour résoudre les conflits d’intérêts et parvenir à un accord. Chaque partie va alors essayer de faire comprendre sa position tout en essayant d’obtenir des avantages pour soi-même (Culo & Skendrovic, 2012).

En vue de son importance dans différents domaines interpersonnels, nous pourrions explorer de plus près les mécanismes sous-jacents à la communication et s’interroger sur sa multimodalité. L’analyse de ses différentes composantes nous permet de distinguer deux niveaux : un premier niveau verbal qui se réfère aux aspects linguistiques, et un deuxième niveau non-verbal, beaucoup plus vaste, qui englobe les gestes, les postures du corps, les expressions faciales ainsi que des indices de type vocaliques, olfactifs ou encore proxémiques (Phutela, 2015). Ces différents éléments non-verbaux peuvent alors venir renforcer, illustrer, compléter ou contredire les mots et ainsi réguler de différentes manières nos interactions (Ekman & Friesen, 2010). Par exemple, une incongruence entre ces indices, décrit dans les travaux de Bateson sur la schizophrénie comme un phénomène de double-contrainte, peut amener beaucoup de confusion et aboutir à une véritable impasse communicationnelle (Bateson et al., 1963 ; Cullin, 2006). Cet aspect reste encore très étudié aujourd’hui pour comprendre les dilemmes présents dans la communication et nous pousse à nous interroger sur la fiabilité de ces différents indices et sur le type d’information que l’on pourrait décoder.

Concernant la fiabilité de ceux-ci, Ekman et Friesen (2010) ont proposé une théorie stipulant que le langage non-verbal permettrait un meilleur jugement d’authenticité notamment dans la cadre du mensonge. Selon eux, nous serions plus susceptibles de laisser échapper des

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8 indices de tromperie ou des fuites d’informations retenues par notre comportement non-verbal, tandis qu’il serait plus facile de contrôler nos mots. Des études plus anciennes ont également souligné cette tendance des individus à accorder plus de poids aux aspects non-verbaux, qu’ils jugent comme étant plus fiables et authentiques (par exemple Archer & Akert, 1977 ; Argyle et al., 1971). Comment expliquer cette tendance ? Serait-ce parce que les formes d’expressions non-verbales ont précédé les formes verbales dans la trajectoire évolutionnaire ? En effet, avant que les systèmes langagiers n’émergent, l’utilisation des mains et des vocalisations prédominait dans le processus communicationnel (Levinson & Holler, 2014). D’autre part, il s’agit du premier système de communication que l’on dispose lorsque l’on vient au monde. Les nourrissons utilisent, par exemple dès 12 mois, le geste de pointage (Liszkowski et al., 2012).

Néanmoins, il n’est pas toujours approprié de distinguer les indices verbaux et non-verbaux sur leur pertinence, surtout dans l’analyse des mensonges et de la tromperie (Vrij et al., 2000).

Si l’on se concentre désormais sur le type d’information que l’on peut retirer du comportement non-verbal, un grand nombre de recherches se sont portées sur les expressions faciales. Le visage qui peut être détecté rapidement et ce dès les premières minutes de vie chez les nourrissons, est un premier type d’information auquel nous avons accès lors d’une interaction avec, en plus, un caractère permanent (Slater, 2002). Les travaux d’Ekman et Friesen (2010) nous démontrent que les expressions faciales peuvent nous renseigner sur les attitudes, les rôles interpersonnels ou les émotions d’un individu. Beaucoup de leurs recherches se sont d’ailleurs focalisées sur les informations affectives du visage qui transmettent de nombreux indices sur la nature d’une émotion. Il s’agit d’un domaine qui a suscité un grand nombre d’études notamment pour explorer comment les émotions viennent réguler nos interactions avec une influence tant au niveau intrapersonnel qu’au niveau interpersonnel (Morris & Keltner, 2000 ; Van Kleef, 2009). Pouvoir décoder correctement les états émotionnels de nos interlocuteurs paraît alors être un élément primordial dans nos relations sociales.

Cette capacité peut être mise en lien avec les compétences émotionnelles d’un individu.

Par exemple, Jacob et al. (2013) ont cherché à évaluer l’impact des indices verbaux et non- verbaux sur l’évaluation des états émotionnels d’autrui puis ont exploré le lien avec les compétences émotionnelles. Ils ont démontré d’une part que la crédibilité du non-verbal prédomine pour tous les participants, et ce d’autant plus que leur niveau en intelligence émotionnelle est élevé, et d’autre part que ces compétences sont également liées à une résolution d’incongruence plus rapide entre les deux types d’indices. Ces résultats permettent de relever l’importance des compétences émotionnelles dans le décodage des émotions. Il s’agit d’ailleurs d’un domaine de plus en plus étudié car ce type de compétences n’aurait pas

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9 seulement un rôle au niveau interpersonnel, mais plusieurs recherches montrent son implication pour une satisfaction de vie plus élevée, une réussite scolaire et professionnelle ainsi que pour une adaptation de manière plus générale (par exemple : Mestre et al., 2006 ; Sanchez et al., 2016 ; Urquijo et al., 2015).

La présente recherche s’articule dans le même ordre d’investigations à propos des compétences émotionnelles et de l’analyse du comportement non-verbal. L’objectif est d’explorer le type d’information que l’on peut retirer des expressions faciales dans un cadre particulier de négociation et d’examiner si le niveau de compétences émotionnelles influence la performance de décodage. Plus spécifiquement, il s’agit de déterminer dans un premier temps, si un observateur externe est capable de retirer une information sur le nombre de points acquis par un négociateur ou sur l’appréciation de l’adversaire à partir des signaux du visage uniquement. L’étude cherche à explorer dans un deuxième temps l’influence des compétences émotionnelles de l’observateur sur sa capacité à décoder des informations aussi spécifiques.

2. Partie théorique

2.1 La communication de l’émotion 2.1.1 Expression et perception des émotions

Tels que brièvement introduits, les mouvements du visage sont de précieux signaux dans l’expression et la communication d’une émotion. Afin de mieux comprendre le processus communicationnel en jeu, Scherer (2013) a proposé un modèle tripartite de l’expression et de la perception des émotions (TEEP) pour diverses modalités expressives. En modalité visuelle, ce modèle stipule que les signaux, par exemple les mouvements musculaires faciaux, sont des symptômes, ou autrement dit, des externalisations perceptibles du processus émotionnel interne en cours. L’émetteur va produire ces comportements expressifs appelés indices distaux qui vont devenir disponibles pour la perception et qui peuvent fournir des informations à travers un processus de transmission. Ces indices, tels qu’ils seront perçus par le récepteur, sont appelés indices proximaux. Ces perceptions proximales de l’observateur lui permettront ensuite d’évaluer la signification de l’expression à travers différents mécanismes d’inférence et d’attribution de l’émotion. L’influence socioculturelle rentre également en jeu dans ce processus de communication en raison des règles conventionnelles d’affichage ou de ressentis.

Cet aspect rejoint le concept des règles d’affichage « display rules » proposé dans les travaux d’Ekman et qui se réfère à la manière d’intensifier, de neutraliser ou de masquer les affects selon les différentes cultures (Ekman et al., 1969). Une étude de Matsumoto et al. (2008) a par exemple démontré que les cultures individualistes ont tendance à être plus expressives que les

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10 cultures collectivistes. Une explication serait que les individualistes accordent plus de poids à la dimension intrapersonnelle des émotions, tandis que la signification interpersonnelle prédomine sur la liberté d’expression pour les collectivistes en privilégiant le groupe, le contexte et les relations. Pour revenir au modèle de Scherer, l’auteur mentionne une fonction tripartite du processus communicationnel : 1) La communication des symptômes et états du locuteur, 2) l’appel aux auditeurs en termes de déclenchement d’une réaction ou d’une inférence, ou 3) une communication symbolique à travers une configuration particulière.

Toutefois, ces différentes fonctions n’ont pas les mêmes implications méthodologiques pour la recherche. Ainsi pour étudier la fonction d’appel, il s’agira d’explorer quelles configurations d’indices distaux s’associent à telles inférences émotionnelles particulières. Ce modèle permet de souligner un grand débat toujours en cours dans la littérature scientifique concernant les fonctions et les significations des expressions faciales (Scherer et al., 2013).

2.1.2 Théories des émotions de base

Deux grands types de théories se sont intéressées à l’étude de l’expression faciale et de ses mécanismes de reconnaissance et d’inférence, il s’agit des théories des émotions de base et des théories de l’évaluation cognitive (appraisal). Concernant la théorie des émotions de base, les travaux d’Ekman (1993) et d’Izard (1994) ont été grandement influencés par les recherches antérieures de Tomkins et de Darwin sur l’universalité des émotions. Ils ont suggéré qu’il existe un nombre limité d’émotions de base à caractère évolutionnaire et adaptatif qui sont universelles et biologiquement programmées. Parmi ces émotions, souvent sont rapportés la tristesse, la joie, la colère, la peur, le dégoût et la surprise auxquels s’ajoute parfois le mépris (Matsumoto et al., 2008). Chacune de ces émotions aurait des conditions spécifiques d’émergence et comporterait des patterns neuronaux, autonomes et expressifs spécifiques. La particularité de chaque expression faciale s’établit par l’activation de muscles faciaux distincts.

Cela a amené Ekman et Friesen à introduire le terme d’unités d’actions musculaires et à développer un système de codage des expressions faciales, le Facial Action Coding System (FACS ; Ekman & Rosenberg, 1997). Ils ont postulé l’existence de configurations d’expressions prototypiques pour des émotions spécifiques qui sont directement reconnues par l’observateur. Le processus inférentiel de reconnaissance des émotions qui en découle consisterait alors à comparer l’expression faciale observée avec des modèles prototypiques stockés dans notre mémoire.

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11 2.1.3 Théories de l’appraisal

Les théories de l’appraisal, autrement dit de l’évaluation cognitive, amènent une tout autre perspective. Elles suggèrent que les émotions sont générées et différenciées sur la base d’évaluations subjectives et spécifiques concernant une situation, un événement ou un objet en tenant compte de certains critères. Ce sont les résultats de cette évaluation qui viennent façonner les différentes réponses émotionnelles, dont l’expression (Sander & Scherer, 2014). Le modèle qui étend beaucoup son influence actuellement est le modèle des processus composants de Scherer (2009) qui conceptualise les émotions comme un processus continu d’évaluations en lien avec les cinq composantes de l’émotion, à savoir, l’évaluation cognitive, la réponse physiologique, la tendance à l’action, l’expression motrice et le sentiment subjectif. L’émotion concerne une période où plusieurs sous-systèmes sont synchronisés afin de produire une réaction appropriée. Ce processus rend compte d’une dynamique temporelle par la succession des critères d’évaluation comprenant la pertinence, l’implication, le potentiel de maîtrise ainsi que la signification normative. Le résultat cumulatif de ce processus d’évaluation impacte les autres composantes de l’émotion et détermine séquentiellement la dynamique ainsi que la configuration de l’expression faciale émotionnelle. Une étude de Scherer & Mortillaro (2018) illustre le fait que les résultats de l’évaluation déterminent bien la nature des expressions faciales : d’une part, ils ont démontré que les participants ont pu déduire des évaluations et des émotions ciblées à partir des expressions faciales et d’autre part, que la capacité d’interpréter correctement les stimuli synthétisés corrèle avec la capacité de reconnaître des émotions.

Ces résultats révèlent un aspect important concernant le rôle des compétences émotionnelles dans le décodage des expressions faciales. Des études antérieures ont retrouvé le même lien avec différentes mesures de l’intelligence émotionnelle. Par exemple, Austin (2005) a relevé entre autres, une relation positive entre les scores en intelligence émotionnelle et la performance dans une tâche de reconnaissance des émotions. De même, Edgar et al. (2012) a démontré qu’un score élevé en intelligence émotionnelle améliore la fiabilité du décodage. Les conceptions et les mesures de l’intelligence émotionnelles sont présentées dans la section suivante.

2.1.4 Comparaison des deux approches

Ces deux modèles théoriques se distinguent dans la manière de concevoir l’apparition d’une expression faciale. Selon Ekman, une expression apparaît d’un trait à la suite de l’émergence simultanée des unités d’actions, tandis que Scherer postule une séquentialité de chacun des mouvements faciaux, déclenchés au fur et à mesure des évaluations cognitives. Wehrle et al.

(2000) ont testé les prédictions de chacun de ces modèles mais n’ont pas pu confirmer l’une ou

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12 l’autre proposition. Ils ont simplement pu démontrer que les stimuli dynamiques étaient mieux reconnus que les statiques. Cet aspect fait d’ailleurs l’objet de critique concernant la théorie des émotions de base qui n’utilise que des représentations prototypiques statiques. En effet, diverses études démontrent une meilleure reconnaissance lorsque la dynamique des expressions émotionnelles est considérée (Mortillaro & Dukes, 2018 ; Schlegel et al., 2014 ; Wehrle et al., 2000). Un deuxième élément important qui différencie les deux théories est que les théories de l’appraisal ne suggèrent pas un nombre limité d’émotions mais considèrent une infinité de possibilités permettant de rendre compte de la pluralité des épisodes émotionnels existants (Cordaro et al., 2018 ; Keltner et al., 2019 ; Scherer, 2009). Enfin un troisième élément critique par apport à cette approche concerne le processus inférentiel. Les nouvelles études sur la reconnaissance des émotions détaillent des processus plus complexes qu’une simple attribution étiquetée par un mot unique (Keltner et al., 2019). Des auteurs ont proposé le concept d’évaluation inverse : une information critique récupérée des expressions faciales concerne les évaluations que fait un individu sur l’interaction en cours et cette information conduit à son tour à des inférences sur les intentions ou les états mentaux de cette même personne (De Melo et al., 2013). Dans cette perspective, les théories de l’appraisal permettent par conséquent de mieux considérer la complexité des épisodes émotionnels et des processus inférentiels qui en découlent.

2.2 L’intelligence émotionnelle et les compétences émotionnelles 2.2.1 Origines et définition de l’intelligence émotionnelle

Le concept d’intelligence émotionnelle (IE) pose la question de la définition même du terme d’intelligence ainsi que de sa multiplicité. En effet, l’intelligence était initialement perçue comme uni-factorielle avec les travaux de Spearman, mais s’est au fil des années pluralisée tel un ensemble de facteurs plus ou moins indépendants (Beaujean & Benson, 2019). En 1920, Thorndike a proposé trois différentes formes d’intelligence : abstraite, mécanique et sociale.

L’intelligence sociale peut être considérée comme la racine du construit d’intelligence émotionnelle et se définit comme la capacité à comprendre et gérer les personnes (Thorndike

& Stein, 1937). Néanmoins, les différents travaux et mesures existants pour ce type d’intelligence mettent en évidence un problème de validité discriminante important dans son rapport avec l’intelligence générale. L’IE à ce point, se distinguerait mieux parce qu’elle implique spécifiquement des émotions ou des contenus émotionnels (Mayer & Salovey, 1993).

Elle se recoupe également avec l’intelligence intrapersonnelle et interpersonnelle proposées par Gardner en 1983. Alors que la première désigne la capacité de compréhension de soi et

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13 d’introspection sur ses émotions ou ses pensées, la deuxième forme, qui se rapproche plus de l’intelligence sociale de Thorndike, concerne la capacité de comprendre les intentions, les motivations et les désirs des autres (Mayer & Salovey, 1993 ; Smith, 2002).

Le terme d’intelligence émotionnelle est véritablement introduit par Mayer et Salovey en 1990 qu’ils décrivent comme « une forme d’intelligence sociale qui implique de contrôler ses propres sentiments et émotions et celles des autres, de les distinguer entre elles, et d’utiliser cette information pour guider la pensée et l’action de l’individu (p.189) ». Les auteurs ont par la suite modifié et actualisé cette définition comme suit : « L'intelligence émotionnelle concerne la capacité de raisonner précisément sur les émotions, la capacité d'utiliser les émotions et les connaissances émotionnelles pour améliorer la pensée (Mayer & Roberts, 2008, p. 510) ». Leur modèle sera explicité plus loin dans ce chapitre.

Ce concept a été popularisé par la suite grâce à l’ouvrage de Goleman en 1995 qui présente un modèle avec différentes compétences réparties en cinq groupes : connaissances de soi, autorégulation, motivation, empathie et compétences sociales (Boyatzis et Goleman, 2000).

Depuis, d’autres modèles ont été développés et l’on peut distinguer ceux qui caractérisent l’IE en termes de capacités mentales (Ability EI) ou en tant que mélange de traits de personnalité et autres dispositions individuelles (Trait EI). Ces différences de conceptualisation de l’IE conduisent à l’utilisation de mesures d’opérationnalisation dissemblables. Les modèles d’Ability EI préfèrent se baser sur des mesures de performances tandis que les modèles de Trait EI se basent principalement sur des mesures d’auto-évaluations. On ne retrouve d’ailleurs que de très faibles corrélations entre ces différentes mesures, ce qui distingue d’autant plus ces deux approches (Brannick et al., 2009).

2.2.2 Trait EI (mixed)

Ces types de modèles, également appelé « mixed », comprennent un mélange de traits non- cognitifs et de dispositions comportementales ou motivationnelles qui sont plutôt corrélés aux traits de personnalité (Saklofske et al., 2003). Cette approche est considérée comme l’une des théories principales de l’IE en raison de sa scientificité. En effet, elle permet d’être testable, falsifiable et générale avec différents instruments de mesure développés (Petrides et al., 2016).

Parmi les différents instruments d’évaluation développés, on retrouve par exemple : 1) l’inventaire des quotients émotionnels (EQ-i) de Bar-on mesurant l’intelligence intrapersonnelle, l’intelligence interpersonnelle, l’adaptabilité, la gestion du stress et l’humeur générale (Bar-On et al., 2000 ; Dawda & Hart, 2000), 2) l’Emotional and Social Competency Inventory (ESCI) de Goleman pour des mesures relatives à la conscience de soi, l’autogestion, la conscience sociale et les aptitudes sociales (Boyatzis, 2016 ; Boyatzis, Goleman, & Rhee,

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14 2000), ou encore 3) le Trait Emotional Intelligence Questionnaire (TEIQue) proposé par Petrides pour mesurer le bien-être, la maîtrise de soi, l’émotivité et la sociabilité (Petrides, 2009).

Tous ces différents instruments rendent compte de la diversité des traits qui sont considérés dans l’établissement du construit de l’intelligence émotionnelle selon cette approche, ce qui peut faire l’objet de critique (Roberts et al. 2010). Néanmoins, d’autres éléments caractéristiques de ces modèles sont problématiques tels que les mesures d’auto-évaluations. Il s’agit d’une opérationnalisation qui sous-tend une faible fiabilité et ne constitut pas une mesure valide pour évaluer l’intelligence (Zeidner et al., 2004). Une étude de Brackett et al. (2006) n’a par exemple pas trouvé de corrélation entre les mesures d’auto-évaluation et les mesures de performance suggérant que la perception qu’ont les individus de leur intelligence émotionnelle n’est pas un bon indicateur de leurs capacités réelles. Ce biais d’estimation de la performance se généralise d’ailleurs à d’autres domaines (Dunning et al., 2003). Un second aspect problématique qui est souvent mentionné en littérature scientifique concerne le biais de désirabilité sociale qu’il convient de tenir compte pour chaque test auto-évaluatif. Il est en effet plus facile de truquer ses réponses à des tests auto-déclaratifs plutôt qu’à des tests de performance, et cela amène de grandes conséquences notamment dans les démarches de recrutement dans une entreprise (Day & Carroll, 2008). Enfin, un dernier point qui peut être évoqué concerne le lien prononcé avec des mesures de personnalité souvent retrouvé tandis qu’il n’est pas assez établi avec l’intelligence cognitive (Roberts et al., 2010 ; Schlegel &

Mortillaro, 2019). Malgré ces différentes limites, quelques méta-analyses démontrent que cette approche reste néanmoins très utile notamment dans le lien qu’ont les compétences émotionnelles avec le rendement au travail (Joseph & Newman, 2010 ; Joseph et al., 2015).

2.2.3 Ability EI

L’approche proposant de conceptualiser l’IE en termes de capacité est la plus acceptée actuellement car elle établit un lien plus cohérent avec les notions d’émotion et d’intelligence (Roberts et al., 2010). Mayer et Salovey (1997) caractérisent l’IE comme un ensemble de capacités interdépendantes et proposent un modèle avec quatre compétences. Une première compétence est la perception des émotions qui désigne la capacité à identifier et exprimer adéquatement les émotions pour soi et autrui. Une deuxième compétence est l’utilisation des émotions pour faciliter la pensée qui se réfère à la capacité de générer des émotions adaptées à la situation. Une troisième habileté est la compréhension des émotions qui consiste à pouvoir comprendre des émotions complexes ainsi que les relations associées aux changements d’émotions. Puis la dernière est la gestion des émotions chez soi et chez autrui pour atteindre

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15 des buts spécifiques (Mayer & Salovey, 1997). Ces quatre compétences sont organisées selon un ordre hiérarchique suivant une trajectoire évolutive par rapport à un continuum de complexité : la capacité de perception étant à un niveau inférieur et celle de gestion à un niveau supérieur (Mayer et al., 2008). Sur chacun de ces processus existent des différences individuelles et les auteurs ont proposé de les opérationnaliser à l’aide du Mayer-Salovey- Caruso Emotional Intelligence Test (MSCEIT). Ce test est composé de 8 tâches, 2 pour chaque processus, basées essentiellement sur un système de notation par experts ou par consensus.

Selon eux, leur approche est conceptuellement plus cohérente que celle proposée par les modèles Trait EI (Brackett & Salovey, 2006).

Néanmoins, plusieurs critiques ont été discutées. Tout d’abord, concernant le souhait des auteurs de concevoir l’IE comme un domaine unifié de capacités, leur test ne semble pas présenter l’émergence d’un facteur d’ordre supérieur car l’intercorrélation entre les différentes branches est très faible (Fiori & Antonakis, 2011). Plusieurs recherches en analyse factorielle ont aussi démontré des problèmes avec la branche de facilitation. D’un côté elle ne se distingue pas assez des autres branches, puis d’un autre, les modèles qui ne l’incluent pas se sont avérés être plus adaptés (Rossen et al., 2008). De plus, il s’agit d’un test qui se démarque des autres tests cognitifs par son système de notation consensuel d’une part, et par son format de réponse d’autre part. Un problème avec la notation consensuelle est qu’elle n’est pas basée sur une théorie spécifique et c’est la majorité de la population qui détermine la réponse correcte. Or, la validité d’une réponse populaire peut être remise en question et ne permet pas de bien discriminer les personnes avec une haute compétence (Fiori et al., 2014 ; McCann & Roberts, 2008 ; Schlegel & Mortillaro, 2019). Quant au format, la majorité des sous-tests consistent à évaluer une étendue pour chaque alternative plutôt que d’en sélectionner qu’une seule correcte, ce qui ne correspond pas au format usuel des tests de performance. Ces différents aspects compliquent l’établissement d’une conclusion générale sur les compétences d’IE (Ability EI) en tant que construit véritable (Schlegel & Mortillaro, 2019).

Malgré ces diverses critiques, très peu de tests ont été proposés comme alternatives au MSCEIT. Deux auteurs, McCann et Roberts, ont tout de même proposé en 2008 deux instruments de mesure : le test situationnel de compréhension des émotions (STEU) et le test situationnel de gestion des émotions (STEM). L’avantage de ces deux tests par rapport au MSCEIT est l’utilisation d’un format à choix multiples plutôt qu’une échelle de notation, et les réponses correctes sont basées selon une théorie spécifique (MacCann & Roberts, 2008). Dans la recherche du lien entre les capacités émotionnelles et le travail, un point critique concernant

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16 ces tests est que les scénarios utilisés mettent en place principalement des situations quotidiennes sans réel rapport avec le monde organisationnel (Schlegel & Mortillaro, 2019).

2.2.4 Geneva Emotional Competence Test

Dans le but d’améliorer tous ces différents aspects discutés et afin de proposer une mesure valide dans le monde organisationnel, Schlegel & Mortillaro (2019) ont développé une nouvelle batterie de tests, le Geneva Emotional Competence Test (GECo). Un de leur premier objectif était de pouvoir générer des items basés sur des théories existantes. Ils se penchent alors sur la théorie de la régulation des émotions ou encore sur la théorie de l’appraisal pour définir les performances qui représenteront des niveaux de capacités inférieurs ou supérieurs. Puis, en vue des mesures trop générales évaluées par le STEU et le STEM, ils souhaitaient adapter les items à un contexte spécifique par le biais de vignettes décrivant des situations au travail. Ceci permet de considérer des compétences selon un contexte cible. Enfin, il fallait également augmenter la qualité psychométrique de précision de mesure et de cohérence interne. Pour ce faire, ils ont effectué une série de cinq études qui ont démontré une nette amélioration sur différents plans : validité de construit, consistance interne et validité prédictive. En effet, ils ont démontré que les quatre sous-tests sont chacun liés à d’autres tests de mesures des composantes de l’intelligence émotionnelle. Seule la régulation émotionnelle se démarquerait un peu plus par son indépendance vis-à-vis des autres compétences et par rapport à l’intelligence cognitive.

Celle-ci serait alors plutôt associée à la personnalité (Schlegel & Mortillaro, 2019).

Le test évalue quatre compétences : la reconnaissance des émotions, la compréhension des émotions, la régulation émotionnelle et la gestion des émotions chez autrui. La reconnaissance émotionnelle désigne la capacité de reconnaître les émotions émises à travers des expressions non-verbales telles que les expressions faciales, corporelles ou la tonalité de la voix. La compréhension des émotions se réfère à la capacité de pouvoir déduire l’état émotionnel de quelqu’un en évaluant les circonstances de la situation en termes de qualité et de temporalité afin de comprendre ce qui pourrait causer l’expérience émotionnelle. La régulation des émotions concerne la capacité de créer et maintenir des états affectifs positifs grâce à des stratégies de régulation émotionnelle cognitives visant à influencer la manière dont les gens pensent lorsqu’ ils ont une émotion négative. Les auteurs ont pris en guise de base théorique le modèle de Garnefski et al. (2001) proposant neuf types de stratégies dont quatre inadaptées et cinq adaptatives. Pour terminer, le dernier sous-test de gestion des émotions se réfère à la capacité à répondre de manière efficace à l’émotion de quelqu’un en choisissant une stratégie comportementale adaptée. C’est une compétence qui s’évalue le mieux dans des situations de conflits interpersonnels lorsqu’il y a des divergences d’objectifs par exemple. De ce fait, les

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17 auteurs se sont basés sur une théorie de la gestion des conflits (Thomas, 1992) qui décrit cinq stratégies comportementales, à savoir, la concurrence, la collaboration, le compromis, l’évitement et l’accommodement.

On remarque que par rapport au modèle de Mayer & Salovey (1997), d’une part le facteur de facilitation ne fait plus partie des compétences compte tenu des problèmes factoriels qu’il engendrait, et d’autre part, la branche de gestion des émotions a été séparée sur sa composante relative à soi ou à autrui. Il y a donc désormais la régulation émotionnelle qui se réfère aux stratégies cognitives de régulation pour soi, et la gestion des émotions d’autrui qui se rapporte plus à des stratégies comportementales. Ces changements sont congruents avec le modèle modifié de Mayer & Salovey (2016).

2.3 La négociation

2.3.1 Définition et historique de la recherche en négociation

La négociation a une grande influence dans divers aspects de notre vie quotidienne. Que ce soit lors d’une discussion professionnelle sur un projet de travail ou lors d’une discussion entre amis pour choisir le lieu de vacances, les individus vont s’engager dans des processus de négociation pour faire valoir leurs préférences. Souvent désignée dans la littérature en tant que processus, la négociation peut être caractérisée comme une forme d’interaction sociale fréquente lorsqu’il y a une recherche de résolution de conflit, notamment dans la répartition mutuelle de ressources (Thompson & Hastie, 1990).

Afin de bien comprendre cette notion, soulignons ses quatre propriétés : les parties, leurs intérêts, le processus de négociation ainsi que le résultat. Les parties désignent alors une personne ou un groupe de personnes ayant un intérêt commun. Leurs intérêts propres se réfèrent aux préférences ou bien à l’utilité-même des ressources à répartir. D’ailleurs c’est le degré de conflit entre les intérêts des différentes parties qui va déterminer la structure de la négociation.

On en repère trois types : la négociation distributive où les intérêts sont totalement opposés et contradictoires, la négociation de pure coordination avec des intérêts compatibles, c’est-à-dire que l’utilité de l’une des parties augmente aussi celle de l’autre, et enfin, certainement la plus fréquente des situations, la négociation intégrative avec des intérêts ni totalement compatibles, ni totalement opposés. L’interaction qui va se produire avant le résultat concerne le processus de négociation en tant que tel. Et c’est lors de cette interaction que les parties vont communiquer et mettre en place des stratégies de négociation. Le produit de ce processus aboutira au résultat soit en donnant lieu à une impasse où aucun accord mutuel n’a été accepté, soit en arrivant à un

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18 accord mutuel. Celui-ci peut être évalué en termes de répartition des ressources par exemple.

(Thompson, 1990).

Les premières recherches en négociation dès les années soixante intéressaient beaucoup le domaine de la psychologie sociale avec l’exploration des différences individuelles et des caractéristiques situationnelles (Bazerman et al., 2000). Toutes ces recherches sur les différences individuelles à cette période (comprenant les caractéristiques démographiques ou bien les traits de personnalité) aboutissaient à une même conclusion : ces variables n’expliquent que très peu de variance dans les comportements de négociation (Thompson, 1990).

Néanmoins, les recherches actuelles tendent à démontrer le contraire. Par exemple, Liu et al.

(2015) ont démontré un impact considérable de la culture concernant l’effet de l’agrément et de l’extraversion sur les comportements de négociation. D’autres auteurs, Schlegel et al. (2018) ont démontré la valeur prédictive de l’intelligence émotionnelle sur les résultats d’une négociation. Ces variables personnelles ne sont donc plus à négliger. L’étude de l’émotion avait également sa place dans le processus de négociation mais ces recherches ont diminué avec la révolution cognitive qui a suivi quelques années plus tard (Morris & Keltner, 2000). En effet, cette révolution a déployé toute son influence dans le monde de la recherche et a laissé de côté le domaine des relations interpersonnelles. Les chercheurs se sont alors engagés dans une perspective de prise de décision comportementale notamment à travers l’axe de la rationalité (Bazerman et al., 2000). Les aspects sociaux n’ont refait surface qu’à la fin des années nonante avec une renaissance d’intérêt pour la place de l’émotion dans les interactions de négociation.

Une première vague s’est plutôt consacrée aux effets intrapersonnels de l’émotion, mais l’étude des effets interpersonnels fait l’objet de beaucoup d’étude actuellement (Morris & Keltner, 2000 ; Olekalns & Druckman, 2012).

2.3.2 Le rôle des émotions dans la négociation

Il ne fait nul doute que les émotions ont un rôle important dans les interactions sociales (Morris et Keltner, 2000 ; Olekalns & Druckman, 2012 ; Van Kleef, 2009 ). La capacité de pouvoir juger les émotions est essentielle pour un fonctionnement social réussi, notamment en permettant d’anticiper les actions d’autrui et d’adapter les siennes. C’est ce qui nous permet d’avoir une adaptation adéquate à son environnement social (Pietroni et al., 2008). Beaucoup de recherches se sont concentrées sur l’importance des émotions positives dans la régulation des interactions sociales et le maintien des liens sociaux (Shiota et al., 2004). Par exemple, le sourire et le rire participent à la formation des relations de coopération et d’affiliation ainsi qu’à la diminution de conflits (Bersade, 2002 ; Mehu et Dunbar, 2008). En négociation, les émotions positives peuvent venir faciliter le processus en stimulant la résolution créative de problème ou

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19 en favorisant la compréhension des besoins de chacun, et à l’inverse les émotions négatives peuvent venir entraver le processus en détournant notre attention des questions fondamentales, en entravant notre réflexion ou encore en nous engageant dans des stratégies de manipulation (Shapiro & Fischer, 2005).

Comme mentionné précédemment, la dimension intrapersonnelle des émotions a beaucoup été étudiée dans un premier temps, avec comme objectif d’examiner les conséquences qu’ont les émotions au sein de l’individu-même et de l’impact sur son traitement de l’information (par exemple Bodenhausen et al.,1994). Pour y remédier, Morris et Keltner (2000) ont suggéré une autre approche qui met en évidence les fonctions sociales des émotions. Ils conceptualisent les émotions comme un système de communication interpersonnel où l’expression émotionnelle d’un individu influence les autres de sorte que chacun va observer et répondre aux émotions de l’autre. De plus, ils stipulent que les émotions surviennent en réponse à des problèmes existants dans une relation et qu’elles permettent ainsi de réguler les conflits relationnels. En contexte de négociation, l’émotion possède alors une puissante valeur informationnelle. D’autres études viennent appuyer cet argument. Pietroni et al. (2008) suggèrent que les émotions sont des signaux qui permettent de décrypter la valeur que les négociateurs attribuent aux différentes questions en jeu, de sorte à pouvoir ensuite adapter leurs stratégies et parvenir à un accord mutuel satisfaisant. Ainsi si l’homologue exprime du bonheur sur la question prioritaire du négociateur et de la colère sur la question peu prioritaire, cela permettra une négociation plus intégrative en diminuant l’éventuel biais de fixed-pie perception consistant à percevoir les préférences d’autrui comme catégoriquement opposées aux siennes et pouvant empêcher une résolution de conflit adéquate. Une situation émotionnelle inverse conduirait à amplifier ce biais.

Un modèle qui conceptualise ces différents aspects, est celui de Van Kleef (2009) Emotion as social information (EASI) qui stipule que les expressions émotionnelles affectent le comportement de l’observateur en déclenchant soit une réponse affective intrapersonnelle, soit un processus inférentiel. Ces deux processus peuvent converger vers un même comportement ou amener à des réactions totalement différentes. Ils s’influencent mutuellement par le biais de deux modérateurs : le traitement de l’information et les facteurs socio-relationnels. L’idée est que l’on va pouvoir déduire des informations sur les sentiments, sur les attitudes ou sur les intentions de notre interlocuteur, qui influenceront ensuite notre comportement. Par exemple, une information de colère peut nous amener à stopper le comportement dans lequel on s’était engagé, ou à l’inverse une information de joie nous amènera à continuer notre action (Keltner et Haidt, 1999). De même, un individu avec un adversaire en colère fera des concessions plus

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20 importantes que s’il négociait avec une personne heureuse (Van Kleef et al., 2004). En conclusion, les émotions sont de puissantes informations lors de nos interactions sociales et engendrent des effets tant au niveau intrapersonnel qu’interpersonnel.

2.3.3 Les compétences émotionnelles dans la négociation

Compte tenu de l’importance des émotions lorsqu’on interagit avec une personne, il paraît important de pouvoir les gérer au mieux ce qui relate des compétences émotionnelles. Certaines recherches se sont alors tournées vers le lien existant entre les compétences émotionnelles et les résultats d’une négociation. Par exemple, de bonnes capacités émotionnelles permettraient de faire de meilleures inférences sur les priorités de son adversaire et ainsi de mieux réguler la négociation (Kim et al., 2015). Une autre recherche, celle de Schlegel et al. (2018) s’est intéressée à la valeur prédictive de l’intelligence émotionnelle (IE) sur les résultats économiques et relationnels d’une négociation employé-recruteur, avec l’hypothèse qu’elle serait un meilleur prédicteur que la capacité mentale générale (GMA). Les résultats vont dans le sens de leur hypothèse en démontrant que l’IE permet de mieux prédire les résultats de la négociation, par rapport au GMA qui n’a pas de lien. Curhan et Mueller (2006) quant à eux, nous ont démontré l’influence de l’IE sur les résultats affectifs et évaluatifs de son homologue en négociation. Entre autres, une bonne compréhension des émotions a prédit la satisfaction des résultats de son homologue, l’évaluation de la sympathie ainsi que le désir de renégocier avec la personne ultérieurement. Dans le même ordre d’idées, Kim et al. (2015) retrouvent ce type d’influence de l’IE sur les résultats sociaux de la négociation. Lorsqu’un négociateur a un bon niveau en IE il est évalué comme étant plus honnête, fiable et sympathique et permet à son adversaire de ressentir des émotions positives et d’être plus à l’aise pour discuter des problèmes.

Toutes ces études démontrent que les compétences émotionnelles sont tout autant nécessaires que le comportement ou les gestes adoptés lors de l’interaction afin de réguler la négociation (Kelly & Kaminskiené, 2016).

Parmi les compétences émotionnelles, la branche de la perception apparaît comme la première compétence dans la trajectoire évolutive car elle appartiendrait à un niveau de complexité inférieur et serait par conséquent accessible plus tôt dans le développement (Mayer et al., 2008). C’est peut-être pour cet aspect qu’elle a fait l’objet d’études depuis de nombreuses années venant dépasser le nombre d’exploration des autres branches. Principalement, elle a été étudiée à travers les capacités de reconnaissance des émotions. D’ailleurs, Schlegel et Mortillaro (2019) placent cette compétence au premier rang dans leur test d’évaluation élaboré avec le GECo. Beaucoup de recherches ont démontré l’importance d’une bonne reconnaissance des émotions pour des résultats interpersonnels positifs (Schlegel & Scherer, 2016). De même,

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21 lors d’un processus de négociation, une meilleure capacité de reconnaissance des expressions faciales a un effet positif sur la performance objective des individus (Elfenbein et al., 2007).

Puis pour revenir sur l’étude de Schlegel et al. (2018), la capacité de reconnaissance des émotions testée indépendamment des capacités d’intelligence émotionnelle (MSCEIT) grâce au GERT a prédit les résultats de la négociation de manière plus cohérente et précise.

3. Présentation de la recherche et des hypothèses théoriques

En vue de la littérature théorique et empirique, il a été démontré à de maintes reprises que différents types d’informations pouvaient être retirés des expressions faciales, notamment concernant les états émotionnels, les évaluations, ou encore les préférences d’un individu (De Melo et al., 2013 ; Ekman, 1993 ; Ekman & Friesen, 2010 ; Izard, 1994 ; Scherer, 2011 ; Scherer & Mortillaro, 2018 ; Van Kleef, 2009). Il a également été relevé l’importance des émotions dans la régulation des interactions, avec un impact plus favorable des émotions positives ( Mehu & Dunbar, 2002 ; Morris et Keltner, 2000 ; Olekalns & Druckman, 2012 ; Pietroni et al., 2008 ; Shapiro & Fischer, 2005 ; Shiota et al., 2004 ; Van Kleef, 2009). Dans la présente étude, un premier objectif est alors d’explorer si les signaux du visage nous permettent d’obtenir des informations précises dans un contexte de négociation concernant les résultats obtenus par le négociateur d’une part, et concernant la sympathie ressentie par l’adversaire d’autre part. En effet, ce que recherche un négociateur est avant tout d’obtenir des avantages pour soi-même (Culo & Skendrovic, 2012), par conséquent : est-ce qu’un observateur externe serait capable de reconnaître s’il a réussi ou non à maximiser ses points ? Plus spécifiquement, il s’agit d’explorer si les signaux du visage nous permettent d’estimer correctement le nombre de points acquis par le négociateur en termes de gain ou de perte, puis d’estimer à quel point il a été jugé comme sympathique ou non par son adversaire.

D’autres études ont relevé l’importance des compétences émotionnelles dans le décodage et l’interprétation des indices relevés sur les expressions faciales (Austin, 2005 ; Curhan & Mueller, 2006 ; Edgar et al. 2012 ; Jacob et al., 2013 ; Kim et al., 2015 ; Schlegel et al., 2018 ;). L’objectif principal de ces recherches était d’explorer ce lien dans l’interaction en cours directement pour évaluer l’impact sur les interprétations mais aussi sur la manière de réguler une interaction (Curhan & Mueller, 2006). Dans la présente étude, un deuxième objectif est ainsi d’explorer le même lien, mais pour un observateur externe à l’interaction afin de voir si ses propres compétences émotionnelles lui permettent de faire des estimations correctes sur les résultats de la négociation.

(23)

22 Quand on parle des compétences émotionnelles, nous nous référons aux sous- dimensions de l’intelligence émotionnelle selon le modèle de Mayer et Salovey (1990) dans sa version présentée dans le GECo (Schlegel & Mortillaro, 2018). Le troisième objectif de cette étude est d’évaluer la valeur prédictive de chacun des sous-tests du GECo dans l’idée de rejoindre les résultats trouvés par Schlegel et al. (2018), notamment avec une valeur prédictive plus élevée pour la compétence de reconnaissance des émotions.

Pour terminer, il est souvent relevé la tendance des individus à faire de mauvaises auto- évaluations de leur véritable performance (Brackett et al., 2006 ; Dunning et al., 2003). De ce fait, nous souhaiterions évaluer dans quelle mesure la relation entre l’auto-évaluation de l’observateur sur ses propres estimations et la précision de celles-ci tant sur la performance que sur la sympathie est expliquée par les compétences émotionnelles. Plus spécifiquement, il s’agit d’explorer si le score total au GECo est un médiateur du lien entre l’auto-évaluation et les scores réels obtenus en négociation.

Objectif de recherche 1

Explorer si les indices faciaux présents dans les vidéos permettent à un observateur externe d’estimer correctement le nombre de points obtenus par un négociateur en termes de gain ou de perte ainsi que d’estimer la sympathie de l’adversaire.

Hypothèse 1.1 : Il y a un lien significatif (corrélation) entre les estimations de la performance et les scores réels de performance obtenus par les négociateurs :

Hypothèse 1.2 : Il y a un lien significatif (corrélation) entre les estimations de la sympathie et les scores réels de sympathie évalués par l’adversaire :

Figure 1. Représentation de l’effet attendu entre les estimations de la performance et les scores réels obtenus.

Figure 2. Représentation de l’effet attendu entre les estimations de la sympathie et les scores réels obtenus.

Estimations de la performance

Estimations de la sympathie

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23 Objectif de recherche 2

Évaluer l’impact des compétences émotionnelles sur la capacité d’estimation de la performance du négociateur d’une part, et d’autre part, sur la capacité d’estimation de la sympathie de l’adversaire.

Hypothèse 2.1 : Un niveau élevé de compétence émotionnelle prédit un meilleur score de précision des estimations tant pour la performance que pour la sympathie. Plus spécifiquement nous nous attentons à ce qu’un score total de compétence émotionnelle élevé prédise une précision des estimations de la performance plus petite1 :

Hypothèse 2.2 : Un score total de compétence émotionnelle élevé prédit une précision des estimations de la sympathie plus petite :

Objectif de recherche 3

Évaluer la valeur prédictive de chacun des sous-tests sur la précision des estimations de la performance et sur la précision des estimations de la sympathie.

Hypothèse H3.1 : Chaque sous-test permet de prédire conséquemment la précision des estimations de la performance, mais celui de la reconnaissance des émotions a une valeur prédictive plus élevée que les autres sous-tests.

1 Le calcul des scores de précision des estimations de la performance et de la sympathie sont expliqués dans la Partie 5. Plus la précision est proche de 0 meilleure elle est.

Figure 3. Représentation de l’effet attendu entre le score total obtenu au GECo et la précision des estimations de la performance.

Figure 4. Représentation de l’effet attendu entre le score total obtenu au GECo et la précision des estimations de la sympathie.

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24 Hypothèse H3.2 : Chaque sous-test permet de prédire conséquemment la précision des estimations de la sympathie, mais celui de la reconnaissance des émotions a une valeur prédictive plus élevée que les autres sous-tests.

Objectif de recherche 4

Évaluer dans quelle mesure la relation entre l’auto-évaluation de l’observateur sur ses propres estimations et la précision des estimations est expliquée par ses compétences émotionnelles.

Plus spécifiquement, explorer si le score total au GECo est un médiateur du lien entre l’auto- évaluation et la précision des estimations.

Figure 5. Représentation de l’effet attendu entre les différents sous-tests du GECo et la précision des estimations de la performance.

Figure 6. Représentation de l’effet attendu entre les différents sous-tests du GECo et la précision des estimations de la sympathie.

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25 Hypothèse 4.1 : La relation entre l’auto-évaluation et la précision des estimations de la performance est médiée par le score total au GECo.

Hypothèse 4.2 : La relation entre l’auto-évaluation et la précision des estimations de la sympathie est médiée par le score total au GECo.

4. Méthode 4.1 Population

Cette recherche, ainsi que tous ses aspects méthodologiques ont été soumis et validés auprès de la Commission d’éthique de la Faculté de Psychologie et Sciences de l’Education de l’Université de Genève. Nous avons recruté à travers la plateforme sona-system cent participants étudiant-e-s en Bachelor de psychologie à l’Université de Genève, qui, afin de valider leur cours de Psychologie de l’Émotion effectuent un certain nombre d’heures d’expériences. Nous n’avons pas spécifié de critère d’inclusion ou d’exclusion particulier, toutefois l’expérience étant en français, nous avons vérifié leur niveau langagier avec une question spécifique dans un bref questionnaire démographique qu’ils ont rempli au début de l’expérience.

Figure 7. Représentation de l’effet de médiation du score total au GECo attendu dans la relation entre l’auto-évaluation et la précision des estimations de la performance.

Figure 8. Représentation de l’effet de médiation du score total au GECo attendu dans la relation entre l’auto-évaluation et la précision des estimations de la sympathie.

H4.1

H4.2

(27)

26 4.2 Procédure

L’intégralité de l’étude s’est effectuée en ligne sur la plateforme Qualtrics, pour laquelle une licence a été fournie par la FPSE, et a pu être directement complétée depuis les ordinateurs personnels des étudiants. L’étude s’est déroulée en deux parties : une première phase a consisté à passer un bref questionnaire démographique sur le niveau de français ainsi que le questionnaire GECo, puis une deuxième phase à effectuer la tâche d’analyse vidéo. Afin de garantir la confidentialité des données, les résultats pour chaque participant aux deux parties de l’étude ont été liés uniquement grâce à leur identifiant sona-system.

Au début du premier questionnaire, des informations concernant l’étude ont été présentées et leur consentement demandé. Les participants pouvaient ensuite réaliser le GECo pour une durée d’environ 50 minutes. À la suite de cette première phase, ils pouvaient s’inscrire à la deuxième partie de l’étude pour réaliser la tâche d’analyse vidéo. À noter que si les participants ne souhaitaient réaliser que la première partie concernant le questionnaire GECo en ligne sans effectuer la tâche d’analyse vidéo, ils le pouvaient, leurs données étaient toutefois quand même conservées dans le cas où une autre étude à laquelle ils pouvaient participer nécessitait des données sur leurs compétences émotionnelles mesurées avec ce questionnaire. Concernant la deuxième partie, ils commençaient également par lire les informations et remplir le formulaire de consentement. La tâche d’analyse vidéo pouvait alors démarrer pour une durée de maximum 1h. À la fin de l’expérience, les participants étaient informés des objectifs de l’étude et remerciés pour leur participation. Chacune des deux parties de l’étude a permis aux participants d’acquérir un crédit d’expérience pour valider leur cours (2 crédits au total pour l’intégralité de l’étude).

4.3 Matériel

4.2.1 1ère partie : Geneva Emotional Competences test (GECo ; Schlegel & Mortillaro, 2019) Le GECo se compose de quatre sous-tests évaluant les quatre compétences émotionnelles suivantes : la reconnaissance des émotions, la compréhension des émotions, la régulation émotionnelle ainsi que la gestion des émotions.

Le premier sous-test de reconnaissance des émotions correspond à la version abrégée du GERT-S (Schlegel & Scherer, 2016). Il se compose de 42 film-vidéos d’une durée de 1 à 3 secondes dans lesquelles différents acteurs expriment l’une des 14 émotions suivantes : joie, fierté, amusement, plaisir, soulagement, intérêt, surprise, colère, irritation, dégoût, tristesse, désespoir, peur et inquiétude. Afin de permettre un focus plus établi sur les aspects non-verbaux de l’expression émotionnelle, ce sont des pseudo-phrases standardisées sans signification qui

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27 sont prononcées. Les participants doivent alors choisir parmi les 14 émotions laquelle représente le mieux celle qui est exprimée.

Le second sous-test de compréhension des émotions est constitué de 20 items qui correspondent à des vignettes décrivant une situation émotionnelle expérimentée par une autre personne. Les participants doivent choisir parmi les 14 émotions suivantes celle qui décrit le mieux ce que la personne ressent : fierté, joie, intérêt, soulagement, ennui, tristesse, honte, culpabilité, inquiétude, peur, dégoût, mépris, irritation et colère.

Pour la régulation émotionnelle qui est le troisième sous-test, il y a 28 items constituant des vignettes dans lesquelles notre propre personne se retrouve dans une situation avec une émotion négative ressentie. La tâche consiste à choisir deux options sur quatre où chaque possibilité décrit une pensée représentant l’une des principales stratégies de régulation. Parmi les quatre propositions, deux options reflètent des stratégies adaptatives et deux autres options reflètent des stratégies non-adaptatives.

Pour terminer, le dernier sous-test de gestion des émotions consiste à lire 20 vignettes qui mettent en jeu une interaction avec une tierce personne éprouvant une émotion négative ou un bonheur inapproprié2. Le participant doit alors choisir parmi cinq options quelle stratégie comportementale il souhaite adopter en vue de la situation. Pour rappel, les cinq stratégies comportementales de gestion de conflit sont : la concurrence, la collaboration, le compromis, l’évitement et l’accommodement (Thomas, 1992).

Au total le GECo se compose alors de 110 items et dure approximativement 50 minutes. A la fin de l’expérience, les scores pour les quatre sous-tests ainsi qu’un score total nous sont automatiquement calculés et remis.

4.2.2 2ème partie : Tâche d’analyse vidéo Stimuli

Au total 96 stimuli-vidéos d’une durée de 15 secondes ont été créés à partir d’une tâche de négociation fictive. Dans cette tâche, des étudiants ont incarné par paire le rôle d’un employé et d’un responsable des ressources humaines avec comme objectif de parvenir à un accord sur différentes thématiques afin d’établir un nouveau contrat de travail. De ce fait, ils avaient 30min à leur disposition pour négocier 8 points : le 1er jour de travail, le bonus annuel, le nombre de jours de congé, le salaire, l’assurance, le bâtiment, le remboursement de déménagement et lieu.

Pour chacun de ces thèmes, cinq options représentant des gains (0 à 4000) ou des pertes (0 à -

2 Tel que défini dans le GECo, un bonheur inapproprié se réfère à la situation où un état affectif positif est ressenti face au malheur de quelqu’un d’autre. Par exemple en contexte organisationnel, une personne pourrait se réjouir d’un licenciement d’un de ses collègues ce qui n’est pas éthiquement moral.

(29)

28 6'000) sont proposées différentiellement à l’employé et au responsable RH. Les rôles ont été attribués aléatoirement et chaque individu avait pour but de maximiser ses propres gains. Nous avions demandé l'autorisation de les filmer et d'utiliser ces vidéos comme stimuli dans d'autres études selon les indications du comité d'éthique. De plus, l’accord ainsi qu’une autorisation de diffusion des vidéos a été remplie par tous les participants ayant accepté d’être filmés.

Les vidéos obtenues ont été traitées avec le logiciel Movavi Video Editor Plus 2020 afin de modifier le cadrage, la durée ainsi que la qualité des images. Le cadrage a été modifié pour ne présenter qu’un seul des négociateurs à la fois et dans le but de cibler la partie supérieure du corps en privilégiant la visualisation du visage. Le son a été coupé pour permettre un focus sur les aspects non-verbaux visuels uniquement. Nous avons choisi d’inclure seulement les 15 dernières secondes de chaque point négocié afin de ne présenter que le moment où l’accord est établi et où le comportement émotionnel du négociateur est le plus fort. En effet, les négociateurs avaient comme consigne de formuler explicitement leur accord final avant de passer au thème suivant et il s’agit du moment où nous nous attendons à ce que le comportement émotionnel de la personne concernant le résultat du point négocié soit le plus visible.

Parmi toutes les négociations filmées, nous avons souhaité retenir un nombre égal de négociations en faveur de l’employé et en faveur de l’employeur afin d’éviter tout biais potentiel. Nous avons donc choisi les 3 vidéos où l’employé a remporté la négociation avec le plus grand écart de points et les 3 vidéos où le responsable RH a obtenu le plus de points également. Cela a donné lieu à 12 vidéos chacune composée de huit séquences (chaque vidéo correspondait à un négociateur pour les huit thématiques discutées).

Tâche d’analyse à effectuer

La tâche demandée aux participants de notre étude était d’estimer dans un premier temps le nombre de points acquis par le négociateur qu’il voyait sur la vidéo et ce pour les 96 stimuli.

Après l’analyse des huit séquences pour un même négociateur, deux autres questions leur étaient posées. L’une portait sur une auto-évaluation des estimations faites, et l’autre leur demandait sur une échelle à 5 points à combien ils estimaient que le négociateur ait été jugé sympathique par son adversaire.

5. Résultats

5.1 Présentation des variables

Pour tester nos différentes hypothèses, nous avons utilisé les données de 98 participants (MÂge = 22,32 ans, SDÂge = 4.56) et effectué nos analyses sur le logiciel R.

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