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L'arbitrage commercial international par rapport à la juridiction étatique en matière de mesures provisoires et conservatoires : étude analytique et comparative

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L’arbitrage commercial international

par rapport à la juridiction étatique

en matière de mesures provisoires et conservatoires :

étude analytique et comparative

Thèse

Fehr Abd Elazim Emara

Doctorat en droit

Docteur en droit (LL.D.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

Depuis le milieu du XXe siècle, l'arbitrage commercial international a connu un développement phénoménal et acquis une importance significative dans le monde des transactions commerciales internationales. Il est effectivement devenu la juridiction mondiale la plus acceptable, la plus fiable et la plus usuelle pour résoudre les différends relatifs au commerce et aux investissements internationaux.

Toutefois, il a rencontré des difficultés en ce qui concerne les mesures provisoires et conservatoires ce qui explique la tendance des parties à éviter d’y avoir recours devant les arbitres, au profit des juridictions étatiques pour obtenir les mesures d’urgence dont ils avaient immédiatement besoin. L’inexistence d’un régime procédural capable de bien régir cette matière était la raison principale qui a réduit l’efficacité de l’arbitrage.

Pourtant, ce fait a changé grâce aux modifications majeures qui ont été apportées à la Loi type de la CNUDCI en 2006. Cette loi a établi un régime arbitral spécifique aux mesures provisoires et conservatoires. À un stade ultérieur, les règlements modifiés récemment par les centres d’arbitrage qui agissent sur la scène internationale ont beaucoup développé ce régime en le mettant en pratique.

Maintenant, en présence d’un régime arbitral particulier régissant les mesures provisoires et conservatoires, il est opportun d’en évaluer en profondeur l’efficacité par rapport à celle du régime étatique classique régissant la même matière. Voilà l’objectif de cette thèse de doctorat qui présente nombre des propositions doctrinales et normatives dans le but d’améliorer autant que possible ce régime arbitral récent.

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ABSTRACT

Since the mid-twentieth century, the International Commercial Arbitration has achieved massive development and has gained significant importance in the world of international business transactions. It has effectively become the most acceptable, reliable and widely preferred jurisdiction for the settlement of international investment and trade disputes

However, for a long time, the failure of arbitration to properly deal with interim measures lead adversaries to avoid resorting to arbitral tribunals preferring the state courts when emergency measures were required. The main reason for this inadequacy was the lack of a comprehensive arbitral regime for governing the interim measures procedure, which in turn lead to a reduction in the effectiveness of international arbitration.

This issue was recently addressed thanks to the major amendments to the UNCITRAL Model Law in 2006. This Model Law established a specialized regime to govern the arbitral proceedings for interim measures. More recently, a number of prominent international arbitration centers modified their rules to comprehensively deal with the issue of interim measures and to put it into practice.

The introduction of this specialized arbitral regime calls for more effort to evaluate and compare its effectiveness to the juridical state system in dealing with the issue of interim measures. Therefore, the main objective of this doctoral thesis is to provide a thorough and analytical comparison of the two systems and to present a number of doctrinal and legislative proposals aimed at improving the recently introduced arbitral regime.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... III ABSTRACT ... V TABLE DES MATIÈRES ... XII LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS UTILISÉES ... XV REMERCIEMENTS ... XIX

Introduction générale ... 1

1. Cadre conceptuel général de la recherche ... 4

1.1. Notion des mesures provisoires et conservatoires en général ... 4

1.1.1. Émergence et définition du référé (mesures bilatérales) ... 7

1.1.2. Émergence et définition de l’ordonnance sur requête (mesures unilatérales ou ex-parte ou ordonnance préliminaire) ... 11

1.2. Émergence et évolution de l’arbitrage commercial international en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 16

1.2.1. Développement de la compétence de l’arbitre en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 17

1.2.1.1. La phase initiale d'évolution de la compétence de l’arbitre en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 17

i. Principe de la compétence partagée de l’arbitre et du juge en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 18

ii. Principe du pouvoir non exclusif de l’arbitre en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 23

(8)

1.2.1.2. La phase récente d'évolution de la compétence arbitrale en

matière de mesures provisoires et conservatoires ... 26

1.2.2. Développement du régime procédural arbitral en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 28

2. Pertinence et originalité de la recherche ... 31

3. Question, hypothèse et objectif de la recherche ... 35

4. Méthodologie ... 37

4.1. Méthode d’analyse comparative ... 37

4.2. Méthode d’analyse exégétique et méthode interprétative (l’herméneutique juridique) ... 40

5. Plan ... 41

Première partie : Procédure étatique et procédure arbitrale régissant l’introduction de la requête des mesures provisoires et conservatoires ... 43

Introduction ... 45

Chapitre 1 : Introduction de la requête des mesures provisoires devant la juridiction étatique ... 47

Section I : Introduction de la requête des mesures provisoires devant le juge étatique d’urgence ... 48

1. Introduction de la requête des mesures bilatérales devant le juge d’urgence (des référés) ... 48

1.1. Liaison du contentieux en matière de mesures bilatérales ... 51

1.2. Délais de comparution dans les affaires des référés ... 53

1.3. Délais de comparution en cas d’urgence majeure ... 55

2. Introduction de la requête des mesures unilatérales (ex-parte) devant le juge d’urgence (juge des ordonnances) ... 59

2.1. Notion et nature de la requête des mesures unilatérales ... 59

2.2. Forme et contenu de la requête des mesures unilatérales ... 60

2.3. Procédure d’introduction de la requête des mesures unilatérales devant le juge des ordonnances ... 63

(9)

Section II : Introduction de la requête des mesures provisoires devant

la juridiction étatique du fond ... 67 1. Introduction de la requête des mesures bilatérales devant le

juge étatique du fond ... 67 2. Introduction de la requête des mesures unilatérales

devant le juge étatique du fond ... 72 Section III : Récusation du juge en matière d’urgence ... 79

Chapitre 2 : Introduction de la requête des mesures provisoires et

conservatoires devant la juridiction arbitrale ... 83

Section I : Introduction de la requête des mesures provisoires devant l’arbitre d’urgence ... 84

1. Le responsable pour recevoir la requête des mesures

provisoires dans une institution arbitrale ... 88 2. Voies possibles pour introduire une requête de mesures

provisoires devant l’arbitrage ... 93 3. Contenu et forme de la requête des mesures provisoires

présentée à l’arbitrage ... 96 4. Rôle de l'institution d’arbitrage au début de la procédure

d’urgence ... 101 4.1. Vérification prima facie de la requête des mesures

provisoires ... 101 4.2. Nomination de l’arbitre d’urgence ... 111 5. Notification de la requête des mesures provisoires et

conservatoires ... 116 5.1. Notification de la requête des mesures bilatérales avant sa

transmission à l’arbitre d’urgence ... 116 5.2. Transmission sans notification de la requête des mesures

unilatérales à l’arbitre d’urgence ... 123 Section II : Introduction de la requête des mesures provisoires devant

le tribunal arbitral ... 126 1. Introduction de la requête des mesures bilatérales devant le

(10)

2. Introduction de la requête des mesures unilatérales devant

un tribunal arbitral ... 134

Section III : Récusation de l’arbitre en matière d’urgence ... 137

Conclusion ... 149

Deuxième partie : Octroi des mesures provisoires et conservatoires par la juridiction étatique et par la juridiction arbitrale ... 155

Introduction ... 157

Chapitre 1 : Lieu de la procédure étatique et arbitrale en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 159

1. Lieu de la procédure étatique des mesures provisoires et conservatoires ... 159

2. Lieu de la procédure arbitrale des mesures provisoires et conservatoires ... 161

Chapitre 2 : Conditions d’octroi des mesures provisoires et conservatoires ... 173

1. Conditions générales d’octroi des mesures provisoires et conservatoires ... 173

1.1. L'urgence ... 174

1.1.1. Concept d'urgence et son exigence comme condition juridique ... 174

1.1.2. Le moment où le cas d’urgence doit exister ... 182

1.1.3. Contrôle de la Cour de cassation sur l'existence d’urgence ... 186

1.2. Le non-préjudice au principal ... 190

2. Conditions supplémentaires et particulières d’octroi des mesures provisoires et conservatoires ... 202

2.1. Conditions supplémentaires ... 202

2.1.1. Nécessité des circonstances justifiant l’octroi des mesures provisoires sollicitées sans contradiction (ex-parte) ... 202

(11)

2.2. Conditions particulières ... 208 2.2.1. La première condition particulière ... 208 2.2.2. La seconde condition particulière ... 210 3. Conséquences de l'absence de l’une ou quelques-unes de ces

conditions ... 211

Chapitre 3 : Procédure étatique et procédure arbitrale régissant la prise de la décision en matière de mesures

provisoires et conservatoires ... 219

1. Forme de la décision rendue en matière de mesures

provisoires et conservatoires ... 219 1.1. Forme de la décision provisoire étatique ... 219 1.1.1. Forme de la décision étatique en matière de mesures

bilatérales ... 220 1.1.2. Forme de la décision étatique en matière de mesures

unilatérales ... 222 1.2. Forme de la décision arbitrale provisoire ... 225 1.2.1. Pouvoir de l’arbitre pour choisir la forme de sa

décision provisoire ... 226 1.2.1.1. Pouvoir de l’arbitre pour choisir la forme de sa décision en

matière de mesures bilatérales ... 226 1.2.1.2. Pouvoir de l’arbitre pour choisir la forme de sa décision en

matière de mesures unilatérales ... 231 1.2.2. Distinction entre les formes de la décision

arbitrale provisoire ... 232 1.2.2.1. Caractéristique formelle de la décision arbitrale rendue en

matière de mesures bilatérales ... 234 1.2.2.2. Caractéristique formelle de la décision arbitrale rendue en

matière de mesures unilatérales ... 238 2. Délai d’émission de la décision provisoire ... 241 3. Caractéristiques des décisions étatique et arbitrale rendues en

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3.1. Caractéristique générale distinguant les décisions rendues en

matière de mesures d’urgence ... 247 3.1.1. L’autorité de la décision provisoire étatique ... 250 3.1.1.1. L’autorité de la décision étatique rendue en matière de

mesures bilatérales ... 251 3.1.1.2. L’autorité de la décision étatique rendue en matière de

mesures unilatérales ... 252 3.1.2. L’autorité de la décision provisoire arbitrale ... 254 3.2. Caractéristiques particulières ... 257 3.2.1. Caractéristique particulière de la décision rendue en matière

de mesures bilatérales ... 257 3.2.2. Caractéristique particulière de la décision rendue en matière

de mesures unilatérales ... 261 3.2.2.1. La raison justifiant l’application du principe du non

contradictoire ... 261 3.2.2.2. Les conséquences de l’application du principe du

non contradictoire ... 263 Conclusion ... 267

Troisième partie : Procédure étatique et procédure arbitrale régissant l’exécution et le recours en matière

de mesures provisoires et conservatoires ... 273

Introduction ... 275

Chapitre 1 : Exécution des mesures provisoires et conservatoires

ordonnées par la juridiction étatique ... 277

1. Caractéristiques de l'exécution des mesures provisoires et

conservatoires ordonnées par la juridiction étatique ... 277 1.1. L'exécution immédiate et provisoire ... 277 1.2. L'exécution sans notification ... 281 2. Responsabilité des dommages résultant de l'exécution

immédiate et provisoire des mesures ordonnées par une

(13)

Chapitre 2 : Reconnaissance et exécution des mesures provisoires et conservatoires ordonnées par la

juridiction arbitrale ... 287

Section I : Reconnaissance et exécution des mesures bilatérales

ordonnées par l’arbitrage ... 288 1. Applicabilité de la Convention de New York en matière de

mesures provisoires bilatérales ... 288 2. Régime spécifique d’exécution des mesures bilatérales

établi par la loi type ... 299 2.1. Traitement de la question de la forme de la décision

provisoire arbitrale ... 300 2.2. Détermination des motifs de refus de reconnaissance ou

d’exécution des mesures provisoires (bilatérales) ... 304 2.2.1. Motifs généraux de refus de l’exécution d’une sentence ou

d’une mesure provisoire ... 306 a. Invalidité de la convention d’arbitrage ... 307 b. Inarbitrabilité ... 314 c. Violation du principe du contradictoire ou des droits de

la défense ... 316 2.2.2. Motifs particuliers de refus de l’exécution d’une

mesure provisoire ... 320 a. Le premier motif : Le non-respect de la garantie (caution)

constituée par l'arbitre ... 320 b. Le deuxième motif : Rétraction ou suspension des mesures

provisoires par le tribunal arbitral ... 329 c. Le troisième motif : L’incompatibilité des mesures

provisoires avec les pouvoirs du juge d’exequatur ... 331 Section II : Possibilité d’exécution des mesures unilatérales (ex-part)

ordonnées par l’arbitre ... 336 Section III : Autre lacune à combler pour améliorer le régime

spécifique de l’exécution des mesures provisoires de la

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Section V : Recevabilité du recours en annulation contre la décision

provisoire arbitrale ... 352

Conclusion ... 357

Conclusion générale ... 365

A. Problèmes pathologiques de l'arbitrage en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 367

B. Caractéristiques congénitales affectant l'arbitrage en matière de mesures provisoires et conservatoires ... 372

BIBLIOGRAPHIE ... 375

1. Ouvrages ... 375

2. Thèses ... 378

3. Articles de revues et recueils de cours ... 379

3.1. Sur support papier ... 379

3.2. Sur supports électroniques ... 380

4. Conférences et colloques publiés ... 382

5. Jurisprudence ... 383 5.1. Jurisprudence égyptienne ... 383 5.2. Jurisprudence française ... 387 5.3. Autre jurisprudence ... 390 6. Rapports de recherche ... 391 7. Dictionnaires ... 392

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LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS UTILISÉES

AAA : American Association of Arbitration. ALI : American Law Institute.

AJAC : Association japonaise d’arbitrage commercial.

B.T.C.A.S. : Bureau technique de la Cour administrative suprême. B.T.C.C. : Bureau technique de la Cour de cassation.

B.T.C.S.C. : Bureau technique de la Cour suprême constitutionnelle. Bull. : Bulletin.

Cah. Arb. : Cahier de l'arbitrage.

CAIS : Centre d'arbitrage international de Singapour. CAMERA : Chambre arbitrale de Milan.

Cass. Civ : Cour de cassation, chambre civile.

Cass. Com. : Cour de cassation, chambre commerciale. CCI : Chambre de commerce internationale.

CCS : Chambre de Commerce de Stockholm. CEPANI : Centre belge d’arbitrage et de médiation.

(16)

Com. : Commercial.

C.p.c. : Code de procédure civile.

CNUDCI : Commission des Nations Unies pour le droit commercial international. Éd. : Édition.

HKIAC : Hong Kong International Arbitration Center. ICC : International Chamber of Commerce.

ICCA : International Council for Commercial Arbitration.

ICSID : International Centre for Settlement of Investment Disputes. IJPL. : International Journal of Procedural Law.

Int. Court : International Court.

Int'l l.f. d. int'l : International Law Forum du droit international. JCAA : Japan Commercial Arbitration Association.

JCP E : Juris-Classeur périodique, édition Entreprise. J.D.I. : Journal du droit international.

J. Int. Arb. : Journal of International Arbitration. AIAJ. : Asian International Arbitration Journal.

OHADA : Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires. OMPI : Organisation mondiale de la Propriété intellectuelle.

R.D.P.A : Revue de droit des pays Afrique Rev. : Revue.

(17)

RIDC : Revue internationale de droit comparé. RDAI. : Revue de droit des affaires internationales. LCIA : London Court of International Arbitration. sér. : Série.

SIAC : Singapore International Arbitration Center.

[sic] : Expression employée pour signifier que le précédent énoncé qui est cité ne comporte pas d’erreurs de transcription.

TGI : Tribunal de Grande Instance. Trad. : Traduction.

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REMERCIEMENTS

En premier lieu, je voudrais exprimer ma vive reconnaissance envers mes parents. Ce sont eux qui m'ont transmis les valeurs qui ont fait de moi une personne responsable et capable de poursuivre mes études universitaires qui m'ont amené jusqu'au doctorat en droit. Je dédie cette thèse à la mémoire de mon père décédé il y a quelques années.

Je tiens aussi à exprimer toute ma gratitude à mon épouse, Mawra, et à mes deux fils, Aly et Omar. Ils m’ont beaucoup encouragé et ont dû faire preuve de beaucoup de patience alors que je devais me concentrer pour approfondir les différents aspects du sujet de notre thèse.

Je voudrais aussi remercier mes beaux-parents pour m’avoir appuyé tout au long de mon séjour d’études au Canada.

Je tiens à exprimer ma profonde reconnaissance envers le ministère de la Justice de l'Égypte de même qu'au Conseil suprême de la magistrature de m'avoir accordé un congé d'études au Canada.

Merci également à mon directeur de thèse, Monsieur le professeur Bjarne

Melkevik, qui a bien voulu accepter de me donner son indéfectible soutien et me prodiguer

de précieux conseils.

J'apprécie grandement la contribution de Monsieur le professeur Alain Prujiner qui m'a fait profiter de sa longue expérience dans le domaine de l'arbitrage commercial international et de me faire de judicieux commentaires sur ce sujet.

J’adresse mes remerciements à mon codirecteur, Monsieur le professeur

Abd Elfadil Bakre, pour avoir partagé avec nous ses connaissances du milieu

(20)

Enfin, il ne faut jamais oublier Monsieur Michel Fournier qui m'a accompagné lors de mon arrivée à Québec. Il m'a aidé particulièrement en passant de nombreuses heures à la révision linguistique du texte de notre thèse.

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(22)
(23)

Une justice différée est une justice refusée. Une telle justice est souvent inefficace parce qu’elle ne répond pas intégralement aux besoins et aux attentes des justiciables. Cela mine la crédibilité du système judiciaire ainsi que la confiance des citoyens envers l’État. L’inefficacité et la lenteur de la justice incarnent sur le terrain l’expression de l’insécurité judiciaire qui mène dans le domaine économique, entre autres, à la fuite des investisseurs. C’est pourquoi, dans tous les systèmes juridiques développés, le législateur fait tous les efforts possibles pour simplifier et accélérer les procédures afin d’optimaliser la performance des tribunaux dans le but de réaliser une prompte justice. Cela est en effet considéré comme un objectif législatif général, peu importe le différend à résoudre.

Toutefois, il existe des matières extraordinaires qui ne peuvent jamais être réglées par les procédures habituelles quelles que soient leur simplicité et leur rapidité ; on les appelle « matière des mesures provisoires et conservatoires ». Cette matière nécessite toujours des procédures exceptionnelles pour qu’elle soit bien traitée : ce sont les « procédures provisoires et conservatoires ».

Depuis l’apparition il y a plusieurs siècles de la théorie d’urgence en matière civile et commerciale, la compétence pour octroyer les mesures provisoires et conservatoires était en principe réservée exclusivement à la juridiction étatique. Lorsque l’arbitrage est devenu, au niveau mondial, une instance de « juridiction » plus acceptable, plus fiable et plus usuelle pour résoudre les disputes inhérentes à l’investissement transnational, certaines questions complexes ont pu être soulevées ; l’une des plus récentes est celle qui est reliée à sa capacité et à son efficience en ce qui concerne le traitement de la matière des mesures provisoires et conservatoires par rapport à la juridiction étatique. C’est ce qui nous a amené à donner à notre recherche le titre de « L’arbitrage commercial international par

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Comme ce titre l’indique, cette étude se penchera spécifiquement sur la problématique entourant la place des « mesures provisoires et conservatoires » lors de leur traitement par la juridiction étatique et par la juridiction arbitrale. Nous sonderons les profondeurs de cette question en examinant les instruments internationaux de l’arbitrage commercial et un certain nombre d’ordres juridiques en évaluant plus attentivement l’efficacité de l’arbitrage commercial par rapport à la juridiction étatique dans le but d’améliorer le régime d'arbitrage d'urgence autant que possible. Et là réside l'idée générale qui constitue le noyau dur de la problématique de cette recherche.

Pour exposer cette problématique, il faut d'abord tracer le cadre conceptuel général de la recherche (1) en montrant la pertinence et l’originalité de notre étude (2). Nous identifierons ensuite la question spécifique à laquelle il faut répondre et l’hypothèse initiale à prouver ; c’est ce qui nous conduira à déterminer les objectifs de cette étude (3) ainsi que l’approche méthodologique à suivre pour les atteindre (4). Il convient enfin de présenter le plan que nous adopterons pour élaborer notre thèse (5). À partir de ces cinq axes principaux, nous mettrons en relief le cadre général de notre thèse de doctorat.

1. Cadre conceptuel général de la recherche : Le titre de notre thèse comporte trois

concepts principaux : la juridiction arbitrale, la juridiction étatique et la matière des mesures provisoires et conservatoires ; toutefois, le concept pivot autour duquel s'articule cette étude est celui mentionné en dernier. Or, nous examinerons ci-dessous l’émergence et la notion de ces mesures (1.1) ainsi que l’émergence et l’évolution de la juridiction arbitrale en matière de mesures provisoires et conservatoires (1.2).

1.1. Notion des mesures provisoires et conservatoires en général : La littérature

spécialisée dans le domaine des matières civile, commerciale et arbitrale confirme qu'il est difficile de s'entendre sur une définition unique des mesures provisoires et conservatoires. Stephen R. Bond affirme même que « la notion de « mesure conservatoire » est l’une des plus obscures qui soit » (1). Dans le même contexte, Gérard Pluyette affirme que « la pratique judiciaire, en droit commun comme en matière d’arbitrage international,

(1) Stephen R. Bond, La nature des mesures conservatoires et provisoires in Mesures conservatoires et provisoires en matière d’arbitrage international, Bull. de la Cour Internationale d’Arbitrage, IXe

Colloque conjoint, Ibrahim SHIHATA et Robert COULSON (dir.), CCI, AAA et CIRDI, Paris, Publ. ICC, 1992, p. 8.

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montre, à l’évidence, la très grande diversité des mesures et l’ambigüité de la notion, le caractère conservatoire et même provisoire ne reflétant pas toujours la situation réelle. Cette question a fait l’objet d’analyses et de débats très approfondis […] » (2). Claude Goldman estime qu’ « il n’est pas possible, dans le cadre de l’arbitrage international, de donner une définition unique des mesures provisoires » (3). Dans son ouvrage intitulé « Provisional Measures in International Commercial Arbitration », Ali Yeşilirmak assure que « there is no widely accepted definition of concept of interim measures » (4). En droit français, la notion de mesures provisoires et conservatoires garde effectivement un aspect flou et ambigu parce qu’elles traitent de cas et situations multiples et variés ; elles sont donc difficiles à identifier exclusivement (5).

Sur le plan jurisprudentiel, ces mesures ont été définies par la Cour de Justice des Communautés européennes en confirmant qu’elles sont « destinées à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond » (6).

De notre côté, nous estimons que cette difficulté d’une définition claire et unique s’explique par une panoplie de raisons bien différentes. Soulignons que les mesures conservatoires sont très divergentes et disséminées dans différentes lois, de sorte qu’une classification identificatoire unique se révèle nécessairement compliquée. Retenons également, quant aux lois étatiques, que l’absence de précision laisse souvent à désirer ; il existe plus fréquemment plusieurs juridictions qui ont la compétence pour octroyer de telles mesures et le juge possède un large pouvoir discrétoire d’appréciation pour admettre ou rejeter la requête postulée ou l’affaire formée afin d’obtenir une mesure conservatoire. Dans ce contexte, il ne faut pas dénier aussi le rôle important joué par les circonstances

(2) Gérard PLUYETTE in Mesures conservatoires et provisoires en matière d’arbitrage international, Bull. de la Cour Internationale d’Arbitrage, IXe Colloque conjoint, op. cit., p. 74.

(3) Claude GOLDMAN, « Mesures provisoires et arbitrage international », (1993) 1 RDAI. 3,4.

(4) Ali YESILIRMAK, Provisional Measures in International Commercial Arbitration, Kluwer Law International, London, 2005 p. 4.

(5) Mohammad-Ali BAHMAEI, L'intervention du juge étatique des mesures provisoires et conservatoires

en présence d'une convention d'arbitrage : droits français, anglais et suisse, Thèse de doctorat,

Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne), Paris, L.G.D.J, 2002, pp. 4 : 20.

(6) Cour de Justice des Communautés européennes, Arrêt Reichert II, 26 mars 1992, affaire C-261/90, Rec. 1992, Chapitre 34, p. 2175, cité par Sébastien BESSON, Arbitrage international et mesures

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entourant le différend, circonstances qui sont alléguées par le demandeur, celles qui pourraient convaincre ou ne pas convaincre le juge de la nécessité de prononcer la mesure demandée. En outre, ces mesures sont ordonnées sous plus d'une forme procédurale et ne sont pas régies par un seul régime procédural, et cela, selon leur type (bilatérales ou unilatérales).

Il n’y a donc pas de définition unique des tous les types de ces mesures, mais il est peut être plus facile de trouver au moins certains textes définissant un type précis. Malgré cela, la doctrine leur en donne plusieurs qui varient de façon circonstancielle. Étymologiquement, ces mesures indiquent la procédure qui a pour but de sauvegarder un droit (7). Il s’agit de « l'ensemble des mesures qui peuvent être ordonnées préalablement à la solution d'un litige au fond, et qui ne préjugent pas du fond. C'est en raison de ce dernier caractère (et non du fait qu'elles seraient réversibles, ce qui n'est pas nécessairement le cas) que ces mesures peuvent être qualifiées de provisoires » (8). Elles « sont des décisions qui ne tranchent pas le fond du litige, mais statuent sur un ou plusieurs chefs de demandes qui nécessitent une solution urgente » (9). Une définition différente prévoit que : « a provisional measure is, broadly speaking, a remedy or a relief that aimed at safeguarding the rights of parties to a dispute pending its final resolution » (10).

Dans la pratique, il est très fréquent que ces mesures sont divisées en deux types :

les mesures bilatérales et les mesures unilatérales ou (ex-part ). Ces deux types de

mesures sont le mécanisme par lequel la théorie d’urgence peut être appliquée. Conformément à ce qui est traditionnellement prescrit par les ordres juridiques civilistes, la compétence pour l’octroi des mesures bilatérales est conférée à la juridiction étatique des référés et la compétence pour l’octroi des mesures unilatérales est conférée à la juridiction étatique des ordonnances sur requête. Les référés et les ordonnances sur requête sont deux recours procéduraux classiques et deux matières entièrement distinctes. Or, chacune de ces deux matières possède une notion propre et des caractéristiques particulières. Nous

(7) Stephen R. Bond, op. cit., p. 8. (8) Claude GOLDMAN, op. cit., p. 3 et 4.

(9) Gaston Kenfack DOUAJNI, « Les mesures provisoires et conservatoires dans l'arbitrage OHADA », (2000) 110, fascicule 833, R.D.P.A 137, 137.

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exposerons ci-dessous l’émergence et la définition du référé (mesures bilatérales) (1.1.1) et celle de l’ordonnance sur requête (mesures unilatérales) (1.1.2).

1.1.1. Émergence et définition du référé (mesures bilatérales) : Le référé est un régime

procédural traditionnel qui apparut et entra en vigueur en vertu de l’édit du 22 janvier 1685 au Châtelet de Paris. Cet édit, qui est considéré comme l'origine de la juridiction du référé, établit une procédure particulièrement rapide et sommaire pour statuer contradictoirement au provisoire lors de procès urgents ; par exemple : « évacuation des lieux, payement des loyers, saisies et exécutions mobilières, établissement et charges de gardiens et de commissaires, réparation des bâtiments, salaires des tuteurs, précepteurs et maitres d'école, honoraires des médecins, apothicaires et chirurgiens et autres matières sommaires et provisoires […] » (11).

Dès que la procédure des référés a été instaurée au XIXe siècle en France, comme le dit J. Seignolle, elle « s’est développée et continue à se développer sans cesse ; le recours au référé est, dans la pratique, de plus en plus fréquent » (12). Par la suite, cette procédure a été adoptée par un grand nombre d’ordres juridiques étatiques, surtout ceux qui suivent le système de droit civil. Le référé est alors devenu un régime procédural spécifique à l’intérieur du système procédural général. Ainsi, dans le même temps et en parallèle, une juridiction extraordinaire appelée (juridiction de référé) a été créée en se basant sur la procédure des référés.

Selon le dictionnaire de droit de S. Corniot, le référé est « une procédure exceptionnelle et rapide par laquelle un plaideur demande instance, soit au président du tribunal de commerce, soit au président du tribunal paritaire, voire même au juge administratif afin de statuer provisoirement sur une contestation dont la solution s'impose d'urgence » (13).

(11) Sur l'émergence et l’évolution historique du référé voir : Jean-Pierre SEIGNOLLE, La juridiction du

président du tribunal, Tome I " Des référés ", Paris, Librairies techniques, 1957, pp. 21 ss. ; Alain

PRUJINER, Contribution à une théorie du droit judiciaire d’urgence : étude comparative de

l’injonction interlocutoire et du référé , thèse de doctorat, Québec, L'école des gradués, Université

Laval, 1979, p.15 et Pierre ESTOUP, La pratique des procédures rapides, référés, ordonnances sur requêtes, procédures d’injonction, Paris, Litec, 1990, pp. 8 : 10.

(12) Jean-Pierre SEIGNOLLE, op. cit., Tome I, p. 24.

(28)

Une autre définition insiste sur le fait que le référé est « une procédure exceptionnelle ; elle ne peut être utilisée que dans certains cas limitativement prévus par la loi. L'ordonnance rendue par le juge des référés a un caractère essentiellement provisoire : en aucun cas, elle ne peut faire préjudice au principal » (14).

Le Lexique des termes juridiques de Serge Guinchard et Thierry Debard définit le référé comme « une procédure contradictoire et accélérée grâce à laquelle une partie peut, dans certains cas, obtenir d'un magistrat unique une décision provisoire, qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend » (15).

Sur le plan législatif, l’article 484 du Code de procédure civile français a clairement défini le référé en disposant que « l'ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d'une partie, l'autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n'est pas saisi du principal le pouvoir d'ordonner immédiatement les mesures nécessaires ».

Sur le plan judiciaire, la Cour de cassation égyptienne a jugé que « la matière des référés, selon l'article 227 du Code de procédure civile [égyptien], est celle qui ne peut être résolue que par des mesures provisoires et conservatoires sans aucun préjudice au fond du litige […] » (16).

Le législateur procédural égyptien ne s'est pas beaucoup préoccupé de définir le référé, mais se souciait davantage de déterminer les conditions de la compétence du juge des référés, leurs caractéristiques et toutes les procédures à suivre pour régler cette matière. Cela n'empêche pas les théoriciens juridiques d'extraire une définition à partir des dispositions prescrites par les lois procédurales en s'appuyant sur la nature, les caractéristiques et les règles régissant la compétence juridictionnelle en matière des référés.

(14) S. CORNIOT, Dictionnaire de droit, Tome II, 2e éd., Paris, Dalloz, 1966, p. 491.

(15) Serge GUINCHARD et Thierry DEBARD (dir.), Lexique des termes juridiques, 18e éd, Paris, Dalloz, 2011, p. 680.

(16) Voir : Cass. civ, Le Caire, 17 janvier 1976, pourvoi No 59/40, Rev. B.T.C.C., sér. 27, Vol. 1, p. 42,

Cass. civ., Le Caire, 8 décembre 1997, pourvoi No 2324/60, Rev. B.T.C.C., sér. 48, Vol. 2, p. 1401 et

Cass. civ., Le Caire, 28 mai 2002, pourvoi No 421/71, Rev. B.T.C.C., sér. 53, Vol. 2, p. 715.

* Note : Toute la jurisprudence et les dispositions en arabe sont traduites en français

(29)

Suivant la formulation doctrinale française de J. Seignolle, le référé est « une procédure ayant pour objet de statuer aussi rapidement que possible dans les affaires urgentes et dans les cas où les titres et jugements soulèvent des difficultés relativement à leur exécution, mais uniquement d'une manière provisoire, le principal demeurant toujours réservé » (17).

Pour notre part, nous définissons le référé comme un ensemble de procédures contradictoires, extraordinaires, rapides et sommaires ; il ne s'applique qu'aux cas d'urgence en autorisant la juridiction compétente à rendre contradictoirement, sans préjudice au fond du litige, des jugements provisoires et exécutoires immédiatement soit pour assurer aussitôt que possible la conservation judiciaire des intérêts et des droits menacés lors d'un préjudice sérieux, soit pour prévenir un dommage imminent.

Il est important de souligner que la juridiction étatique des référés a été créée pour faire face aux cas d’urgence exigeant une intervention judiciaire particulière, intervention réalisée selon des procédures extraordinaires (procédures d’urgence) qui doivent toujours être plus sommaires, plus simples et plus rapides que celles suivies habituellement.

Et puisque les procédures des référés sont toujours contradictoires, les mesures ordonnées par le jugement en référé s’appellent mesures bilatérales. Nous constatons que ce terme indique exclusivement l’intervention et les procédures qui sont contradictoirement prises pour prévenir un dommage imminent ou un péril en la demeure menaçant un ou plusieurs intérêts. Ces mesures ne peuvent pas être prononcées en l’absence de l’autre partie puisque la contradiction s’avère la caractéristique distinguant ces mesures. Pour cette raison, l’expression mesures bilatérales est très commune.

La loi type (18) de la CNUDCI (19) sur l’arbitrage commercial international consacre une définition particulière pour les mesures bilatérales (20). Dans le deuxième alinéa de l’article 17 de cette loi remarquable, nous lisons la disposition significative suivante :

(17) Jean-Pierre SEIGNOLLE, op. cit., Tome I, p. 21.

(18) L’article 13 du Guide pour l’incorporation dans le droit interne et l’utilisation de la Loi type de la CNUDCI sur la conciliation commerciale internationale (2002) dispose que :

Une loi type est un texte législatif qu’il est recommandé aux États d’incorporer dans leur droit interne. Contrairement à une convention internationale, une loi type n’oblige pas

(30)

Une mesure provisoire est toute mesure temporaire, qu’elle prenne la forme d’une sentence ou une autre forme, par laquelle, à tout moment avant le prononcé de la sentence qui tranchera définitivement le différend, le tribunal arbitral ordonne à une partie :

(a) De préserver ou de rétablir le statu quo en attendant que le différend ait été tranché; (b) De prendre des mesures de nature à empêcher, ou de s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de causer, un préjudice immédiat ou imminent ou une atteinte au processus arbitral lui-même ;

(c) De fournir un moyen de sauvegarder des biens qui pourront servir à l’exécution d’une sentence ultérieure ; ou

(d) De sauvegarder les éléments de preuve qui peuvent être pertinents et importants pour le règlement du différend.

Cette définition est adoptée par l’article 17.2 de la loi de la Nouvelle-Zélande sur l'arbitrage qui a été amendée par l’Act. No 94 de 2007. Cet article dispose que :

Interim measure means a temporary measure (whether or not in the form of an award) by which a party is required, at any time before an award is made in relation to a dispute, to do all or any of the following:

(a) Maintain or restore the status quo pending the determination of the dispute,

(b) Take action that would prevent, or refrain from taking action that is likely to cause, current or imminent harm or prejudice to the arbitral proceedings,

(c) Provide a means of preserving assets out of which a subsequent award may be satisfied,

(d) Preserve evidence that may be relevant and material to the resolution of the dispute, (e) Give security for costs.

Une définition presque semblable est également prévue par l’article 26.2 de la version révisée en 2010 du Règlement d’arbitrage de la CNUDCI.

l’État qui l’incorpore à en aviser l’Organisation des Nations Unies ou les autres États qui peuvent l’avoir également incorporée. Les États sont néanmoins fortement encouragés à informer le secrétariat de la CNUDCI de l’adoption de toute loi fondée sur la nouvelle Loi type (ou sur toute autre loi type issue des travaux de la CNUDCI).

Et l’article 14 dispose que :

Lorsqu’il l’incorpore dans son système juridique, un État peut modifier le texte de la loi type ou en supprimer certaines dispositions. Dans le cas d’une convention, les possibilités de modification du texte uniforme par les États parties (normalement par le biais de “réserves”) sont beaucoup plus restreintes; en particulier les conventions dans le domaine du droit commercial interdisent en règle générale toute réserve ou n’en autorisent qu’un tout petit nombre sur des points spécifiques.

(19) La Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) a été créée par la résolution 2205 (XXI) de l’Assemblée générale des Nations Unies en date du 17 décembre 1966. Voir : Guide de la CNUDCI, L’essentiel sur la Commission des Nations Unies pour le droit

commercial international, Publ. des Nations Unies, Vienne, 2013, p. 1 en ligne :

http://www.uncitral.org/pdf/french/texts/general/12-57492-Guide-to-UNCITRAL-f.pdf consulté le 5

novembre 2013.

(20) Voir Alain PRUJINER, Éléments d’une Loi type réformée in D'une réforme à une autre : Regards croisés sur l'arbitrage au Québec, Frédéric BACHAND et Fabien GELINAS (dir.), Québec, Yvon Blais, 2013, p. 232

(31)

1.1.2. Émergence et définition de l’ordonnance sur requête (mesures unilatérales ou

ex-parte ou ordonnance préliminaire) : Comme la procédure du référé, celle de l’ordonnance sur requête est un régime traditionnel apparu d’abord en France. Le décret impérial du 30 mars 1808 qui contient le règlement pour la police et la discipline des cours et tribunaux était la graine à partir de laquelle a grandi l'idée générale de l’ordonnance sur requête. L’article 54 de ce décret énonçait que :

Toutes requêtes à fin d'arrêt ou de revendication de meubles ou marchandises, ou autres mesures d’urgence ; celles pour mise en liberté, ou pour obtenir permission d'assigner sur cession de biens ou sur homologation de concordats et délibérations de créanciers, et celles pour assigner à bref délai, en quelque matière que ce soit, seront présentées au président du tribunal, qui les répondra par son ordonnance, après la communication, s'il y a lieu, au procureur impérial.

Néanmoins les requêtes présentées après la distribution de la cause, et dans le cours de l'instruction, seront répondues par le vice-président de la chambre à laquelle la cause aura été distribuée.

Cet article ouvrait la porte procédurale pour les magistrats français en vue de résoudre les matières prescrites par le moyen des ordonnances provisoires selon des procédures extraordinaires non contradictoires et non par des jugements qui sont soumis aux procédures ordinaires. Cependant, il n’a établi ni la procédure à suivre pour qu’un requérant introduise une requête, ni celle qui régit l’octroi de ces ordonnances, ni les voies de recours. En outre, l’article mentionné n’a pas déterminé les caractéristiques de ces ordonnances, ce qui les rendait juridiquement ambiguës à cette époque.

Toutefois, la pratique judiciaire des magistrats français a, à petits pas, comblé cette lacune. C’est le magistrat De Belleyme, le président du Tribunal civil de la Seine de 1829 à 1856, qui a concrètement établi la pratique judiciaire des ordonnances sur requête. C’est lui qui a ébauché le régime de la juridiction des requêtes (21). Ce fut en effet la première brique posée dans la construction pratique de cette juridiction extraordinaire.

La pratique judiciaire issue de Belleyme a été suivie pendant des années en France et a établi la base fondamentale de la juridiction des requêtes. De même, elle a montré la pertinence inévitable de cette juridiction et la nécessité d’un régime procédural structuré et

(21) Sylvie PIERRE-MAURICE, Ordonnance sur requête, thèse de doctorat, France, Strasbourg III, Dalloz, 2003, p. 2 et 3.

(32)

adéquat. Le décret nº 71-740 qui a été promulgué en France le 9 septembre 1971 a bien mis l’ordonnance sur requête à la place qu’elle mérite dans le Code de procédure civile (22).

Dans un développement assez récent et sous une section spécifique intitulée « les ordonnances sur requête », le nouveau Code de procédure civile français de 1976 établit un régime intégral et précis régissant la juridiction des requêtes. Ce régime met en ordre toute la procédure à suivre afin d’obtenir une mesure provisoire ou conservatoire unilatérale (ex-part) par le moyen d’une ordonnance sur requête. Comme c’est le cas pour la procédure des référés, celle des ordonnances sur requête a ensuite été adoptée par presque tous les ordres juridiques étatiques, surtout ceux qui suivent le système de (Civil Law) qui l'ont intégrée à leurs propres droits des procédures civiles.

L’ordonnance sur requête en tant que procédure judiciaire n’est pas facile à définir. La signification juridique de cette ordonnance est toujours demeurée problématique pour les théoriciens. Plusieurs approches doctrinales ont émergé pour classifier la nature juridique des ordonnances en général.

Une théorie traditionnelle est apparue en les classant en deux catégories. La première catégorie comporte les ordonnances gracieuses qui sont rendues en l’absence d’un contentieux et sans la présence de la partie adverse (23) ; c’est pourquoi elles sont considérées comme des actes de pure administration (24). La seconde catégorie comporte les ordonnances contentieuses qui sont rendues en raison de l’existence d’un litige ou d’un contentieux entre le requérant et l’autre partie ; ces ordonnances ne peuvent pas être classifiées comme un acte de pure administration parce qu’elles sont de nature à porter éventuellement atteinte aux droits ou aux intérêts, soit à la partie qui les sollicite, soit à celle contre qui elles sont rendues (25). L’ordonnance sur requête appartient à la seconde

(22) Pierre ESTOUP, op. cit., p. 191. Voir également en ligne :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000879042 consulté le 21

avril 2015.

(23) Dans ce sens, voire Serge GUINCHARD et Thierry DEBARD (dir.), Lexique des termes juridiques, op. cit., p. 249.

(24) Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des ordonnances sur requête, Tome II « Des ordonnances sur requête », op. cit., p. 25. Dans le même sens, voir aussi Jean CLEMENCEAU, Les procédures de référé et d’ordonnance sur requête, Paris, EJVS, 1965, p. 203. (25) Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des ordonnances sur requête,

(33)

catégorie, car elle est rendue en raison de l’existence d’un contentieux sérieux entre les parties (26), contentieux qui apparaît souvent sous la forme d'un risque urgent menaçant un droit ou un intérêt.

Dans son ouvrage intitulé « Les procédures de référé et d’ordonnance sur requête », Jean Clemenceau dit que : « les ordonnances de caractère contentieux dépassent le cadre de l’administration judiciaire ; elles comportent une appréciation de la requête et de l’objet de la demande et sont susceptibles, selon la décision qu’elles comportent, de faire grief soit au requérant, en cas de refus de la mesure sollicitée, soit à la partie adverse si la mesure est accordée » (27).

Une théorie a situé les ordonnances sur requête dans une position intermédiaire entre l’acte gracieux et l’acte juridictionnel. Il nous semble que cette théorie n’était pas suffisamment évidente ou rigoureuse, ce qui a conduit à l’émergence d’une autre, plus adéquate. Celle-ci affirme que ces ordonnances sont des actes d’administration judiciaires qui sont rendus sous la forme de mesures provisoires en se basant sur « l’imperium » et en ne dessaisissant pas le juge qui les avait rendues (28).

J. Seignolle décrit les ordonnances sur requête en examinant leur nature et leurs caractères fondamentaux ; ainsi, selon cet auteur célèbre, « l’ordonnance sur requête est une mesure de police ayant un caractère provisoire, ne dessaisissant pas le juge qui l’a rendue et n’ayant pas l’autorité de la chose jugée ; elle est cependant, malgré son caractère administratif, susceptible de voies de recours » (29). Bien que cette conception reste encore la plus remarquable, elle n’est cependant jamais classifiée comme axiome ou comme fait procédural.

(26) Proche de ce sens, voir Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des

ordonnances sur requête, Tome II « Des ordonnances sur requête », op. cit., p. 25 et Pierre ESTOUP,

op. cit., p. 204.

(27) Jean CLEMENCEAU, op. cit., p. 203.

(28) Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des ordonnances sur requête, Tome II « Des ordonnances sur requête », op. cit., p. 25.

(29) Jean-Pierre SEIGNOLLE, op. cit., Tome II, Juridiction contentieuse et définitive, p. 20 et Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des ordonnances sur requête, Tome II « Des

(34)

Insistons sur le fait qu’au contraire de l’ordonnance gracieuse, celle sur requête est d’une nature contentieuse. Toutefois, comme J. Seignolle le dit « le magistrat rendant une ordonnance sur requête ne tranche pas un litige, il intervient non pour résoudre une question de droit, mais pour exercer un contrôle dans l’intérêt du requérant et dans celui des tiers à qui l’acte peut faire grief » (30).

Ce que nous avons mentionné ci-dessus n’est pas une exposition complète de toutes les théories qui ont été élaborées en essayant de faire le point sur la question de la nature de l’ordonnance sur requête, mais nous n’avons vraiment présenté qu’un résumé des théories les plus importantes. La controverse théorique autour de cette question est toujours en cours, mais il nous semble qu’elle commence de plus en plus d’être en rupture avec la pratique judiciaire. En dépit de la divergence provoquée par cette question chez les théoriciens, nous observons qu’elle ne cause aucun conflit et qu’elle n’a pas d’importance sur le plan pratique. Cela nous amène à analyser cette question sous un angle législatif et jurisprudentiel en partant ainsi de l’abstrait théorique vers le concret pratique.

Le nouveau Code de procédure civile français de 1976 (31) distingue clairement la matière gracieuse (32) de celle des ordonnances sur requête (33). Le législateur consacre des chapitres particuliers dans ce Code pour normaliser la matière gracieuse et il en fait de même pour régir celle des ordonnances sur requête.

L’article 493 du C.p.c. français la définit expressément en disposant que « l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ». Selon les articles 851, 875, 897 et 958 du même Code, les juges compétents peuvent ordonner sur requête toutes

(30) Jean-Pierre SEIGNOLLE, Traité théorique et pratique des référés et des ordonnances sur requête, Tome II « Des ordonnances sur requête », op. cit., p. 28.

(31 ) Il y a une nouvelle version de ce Code qui vient d’entrer en vigueur le 17 octobre 2013.

(32) Concernant la matière gracieuse, l’article 25 du C.p.c. français nous présente sa signification juridique d’une manière indirecte. Cet article prévoit que « le juge statue en matière gracieuse lorsqu'en l'absence de litige il est saisi d'une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l'affaire ou de la qualité du requérant, qu'elle soit soumise à son contrôle ». Selon l’article 28 du même Code, les décisions peuvent être rendues en cette matière selon une procédure non contradictoire. Elles sont toujours susceptibles de voies de recours.

(33) Voir le livre Ier, Titre Ier, Chapitre II intitulé « Les règles propres à la matière gracieuse » et Titre XIV, Chapitre II, Section II, Sous-section III intitulée « Les ordonnances sur requête ».

(35)

mesures urgentes, dans les limites de leur compétence, lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement.

Dans le nouveau Code de procédure civile québécois (34), l’article 509 est consacré pour définir l’injonction qui peut être accordée, dans le cas d’urgence, à l’insu de l’autre partie. Cette article dispose que « l’injonction est une ordonnance de la Cour supérieure enjoignant à une personne ou, dans le cas d’une personne morale, d’une société ou d’une association ou d’un autre groupement sans personnalité juridique, à ses dirigeants ou représentants, de ne pas faire ou de cesser de faire quelque chose ou d’accomplir un acte déterminé ».

Sous un angle jurisprudentiel, la Cour de cassation égyptienne a, quant à elle, défini les ordonnances sur requête dans un bon nombre de ses arrêts. Elle confirme que :

L’ordonnance sur requête est une décision rendue par le juge des requêtes en se basant sur son pouvoir d’injonction pour répondre à une sollicitation présentée par le requérant. Dans les cas qui nécessitent une procédure rapide et soudaine, cette ordonnance est rendue en l’absence de la partie adverse sans motif en imposant une mesure conservatoire qui ne porte pas préjudice au fond. Or, l’ordonnance sur requête ne dessaisit pas le juge qui l’a rendue et n’a pas l'autorité de la chose jugée, ce qui donne au juge des ordonnances le pouvoir pour la rétracter ou la modifier par le moyen d’une nouvelle ordonnance motivée […] (35).

Selon nous, les ordonnances sur requête sont des décisions juridictionnelles ne dessaisissant pas le juge qui les a rendues et n’ayant pas la force de la chose jugée. Elles sont rendues par les juges des ordonnances dans des cas précis et selon des conditions spécifiques, et cela, en vertu de procédures extraordinaires, contraignantes, immédiates et simples qui sont strictement régies par la loi. Les juges des requêtes les rendent toujours en se basant sur leur pouvoir de contrainte ou mieux dit « imperium ». Ces ordonnances ne sont que des mesures conservatoires qui sont généralement rendues lors de cas d’urgence et en l’absence de la partie adverse. La non-contradiction, comme facteur caractéristique de ces mesures urgentes, s’avère l’effet-surprise qui garantit l’efficacité de cette procédure. Pour garder le juste équilibre entre l’intérêt du requérant et celui de la partie adverse, les ordonnances sur requêtes sont toujours susceptibles de voies de recours.

(34) Le nouveau Code de procédure civile québécois, C.p.c, a été présenté le 30 avril 2013, adopté le 20 février 2014, sanctionné le 21 février 2014 et entré en vigueur le 1er janvier 2016.

(35) Dans ce sens, voir Cass. civ., Le Caire, 18 décembre 1978, pourvoi No 450/48, Rev. B.T.C.C., sér. 29,

Vol. 1, p. 1943 et Cass. civ., Le Caire, 21 décembre 1987, pourvoi No 1605/53, Rev. B.T.C.C., sér. 38,

(36)

Sur le plan de l’arbitrage et puisque ces ordonnances sont souvent accordées par une procédure non contradictoire (à l’insu de la partie adverse), elles prennent doctrinalement et arbitralement l’expression mesures unilatérales (ex-part) et c'est le terme que nous adapterons ci-après. La loi type les appelle ordonnances préliminaires en les distinguant des mesures provisoires (bilatérales). Il est remarquable que le codificateur de cette loi consacre une section indépendante pour régir séparément chaque type de ces mesures.

En montrant leur nature juridique, leur objectif procédural et leur caractéristique unilatérale, l’article 17.B.1 de la loi type définit indirectement l’ordonnance préliminaire en disposant que : « sauf convention contraire des parties, une partie peut présenter, sans le notifier à aucune autre partie, une demande de mesure provisoire ainsi qu’une requête aux fins d’ordonnance préliminaire enjoignant à une partie de ne pas compromettre la mesure provisoire demandée ».

Et d’une manière plus détaillée, le législateur de la Nouvelle-Zélande définit les ordonnances préliminaires dans l’article 17.4 de la loi sur l’arbitrage en confirmant que :

Preliminary order means an order directing a party not to frustrate the purpose of an interim measure respondent means any of the following, as the case may be :

(a) a party against whom an interim measure is requested or directed, (b) a party against whom a preliminary order is applied for or directed,

(c) a party against whom recognition or enforcement of an interim measure is sought or has been obtained.

1.2. Émergence et évolution de l’arbitrage commercial international en matière de mesures provisoires et conservatoires : L'attention et la préoccupation juridiques de la

communauté internationale pour l'arbitrage commercial a commencé à croitre depuis l'aube du XXe siècle. Le Protocole de Genève de 1923 relatif aux clauses d’arbitrage (36) et la Convention de Genève de 1927 pour l'exécution des sentences arbitrales étrangères (37) ont été la pierre angulaire sur laquelle la juridiction arbitrale internationale a été constituée. Toutefois, ni ce Protocole, ni cette Convention n’ont réglé la question des mesures provisoires et conservatoires et par conséquent, ils n’ont pas régi la compétence arbitrale en

(36) Protocole de Genève relatif aux clauses d’arbitrage, Société des Nations, Genève, le 24 septembre 1923.

(37) Convention pour l'exécution des sentences arbitrales étrangères, Société des Nations, Genève, le 26 septembre 1927.

 Il est à noter que le Protocole de Genève de 1923 et la Convention de Genève de 1927 ont été annulés par l’article V-2 de la Convention de New York de 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères.

(37)

cette matière spécifique (38). Pourtant, c’était normal, car l’arbitrage à cette époque était encore un système juridictionnel alternatif naissant.

Au cours des dernières cinquante années, l’arbitrage commercial en matière de mesures provisoires et conservatoires a connu des grands développements législatifs et réglementaires sur le plan international, et cela, sur deux phases successives : celle portant sur la compétence de l’arbitre (1.2.1) et celle portant sur le régime procédural régissant cette matière (1.2.2).

1.2.1. Développement de la compétence de l’arbitre en matière de mesures provisoires et conservatoires : Nos études des instruments internationaux et des lois

étatiques récents portant sur l’arbitrage commercial indiquent que cette compétence et ce

pouvoir ont remarquablement évolué sur deux phases successives ; nous les montrerons ci-dessous.

1.2.1.1. La phase initiale d'évolution de la compétence de l’arbitre en matière de mesures provisoires et conservatoires : La Convention de Washington (Convention du

CIRDI) de 1965 pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États (39) et la Convention européenne sur l'arbitrage commercial international (Convention de Genève du 21 avril 1961) (40) ont parallèlement incarné le

(38) V. V. VEEDER, Mesures provisoires et conservatoires in L'exécution des sentences arbitrales en

vertu de la Convention de New York : Expérience et perspectives, Nations Unies, New York, 1999, p. 22, en ligne :

http://www.uncitral.org/pdf/french/texts/arbitration/NY-conv/Enforcing_Arbitration_Awards_F.pdf

consulté le 26 octobre 2013.

(39) Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) a été institué par la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États (Convention du CIRDI ou simplement la Convention). La Convention a été élaborée par les Administrateurs de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (la Banque mondiale). Le 18 mars 1965, les Administrateurs ont soumis la Convention, avec un rapport, à l’examen des gouvernements membres de la Banque mondiale en vue de sa signature et de sa ratification. La Convention est entrée en vigueur le 14 octobre 1966, suite à sa ratification par 20 pays. Au 15 décembre 2002, 136 pays avaient ratifié la Convention pour devenir des États contractants. Conformément aux dispositions de la Convention, le CIRDI fournit des services de conciliation et d’arbitrage des différends relatifs aux investissements entre des États contractants et des ressortissants d’autres États contractants. Voir l’introduction de la convention et les règlements du CIRDI, en ligne :

https://icsid.worldbank.org/ICSID/StaticFiles/basicdoc_fra-archive/ICSID_French.pdf consulté le 9 septembre 2013.

(40) Cette Convention est entrée en vigueur le 7 janvier 1964, conformément au paragraphe 8 de l'article X, à l'exception des paragraphes 3 à 7 de l'article IV qui sont entrés en vigueur le 18 octobre 1965 aux termes du paragraphe 4 de l'annexe à la Convention. Voir

(38)

premier développement conventionnel international réglant expressément la compétence arbitrale pour les mesures provisoires et conservatoires. À l'aune de ce qui est prévu par ces deux conventions et notamment celle du CIRDI, les instruments régissant l’arbitrage commercial international ont commencé de se préoccuper avec une célérité croissante de la question de la compétence en cette matière. La majorité de ces instruments qui ont postérieurement et successivement évolué au cours du dernier demi-siècle ont établi deux principes remarquables concernant cette compétence :

i. Principe de la compétence partagée de l’arbitre et du juge en matière de mesures provisoires et conservatoires (41) : L’article VI paragraphe 4 de la Convention de Genève (1961) confirme ce principe en disposant qu’ « une demande de mesures provisoires ou conservatoires adressée à une autorité judiciaire ne doit pas être considérée comme incompatible avec la convention d'arbitrage, ni comme une soumission de l'affaire quant au fond au tribunal judiciaire ».

D’une formulation presque similaire, nous lisons l’article 9 de la loi type disposant le même principe en confirmant que « la demande par une partie à un tribunal, avant ou pendant la procédure arbitrale, de mesures provisoires ou conservatoires et l'octroi de telles mesures par un tribunal ne sont pas incompatibles avec une convention d'arbitrage ».

Ces deux articles donnent expressément aux parties le choix d’introduire la requête des mesures provisoires soit devant le juge, soit devant l’arbitre. Il convient de souligner que ledit principe permet d'éviter la concurrence et le conflit de la compétence juridictionnelle en matière de mesures provisoires entre le juge et l’arbitre, et cela, soit avant ou après la constitution du tribunal arbitral. Par contre, la compétence de l’arbitre pour l’octroi des mesures provisoires et conservatoires n’est pas exclusive puisque la compétence du juge étatique subsiste (42). Autrement dit, il n’existe aucune supériorité ni de la juridiction étatique, ni de la juridiction en ce qui concerne la compétence en cette matière

en ligne : https://treaties.un.org/Pages/showDetails.aspx?objid=080000028003332f consulté le 9 septembre 2013.

(41) Mohammad-Ali BAHMAEI, L'intervention du juge étatique des mesures provisoires et conservatoires

en présence d'une convention d'arbitrage : droits français, anglais et suisse, Thèse de doctorat,

Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne), 2002, p. 35.

(42) Andreas REINER, « Les mesures provisoires et conservatoires et l'arbitrage international, notamment l'arbitrage CCI », (1998) 125-4 J.D.I. 853, 867.

(39)

puisque celle-ci dépend toujours du choix du demandeur. Par conséquent, en l’absence d’un accord express, il est impossible d’exclure ni la compétence du juge, ni la compétence de l’arbitre.

Sur le plan juridictionnel, nous soulignons que la Cour de cassation française a confirmé à plusieurs reprises que l’existence d’une convention d’arbitrage n’écarte pas la compétence du juge étatique des référés d'accorder des mesures provisoires et conservatoires si les parties les lui demandent même au cours du déroulement de l’instance arbitral (43).

À cet égard, il convient de souligner l’affaire Atlantic Triton (44). Le litige dans cette affaire a surgi en raison d’un contrat conclu en 1981 entre une société norvégienne (l’Atlantic Triton) et la République populaire révolutionnaire de Guinée. Le contrat portait sur la conversion de trois navires de pêche incluant leur équipement et leur exploitation. Ledit contrat stipulait une clause compromissoire conférant la compétence juridictionnelle au CIRDI. Pendant la durée du contrat, un différend a surgi entre les deux parties.

À la suite de ce différend et en raison de la présence des trois navires qui sont l’objet du litige dans le port de Concarneau (en France) où se faisait leur réparation, la société norvégienne a immédiatement introduit une requête au Président du Tribunal de Commerce de Quimper en France. La requête avait pour but d’obtenir une mesure conservatoire permettant la saisie provisoire sur ces trois navires. Le 12 octobre 1983, le juge français a ordonné la saisie conservatoire sur les navires jusqu'à ce que le fond du litige soit tranché.

En 1984 et après que cette mesure eut été prononcée et en se basant sur la clause compromissoire, la société norvégienne a déposé une demande d’arbitrage contre le gouvernement de Guinée devant le CIRDI.

(43) Voir par exemple : cass. civ. 9 juillet 1979, Rev. arb., 1980, p. 79 ; cass. civ. 29 novembre 1989, Rev. arb., 1990, p. 633 ; cass. civ. 1er février 1989, Rev. arb., 1989, p. 494 ; cass. civ. 20 mars 1989, Rev.

arb., 1989, p. 653 et cass. civ. 6 mars 1990, Rev. arb., 1990, p. 633.

(44) Affaire du CIRDI No ARB/ 84/1, société de l’Atlantic Triton et la République populaire révolutionnaire de Guinée, 21 avril 1986, citée par Mohammad-Ali BAHMAEI, op. cit., pp. 185 : 187.

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