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La transition professionnelle d'infirmières immigrantes de la région de Québec

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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© Catherine Tremblay, 2018

La transition professionnelle d’infirmières immigrantes

de la région de Québec

Mémoire

Catherine Tremblay

Maîtrise en sciences infirmières - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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La transition professionnelle d’infirmières immigrantes

de la région de Québec

Mémoire

Catherine Tremblay

Sous la direction de :

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iii

Résumé

Au Québec, le taux de rétention après cinq ans des infirmières immigrantes est inférieur de 25% à celui des diplômées locales (OIIQ, 2017a). Or, leur intégration dans le réseau de la santé vient combler un besoin de main-d’œuvre tout en permettant l’amélioration de l’accessibilité des services pour les personnes de différents groupes ethniques et culturels (Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). En s’appuyant sur la théorie de la transition de Meleis (2010), une étude qualitative descriptive a été entreprise afin de mieux comprendre la transition professionnelle des infirmières immigrantes de la région de Québec. Les données, issues d’entrevues semi-structurées effectuées auprès de six participantes, ont fait l’objet d’une analyse thématique (Pierre Paillé & Mucchielli, 2012). Cette étude amène une meilleure compréhension de la nature des transitions des infirmières immigrantes. L’expérience de celles-ci s’articule autour de trois thèmes principaux : vivre simultanément différentes transitions, expérimenter une pratique différente et être confrontée au contraste entre ses attentes et la réalité. De plus, trois conditions qui influencent la transition professionnelle ont émergé : faire appel à ses ressources intérieures pour s’adapter, évoluer dans un environnement de travail influençant la transition et être différente des autres. Finalement, deux derniers thèmes sont ressortis de l’analyse en lien avec le bilan que font les infirmières immigrantes de leur expérience, soit évaluer son intégration au travail et vivre un sentiment d’accomplissement de soi. Ainsi, des mesures favorisant l’intégration et la rétention du personnel infirmier diplômé hors du Québec sont proposées à la lumière des résultats de recherche et des écrits.

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iv

Abstract

In Quebec, the retention rate 5 years after entering practice is 25% lower for foreign trained nurses than it is for nurses that completed their studies locally (OIIQ, 2017a). The integration of foreign trained nurses into the health system helps to maintain a sufficient workforce and facilitate accessibility to health care for people of different ethnic and cultural backgrounds (Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). Based on the Transition Theory of Meleis (2010), our qualitative study inspired by a phenomenology approach aimed at understanding the experience of professional transition as lived by foreign trained nurses in Quebec City. The data, collected for 6 participants was via semi-structured interview, has been analysed with theme identification (Pierre Paillé & Mucchielli, 2012). Three major themes around the experience of internationally educated nurses were found: living different transitions at the same time, experimenting a different practice and realising the contrast between one’s expectations and the reality. Then, conditions influencing transition emerged from the data: using inner resources and strengths to adapt, the influence of the work environment and being different. Finally, two last themes emerged for the analysis concerning the evaluation of the integration made by the nurse herself and an feeling of accomplishment. In accordance with our results and the literature, we conclude this study suggesting different

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v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... viii

Liste des figures ... ix

Liste des abréviations ... x

Remerciements ... xii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique ... 3

1.1. Augmentation de la proportion d’infirmières diplômées hors Québec au sein de l’effectif infirmier québécois ... 3

1.2. Définition de l’intégration professionnelle ... 4

1.3. Défis et enjeux reliés à l’intégration et à la rétention de ces professionnelles ... 5

1.4. Contexte sociopolitique appuyant l’intégration des infirmières diplômées hors Québec ... 7

1.5. Pertinence de l’étude pour la discipline infirmière ... 9

Chapitre 2 : Recension des écrits ... 10

2.1. Processus d’immigration ... 10

2.1.1. Facteurs motivant la migration des infirmières ... 11

2.1.2. Attentes en lien avec l’immigration ... 13

2.2. Processus de reconnaissance professionnelle ... 15

2.3. Défis reliés au processus d’intégration professionnelle ... 16

2.3.1. Communication ... 17

2.3.2. Ajustement culturel ... 21

2.3.3. Adaptation à une pratique différente ... 23

2.3.4. Marginalisation et racisme... 27

2.3.5. Contexte familial ... 28

2.4. Éléments facilitant le processus d’intégration professionnelle ... 30

2.5. Limites de la littérature ... 32

Chapitre 3 : Cadre théorique ... 33

3.1. Théorie de la transition ... 33

3.1.1. Nature des transitions ... 34

3.1.2. Conditions facilitant et entravant les transitions ... 36

3.1.3. Modèles de réponses ... 37

3.1.4. Interventions infirmières ... 38

3.2. But de l’étude... 39

3.3. Questions de recherche ... 39

Chapitre 4 : Méthode ... 40

4.1. Approche utilisée et justification ... 40

4.2. Collecte de données ... 40

4.2.1. Milieu de recrutement ... 41

4.2.2. Sélection des participants ... 41

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vi

4.3.1. Entrevue ... 42

4.3.2. Fiche de données démographiques ... 43

4.3.3. Journal de bord ... 43

4.3.4. Journal réflexif ... 43

4.4. Analyse des données ... 43

4.4.1. Critères de scientificité ... 44

4.5. Considérations éthiques ... 45

Chapitre 5 : Résultats ... 47

Profil des participantes ... 47

Axe 1 : Nature de l’expérience de transition professionnelle vécue par des infirmières immigrantes de la région de Québec... 48

Thème 1 : Vivre simultanément différentes transitions ... 48

Sous-thème 1.1 : Parcours migratoire ... 49

Sous-thème 1.2 : Renouvellement du réseau social ... 56

Sous-thème 1.3 : Modification des structures et des rôles familiaux ... 57

Sous-thème 1.4 : Problèmes de santé ... 59

Thème 2 : Expérimenter une pratique infirmière différente ... 60

Sous-thème 2.1 : Différences soulevées... 61

Sous-thème 2.2 : Paradoxe entre le plaisir de découvrir des pratiques différentes et les malaises ressentis face à ces pratiques ... 64

Sous-thème 2.3 : Adaptation graduelle à la différence (de l’inconfort à la routine, au confort) ... 66

Thème 3 : Réaliser le contraste entre ses attentes professionnelles et la réalité ... 67

Sous-thème 3.1 : Diminution de la qualité de vie au travail... 68

Sous-thème 3.2 : Sentiment d’être peu reconnue ... 73

Axe 2 : Éléments facilitant et entravant la transition professionnelle d’infirmières immigrantes de la région de Québec... 80

Thème 4 : Puiser dans ses ressources intérieures pour s’adapter et favoriser son pouvoir d’agir professionnel. (Conditions personnelles) ... 80

Thème 5 : Évoluer dans un environnement influençant la transition professionnelle. (Conditions communautaires) ... 82

Sous-thème 5.1 : Équipe de travail ... 82

Sous-thème 5.2 : Soutien organisationnel ... 84

Thème 6 : Être différente des autres. (Conditions sociétales) ... 88

Axe 3 : Le bilan que font les infirmières immigrantes de leur expérience ... 91

Thème 7 : Évaluer son intégration au travail ... 91

Thème 8 : Vivre un sentiment d’accomplissement de soi ... 93

Chapitre 6 : Discussion ... 97

6.1. Retour sur le cadre théorique et les écrits scientifiques ... 97

6.1.1. Nature des transitions ... 97

6.1.2. Conditions de transitions ... 102

6.1.3. Modèles de réponse ... 108

6.2. Recommandations ... 109

6.3. Limites de l’étude ... 111

(7)

vii

Liste de références ... 114

Annexes ... 121

Annexe 1 : Lettre type pour le recrutement ... 121

Annexe 2 : Formulaire de consentement ... 122

Annexe 3 : Fiche de données sociodémographiques ... 126

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viii

Liste des tableaux

Tableau 1. Caractéristiques des différents parcours menant à l'obtention d'un permis de pratique pour les

infirmières formées à l'étranger... 6

Tableau 2. Critères de sélection des participants à l’étude ... 42

Tableau 3. Profil des participantes à l’étude (données sociodémographiques) ... 48

Tableau 4. Thème 1 et sous-thèmes ... 49

Tableau 5. Thème 2 et sous-thèmes ... 61

Tableau 6. Thème 3 et sous-thèmes ... 68

Tableau 7. Nature de l’expérience de transition professionnelle des infirmières immigrantes de la région de Québec ... 79

Tableau 8. Caractéristiques facilitantes et entravantes des équipes de travail ... 84

Tableau 9. Synthèse des trois axes ... 95

(9)

ix

Liste des figures

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x

Liste des abréviations

 OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques  OIIQ : Ordre des infirmières et infirmiers du Québec

 ARM : Arrangement de reconnaissance mutuelle  OMS : Organisation mondiale de la santé  CII : Conseil international des infirmières

 SIDIIEF : Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l’espace francophone  AIIC : Association des infirmières et infirmiers du Canada

 AIIAO : Association des infirmières et infirmiers autorisés de l'Ontario  CEPI : Candidat(e) à l'exercice de la profession infirmière

 CIQ : Conseil interprofessionnel du Québec  PTI : Plan thérapeutique infirmier

 FADM : Feuille d’administration des médicaments

 SOIT : Service d’Orientation et d’Intégration des Immigrants au Travail  PAE : Programme d’aide aux employés

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xi

Pour mes trois petits amours, sachez que tout est possible avec beaucoup de détermination et de patience.

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xii

Remerciements

Alors que je débutais mes études de deuxième cycle, jamais il ne m’est venu à l’esprit que 8 ans plus tard j’y serais encore. Tellement de choses sont arrivées et tellement de gens m’ont offert leur soutien depuis. Je prends donc ces quelques lignes pour vous remercier.

Mes premières pensées vont à mes amours Stébane, Béatrice, Jacob et Charlotte. Mes petits amours, grâce à vous, j’ai appris à lâcher prise et à être plus indulgente envers moi-même. Vous m’avez donné une raison de continuer malgré les nombreuses embûches qui se sont posées sur mon chemin. Merci d’être dans ma vie, de faire de moi une meilleure personne. J’espère que vous serez fiers de votre maman et que je pourrai être un exemple de détermination pour vous un jour. Stébane, merci pour ton soutien quotidien. Merci d’être un papa et conjoint impliqué et si compréhensif. Sans tes encouragements et ton amour constant, je n’y serais certainement pas arrivée.

Durant mon cheminement à la maîtrise, j’ai eu la chance d’être accompagnée par deux directrices de recherche exceptionnelles. D’abord, je tiens à remercier Mme Ginette Lazure pour votre si grande écoute, vos conseils toujours pertinents et les réflexions que vous avez suscitées chez moi. Merci aussi à Judith Lapierre qui m’a prise comme étudiante alors que mon cheminement était bien entamé. Ta patience et tes encouragements ont été déterminants dans la poursuite de mes études, malgré les nombreux arrêts et reprises des dernières années. Merci également pour tes commentaires qui ont fait évoluer mon travail et mes réflexions.

Je veux aussi remercier ma famille et mes amis pour leur soutien et leurs encouragements. Merci aussi à mon amie Pascale. Notre cheminement en parallèle a donné lieu à une amitié précieuse et qui se poursuivra, j’espère, de longues années. Tu es un exemple pour moi à bien des égards, autant comme infirmière que comme maman.

D’autres personnes ont croisé mon parcours et m’ont, peut-être sans le savoir, donné les outils et l’espoir nécessaire pour terminer mes études : Chantale Jobin, Véronique Vachon, Marie-Josée Poulin et Anne-Isabelle Gingras. Merci de votre écoute alors que je vivais des moments difficiles.

De plus, j’aimerais remercier les nombreux organismes qui m’ont offert du soutien financier : le Centre de formation et d’expertise en recherche en administration des services infirmiers; le Ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport ; l’Ordre régional des infirmières et infirmiers et la Fondation Francis et Geneviève Melançon. Finalement, merci à l’établissement où le recrutement a eu lieu d’avoir facilité mes démarches et à toutes les infirmières qui ont pris du temps pour me rencontrer et me raconter leur histoire. Vous m’avez fait grandir en me livrant vos parcours si extraordinaires.

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1

Introduction

Une pénurie d’infirmières sans précédent existe un peu partout dans le monde (OMS, 2016; Oulton, 2006). Au Canada, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) (2011b) estime qu’il manquera environ 60 000 infirmières d’ici 2022 et selon Jean (2005) il est prévu également que cette pénurie sera importante au Québec. Dans ce contexte, l’embauche d’infirmières ayant fait leurs études à l’étranger, devient une solution utilisée mondialement afin de combler les besoins créés par une pénurie globale d’infirmières (Kawi & Xu, 2009; L. Lin, 2009; Takeno, 2010; Zhou, Windsor, Coyer, & Theobald, 2010). Au Canada, le système de pointage, lors l’évaluation d’une demande d’immigration, avantage les infirmières. Le Québec s’inscrit aussi dans cette tendance en facilitant la mobilité ces professionnelles par la mise en place d’accords de reconnaissances des acquis professionnels avec la France. Conséquemment, l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) reçoit un nombre croissant de demandes d’équivalence de diplômes ou de permis de la part d’infirmières ayant fait leurs études à l’extérieur du Québec (OIIQ, 2017a). En conséquence, de plus en plus d’infirmières immigrantes sont embauchées dans des milieux de pratique de la région de Québec. L’intégration au travail ainsi que la rétention de ces infirmières deviennent donc une préoccupation importante en regard à la planification et au développement de la main-d’œuvre infirmière pour les gestionnaires de ces établissements. D’une part, des moyens permettant de favoriser l’ajustement culturel et l’acquisition des compétences cliniques nécessaires à la pratique québécoise par les infirmières immigrantes sont recherchés par les gestionnaires de soins infirmiers puisque ces deux éléments sont nécessaires à la qualité des soins infirmiers et la sécurité des patients (Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). D’autre part, le taux de rétention après cinq ans des infirmières immigrantes est nettement inférieur (25%) à celui des diplômées du Québec (OIIQ, 2017a), ce qui indique que l’intégration dans les milieux de travail de ces professionnelles de la santé est problématique (Blythe, Baumann, Rhéaume, & McIntosh, 2009; Kawi & Xu, 2008).

Dans les dernières années, plusieurs études ont permis de mieux comprendre le vécu des infirmières pratiquant dans un pays autre que celui où elles ont été formées (Beaton & Walsh, 2010; Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; Jose, 2011; Tregunno, Peters, Campbell, & Gordon, 2009; Xu, 2008). Xu (2010b) et Zizzo et Xu (2009) ont identifié quatre grandes catégories de difficultés reliées à cette expérience soit, la communication, la différence entre les pratiques infirmières par exemple celles concernant le rôle infirmier, l’ajustement culturel et finalement, la marginalisation, le racisme et la discrimination. McGuire et Murphy (2005) ajoutent une autre dimension à cette problématique, soit le manque de soutien social et les difficultés financières qui peuvent être associés à l’expérience de migration. Bien que l’expérience d’intégration des infirmières1

immigrantes ait déjà été documentée, la transférabilité des résultats de ces études réalisées en contexte

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2

saxon au contexte québécois peut être mise en doute. En effet, il existe des différences majeures entre le Québec et ces autres pays, tant au niveau des milieux de pratique que de la langue ou de la provenance des infirmières. Dans le cadre de cette présente étude, l’intégration des infirmières immigrantes sera envisagée sous l’angle de la transition. En effet, la théorie de Meleis (A. I. Meleis, 2010a) permet principalement d’identifier la nature de la transition vécue par une personne de même que les conditions qui l’influence. Afin de mieux comprendre l’expérience des infirmières immigrantes de la région de Québec, nous avons effectué une étude qui s’est articulée autour de trois questions de recherche.

1) Quelle est l’expérience de transition professionnelle d’infirmières immigrantes de la région de Québec? 2) Quelles sont les conditions qui influencent la transition professionnelle d’infirmières immigrantes? 3) Quels sont les modèles de réponses des infirmières immigrantes en transition professionnelle?

Le premier chapitre de ce mémoire vise à décrire la problématique et à présenter les différents éléments justifiant la pertinence de cette étude. Le deuxième chapitre présente une recension des écrits sur le vécu des infirmières immigrantes, permet de mettre à l’avant les lacunes dans les écrits et de préciser comment cette étude pourra contribuer à l’amélioration des connaissances à ce sujet. Par la suite, le cadre théorique de la transition de Meleis, qui a guidé cette étude, est présenté. Le quatrième chapitre permet de justifier les choix méthodologiques qui ont été faits dans le cadre de cette étude qualitative descriptive. Les résultats sont présentés au chapitre 5. Finalement, une discussion de ces derniers de même que des recommandations se retrouvent au chapitre 6 qui est suivi d’une brève conclusion.

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3

Chapitre 1 : Problématique

La proportion d’infirmières diplômées hors Québec faisant partie de la relève infirmière est de plus en plus grande, occasionnant des défis spécifiques à l’intégration et à la rétention de ces infirmières. Ce chapitre présentera dans un premier temps cette problématique. Par la suite, les différentes voies d’accès à l’exercice de la profession au Québec pour les infirmières immigrantes seront présentées de même qu’une définition de l’intégration professionnelle. Puis le contexte social et législatif venant appuyer l’intégration de professionnels d’origine multiculturelle sera présenté. Finalement le but de cette étude sera présenté.

1.1.

Augmentation de la proportion d’infirmières diplômées hors Québec

au sein de l’effectif infirmier québécois

Une pénurie sans précédent de professionnels de soins, dont des infirmières, existe un peu partout dans le monde (OMS, 2016). Dans ce contexte, au Canada comme ailleurs, l’embauched’infirmières ayant fait leurs études à l’étranger devient une solution afin de combler les besoins (Kawi & Xu, 2009; L. Lin, 2009; Neiterman & Bourgeault, 2015; Primeau, Champagne, & Lavoie-Tremblay, 2014; Takeno, 2010; Zhou et al., 2010). Au Canada, des initiatives provinciales telles que l’organisme Recrutement Santé Québec aident annuellement des établissements à recruter des infirmières immigrantes.

Par ailleurs, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (2010a) affirme que l’immigration d’infirmières formées à l’étranger est en hausse dans la plupart des pays à haut revenu. Cette tendance se présente également au Canada. En effet, le nombre d’infirmières ayant fait leurs études à l’étranger atteindrait 7 à 8 % du nombre total d’infirmières ayant un droit de pratique au Canada (Baumann, Blythe, & Ross, 2010; Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; Kolawole, 2009; McGuire & Murphy, 2005; Neiterman & Bourgeault, 2015). Au Québec, la proportion d’infirmières formées à l’étranger a atteint 5,8 % de l’effectif infirmier total et 11% des infirmières de la relève en 2016-2017 (OIIQ, 2017a, 2017b). D’ailleurs, le nombre de permis de pratique délivré à des infirmières ayant fait leurs études à l’extérieur du Québec a été en augmentation constante depuis dix ans, à l’exception des trois dernières années ou une baisse a été enregistrée (OIIQ, 2017a). Depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles avec la France (ARM), le nombre d’infirmières françaises au Québec a plus ou moins triplé et représente environ la moitié de la relève infirmière formée hors Québec (OIIQ, 2016). Cependant, le nombre de demandes d’infirmières diplômées en France est en diminution depuis quelques années (OIIQ, 2017a), alors que le Rapport statistique sur l’effectif infirmier 2016-2017 met en lumière une augmentation du nombre d’infirmières provenant de la francophonie et plus particulièrement des pays suivants : Haïti, Liban, Algérie, Maroc et Côte d’Ivoire (OIIQ,

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2017b). Avant de poursuivre, une définition du concept d’intégration professionnelle s’impose. Dans la section suivante, quatre définitions permettant de comprendre l’intégration professionnelle seront présentées.

1.2. Définition de l’intégration professionnelle

Avant de poursuivre, une définition du concept d’intégration professionnelle s’impose. Dans cette section, quatre définitions permettant de comprendre l’intégration professionnelle seront présentées.

D’abord, selon Paillé (1991a), l'intégration professionnelle réfère à plusieurs éléments ( faits, actions, comportements, interprétations ou décisions) qui interviennent quand un individu est confronté à une nouvelle réalité professionnelle. Il existe une distinction entre intégration professionnelle et intégration dans l’organisation. En effet, l’auteur affirme que la réalité professionnelle est parfois faussement assimilée à la réalité organisationnelle. Alors que cette dernière ne renvoie qu’aux situations professionnelles à l’intérieur d’une organisation (P. Paillé, 1991a), la réalité professionnelle prend un sens plus large. Sans exclure la notion d’intégration organisationnelle, le concept d’intégration professionnelle correspond mieux à la situation des infirmières immigrantes, en ce sens qu’il permet également de comprendre leur intégration à la profession infirmière québécoise.

Aussi, l’Office de la langue française (1990) mentionne qu’à l’intérieur d’un groupe, qui pourrait être un établissement de santé, « l'intégration est l'ensemble des phénomènes d'interaction qui provoquent une accommodation et un ajustement réciproques et qui amènent ainsi chaque membre à une conscience de son identification avec ce groupe » (Office de la langue française, 1990). De ce fait, l’intégration concerne autant l’infirmière immigrante que l’organisation dans laquelle elle travaille. En effet, certaines politiques aidantes doivent être mises en place par le milieu qui accueille l’immigrante, et cette dernière doit s’investir afin de réaliser son intégration (Gouvernement du Québec, 1991; Haut Conseil à l'Intégration, 2007; Khellil, 2005).

D’un autre côté, Berset, Weygold, Crevoisier et Hainard (1999) apportent une piste de compréhension de l’intégration des immigrants en définissant le processus de l’adaptation occupationnelle comme étant la capacité du migrant à transférer ses compétences professionnelles à la société d’accueil, et à la reconnaissance de ces dernières par le milieu de travail. Cependant, l’intégration professionnelle ne peut être limitée à un processus d’adaptation ou de développement de compétences. En effet, Primeau (2015) explique que le processus d’intégration des infirmières immigrantes englobe deux éléments. D’abord, l’intégration à la profession infirmière qui est associée aux étapes qui visent à l’obtention du permis de pratique. Par la suite, l’intégration en emploi qui « englobe la recherche d'emploi, le processus d'embauche, l'entrée à l'emploi et

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ultimement la réussite de la période de probation » (Primeau, 2015, p. 64). Cette auteure ajoute également la notion de rétention :

Si la transition de pratique est mesurée par la réussite de l'examen d'entrée à la profession et par la réussite de la période de probation (qui implicitement atteste que les compétences et attitudes de l'infirmière correspondent aux attentes de l'employeur), la rétention représente quant à elle la capacité de l'employeur de conserver celle-ci à son emploi. Primeau, 2015, p.64)

Dans le cadre de cette étude, il sera question de la transition professionnelle des infirmières immigrantes, incluant les processus d’intégration et de rétention définis par Primeau (2015). Dans la section suivante, les différentes voies d’accès à la profession et les défis et enjeux aux niveaux de l’intégration et de la rétention des infirmières immigrantes au Québec seront présentés.

1.3. Défis et enjeux reliés à l’intégration et à la rétention de ces

professionnelles

Des mesures ont été prises par différentes instances gouvernementales et professionnelles afin de faciliter l’intégration des infirmières immigrantes. En effet, au Canada, les professionnels de la santé sont avantagés lors de leur demande d’immigration en raison du système de pointage présentement utilisé pour évaluer les demandes, ce dernier favorisant les personnes ayant un haut niveau d’éducation (Suto, 2009). Cependant, la législation concernant l’accès à la profession pour les personnes formées hors du pays relève des ordres professionnels provinciaux (AIIC, 2011a). Au Québec, il existe deux parcours menant à l’obtention d’un permis de pratique pour les infirmières immigrantes. En général, les infirmières doivent faire une demande de reconnaissance d’équivalence auprès de l’OIIQ, mais les infirmières françaises bénéficient de mesures accélérées puisque l’OIIQ a conclu un accord de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles avec la France (ARM). Ainsi, depuis le 7 juillet 2011, les infirmières françaises inscrites au Tableau de l'Ordre national des infirmiers de France peuvent faire une demande d’équivalence de permis d’exercice sans avoir à passer l’examen professionnel du Québec (OIIQ, 2011). Le Tableau 1.1 présente les caractéristiques propres à chaque parcours.

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6

Tableau 1. Caractéristiques des différents parcours menant à l'obtention d'un permis de pratique pour les

infirmières formées à l'étranger

De plus, l’OIIQ a mis en place un « Programme d’intégration professionnelle » obligatoire pour toutes les infirmières immigrantes. Ce programme vise principalement à permettre l’acquisition de nouvelles compétences propres au rôle infirmier au Québec, et à l’actualisation des compétences déjà acquises en fonction du contexte québécois (OIIQ, 2007). Il peut se dérouler en centres hospitaliers ou dans un établissement de formation collégiale, en fonction de l’évaluation du dossier de l’infirmière immigrante par l’OIIQ (OIIQ, 2007). Conséquemment, les établissements de santé sont souvent les uniques structures d’accueil des infirmières immigrantes et deviennent, par le fait même, responsables de leur intégration professionnelle.

Ainsi, l’intégration professionnelle ainsi que la rétention des infirmières diplômées hors Québec est une préoccupation importante en regard à la planification et au développement de la main-d’œuvre infirmière. D’une part, des moyens permettant de favoriser l’ajustement culturel et l’acquisition des compétences cliniques nécessaires à la pratique québécoise par les infirmières immigrantes sont recherchés (Afaf I. Meleis & Glickman, 2012; Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). Ces deux éléments sont en effet nécessaires à la qualité des soins infirmiers et à la sécurité des patients (Afaf I. Meleis & Glickman, 2012; Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). D’autre part, les taux d’intégration et de rétention chez les infirmières formées hors Québec sont nettement plus bas que ceux de celles ayant diplômé ici, ce qui laisse entrevoir des problèmes aux niveaux de l’intégration et de la rétention des professionnelles immigrantes.

D’abord, le taux d’intégration de la relève infirmière sur le marché de l’emploi (toutes formations initiales confondues) est de 82,7% alors que pour les infirmières formées à l’étranger il est de 67,4%. Bien que le taux d’intégration ait diminué pour l’ensemble des infirmières de la relève, celui des infirmières formées à l’étranger a diminué de 20% dans les deux dernières années alors qu’avant il était presque équivalent à celui des diplômés du Québec. De plus, le taux d’infirmières encore inscrites au Tableau de l’OIIQ, cinq ans après l’obtention du

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permis de pratique est inférieur chez les infirmières formées à l’extérieur du Québec : 65% comparativement à 90% pour les infirmières formées au Québec (OIIQ, 2017a). Les infirmières immigrantes françaises sont plus nombreuses à quitter la pratique infirmière québécoise (taux de rétention : 55 à 65%) que celles provenant d’autres pays (90%), ce qui pourrait expliquer le bas taux de rétention (OIIQ, 2017a). En effet, les diplômés de France représentaient la plus importante proportion des infirmières immigrantes ayant obtenu leur permis de pratique en 2011-2012 (OIIQ, 2017a).

En conséquence, il devient particulièrement important de comprendre l’expérience d’intégration des infirmières immigrantes afin de mieux cerner les facteurs favorisant leur intégration et leur rétention. De même, cette expérience s’inscrit également dans un contexte social et politique plus large qu’il importe de connaître.

1.4. Contexte sociopolitique appuyant l’intégration des infirmières diplômées

hors Québec

Dans plusieurs pays, dont le Canada, l’immigration est devenue un agent indispensable au développement économique et au maintien de la croissance démographique (OCDE, 2010b). D’ailleurs, le Canada aurait, à l’échelle mondiale, la plus forte proportion d’immigrants dans sa population, mis à part l’Australie (Statistiques Canada, 2014). Dans un rapport de Statistiques Canada (2014) sur l’enquête nationale auprès des ménages effectuée en 2011, 20,6 % de la population totale du pays est née à l’étranger. Le Québec a également atteint le plus haut taux de personnes immigrantes de son histoire, soit 12,6 % de la population (Statistiques Canada, 2013). Par ailleurs, le Québec est la deuxième province canadienne à avoir accueilli le plus grand nombre d’immigrants entre 2006 et 2011, après l’Ontario (Statistiques Canada, 2014). En effet, le Québec a accueilli 19,2 % de tous les nouveaux arrivants au Canada, soit 223 400 personnes. Cette transformation progressive de la population impose au système de santé, une adaptation des services dans le but d’offrir des soins qui répondent aux besoins de ces personnes.

En effet, en réponse à cette diversité culturelle grandissante, le Parlement canadien a adopté, en 1988, la Loi sur le multiculturalisme. Cette loi vient affirmer que le respect du multiculturalisme — c'est-à-dire le respect et la valorisation de la «diversité culturelle et raciale de la société canadienne» (Ministère de la Justice du Canada, 2014, 1er avril) — comme une caractéristique fondamentale de la société canadienne et influence directement certaines politiques associées au système de santé. En effet, différentes lois canadiennes et québécoises viennent appuyer la nécessité d’adapter les services aux personnes de différentes origines ethniques et culturelles en affirmant les principes d’accessibilité et d’équité.

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Tout d’abord, l’accessibilité aux soins de santé, un des principes fondateurs du système de santé canadien en vertu de la Loi canadienne sur la Santé (Ministère de la Justice du Canada, 1985), a d’abord été définie en terme économique. Cependant, un rapport de Santé Canada (2001) concernant l’équité et la sensibilisation du système de soins de santé quant aux besoins des populations minoritaires et marginalisées vient enrichir la loi en élargissant ce concept. En effet, il est affirmé que les établissements de santé doivent être compétents en matière de reconnaissance des différences culturelles puisque cela est essentiel à l’accès à des soins optimaux. Au Québec, la Loi sur les services de santé et les services sociaux est explicite (Éditeur officiel du Québec, 2018). Elle établit un mode d’organisation des ressources humaines, matérielles et financières qui doit tenir compte des particularités géographiques, linguistiques, socioculturelles, ethnoculturelles et socio-économiques des régions et favoriser, compte tenu des ressources, l’accessibilité à des services de santé et des services sociaux, dans leur langue, pour les personnes des différentes communautés culturelles du Québec.

De ce fait, le développement de la compétence culturelle organisationnelle préoccupe les gestionnaires des établissements de santé. Cette dernière se caractérise par un ensemble de comportements congruents, de pratiques de gestion et de politiques institutionnelles entraînant un environnement organisationnel inclusif et respectueux de la diversité culturelle (Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). Différentes stratégies afin de soutenir la compétence culturelle peuvent être employées dans le but de faciliter l’accès aux services et d’augmenter la capacité de l’organisation à servir une population plus diversifiée (Srivastava, 2007). L’une d’entre elles, soit la mise en place de politiques de recrutement, de rétention et de valorisation de la main-d’œuvre d’origine culturelle diversifiée, intéresse particulièrement cette présente étude.

En effet, il a été démontré qu’une meilleure intégration des professionnels de différentes origines culturelles dans les établissements de santé permet l’amélioration de l’accessibilité des services pour les personnes et familles de différents groupes ethniques et culturels et facilite leur compréhension du système tout en créant un environnement de soins favorable à l’expression de leurs besoins spécifiques (Pearson et al., 2007; RNAO, 2007). Récemment, une étude phénoménologique descriptive réalisée en Ontario auprès de 11 infirmières immigrantes de diverses origines met en lumière la perception que ces infirmières ont de leur contribution à l’expérience de soins des patients et à la promotion de soins infirmiers culturellement compétents (Njie-Mokonya, 2016). D’abord, leur présence facilite la compréhension par les autres infirmières des pratiques culturelles différentes et contribue à améliorer les relations entre les professionnels et les patients issus de communautés culturelles diverses. Aussi, lorsque l’infirmière immigrante partage le même bagage culturel ou parle la même langue que les patients, d’autres bénéfices ont été identifiés, soit une meilleure compréhension du plan de traitement par le patient, puisqu’expliqué dans sa langue maternelle, et une diminution de son anxiété en lien avec le séjour à l’hôpital (Njie-Mokonya, 2016).

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À l’inverse, lorsqu’elles rencontrent des difficultés reliées à leur intégration, les infirmières formées à l’étranger peuvent être moins aptes à offrir des soins de qualité. Par exemple, une étude ontarienne réalisée auprès de 39 infirmières formées hors du Canada démontre que lorsqu’elles rencontrent des difficultés de communication, les infirmières sont moins capable de protéger les intérêts du patient et de faire preuve d’advocacy. Ainsi, compte tenu de l’apport positif à la qualité des soins d’une infirmière bien intégrée et de l’apport négatif lorsque des défis d’intégration sont présent, il est d’autant plus important de s’intéresser à l’intégration des infirmières d’origines culturelles et ethniques différentes au sein des établissements de santé.

1.5. Pertinence de l’étude pour la discipline infirmière

Dans les dernières années, un nombre croissant d’infirmières formées à l’étranger entre dans la pratique infirmière québécoise. Il est nécessaire de mieux comprendre leur processus de transition professionnelle puisque de cette dernière découlent la qualité des soins offerts et à la sécurité des patients. D’autre part, les taux d’intégration et de rétention de ces infirmières sont inférieurs à ceux des infirmières formées au Québec. Finalement, tel que mentionné précédemment, les infirmières d’origines culturelles et ethniques différentes contribuent à la qualité des soins et la compétence culturelle organisationnelle dans un contexte de population de plus en plus diversifié.

En conséquence, il devient particulièrement important de comprendre l’expérience de transition des infirmières immigrantes afin de mieux cerner les facteurs favorisant leur intégration et leur rétention. À cet effet, Raghuram (2007) suggère de s’intéresser à leur expérience dans sa globalité, c’est-à-dire au sein du milieu de travail et de façon plus large dans la société. Cependant, la majeure partie des études réalisées à ce jour se concentrent sur les barrières à l’intégration des infirmières immigrantes (communication, différence de pratique, utilisation de la technologie, discrimination, etc.) (Kawi & Xu, 2009; Moyce, Lash, & de Leon Siantz, 2016; Primeau, 2015). D’autres explorent les facteurs d’attraction et de rétention des infirmières immigrantes, mais peu ont exploré ce phénomène sous l’angle de la transition. Ainsi, cette étude s’inspirera du modèle de la transition de Meleis (2010b) et visera à mieux comprendre l’expérience de transition professionnelle d’infirmières immigrantes de la région de Québec.

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Chapitre 2 : Recension des écrits

Dans le cadre de ce chapitre, une recension des écrits concernant l’expérience d’intégration professionnelle d’infirmières immigrantes a été effectuée. Dans le but de cerner et de définir les concepts inhérents à la problématique, les bases de données Cochrane, Cinahl et Medline ont été explorées, entre 2005 et 2018, à l’aide des mots-clés suivants : Foreign nurse, immigrant nurse, internationally educated nurse, international nurse, overseas nurse, foreign professional personnel, foreign professional, transition, adaptation, integration, carrer mobility, acculturation. De plus, les sites internet des principales associations internationales et canadiennes ayant possiblement un intérêt envers la migration des infirmières ont été consultés, soit l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Conseil international des infirmières (CII), le Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l'espace francophone (SIDIIEF), l’International Center for Nurse Migration, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC), l’Association des infirmiers et infirmières autorisés de l’Ontario (AIIAO) et l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ).

Les études qui ressortent de la recension des écrits sont principalement de nature qualitative. Quelques récits d’infirmières ayant vécu l’immigration et l’intégration professionnelle dans un contexte culturellement différent ont également été recensés, mais ils n’ont pas été utilisés en raison de leur faible caractère scientifique. Toutefois, les articles théoriques et ceux présentant l’opinion d’un expert ont été retenus, car ils apportent une compréhension différente du phénomène de l’intégration professionnelle des infirmières immigrantes.

La recension des écrits est présentée sous trois thèmes. Tout d’abord, le processus d’immigration est abordé, suivi par les défis reliés à la reconnaissance professionnelle et ceux reliés à l’intégration professionnelle. Pour terminer ce chapitre, les limites des écrits existants seront présentées.

2.1. Processus d’immigration

Le premier thème qui sera abordé est le processus d’immigration. Bien que n’étant pas directement en lien avec l’intégration professionnelle des infirmières immigrantes, toutes les démarches et les réflexions entourant le processus d’immigration teintent leurs parcours, une fois celles-ci arrivées dans le pays d’accueil. Les écrits portant sur l’immigration des infirmières font principalement état des facteurs motivant la migration des infirmières ainsi que des attentes de celles-ci relativement à l’immigration. Mais avant tout, la définition de l’immigration s’impose.

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La littérature offre différentes définitions du phénomène de l’immigration. Tout d’abord, l’Office québécois de la langue française (1978) définit ce concept comme le fait ou l’action de s’établir temporairement ou définitivement dans un pays autre que son pays d’origine. De plus, selon Suto (2009), le processus migratoire se termine à l’arrivée dans le nouveau pays et à l’obtention du statut de résident permanent. Finalement, Noiriel (2010) affirme également que l’immigration est un processus par lequel l’individu se déplace dans l’espace. Cependant, il ajoute une autre dimension à l’immigration, celle du déplacement transfrontalier. En effet, il affirme que le phénomène migratoire a été profondément transformé par l’émergence de l’État-nation. Le terme immigration, forgé par la bureaucratie et les politiques, implique nécessairement de se placer du point de vue du pays d’accueil (Noiriel, 2010).

Au Canada, trois catégories d’immigration sont reconnues : l’immigration économique, le regroupement familial et l’immigration humanitaire. La première catégorie s’adresse aux travailleurs qualifiés et aux gens d’affaires, et représente le plus grand nombre d’immigrants au Québec : 59,5 % des arrivants en 2016 faisaient partie de cette catégorie. Les personnes qui viennent rejoindre leur famille représentaient 21 % des immigrants en 2016. Finalement, l’immigration humanitaire, composée principalement des réfugiés et des demandeurs d’asile, représentait 17,5% des nouveaux arrivants en 2016 (Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, 2011). Des politiques et règles d’immigration propres à chacune des catégories d’immigrant sont mises en place par les gouvernements québécois et canadien.

Les écrits concernant l’expérience d’intégration des infirmières immigrantes présentent deux facettes du processus d’immigration. En effet, la littérature aborde les facteurs qui motivent la migration de même que les attentes qu’ont les infirmières face à celle-ci.

2.1.1. Facteurs motivant la migration des infirmières

Dans la section qui suit, deux catégories de facteurs influençant la migration des infirmières seront abordées : les facteurs d’incitation et les facteurs d’attraction.

Dans un premier temps, Woodbridge et Bland (2010), dans le cadre d’une revue systématique de la littérature ayant pour but d’identifier les facteurs significatifs qui influencent le développement des compétences et de la confiance d’infirmières immigrantes en Nouvelle-Zélande, soulignent que deux types de facteurs influencent la migration des infirmières : les facteurs d’incitation et les facteurs d’attraction. D’une part, les facteurs d’incitation représentent ce qui encourage la professionnelle à quitter son pays d’origine, par exemple de mauvaises conditions et un environnement de travail défavorable (Woodbridge & Bland, 2010). À cet effet, une étude qualitative ayant pour but de comprendre la transition de rôle des infirmières philippines aux

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Unis mentionne que des infirmières désirent quitter leur pays en raison de mauvaises conditions de travail (Lin, 2014) . D’autre part, une rémunération plus élevée, des conditions de travail plus intéressantes de même qu’un plus grand accès à l’éducation et à la formation continue seraient des facteurs attirant les infirmières vers le pays hôte (Woodbridge & Bland, 2010). Dans le cadre d’une recherche-action participative portant sur l’expérience d’infirmières indiennes ayant complété un programme universitaire néo-zélandais antérieurement à leur immigration en Nouvelle-Zélande (n=10), Bland et Woolbridge (2011) ont mis en lumière la possibilité de donner des soins à la fine pointe de la technologie comme étant un facteur d’attraction à la migration des infirmières. Cela se retrouve également dans une étude ethnographique examinant les motifs d’immigration d’infirmières népalaises au Royaume-Uni, qui identifie également la possibilité d’avancement de carrière comme facteur motivant la migration (Adhikari & Melia, 2015).

Une autre revue de littérature portant sur la migration et le processus de reconnaissance professionnelle d’infirmières immigrantes aux États-Unis a aussi identifié ces facteurs en y ajoutant la possibilité d’avancement professionnel (Bieski, 2007). Une consultante au Conseil international des infirmières (CII), Kingma (2008) soutient également que la recherche de meilleurs salaires et conditions de travail, la possibilité de développement professionnel, l’amélioration de la qualité de vie et de la sécurité sont des facteurs qui motivent la migration des infirmières. Cette auteure ajoute que l’aventure et l’attrait de la nouveauté sont également des facteurs pouvant influencer les infirmières dans leur décision d’immigrer. Dans le même ordre d’idées, l’étude des récits de vie effectuée par Beaton et Walsh (2010) auprès d’un groupe d’infirmières britanniques ayant immigré à Terre-Neuve entre 1950 et 1990 démontre que l’opportunité de voyager, le remboursement des frais de transport aller-retour et les salaires plus élevés représentent également des incitatifs à l’immigration des infirmières. Plus récemment, une étude ethnographique visant à comprendre l’expérience de transition d’infirmières immigrantes au Canada et à dégager des recommandations favorisant leur intégration et leur rétention a mis en lumière des motivations similaires : vivre une aventure et une expérience de travail dans un contexte culturellement différent, la possibilité d’apprendre et d’entreprendre des études supérieures ainsi que la découverte du Canada et le désir de s’éloigner du pays d’origine (Higginbottom, 2011).

Une revue de littérature portant sur la transition et l’immigration d’infirmières formées à l’international souligne également que les infirmières immigrent parfois en raison d’un mariage à l’étranger ou lorsque le travail du conjoint le requiert (Newton, Pillay, & Higginbottom, 2012). Une autre revue de la littérature portant sur l’expérience d’immigration d’infirmières diplômées à l’étranger reprend ses motifs d’immigration et met en lumière d’autres éléments, soit l’épuisement en raison du travail dans le pays d’origine, l’instabilité politique, la fuite d’un mariage arrangé et une culture d’immigration (p. ex. Philippines) (Moyce et al., 2016). Dans le cadre d’une étude explorant la transition d’infirmières philippines ayant immigré au Canada, Ronquillo (2012) souligne

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que les relations familiales sont une importante raison d’immigrer au Canada. Finalement, pour des infirmières originaires de l’Inde, du Nigéria et de Philippines ayant participé à une étude d’inspiration phénoménologique effectuée dans une région urbaine des États-Unis, le rêve d’avoir une vie meilleure a été un facteur décisif dans la décision d’immigrer (Jose, 2011).

En somme, les facteurs qui motivent la migration des infirmières sont fortement en lien avec le milieu et les conditions de travail. Cependant, elles ne le sont pas exclusivement. La possibilité de poursuivre des activités de formation et les opportunités d’avancement professionnel sont également d’importance. De plus, au niveau personnel, les possibilités d’améliorer leurs conditions de vie, de vivre dans un environnement plus sécuritaire et de voyager font partie des incitatifs à vouloir entamer un processus migratoire.

2.1.2. Attentes en lien avec l’immigration

Plusieurs études démontrent que les infirmières immigrantes ont de hautes attentes en regard à la vie et au travail dans le pays d’accueil (Blythe, Baumann, Rheaume, & McIntosh, 2009; Bosworth et al., 2006; Higginbottom, 2011; Zhou et al., 2010). Lorsqu’elles arrivent à destination, elles sont souvent confrontées à une réalité bien différente de ce qu’elles s’imaginaient : système de soins moins avancé que ce qu’elle croyait, différences au niveau de la pratique infirmière ou au contrat de travail non respecté (Higginbottom, 2011). L’information reçue avant le départ contribue grandement à la création de ces attentes parfois irréalistes. Les écrits font état de deux sources d’informations principalement utilisées par les infirmières immigrantes : les sources formelles, par exemple les agences gouvernementales, et les sources informelles comme les pairs et les médias (Blythe, Baumann, Rheaume, et al., 2009; Higginbottom, 2011; Jose, 2011; L.-C. Lin, 2014).

À la suite d’une étude de nature qualitative menée auprès de 35 infirmières ayant immigré au Canada, Blythe, Baumann, Rhéaume et McIntosh (2009) soutiennent que plusieurs d’entre elles manquaient d’informations sur les possibilités d’emploi. Les infirmières participant à l’étude ont dit vivre de la confusion en raison des procédures d’immigration du Canada qui ne reflètent pas nécessairement la réalité du marché du travail. En effet, le Canada utilisant un système de pointage qui favorise la migration des professionnels de la santé, les infirmières ont tendance à croire qu’elles pourront facilement se trouver un emploi. Or, elles ne réalisent pas toujours les investissements qui sont nécessaires afin de réintégrer la profession (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009) . Dans le même sens, les infirmières recrutées par une agence de placement infirmier internationale sont souvent mal informées sur le travail et les tâches qu’elles accompliront une fois arrivées au Canada. De plus, les auteurs soulignent que dans l’espoir de reprendre leur pratique, certaines infirmières, mal conseillées ou mal informées, arriveraient au Canada comme aides à domicile, une catégorie

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d’immigration à part. Cela implique qu’elles doivent terminer leur contrat d’aide à domicile et obtenir le statut de résidentes permanentes avant de pouvoir faire une demande d’équivalence de permis de pratique, ce qui peut prendre plusieurs années. Par conséquent, une longue absence de la pratique infirmière occasionne très souvent l’abandon de la profession et complique l’obtention d’un permis. Au Québec, entre 2010 et 2014, l’OIIQ a vu le nombre de demandes de reconnaissance d’équivalence augmenter de 200% ce qui a occasionné des délais d’attente supplémentaires dans le traitement des demandes et une augmentation du délai pour compléter le programme d’intégration professionnelle. Ainsi, le taux d’intégration des infirmières diplômées hors Québec (à l’exception des infirmières françaises) a chuté drastiquement de 95% en 2011-2012 à 65% en 2015-2016 (OIIQ, 2017a). En somme, lorsque les informations reçues avant l’immigration sont erronées ou incomplètes, les infirmières immigrantes ne peuvent pas se préparer et planifier des stratégies leur permettant de réintégrer leur profession une fois arrivée au Canada.

À l’instar de Blythe et al (2009), Zhou, Windsor, Coyer et Theobald (2010) soutiennent que l’information reçue avant le départ est responsable d’attentes parfois irréalistes engendrant des déceptions à l’arrivée dans le pays d’accueil. En effet, cette étude de théorisation ancrée, réalisée auprès de 28 participantes, démontre l’ambivalence vécue par des infirmières chinoises ayant immigré en Australie en mettant en lumière différentes sources d’informations ou de désinformations. Selon Lin (2014), la vie aux États-Unis est idéalisée par les agences de placement, ce qui contribue à créer des attentes chez les infirmières immigrantes qui ne correspondent pas à la réalité. En plus de sources formelles d’informations telles que les agences gouvernementales d’immigration mentionnées par Blythe et al. (2009) ainsi que Lin (2014), des sources informelles sont aussi utilisées par les professionnelles qui envisagent l’immigration. Le contact avec des infirmières ayant déjà immigré contribuerait à la création d’une vision idéalisée du pays d’accueil, puisqu’il est possible que ces dernières ne mentionnent pas les parties moins attirantes de la vie à l’étranger. Dans le même sens, José (2011) affirme que la perception de la vie dans le pays hôte est influencée par les médias. Par exemple, cet auteur affirme que les États-Unis sont souvent perçus comme un endroit où il est facile d’être heureux sans difficulté.

En résumé, les attentes reliées à la migration influencent l’expérience migratoire. En effet, la désinformation engendrée par les agences gouvernementales, les agences de placement, le contact avec les pairs ayant déjà immigré et l’information véhiculée dans les médias sont souvent sources d’attentes irréalistes qui peuvent entraîner de la déception et de la frustration à l’arrivée dans le pays hôte (L.-C. Lin, 2014). De plus, pour les infirmières mal conseillées qui immigrent au Canada sous la catégorie d’aide familiale, la désinformation a pour conséquence de ralentir le processus de reconnaissance professionnelle.

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2.2. Processus de reconnaissance professionnelle

L’obtention du permis de pratique est un enjeu central de l’intégration des infirmières immigrantes puisqu’il est obligatoire, à plus ou moins long terme, pour exercer la profession. En effet, au Québec, lorsqu’elle répond aux exigences de l’OIIQ en matière de formation complémentaire et du programme d’intégration, l’infirmière immigrante obtient le statut de Candidate à l’exercice de la profession (CEPI) ce qui lui permet de pratiquer en attendant la réussite de l’examen professionnel. Elle dispose alors, tout comme les candidates québécoises, de trois essais et de deux ans pour réussir l’examen, faute de quoi un permis de pratique leur sera refusé. Les écrits se sont intéressés à l’expérience d’infirmières immigrantes en processus de reconnaissance professionnelle de même qu’aux difficultés qu’elles rencontrent.

L’étude de Sochan et Singh (2007) offre une compréhension approfondie de l’expérience d’infirmières immigrantes en cours de démarches pour obtenir leur droit de pratique en Ontario. Cette étude qualitative narrative réalisée auprès de 12 participantes décrit l’expérience du processus de reconnaissance professionnelle en trois étapes : l’espoir, le désillusionnement et le réajustement. Au départ, la préparation des infirmières immigrantes est teintée d’espoir concernant leur arrivée au Canada. En effet, ces dernières croient que leurs qualifications professionnelles leur permettront d’apporter une contribution significative à la population canadienne, de surcroit dans un contexte de pénurie infirmière. Vient ensuite le désillusionnement, c’est-à-dire la découverte que leurs qualifications professionnelles ne répondent pas aux exigences d’obtention d’un permis de pratique. L’ajustement consiste finalement à redéfinir leur rêve d’être infirmières. Cela se concrétise souvent par le retour à l’école afin de se conformer aux exigences d’obtention du permis de pratique. Dans le même sens, Newton, Pillay et Higginbottom (2012) soulignent qu’une fois arrivées dans le pays d’accueil, les infirmières immigrantes sont souvent forcées d’accepter un emploi en dessous de leurs qualifications en raison des délais rencontrés pour l’évaluation de leurs qualifications professionnelles par les ordres professionnels et pour la mise à jour de leurs compétences. Ce phénomène, de même que le fait que les infirmières immigrantes se voient souvent confier des rôles et des responsabilités qui ne sont pas représentatives de leur expérience, peut entraîner une perte de compétences identifiée dans la littérature comme le «deskilling» tel que le fait ressortir une revue systématique de la littérature portant sur les facteurs influençant l’intégration des infirmières immigrante effectuée par Primeau, Champagne et Lavoie-Tremblay (2014).

Les infirmières immigrantes qui tentent d’obtenir une reconnaissance de leurs qualifications professionnelles font face à différentes embûches. D’une part, elles éprouvent des difficultés à obtenir une copie des diplômes et les références nécessaires pour étayer la preuve de leurs qualifications et de leurs expériences professionnelles (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; Moyce et al., 2016; Newton et al., 2012). Cela est particulièrement vrai pour les réfugiés en raison du contexte social et politique de leur pays d’origine (Winkelmann-Gleed & Seeley, 2005). D’autre part, la nécessité de passer un test de compétence linguistique

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de même que les différences terminologiques et les modes d’évaluation représentent des obstacles supplémentaires à la réussite de l’examen professionnel, et par conséquent, à l’obtention du permis de pratique (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; Moyce et al., 2016; Newton et al., 2012). De plus, les infirmières immigrantes ont parfois de la difficulté à comprendre les procédures et règlementations entourant la demande de reconnaissance professionnelle et l’obtention du permis de pratique (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; Sochan & Singh, 2007). Dans le cadre d’une étude qualitative de type théorisation ancrée explorant l’intégration du point de vue d’infirmières immigrantes (N=5), mais aussi de personnes responsables de leur formation (N=4) et de gestionnaires d’établissement de santé (N=4), les infirmières percevaient la reconnaissance professionnelle comme étant une expérience très difficile, le processus étant compliqué et dispendieux (Wolcott, Llamado, & Mace, 2013). Bien que cette étude s’appuie sur un cadre théorique en sciences infirmières (Modèle d’adaptation de Roy) et que la méthode utilisée est bien explicitée, certains éléments permettant de limiter la portée de l’étude sont présents. En effet, les auteurs ne mentionnent pas s’ils ont atteint la saturation théorque. De plus, l’étude a été réalisé aux États-Unis et la transférabilité des résultats au contexte Québécois est potentiellement limitée en raison de différences culturelles entre ces deux milieux de pratique.

En somme, les infirmières formées à l’étranger vivent plusieurs difficultés en lien avec l’obtention du permis de pratique professionnelle. Tout au long de leurs démarches, elles oscillent entre l’espoir et les déceptions. Comme il a été mentionné précédemment, toutes les infirmières qui immigrent au Québec et qui font une demande d’équivalence de permis de pratique sont dans l’obligation de réussir au minimum un stage d’intégration professionnelle qui a lieu dans les établissements de santé. Ainsi, lorsqu’elles arrivent en milieux de travail, elles sont bien souvent en processus de reconnaissance professionnelle.

2.3. Défis reliés au processus d’intégration professionnelle

Les différents écrits apportent une compréhension de l’intégration professionnelle, principalement en soulignant les défis auxquels sont confrontées les infirmières immigrantes. En effet, elles sont confrontées à des différences au niveau de la communication et doivent s’ajuster à une culture différente. De plus, elles rencontrent des différences importantes au niveau de la pratique infirmière et peuvent vivre de la marginalisation et du racisme dans leur milieu de travail. Finalement, le contexte familial peut représenter lui aussi un défi pour ces infirmières qui tentent de s’intégrer à la profession.

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2.3.1. Communication

Au Canada, 22 % des immigrants ont de la difficulté à se trouver un emploi en raison des barrières reliées à la communication (Van Ngo & Este, 2006). Dans le cadre d’une étude explorant l’expérience d’infirmières immigrantes, de personnes responsables de leur formation et de gestionnaires, la communication est ressortie comme une priorité pour tous les participants. Aussi, les difficultés reliées à la communication ont été identifiées comme étant la principale barrière à l’intégration professionnelle (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009; L. Lin, 2009; Newton et al., 2012). Elles contribueraient également ou pourraient même être responsables d’autres difficultés vécues par l’infirmière immigrante tant dans son travail que dans sa vie professionnelle (Xu, 2010b).

De ce fait, surmonter les éléments qui entravent la communication devient un défi d’une grande importance pour les infirmières immigrantes. Les écrits permettent d’ailleurs d’identifier les principaux obstacles qui y sont reliés : les différents accents, la prononciation, l’usage d’un dialecte ou d’expressions familières et finalement, la terminologie utilisée dans le milieu de travail (Beaton & Walsh, 2010; Cummins, 2009; L.-C. Lin, 2014; Woodbridge & Bland, 2010). Dans cette section, l’influence des problèmes de communication sur la possibilité pour l’infirmière immigrante d’assumer son rôle et ses responsabilités professionnelles sera présentée, de même que l’impact que peuvent avoir les difficultés de communication sur celle-ci.

Conséquences des barrières à la communication sur le rôle et les responsabilités professionnelles assumées par l’infirmière immigrante.

Les différents écrits permettent en effet d’identifier que les difficultés reliées à la communication peuvent empêcher l’infirmière immigrante d’assumer ses responsabilités professionnelles, dans des domaines aussi divers que la gestion, l’utilisation du téléphone ainsi que l’établissement d’une relation thérapeutique avec le patient et l’advocacy.

Dans le cadre d’une revue de littérature portant sur les défis cliniques rencontrés par des infirmières immigrantes d’origine asiatique, Xu (2005) affirme que les difficultés de communication les empêchent d’assumer correctement leurs fonctions de gestion et de supervision. Par exemple, ces infirmières auraient moins tendance à déléguer certaines tâches. En effet, puisqu’elles douteraient de leur capacité à se faire comprendre, les infirmières immigrantes s’exprimeraient avec moins d’assurance et limiteraient leurs interactions avec leurs collègues de travail. Cela limiterait également leur capacité à exercer leur leadership, une compétence attendue chez les infirmières dans un contexte de pratique occidental. Dans le même sens, une étude de cas simple portant sur l’expérience d’une infirmière taiwanaise travaillant dans un hôpital américain

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a mis en lumière la difficulté pour la participante d’endosser des responsabilités de gestion et d’administration en raison de ses difficultés avec la communication (Liou & Cheng, 2011). Tel que mentionné par Liou et Cheng (2011) la généralisation des données issus de cette étude est limitée en raison du contexte très spécifique inhérent au devis de recherche utilisé.

D’un autre côté, les difficultés de communication ont également des répercussions sur l’utilisation du téléphone par les infirmières (Liou & Cheng, 2011). À cet effet, Yi et Jezewski (2000) affirment que l’utilisation de la communication non verbale facilite la compréhension du discours. Or, lorsqu’elles ont à utiliser le téléphone, les infirmières immigrantes perdent leurs repères visuels et ont ainsi plus de difficulté à comprendre leur interlocuteur (Yi & Jezewski, 2000). Également, Xu (2005) mentionne que la prise d’ordonnances téléphoniques serait la principale difficulté reliée à la communication rencontrée par les infirmières immigrantes. L’utilisation par le médecin d’une terminologie à laquelle elle n’est pas habituée, plus particulièrement en ce qui concerne la pharmacothérapie, rendrait difficile pour l’infirmière la compréhension d’une ordonnance téléphonique (Xu, 2005). Finalement, le défi serait encore plus grand lorsque l’infirmière doit contacter un médecin de garde pendant la nuit afin de lui faire part d’un changement dans la condition du patient; le stress d’avoir à réveiller un médecin s’ajoutant à celui de la situation (Xu, 2005). Cela étant dit, les études citées précédemment ont été réalisées auprès d’infirmières allophones, ce qui peut avoir eu une influence sur l’importance accordée aux difficultés de communication dans les écrits.

Dans une revue de la littérature sur les défis cliniques rencontrés par des infirmières asiatiques exerçant dans un contexte de soins étranger, Xu (2005) a soulevé que les difficultés de communication peuvent affecter les soins offerts aux patients puisque ces infirmières trouvaient particulièrement difficile de communiquer avec ces derniers et la famille. De plus, la revue de la littérature réalisée par Kawi et Xu (2009), de même qu’une étude qualitative effectuée en Ontario auprès de 39 infirmières formées hors Canada (Blythe, Baumann, Rhéaume, et al., 2009) permettent d’identifier que les infirmières immigrantes ont de la difficulté à comprendre les aspects socioculturels de la communication tels que l’humour, le sarcasme et les euphémismes. Ces difficultés de communication les empêchent, d’une part, de protéger les intérêts du patient et de faire preuve d’advocacy, d’autant plus que les infirmières immigrantes présentent également des difficultés à communiquer avec leurs collègues de travail (Liou & Cheng, 2011; Xu, 2010b). D’autre part, ces difficultés peuvent compliquer l’établissement d’une relation thérapeutique avec le patient. D’ailleurs, dans les écrits, plusieurs cas où des patients refusaient de se faire soigner par une infirmière immigrante en raison de difficultés de communication ont été recensés (Liou & Cheng, 2011; Xu, 2010b).

Grandement influencées par les normes culturelles, certaines formes de communication non verbale comme le toucher, le sourire et le regard peuvent également être problématiques pour les infirmières qui ne

Figure

Figure 1. Théorie de la transition de Meleis et autres (2000) traduit et cité dans Aubin et  Dallaire (2008)
Tableau 3. Profil des participantes à l’étude (données sociodémographiques)
Tableau 7. Nature de l’expérience de transition professionnelle des infirmières immigrantes de la région de  Québec

Références

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