DES PRATIQUES SOCIALES DE PRÉVENTION DES RISQUES
PROFESSIONNELS DANS LES MÉTIERS DU GÉNIE
CLIMATIQUE AUX SAVOIRS DE RÉFÉRENCE
Hélène CHENEVAL ARMAND sous la direction de Jacques GINESTIE.
Équipe Gestepro, UMR ADEF, IUFM Aix-Marseille, Université de Provence, Unimeca
MOTS-CLÉS : SAVOIRS DE RÉFÉRENCE – PRATIQUES PROFESSIONNELLES
RÉSUMÉ : Ce travail s’intéresse à l’introduction de l’enseignement à la santé et à la sécurité du travail (ES&ST) dans les formations initiales des baccalauréats professionnels. Cet article analyse les savoirs sous jacents aux pratiques de prévention des professionnels. Les premiers résultats permettent de qualifier les écarts entre les savoirs sous jacents aux « pratiques prescrites » dans le monde scolaire et les savoirs sous jacents aux « pratiques effectives » des professionnels.
ABSTRACT : This work concerns the introduction of the teaching devoted to prevention of professional risks, in the technical baccalaureates initial training. This article analyses the underlying knowledge to the practices of professionals. The first results make it possible to qualify the differences between the underlying knowledge implied in the practices prescribed in the school world and the underlying knowledge implied in the real practices of professionals.
1. INTODUCTION
Ce travail s’intéresse à l’introduction de l’enseignement à la santé et à la sécurité du travail (ES&ST) dans les formations professionnelles initiales et plus particulièrement celle des baccalauréats professionnels. Cet enseignement s’inscrit dans une politique de santé et de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Une étude de 1992 du Ministère du Travail révèle que les jeunes professionnels (moins de cinq ans) totalisent vingt-cinq pourcent des accidents du travail alors qu’ils ne représentent que douze pourcent des effectifs des salariés. Le rapport Ceccaldi (1990) qui note des insuffisances et des inadéquations de la formation à la prévention des risques dans l’enseignement technique. Face à ce double constat un accord-cadre (1993, 1997) est passé entre l’Éducation Nationale et la Caisse Nationale d’Assurance Maladie. Cet accord prévoit le transfert officiel de l’enseignement de la prévention vers l’institution d’enseignement. Or, l’introduction de l’ES&ST dans les curricula des formations professionnelles initiales pose la question de l’origine des savoirs de référence en jeu car comme le soulignent Johsua et Dupin (1989) : « Le savoir présenté en classe entretient des liens culturels et sociaux avec l’extérieur de la classe. Il a (…) une histoire particulière, qui conditionne à la fois le contenu à enseigner, sa place dans un cursus, la forme de sa présentation ». De ce fait, la présence en classe d’un objet à enseigner étant la conséquence d’une histoire particulière, le résultat d’un traitement didactique, nous pouvons considérer que l’introduction de l’ES&ST dans les référentiels n’échappe pas à cette règle. Si l’on suit la voie ouverte par des chercheurs comme Amigues, Ginestié, Gonet 1991, Ginestié 1997, Ginestié, Andréucci, 1997, Joshua, 1997 et que comme eux nous pensons que « la pratique est la source immanente des savoirs de référence sur lesquels le processus de transposition didactique va porter ». Alors, qu’est ce que les pratiques traduisent comme types de savoirs ?
2. CADRE THÉORIQUE
Pour analyser les savoirs sous jacents aux pratiques des professionnels, nous avons construit un modèle de transposition didactique et d’élaboration des savoirs spécifique à l’enseignement de la
3. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
3.1. Le choix du champ d’investigation : le génie climatique
Le choix du génie climatique comme champ d’investigation est motivé par un ensemble de considérations. Depuis quelques années, les entreprises d’installation et de maintenance des équipements thermiques et frigorifiques connaissent un fort développement économique et constituent donc un secteur porteur d’emploi pour les jeunes diplômés du baccalauréat professionnel de cette spécialité. Ce secteur est particulièrement exposé aux risques professionnels, car, d’une part, les professionnels sont confrontés à une diversité de risques du fait d’un champ professionnel d’intervention très large. D’autre part, l’emploi des futurs diplômés se situe essentiellement dans les très petites, petites et moyennes entreprises puisqu’elles représentent quatre-vingt-dix pourcent des entreprises du secteur. Or ces entreprises ne possèdent pas l’expertise en interne pour gérer les problèmes de santé et de sécurité au travail (pas de Comité Hygiène Sécurité et Conditions de Travail).
3.2. Le choix des tâches professionnelles objet de l’analyse
Dans le domaine du génie climatique, il existe deux secteurs professionnels correspondant chacun à un baccalauréat professionnel spécifique : le premier s’intéresse à la formation de technicien en installation des systèmes énergétiques et climatiques, le deuxième à celle de technicien en maintenance des systèmes énergétiques et climatiques. Le choix des tâches professionnelles renvoie donc à deux secteurs professionnels : la maintenance et l’installation.
3.3. Le recueil des données
Nous avons procédé à l’enregistrement audiovisuel de la journée de travail de deux équipes de techniciens : l’un en maintenance, l’autre en installation. Les données ont fait l’objet d’une retranscription sous la forme d’un corpus écrit. L’analyse des corpus écrits et des enregistrements audiovisuels nous permet de dégager deux types de données. Les verbalisations, qui peuvent être spontanées ou provoquées (pourquoi ? quels sont les risques…), immédiates (pendant la réalisation de l’activité) ou différées (après la réalisation de l’activité) et les comportements non verbaux qui peuvent être révélateurs du caractère conscient de la prise de risque par le technicien.
4. LES RÉSULTATS 4.1. Les références savantes
Les extraits montrent que les techniciens font appel à des savoirs savants pour évaluer la dangerosité des situations de travail.
4.2. Les références expertes
En ce qui concerne les conduites individuelles. Les extraits montrent que les techniciens mettent en œuvre des conduites individuelles en fonction de leur évaluation personnelle de la dangerosité de la situation. Ces conduites individuelles peuvent compléter les blancs laissés par la réglementation lorsque la situation est considérée comme dangereuse par le technicien ou bien se substituer à la norme ou au règlement lorsque, par exemple, l’installation étant équipée d’un disjoncteur différentiel le technicien décide d’intervenir sous tension car il considère qu’il est protégé en cas de contact accidentel.
En ce qui concerne les normes locales. Les extraits montrent que les techniciens mettent en œuvre des normes locales qui sont des adaptations des prescriptions réglementaires dans le but de concilier sécurité et production.
En ce qui concerne les règlements, normes et outils d’analyse. Les extraits montrent l’absence de référence à des savoirs méthodologiques (outils d’analyse).
5. CONCLUSION
Ces premiers résultats permettent d’élaborer des savoirs de référence pour définir ce que les élèves doivent réussir à faire à la fin de leur formation et donc ce qu’il faudrait leur enseigner. Or, une première approche des instructions officielles de l’ES&ST montre qu’il existe un écart entre les savoirs impliqués dans les pratiques « prescrites » et les savoirs impliqués dans les pratiques « effectives ou réelles » des professionnels. Ainsi, l’existence d’un écart ouvre des perspectives de recherche dans le domaine de la didactique et plus particulièrement celui des conceptions susceptibles de constituer des obstacles à l’apprentissage.
BIBLIOGRAPHIE
AMIGUES, R., & GINESTIÉ, J., & GONET, A. (1991). Learning and teaching of Technology at
the middle school level : “the place of industry”. Technology education and Industry, Report
of the 5th PATT Conference, Eindhoven, Mottier, Raat and De Vries editions.
CHENEVAL-ARMAND, H. (2005). Approche didactique de l’enseignement de la prévention des
risques professionnels en baccalauréat professionnel énergétique, Mémoire Master 2,
Université de Provence Aix- Marseille 1, Département des sciences de l’Éducation.
GINESTIÉ, J. (1997). Technology Education in France, in Theuerkauf, Blandow, Strategien und Paradigmenwechsel zur technischen Bildung, Hildesheim, Diverlag, Franzbecker Ed. (pp. 75-85).
GINESTIÉ, J., & ANDREUCCI, C. (1997). Approach of assessment and teaching meaningful in Technology education in France : tries and mistakes, 8th PATT conference, 10-14 avril, Breukelen, PATT Foundation.
JOHSUA, S. (1997). Le concept de transposition didactique au-delà de la didactique des sciences
et des mathématiques. Marseille : IUFM d’Aix Marseille. Skolê, 6, 15-23.
JOHSUA, S., & DUPIN, J.J. (1989). Introduction à la didactique des sciences et des
