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A VANDONCOURT, C'EST TOUS LES JOURS DIMANCHE

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Academic year: 2022

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A VANDONCOURT, C'EST TOUS LES JOURS DIMANCHE

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Du même auteur :

Louviers sur la route de l'autogestion ? Syros, 1976

Mairies frappées d'autogestion Syros, 1978

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CHRISTOPHE WARGNY

à vandoncourt,

c'est tous les jours dimanche

éditions syros

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Collection « COMBAT CULTUREL »

Danièle COTTEREAU.

Editions SYROS, 1, rue de Varenne, 75007 Paris.

ISBN 2.90.1968.42.2

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COLLECTION « COMBAT CULTUREL »

Chansons politiques d'aujourd'hui Béranger, Brua, Bulher, Imago,

Mouloudji, Servat, Vigneault Mein K a m p f

Dessins de Clément Moreau, antifasciste allemand, publiés pour la première fois en 1938

Le phénomène Beaubourg Marie Leroy

Mise à mort des cultures populaires ? Guy Millière - Gilles Servat Cançons popularas d'Occitania

p e r Deman...

Bilingue Christian Caujolle Chronique des années de crise

textes de Moreau, Tilman, Revzani, Thérame, Laude, Pascarel, Cliff, Noël, etc...

Implosions à la dérive poèmes de Patrick Arfol

En portées, 73 chansons de femmes Les grotesques

dessins humoristiques de Jean-Pierre Cagnat

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S a n s la g e n t i l l e s s e , l ' h o s p i t a l i t é e t la c o l l a b o r a t i o n d e s h a b i t a n t s d e V a n d o n c o u r t , r i e n n ' a u r a i t é t é p o s s i b l e . Une h a b i t u d e b i e n a n c r é e d ' o u v e r t u r e s u r l ' e x t é r i e u r a p e r m i s d e s c o n t a c t s f a c i l e s e t m u l t i p l e s . En t o u t e l i b e r t é . A tous, merci.

M e r c i a u s s i à C a b u p o u r l e s d e s s i n s p a r u s e n 1976 d a n s C h a r l i e - H e b d o e t r e p r o d u i t s ici, a v e c l ' a i m a b l e auto- r i s a t i o n d e l ' a u t e u r .

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Les Damas

Arrêtez-vous dans un village et promenez-vous dans les chemins qui mènent à la rue principale. Les rideaux se soulèvent et les humains murmurent. On épie l'étran- ger. On le montre du doigt. Avec discrétion. On est discret dans les villages de France. Il n'y a que les chiens qui aboient.

En demi-deuil, ils sont les villages. Plus qu'une appa- rence. Les morts qu'on n'a jamais remplacés sont plus nombreux que les vivants. Demi-deuil et mort lente. Et ce ne sont pas les résidents secondaires, affairés chaque week-end à enlever la poussière d'une semaine ou crispés sur leurs tondeuses à gazon qui ramèneront les dimanches d'antan. Y a plus de dimanche, y a plus de bon pain, y a plus le village.

Les villages de villageois, l'exode rural les a pres- que tous tués. Presque... car le tourisme en a « sauvé » quelques-uns. La volonté des habitants en a préservé quelques autres.

A Vandoncourt, ils sont six cents miraculés. Un mira- cle qui n'est pas venu du ciel, qui n'est homologué par personne, ni par l'Eglise catholique — on est plutôt pro- 9

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testant — ni par quelque mécène étendant sa protection à quelque réserve naturelle ou humaine.

On peut se balader. Même avec un magnéto en ban- doulière, un calepin à la main et la triste mine d'un évadé de la ville, on n'est pas une bête curieuse. On ne vous demande rien, on vous souhaiterait plutôt la bienvenue.

Non... n'allez tout de même pas vous imaginer débarquant à Tahiti. On garde la réserve qui sied aux ruraux. Il n'y a pas de vahinées... ni de dépliants touristiques. Vous verrez, l'accueil n'a pas besoin de syndicat d'initiative.

Et pourtant, quelle carte de visite que celle du village ! Il en est venu de tous les continents, à Vandoncourt !...

Non, point de château fort, ni d'abbaye cistercienne. Pas plus de cathédrale gothique que de ruines romaines... La mer ? Suivez la vallée du Rhin, ou celle de la Saône : plus de sept cents kilomètres. Aucun Français n'en est si loin.

Et pas même une piscine. Ni Jules Ferry, ni Belmondo, ni Platini ne sont nés ici. Pas de Luna Park ni d'apparition de la Sainte Vierge. Rien qu'un petit village au pied de la montagne.

A côté des Boroillos de Valentigney, des traîne-bidons de Beaulieu ou des Tâtâs de Mendeure, il y a les Damas de Vandoncourt.

A Vandoncourt donc, les habitants s'appellent les Damas. Appellation pas très flatteuse : c'est le nom d'une prune à gnole cultivée dans la région. A la fin des années soixante, le village n'avait pas besoin de gnole pour dor- mir, le sommeil paraissait définitif.

Pourtant, aujourd'hui, Vandoncourt est devenu vedette de la télé ou des journaux, pas dans les émissions de Guy Lux, ni sous les titres des rubriques « faits divers » ou « sports ». L'équipe de foot n'a pas encore accédé au professionnalisme. Le village est plus village que jamais.

C'est-à-dire qu'il ne ressemble à aucun autre. Se reconnaît- il lui-même, le petit village rond sis aux confins de l'hexagone ?

Démocratie directe, animation au pouvoir, fête à tous les coins de rues. On mange, on danse, on réfléchit, on 10

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décide tous ensemble. A croire qu'à Vandoncourt, c'est tous les jours dimanche.

Le village a son journal, sa fanfare, ses écologistes, ses écrivains, ses historiens, ses pompiers, son alambic municipalisé, sa passion du collectif, des fleurs, des voya- ges et des rencontres. Il connaît et se connaît. L'avenir, tous le préparent. Le passé ? on le connaît mieux que la Bible dont les versets s'égrenaient pourtant au long des longues veillées d'hiver qu'animaient les pasteurs locaux.

L'inventaire du village est réalisé : l'écologie, le site, l'information, la sociologie, l'histoire. Brochures, articles de journaux : le patrimoine est connu ; aux Damas de disposer de l'héritage. Connais-toi toi-même... et compte sur tes 11

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propres forces pour demain. Ce pourrait être la devise des bâtisseurs locaux, bâtisseurs de leur propre avenir.

Pas de baguette magique pour transformer une momie en jeune fille, mais un double refus. Refus de dormir encore. Refus d'être réveillé par le facteur porteur d'une douce et poétique enveloppe portant cette délicieuse ins- cription :

« Jean, Bât. C, Esc. D, 12 e étage, Bloc F, rue des Mar- ronniers, 25230 Vandoncourt. »

Comment s'est opérée cette mutation ? Est-ce une révolution ? Longue histoire, longues histoires.

Tout un cheminement... Comme le dit aujourd'hui, l'un des opérés-opérateurs : « Chaque fois qu'on dit bonjour, au village, on dit en même temps : je te connais, je te recon- nais, tu fais partie de ma communauté, de ma famille. »

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L'automobile et la montagne

Sauf à serpenter lentement au long des routes dépar- tementales du Jura, on ne passe pas à Vandoncourt. Il faut y venir. Y venir en traversant ou en longeant, le plus souvent, l'empire Peugeot.

Peugeot. Même à Vandoncourt, tout le monde en dépend. Qu'on le veuille ou non, chacun ici est de la famille. Par alliance, par obligation, par calcul, ou par nécessité, toujours. Par le sang, par amour, rarement.

Peugeot nourrit tout le monde, ou presque. Il donne et il reprend, à sa guise, le nouveau prince du Pays de Mont- béliard. Suffrage universel ou pas, le véritable héritier des ducs de Wurtemberg, plus puissant que son royal devancier, c'est Peugeot. Parce qu'il distribue seul, ou presque, le droit au travail.

Aux portes de l'empire Peugeot

Le droit de vivre reste, ici, le fait de ce prince-là. Le droit de vivre au pays, mais aux conditions des maîtres ; rien à voir avec le droit à la dignité, à la libre expression.

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Peugeot veut tout contrôler. La production, on s'en doute.

Le reste aussi. Logements, commerces, loisirs, communi- cations, tout dépend peu ou prou du maître. A l'usine, la répression n'est pas un concept abstrait ; la syndicalisa- tion est faible. Et si on pouvait, par syndicats indépendants (c'est-à-dire patronaux), canaliser toute contestation, on le ferait. La direction ne ménage pas ses efforts pour étendre le paternalisme ou utiliser des milices de type corporatif-fasciste 1

Le prince dispose d'autres moyens, une sorte de chan- tage permanent : sans nous, crèvera le pays de Montbé- liard. Mono-industrie, mono-employeur : Peugeot tient entre s e s mains le présent de chacun. L'avenir aussi : il se confond avec celui de l'automobile. Les lignes de vie de chacun, c'est Peugeot qui les détermine.

Comme si « le lion » ne tenait pas assez ses victimes à merci, huit heures par jour, il cherche à les avoir à l'œil le reste du temps. Les associations culturelles et sportives, les organismes d'entraide dépendent souvent de Peugeot. Les commerces, les supermarchés également. Le football aussi lui appartient. Cet argent que Peugeot dis- tribue d'une main à ses ouvriers, il le reprend, en partie, de l'autre.

Peugeot est donc là, tout près. D'autant plus proche que des Peugeot, il y en eut, il y en a, il y en aura à Vandoncourt. L'illustre famille est originaire d'ici : arti- sans, commerçants dynamiques du XIXe siècle qui gagnè- rent la vallée. La lignée remonte au XVe siècle, le vocable peugeot, désignant le fabricant ou le vendeur de poix, devint un patronyme local.

Sochaux, Montbéliard, Audincourt, Senoncourt : des rues noires et tristes. C'est, à quelques kilomètres de Van- doncourt, le pays de Peugeot, un long ruban où les blocs et les usines se chevauchent jusqu'à Belfort. La plus grosse usine de France est là, avec ses quarante mille ouvriers. Il faut avoir vu, à côté du stade, la sortie d'une équipe de travailleurs postés. Des centaines d'autocars sortent en trombe avec leur chargement à destination du 1. L'analyse des méthodes Peugeot mériterait une étude moins sommaire. Voir G. Minazzi : En marche. Ed. Syros.

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Doubs, de l'Alsace et du Jura. Peugeot aspire et vomit à heures fixes ses cargaisons humaines.

Autoroutes, voies express, rocades strient l'énorme complexe industriel. Mais elles ne conduisent pas à Van- doncourt. De la vallée du Gland, une petite route étroite, entourée d'arbres et de verdure, gelée l'hiver, vous emmène au village. L'odeur de bouse et de foin suc- cède aux fumées sochaliennes. On monte vers les pre- mières collines jurassiennes. A peine, mais assez pour trouver un autre monde. Douze kilomètres seulement de Sochaux. C'est peu et c'est beaucoup. Quand on s'éveille le matin à Vandoncourt, ce poumon économique qu'est l'agglomération sochalienne paraît à cent lieues. Loin, loin...

Un village d'hier

Le village s'étire et se serre à la fois au flanc de la montagne jurassienne, entre quatre cents et six cents mètres d'altitude. L'observateur suisse — un expert — le remarque, c'est d'abord un vrai village : « Les maisons et les fermes, d'architecture comtoise typique, se grou- pent autour du vieux temple, symbole vivant de la Réforme que prêcha Guillaume Farel dans le « Pays ». Les habi- tants, fait curieux, s'appellent les Damas, du nom de cette prune que l'on cultive aux alentours. Les rues du village sont propres, les maisons coquettes sous leur aspect vieillot, les jardins, les placettes et les fontaines sont fleuries avec goût. Le passant ne s'y trompe pas : Van- doncourt a de la distinction — un caractère traditionnel- lement réservé aux villages helvètes. Tout y respire une certaine joie de vivre, un optimisme mesuré. Les gens sont aimables, ouverts, chaleureux même. » 1

Un village tranquille, heureux et... presque suisse. La frontière n'est qu'à quelques kilomètres ; six par la route forestière. Il suffit de dépasser le promontoire où s'établit

1. Le Démocrate, 1975.

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le village pour gagner la Suisse. Les chemins ne manquent pas. En se retournant, la vue plonge sur la nébuleuse socha- lienne, le coteau descend lentement vers la vallée de Terre-Blanche, près d'Hérimoncourt.

Comme tous les villages, Vandoncourt a même son site classé. Classé... mais modeste. Presque un lieu de pèlerinage, au moins un but de promenade. C'est en pleine forêt, le Pont Sarrazin. L'érosion a séparé un banc de calcaire du plateau, formant une arche naturelle.

L'érosion, la pluie, le gel, les racines ont failli en avoir raison. La persévérance des élus, depuis 1974, a définiti- vement sauvé l'arche.

Les Damas sont un peu plus de six cents, sur les huit cent cinquante hectares de sol calcaire du village.

Un sol perméable qui retient mal les pluies, pourtant abondantes. Même si le paysage est verdoyant, les réser- ves d'eau difficiles à accumuler sont l'objet d'une vieille et légitime obsession de la population.

Les cent quatre-vingt maisons du village sont grou- pées. La rue des Damas ceinture le centre du village : presque un cercle qui joint les principaux pôles d'attrac- tion d'hier : mairie-école, monument aux morts, temple.

Et ceux d'aujourd'hui : bâtiment technique, usine désaf- fectée transformée en foyer des jeunes et en salle de réunion.

Des potagers, des jardins, des vergers, des fontaines parfois séparent les grosses maisons comtoises, avec leurs deux pans de tuiles aux pentes accusées. Vastes maisons qui abritaient hier des familles plus nombreuses des réserves venues de l'agriculture ou nécessaires à l'élevage.

« Chaque maison était beaucoup plus peuplée que maintenant. Car deux ou trois générations y cohabitaient fréquemment ; elle étaient occupées par des gens qui, tous, vivaient de la terre, ou avaient conservé avec elle de fortes attaches. Les ouvriers — à peu près la moitié de la population — élevaient lapins et poules, et le plus souvent au moins une vache et quelques chèvres, pour le lait. Ils cultivaient de grands jardins qui fournissaient la quasi-totalité des légumes qu'ils consommaient : on n'en vendait pas dans les magasins et, d'ailleurs, l'argent était rare. »

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