Densit´e polynˆ omes orthogonaux
Maximilien Dreveton December 4, 2016
R´ef´erences Ojectif Agreg. Durett (Probablity Theory and Examples) pour les contre exemples.
Demailly (premier chapitre) pour des r´esultats sur les z´eros des polynˆomes orthogonaux et des exemples.
C’est aussi fait diff´eremment dans un bouquin d’exo de Chambert Loir.
Remarque Ultra classique et se recase partout `a condition de n’avoir aucune morale ni amour-propre.
Par contre avec les contre exemples et le lien avec probl`eme des moments en proba, devient int´eressant.
L’application `a construction d’une base hilbertienne deL2(R) est cit´ee dans le rapport du jury.
1 Le th´ eor` eme
D´efinition 1. On note I un intervalle de R. On appelle fonction poids ρ : I− > R∗+ une fonction mesurable telle que :
∀n∈N Z
I
|x|nρ(x)dx <∞ On note L2(I, ρ) espace des fonctions telles que R
I|f(x)|2ρ(x)dx < ∞, que l’on muni du produit scalaire suivant :
< f, g >:=
Z
I
f(x)g∗(x)ρ(x)dx Donc L2(I, ρ) est un Hilbert.
Th´eor`eme 1.1. Il existe(Pn)n une suite de polynˆomes unitaires, orthogonaux deux `a deux, telle que degPn=n. Cette suite est unique. LesPn sont appel´es polynˆomes orthogonaux pour le poids ρ.
Proof. Par r´ecurrence. P0 = 1
Supposons P0, P1, . . . Pn−1 construits, avec degPi = i, donc (P0, P1, . . . Pn−1) est une base de Rn−1[X].
On cherchePn=xn−Pn−1
j=0 λj,nPj(x)
et∀k∈ {0, . . . , n−1}< Pn, Pk >= 0 donc< xn, Pk >=λk,n||Pk||22 d’o`uλk,n= <x||Pn,Pk>
k||22 est le seul choix possible (d’o`u existence + unicit´e).
Exemples
• L2(]0,+∞[, e−x) Pn=Polynˆome de Laguerre
• L2(]− ∞,+∞[, e−x) Pn=Polynˆome de Hermite (voir plus loin)
• L2(]−1,1[,1) Pn=Polynˆome de Legendre
• L2(]−1,1[,√ 1
1−x2) Pn=Polynˆome de Tchebychev
Th´eor`eme 1.2. Si ∃a >0 tel que R
exp(a|x|)ρ(x)dx <∞ alors les polynˆomes orthogonaux forment une base de Hilbert de L2(I, ρ).
Quelques remarques sur les hypoth`ese Supposons I=intervalle born´e de R. Alors le th´eor`eme de Weierstrass permet de conclure, sans l’hypoth`ese sur le poids.
Si l’intervalle n’est pas born´e, on sait que Weirstrass n’est plus valide. En effet, les polynˆomes vont pouvoir approximer n’importe quelle fonction continue uniform´ement, sur un intervalle. On peut certes choisir l’intervalle arbitrairement grand, mais en dehors de l’intervalle, l’approximation
Par exemple, si I =R, et f ∈C0T
L2(I), alors fn=f1[−n,n] est continue sur un compact, donc approxim´ee uniform´ement `a pr`es parPn, , mais pas en dehors de [−n, n]!
Si l’on veut avoir une approximation par des polynˆomes, il faut donc changer de norme, et mettre un poids qui ´ecrase les fonctions `a l’infini. En particulier, il faut que les polynˆomes soit dansL2(I, ρ), doncρ ´ecrase tous les exp(nln(x)).
Un poids du genre ρ(x) = exp(−p
|x|) annule bien tous les polynˆomes, mais ne v´erifie pas l’hypoth`ese de d´ecroissante au minimum en exponentielle lin´eaire en x.
Proof. Supposons que l’on ait a >0 tel queR
exp(a|x|)ρ(x)dx <∞. Soit f ∈L2(I, ρ) et φtelle que φ(x) =f(x)ρ(x)1I(x).
Montrons que φ∈L1(R) On a ∀t≥0, t≤ 1+t22, donc∀x∈I|f(x)ρ(x)≤ 12(1 +|f(x)|)2ρ(x).
Or, par hypoth`ese,ρet ρf2 sont dans L1(I), doncφ∈L1(R).
TF deφ φ(x) =ˆ R
If(x) exp(−iωx)ρ(x)dx
On prolonge ˆφ sur{z∈C/Im(x)< a/2}=Ba Posons : g(z, x) = exp(−izx)f(x)ρ(x)
∀z∈Ba Z
I
|g(z, x)|dx ≤ Z
I
exp(a|x|/2)|f(x)|ρ(x)dx
≤ Z
I
exp(a|x|)ρ(x)
1/2 Z
I
|f(x)|2ρ(x) 1/2
< ∞
∀z∈BAF(z) :=R
Ig(z, x)dxest bien d´efinie.
F holomorphe
• ∀z∈Ba, x−> g(z, x) mesurable
• z−> g(z, x) est holomorphe pour presque tout x
• ∀z∈Ba, |g(z, x)| ≤exp(a|z|/2)|f(x)|ρ(x)
Donc (holomorphie sous signe somme) F est holomorphe sur Ba et prolonge ˆφ. (ce th´eor`eme nous assure aussi que l’on peut d´eriver sous le signe somme)
f orthogonal `a (xn)n implique F=0 Posons gn(x) = xn. Supposons que ∀n ∈ N, < f, gn >= 0.
Montrons que f=0.
On a F(n)(z) = (−i)nR
Ixnexp(−izx)f(x)ρ(x)dx doncF(n)(0) = (−i)nR
Ixnf(x)ρ(x)dx= (−i)n< f, gn>I= 0 Or F est holomorphe en z´ero, donc F(z) = PF(n)(0)
n! zn = 0 au voisinage de 0, donc F=0 sur un voisinage de 0.
Donc le th´eor`eme de prolongement analytique assure que F=0 sur Ba tout entier (car c’est un ouvert connexe avec point d’accumulation).
Conclusion : (Pn) est une base hilbertienne Or l’application φ 7→φˆ qui a une fonction L1(I) associe sa tranform´ee de Fourier est injective, doncφ= 0.
Orρ >0 donc f=0 sur I, donc l’orhtogonal de Vect((gn)n) est{0}, donc Vect((gn)n)=L2(I, ρ) Donc (xn)n est une base de Hilbert, donc (Pn)n aussi. (car Vect((Pn)n)=Vect((gn)n))
1.1 Exemples : polynˆomes et fonctions de Hermite
Prenons pour poids ρ = e−x2. Alors la famille des Pn = (−1)n
2n−1/4πn/2√
n!ex2dn(e−x
2)
dxn est une base or- thonormale de L2(R, ρ).
Par suite, les hn = e−x2Pn (appel´ees fonctions de Hermite) forment une base hilbertienne de L2(R).
1.2 Suppl´ements
Th´eor`eme 1.3. Polynˆome de meilleure approximation
Soit f ∈L2(I, ρ). Alors ∃!Rn∈ Pn tel que ||f−Rn||2=d(f,Pn).
Proof. Pn est un sev ferm´e du Hilbert L2(I, ρ).
Le th´eor`eme de projection sur un sev ferm´e donne : Rn(x) =Pn k=0
<f,Pk>
||Pk||22 Pk(x) Th´eor`eme 1.4. ∀ρ poids sur I =]a, b[, Pn poss`ede n z´eros distincts dans ]a, b[.
Proof. Id´ee : sorte de r´ecurrence sur le nombre de racine (`a n fix´e!) + absurde. Regarder les petits cas pour voir comment ¸ca marche.
n=1 < P1, P0>= 0 =R
IP1(x)ρ(x)dx
SiP1n’a pas de racines dans I, alorsP1ρne s’annule pas, donc serait de signe constant et l’int´egrale serait n´ecessairement non nulle. Donc P1 s’annule sur I.
Pour montrer un seul z´ero, on se rappelle queP1 est de degr´e 1...
n quelconque < Pn, P0 >= 0 : le mˆeme raisonnement conduit `a l’existence d’un z´ero.
Notonsx1, . . . , xk les z´eros distincts dePn contenus dans I, avecm1, . . . , mk leur multiplicit´e.
doncm1+· · ·+mk≤deg(Pn) =n.
Posonsi = 0 si mi pair, 1 sinon. etq(x) =Qk
i=1(x−xi)i degq ≤k≤n Le polynˆomesPnQa dans I pour z´eros les xi, avec multiplicit´e paire mi+i. Donc< Pn, Q >=R
Pn(x)Q(x)ρ(x)dx6= 0
OrPnest orthogonal `aRn−1[X], doncq 6∈Rn−1[X], donc deg q =n, et donc k=n et∀i mi= 1.
2 Contre exemples; non densit´ e des polynˆ omes orthogonaux
2.1 Contre exemple classique via loi lognormale Proposition 2.1.
f0(x) :=√ 2π1
xexp(−(logx)2
2 )
(densit´e d’une log-normale). Soit −1≤a≤1, posons :
fa(x) =f0(x)(1 +asin(2πlogx)) On a :
∀r∈N Z ∞
0
xrf0(x)sin(2πlogx) = 0
Autrement dit, les va `a densit´e selon f0 et fa admettent les mˆeme moments `a tout ordre.
Proof. Changement de variablex= exp(s+r) s= logx−r ds=dx/x donne :
√1 2π
Z ∞
∞
exp(rs+r2) exp(−(s+r)2
2 ) sin(2π(s+r))ds (1)
= 1
√2πexp(r2 2)
Z ∞
∞
exp(−s2
2) sin(2πs)ds (2)
=0 (3)
(on int`egre une fonction impaire)
Remarque sur la log-normale SiX≈ N(0,1), alors Y := exp(X)≈Lognormal et
E(Yn) =E(exp(nX)) (4)
= Z
enx(2π)−1/2e−x2/2dx (5)
=en2/2 Z 1
√
2πe−(x−n)2/2dx (6)
=exp(n2/2) (7)
On peut trouver une va discr`ete qui poss`ede les mˆeme moments `a tout ordre que la lognormale.
Posons Za telle que P(Za = aek) = a−kexp(−k2/2)/ca pour k ∈ Z, o`u ca est une constante de normalisation.
Alors
exp(−n2/2)E(Zan) =e−n2/2X
k
(aek)na−ke−k2/2/ca (8)
=X
k
a−(k−n)exp(−(k−n)2 2 )1
ca (9)
= 1 (10)
2.2 Contre exemple optimal qui sort de nulle part
Proposition 2.2. Posons λ∈]0,1[ −1≤a≤1 β= tan(λπ/2) fa,λ(x) :=cλe−|x|λ(1 +asin(β|x|λsgn(x))) A λfix´e, les fa,λ sont des densit´es de va ayant les mˆeme moments.
Proof. Montrons
∀n∈N Z ∞
−∞
xne−|x|λsin(β|x|λsgn(x)) = 0
Si n est pair la fonction int´egr´ee est impaire et c’est bon.
Si n est impair alors on int`egre une fonction paire donc on montre que l’int´egrale entre 0 et ∞ est nulle. La suite est une succession d’astuces de calcul.
Tout d’abord, on a :
Z ∞
0
tp−1e−qtdt= Γ(p)
qd Re(q)>0
On va utiliser cette relation avec : p= n+1λ q = 1 +iβ ett=xλ comme changement de variable.
Γ(n+1λ ) (1 +iβ)n+1λ =
Z ∞
0
xλ(n+1λ −1)exp(−(1 +iβ)xλ)λxλ−1dx (11)
=λ Z ∞
0
xnexp(−xλ) cos(βxλ)dx−iλ Z ∞
0
xne−xλsin(βxλ)dx (12) Dans la derni`ere ligne, on remarque comme par hasard que la partie imaginaire de Γ(
n+1 λ ) (1+iβ)n+1λ
est justement la quantit´e que l’on veut voir s’annuler.
Montrons donc que Γ(
n+1 λ ) (1+iβ)n+1λ
est r´eel (c’est `a dire (1 +iβ)n+1λ r´eel), et ¸ca ach`evera la preuve.
Commeβ= tan(λπ/2), on a :
1 +iβn+1λ
= cosλπ 2
−n+1λ
expiλπ 2
n+1λ
(13) Commeλ <1 on a n+1λ >1 pour tout n.
De plus :
exp iλπ
2
n+1λ
= exp
in+12 π
et n impair donc n+12 est entier, ce qui ach`eve la d´emonstration.