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Étude sur l'anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer : traduction et adaptation transculturelle d'un outil en français du Québec et exploration des interventions d'accompagnement des infirmières en oncologie

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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© Malek Amiri, 2019

Étude sur l’anxiété de la mort chez les patients atteints

de cancer : traduction et adaptation transculturelle d'un

outil en français du Québec et exploration des

interventions d'accompagnement des infirmières en

oncologie

Mémoire

Malek Amiri

Maîtrise en sciences infirmières - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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Étude sur l’anxiété de la mort chez les patients

atteints de cancer : traduction et adaptation

transculturelle d'un outil en français du Québec et

exploration des interventions d’accompagnement des

infirmières en oncologie

Mémoire

Malek Amiri

Sous la direction de :

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iii

Résumé

L'annonce du diagnostic de cancer peut amener la personne qui en est atteinte à éprouver l’anxiété de la mort à la pensée que son existence puisse être menacée. Les infirmières en oncologie détiennent une position clé pour accompagner les patients atteints de cancer qui éprouvent cette émotion difficile. Cependant, les interventions infirmières visant à soulager l’anxiété de la mort sont peu connues. De plus, aucun instrument de mesure n'est actuellement disponible en français pour évaluer cette émotion douloureuse. Cette recherche descriptive corrélationnelle vise à explorer les liens qui existent entre les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie et l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. Une phase préliminaire est ajoutée, afin de procéder à la traduction et à l’adaptation transculturelle du Death and Dying Distress Scale (DADDS). Au total, trois traducteurs et cinq experts ont été impliqués dans le processus de traduction et d’adaptation transculturelle pour produire l’Échelle de Détresse liée à la Mort (EDM), qui a été pré-testée auprès de cinq patients atteints de cancer du poumon. En ce qui concerne la phase principale de l’étude, 28 patients atteints de cancer du poumon ont été recrutés dans une clinique ambulatoire d’un centre hospitalier de la région de Québec. Les interventions d’accompagnement des infirmières ont été mesurées par l’Échelle d’Interactions Infirmière-Patient – version 70 énoncés – Patient (EIIP-70P). Des analyses de corrélation et de régression polynomiale ont été effectuées. L’EDM présente une bonne consistance interne (α = .86). La relation d’aide et de confiance constitue le seul prédicteur de l’anxiété de la mort (F (2, 23) = 5,31; p = .01). Un modèle polynomial de degré 2 montre que le lien entre ces deux variables prend une forme de parabole convexe : les interventions de relation d’aide entraînent une diminution de l’anxiété de la mort, mais au-delà d’une certaine fréquence elles produisent l’effet inverse.

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iv

Abstract

When the doctors announce the diagnosis of cancer to a person suffering from the disease, this disturbing event leads to experience a series of thoughts concerning one’s existence, something that leads to death anxiety. Here where it comes the role of oncology nurses, who are in a key position to help reduce this difficult emotion. However, little is known about support interventions in nursing care for patients suffering from death anxiety. Moreover, there is, currently, no single instrument available in French to assess this painful emotion. Consequencely, the purpose of this correlational descriptive study is to explore associations between support interventions by oncology nurses and death anxiety among cancer patients. A preliminary phase is added in which three translators and five experts were involved in the Death and Dying Distress Scale (DADDS) translation and cross-cultural adaptation process. This process has produced the Death Distress Scale (DDS), which is pre-tested on five lung cancer patients. In the main phase of this study, 28 lung cancer patients were recruited from an outpatient clinic in a Quebec City hospital center. Nursing support interventions were measured by the Caring Nurse-Patient Interaction Scale – 70-item version – Patient (CNPI-70P). Correlation and polynomial regression analyzes were performed. The DDS has a good internal consistency (α = .86). The trust and support relationship is the main predictor of death anxiety (F (2, 23) = 5.31, p = .01). A second-degree polynomial model shows that the relationship between these two variables produces a convex parabola : these relationship support interventions lead to a decrease in death anxiety, but beyond a certain frequency they produce the opposite effect.

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Table des matières

Résumé... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux... viii

Liste des figures ... ix

Remerciements ... xi

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique ... 3

1.1 Le contexte de l’étude... 3

1.2 Le concept de la mort et du mourir ... 4

1.3 Définition et manifestations cliniques de l’anxiété ... 5

1.3.1 Définition de l’anxiété ... 5

1.3.2 Les principales manifestations cliniques de l’anxiété ... 6

1.4 Définition et mesure du concept de l’anxiété de la mort ... 7

1.4.1 Définition de l’anxiété de la mort ... 7

1.4.2 Mesure du concept de l’anxiété de la mort ... 8

1.5 L’anxiété de la mort des patients atteints de cancer ... 10

1.5.1 La prévalence de l’anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer ... 10

1.5.2 Les impacts de l’anxiété de la mort sur les patients atteints de cancer ... 11

1.6 Les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie ... 12

1.6.1 La relation d’aide ... 12

1.6.2 La prise en charge de la douleur ... 13

1.6.3 Le soutien à la famille et aux proches ... 14

1.6.4 L’accompagnement spirituel ... 14

Chapitre 2 : Recension des écrits ... 17

2.1 La stratégie de repérage des écrits ... 17

2.2 Facteurs influençant l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer et stratégies de coping .... 18

2.3 Mesure de l’anxiété de la mort ... 22

2.4 Écrits relatifs aux interventions visant à soulager l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer ... 25

2.4.1 Interventions qui relèvent de la relation d’aide et de confiance ... 25

2.4.2 Interventions spécialisées... 27

2.5 Objectifs et questions de recherche ... 32

Chapitre 3 : Cadre de référence ... 33

3.1 La justification du choix de la théorie du Human Caring de Watson ... 33

3.2 Éléments du métaparadigme infirmier selon la théorie du Human Caring ... 34

3.3 Définition du caring ... 35

3.4 Les principaux concepts de la théorie du Human Caring de Watson ... 36

3.4.1 La relation transpersonnelle du caring ... 36

3.4.2 Le moment du caring ou l’occasion du caring ... 36

3.4.3 Les facteurs caratifs de la théorie du Human Caring de Watson ... 37

Chapitre 4 : Méthodologie ... 39

4.1 La phase préparatoire de l’étude : traduction et adaptation transculturelle du DADDS ... 39

4.1.1 Le Death and Dying Distress Scale ... 39

4.1.2 Processus de traduction et d’adaptation transculturelle du DADDS ... 40

4.1.2.1 Adaptation transculturelle de la version française préliminaire du DADDS ... 42

4.1.2.2 Le prétest de la version pré-finale québécoise du DADDS ... 44

4.1.2.2.1 Population et échantillon ... 44

4.1.2.2.2 Méthode de collecte des données ... 45

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vi

4.2 Phase principale de l’étude : interventions infirmières et anxiété de la mort ... 46

4.2.1 Devis de recherche de la phase principale... 46

4.2.2 Population à l’étude... 47

4.2.3 Échantillonnage ... 47

4.2.4 Déroulement de l’étude ... 47

4.2.5 Les instruments de mesure ... 48

4.2.5.1 Échelle de Détresse liée à la Mort ... 48

4.2.5.2 Échelle d'Interactions Infirmière-Patient – version 70 énoncés – Patient ... 48

4.2.6 Plan d’analyse des données... 49

4.2.6.1 Analyses préliminaires effectuées sur l’EDM... 49

4.2.6.2 Analyses descriptives ... 50

4.2.6.3 Identification des variables confondantes potentielles ... 50

4.2.6.4 Analyses principales ... 50

4.2.7 Les considérations éthiques ... 51

Chapitre 5 : Résultats... 53

5.1 Résultats de la phase préliminaire ... 53

5.1.1 Adaptation transculturelle : évaluation par le comité d’experts ... 53

5.1.2 Résultats du prétest de la version pré-finale ... 55

5.2 Résultats de la phase principale ... 56

5.2.1 Exactitude des données ... 56

5.2.2 Problèmes reliés au recrutement des patients ... 57

5.2.3 Caractéristiques sociodémographiques des participants ... 57

5.2.4 Analyses préliminaires : évaluation de la performance des énoncés de l’EDM ... 59

5.2.4.1 Analyses descriptives (moyennes et écarts-types) des énoncés de l’EDM... 59

5.2.4.2 Consistance interne et corrélations inter-items ... 61

5.2.4.3 Analyses statistiques effectuées sur l’échelle totale de l’EDM en cas de suppression d’un énoncé ... 63

5.2.5 Résultats des analyses principales de l’étude... 65

5.2.5.1 Description de l’anxiété de la mort des patients ... 65

5.2.5.2 Description des interventions infirmières et indices de fidélité ... 66

5.2.5.3 Variables confondantes potentielles... 67

5.2.5.4 Analyses des corrélations entre les variables d’intérêt de l’étude ... 71

5.2.5.5 Analyse de régression polynomiale ... 72

5.2.5.5.1 Procédure de sélection de variables et critère de choix du modèle de régression ... 73

5.2.5.5.2 Résultats du modèle polynomial du second degré ... 75

Chapitre 6 : Discussion ... 78

6.1 Phase préliminaire : traduction et adaptation transculturelle ... 78

6.2 Phase principale : les interventions infirmières et l’anxiété de la mort ... 82

6.2.1 Anxiété de la mort et évaluation préliminaire des qualités métriques de l’EDM... 82

6.2.2 Interventions infirmières ... 84

6.2.3 Interventions infirmières et anxiété de la mort... 87

6.2.3.1 L’humanisme... 88

6.2.3.2 L’espoir ... 89

6.2.3.3 Les émotions... 90

6.2.3.4 La Relation d’aide et de confiance ... 91

6.2.4 Relation d’aide et de confiance et anxiété de la mort ... 92

6.3 Les forces et les limites de l’étude ... 97

6.3.1 Forces de l’étude ... 97

6.3.2 Limites de l’étude ... 98

6.4 Recommandations pour la pratique clinique, la formation et la recherche ... 99

6.4.1 Recommandations pour la pratique clinique ... 99

6.4.2 Recommandations pour la formation ... 100

(7)

vii

Conclusion ... 102

Références ... 104

Annexes ... 112

Annexe 1. Questionnaire du Death and Dying Distress Scale (DADDS), version originale de Krause et al. (2015). ... 112

Annexe 2. Guide d’entrevue semi-dirigé : Adaptation transculturelle de la version française préliminaire du DADDS ... 114

Annexe 3. Échelle de Détresse liée à la Mort (EDM) (Version pré-finale québécoise du DADDS) ... 120

Annexe 4. Feuillet d’information-Prétest de la version pré-finale québécoise du DADDS ... 122

Annexe 5. Questionnaire des données sociodémographiques pour le prétest de la version pré-finale québécoise du DADDS ... 123

Annexe 6. Guide d’entrevue semi-dirigé pour le prétest de l’Échelle de Détresse liée à la Mort (EDM) ... 124

Annexe 7. Feuillet d’information-Étude principale ... 128

Annexe 8. Questionnaire des données sociodémographiques-Étude principale ... 129

Annexe 9. Échelle de Détresse liée à la Mort (EDM) (version finale québécoise du DADDS) ... 131

Annexe 10. Échelle d’Interactions Infirmière-Patient-Version 70 énoncés-Patient (EIIP-70P) ... 133

Annexe 11. Résumé des modifications apportées à la version française préliminaire du DADDS après l’évaluation du comité d’experts... 139

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viii

Liste des tableaux

Tableau 1. Les dix facteurs caratifs de Watson (1985) ... 38

Tableau 2. Caractéristiques des participants au prétest de la version pré-finale québécoise du DADDS (n = 5) ... 55

Tableau 3. Caractéristiques sociodémographiques des participants à la phase principale de l’étude (n = 28) ... 58

Tableau 4. Analyses descriptives des énoncés de l’EDM (n = 28) ... 60

Tableau 5. Matrice de corrélations de Pearson entre les énoncés de l’EDM (n = 28) ... 62

Tableau 6. Analyses statistiques effectuées sur l’échelle totale de l’EDM en cas de suppression d’un énoncé (n = 28) ………... 64

Tableau 7. Niveaux d’anxiété de la mort des participants (n = 28) ... 65

Tableau 8. Présentation descriptive des interventions infirmières et indices de fidélité (n = 28) ... 66

Tableau 9. Comparaison des médianes de l’anxiété de la mort en fonction des variables sociodémographiques (n = 28) ... 68

Tableau 10. Comparaison des moyennes ou des médianes de l’anxiété de la mort en fonction des variables sociodémographiques (n = 28) ... 70

Tableau 11. Corrélations de Spearman entre les variables d’intérêt de l'étude (n = 28) ... 71

Tableau 12. Modèle polynomial du premier degré (n = 28) ... 74

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ix

Liste des figures

Figure 1. Étapes du processus de traduction et d’adaptation transculturelle du DADDS ... 41 Figure 2. Diagramme de dispersion illustrant le lien entre l’anxiété de la mort et la relation d’aide et de confiance ... 73 Figure 3. Modèle polynomial du premier degré ... 74 Figure 4. Modèle polynomial du second degré ... 77

(10)

x

À ma grand-mère, Fatma, décédée d’un

cancer pendant la réalisation de ce mémoire

et qui a eu la chance d'être bien

accompagnée par ma famille

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xi

Remerciements

C’est avec un grand plaisir et une sincère gratitude que je souhaite remercier tous ceux et celles qui m’ont permis de réaliser le présent mémoire de maîtrise grâce à leurs efforts soutenus et constants ainsi qu’à leur précieuse confiance.

Dans le cheminement ayant conduit à la réalisation de ce mémoire, je tiens à remercier tout d'abord mon directeur de maîtrise, Monsieur Jean-François Desbiens, généreux d’idées et avide de créativité, pour son appui continu, son sens de l’humanité et la grande générosité dont il a fait preuve tout au long de la réalisation de cette étude. C’est certainement grâce à lui que j’ai développé un vif intérêt pour la recherche. Il m’est impossible de résumer ici toutes les connaissances extraordinaires que Monsieur Desbiens m’a transmises tout au cours de l’élaboration de ce mémoire; je tiens seulement à lui témoigner toute ma gratitude. Je désire également remercier Madame Michèle Aubin, la chercheuse responsable de ce projet, pour ses commentaires judicieux, sa rigueur scientifique et la générosité dont elle a fait preuve dans la lecture de mon protocole de recherche. Mes remerciements s’adressent également aux membres du jury d’évaluation de mon mémoire, Madame Lise Fillion et Monsieur Frédéric Douville, qui m’ont fait l’honneur de juger la présente étude. Je tiens à leur exprimer mon appréciation sincère et mon respect pour le précieux temps consacré à la lecture et l’évaluation de ce mémoire.

Mon attention se tourne aussi vers les traducteurs et les experts qui ont collaboré étroitement à la traduction et/ou à l’adaptation transculturelle de l’outil Death and Dying Distress Scale (DADDS) et qui ont su jouer un rôle significatif dans ce processus.

Je désire aussi offrir mes sincères remerciements aux infirmières et à l’agente de secrétariat de la clinique d’oncologie ambulatoire concernée par cette étude qui ont accepté avec beaucoup d’ouverture de collaborer si généreusement à la collecte de la matière première de ce mémoire de maîtrise. Une grande reconnaissance va aux personnes suivis à cette clinique qui, nonobstant le caractère sensible du sujet abordé dans cette étude, ont accepté de participer au prétest de la version française préliminaire du DADDS ou à la phase principale de ce projet de recherche. Leur collaboration et leur motivation sont les assises de ce présent mémoire.

Un merci spécial aux professeurs qui ont marqué mon parcours de maîtrise : Monsieur Pawel Krol et et Mesdames Dianne Tapp, Caroline Maltais, Marie-Pierre Gagnon, Suzanne Bouchard, Sandrine Hegg et Daphney St-Germain.

Si j’ai achevé ce mémoire, c’est grâce à l’amour et au soutien de ma famille tout entière qui a toujours été présente pour moi à chaque instant et qui a respecté mes « absences » physiques et psychologiques, tout en sachant si bien maintenir sa « présence ». Un merci si particulier à mes précieux parents, Lotfi et Sassia, pour leur amour, leur affection, leur foi en moi, pour m’avoir fait découvrir ce dont je suis capable et pour

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xii

m’avoir accompagné et poussé à aller toujours plus loin. Merci à mes chers frères, Marwen et Raed, pour le soutien indéfectible, la joie de vivre, chacun de leurs sourires et leurs encouragements.

Je tiens à remercier infiniment mon cher ami Michel, pour ses qualités de cœur et d’esprit extraordinaires, son soutien moral constant et sans fin qui m’a souvent redonné motivation, la confiance qu’il m’accroche et tous les nombreux services et les moments partagés remplis de rires, merci d’être là, tout simplement. Je remercie aussi une amie fidèle, présente beau temps mauvais temps : Ikram ... Ton soutien, ton écoute, tes petites attentions et ta confiance inébranlable sont d’une grande valeur et m’ont donné l’énergie nécessaire pour terminer ce mémoire de maîtrise; merci.

Enfin, cette liste n’ayant pas de prétention à l’exhaustivité, je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué, de près ou de loin, à la réalisation de ce projet de maîtrise.

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1

Introduction

L’une des certitudes de la vie est que celle-ci aura nécessairement une fin un jour. Pourtant, beaucoup vivent dans le déni de cette finitude, tout en gardant l’idée de la mort à côté et hors de leur champ de conscience. C’est l'annonce du diagnostic d'une maladie grave comme le cancer qui parfois rappelle que la vie aura une fin. Le cancer est en effet, encore aujourd’hui, un événement, particulièrement traumatisant et effrayant, en lien étroit avec la mort. Cette maladie peut alors amener le patient à se considérer comme porteur d’un autre statut et à envisager l’échec possible des thérapeutiques et sa mort imminente. Le cancer peut conséquemment susciter chez le patient un type d’anxiété particulier : l’anxiété de la mort. Il s’agit d’une émotion difficile et complexe qui peut s’exprimer en plusieurs pensées ou préoccupations et qui semble affecter les différentes dimensions de la qualité de vie (physique, psychologique, sociale et spirituelle) des patients atteints de cancer. En oncologie, soulager l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer fait partie du rôle infirmier. De par ses compétences professionnelles et techniques, de même que ses aptitudes et ses attitudes humaines et relationnelles, les infirmières en oncologie pourraient offrir aux patients atteints de cancer des interventions pouvant soulager leur anxiété de la mort. Pourtant, on dispose de peu d’informations quant à la manière dont les infirmières abordent l’anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer. Jusqu’à présent, aucune étude ne s’est intéressée, de façon spécifique, à cette problématique. De plus, il n’existe aucun instrument en français adapté à la population franco-québécoise pour mesurer l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. La recherche proposée a pour objectif principal d’explorer les liens qui existent entre les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie et l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. Une phase préparatoire est ajoutée, afin de procéder à la traduction et à l’adaptation transculturelle du questionnaire Death and Dying Distress Scale (DADDS) pour la population franco-québécoise.

Ce mémoire comporte six chapitres, soit la problématique de l’étude, la recension des écrits, le cadre théorique, la méthodologie de la recherche, les résultats, ainsi que la discussion.

Le premier chapitre circonscrit la problématique à la base de de la présente étude, en appuyant l’importance de la prise en charge de l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer et le manque de connaissances autour des interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie auprès de cette clientèle. Le deuxième chapitre présente la recension des écrits. L’exposition de la stratégie de repérage des écrits débute ce chapitre. Par la suite, les résultats des études ayant trait aux principaux facteurs influençant l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer et aux stratégies de coping utilisées par cette clientèle sont exposés. Après quoi, les enjeux entourant la mesure de l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer sont présentés. Puis, les écrits portant sur les interventions qui visent à soulager l’anxiété de la mort de cette clientèle sont exposés. Pour terminer, les objectifs, les questions de recherche ainsi que la pertinence de ce projet pour la discipline infirmière sont présentés.

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2

Le troisième chapitre fait mention du cadre théorique de l’étude. Ce cadre correspond à la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979). Les dix facteurs caratifs de cette théorie sont utilisés, afin de conceptualiser et d’opérationnaliser les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie auprès de patients atteints de cancer qui expérimentent l’anxiété de la mort.

Le quatrième chapitre présente la perspective méthodologique de la présente étude. Les deux phases proposées dans ce projet sont décrites : une phase préparatoire de traduction et d’adaptation transculturelle du DADDS et une phase principale dont le but est d’explorer les liens qui existent entre les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie et l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. Les éléments méthodologiques à la base de chacune des deux phases sont alors exposés, incluant le devis de recherche, la description de la population à l’étude, la méthode d’échantillonnage et de collecte des données, la taille de l’échantillon, le milieu de recherche, le déroulement du projet et la stratégie de recrutement des participants. Les outils de collecte des données et de mesure retenus et le processus d’analyse des données sont décrits. Ce chapitre se termine en détaillant les considérations éthiques. Le cinquième chapitre présente l’ensemble des résultats de l’étude en deux volets. Dans un premier temps, les résultats obtenus en lien avec la phase préparatoire de l’étude sont présentés, incluant les résultats de l’adaptation transculturelle de la version française préliminaire du DADDS ainsi que ceux du prétest de la version pré-finale québécoise de cet outil. Dans un deuxième temps, les résultats relatifs à la phase principale de l’étude sont exposés. Les résultats des analyses psychométriques préliminaires effectuées sur la version finale québécoise du DADSS, soit l’Échelle de Détresse liée à la Mort (EDM), sont d’abord présentés. Par la suite, les résultats d’analyses descriptives (variables d’intérêt : anxiété de la mort et interventions infirmières) et corrélationnelles sont décrits. La présentation des résultats de l’analyse de régression polynomiale termine ce chapitre.

Le sixième chapitre a pour but d’interpréter et de discuter de l’ensemble des résultats obtenus dans cette recherche, en établissant un lien avec la littérature. La discussion des résultats se divise également en deux volets. Dans un premier temps, un regard critique est porté sur les différentes étapes du processus de traduction et d’adaptation transculturelle du DADDS. Dans un second temps, les résultats des analyses psychométriques préliminaires effectuées sur l’EDM sont discutés, en réalisant une comparaison avec ceux de l’étude ayant permis de valider l’outil DADDS. Également, les résultats des analyses descriptives, des analyses exploratoires de corrélation et de régression polynomiale sont respectivement discutés. Finalement, à la lumière des forces et des limites de ce projet, certaines recommandations pour la pratique clinique, la formation et la recherche sont présentées dans la dernière partie de ce chapitre.

Suit une conclusion générale qui reprend les principaux résultats obtenus dans les deux phases de la présente étude.

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Chapitre 1 : Problématique

Ce premier chapitre a pour objectif de décrire la problématique de ce projet, qui s’intéresse à l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. Dans un premier temps, nous aborderons le contexte de l’étude, puis nous différencierons entre les concepts de la mort et du mourir. Nous discuterons de l’anxiété de manière plus large, puis nous définirons l’anxiété de la mort et nous présenterons les principaux outils qui permettent de mesurer ce concept. Nous présenterons aussi la prévalence et les principaux impacts de l’anxiété de la mort. Pour terminer, nous aborderons les principales interventions d’accompagnement qui peuvent être utilisées par les infirmières en oncologie pour soulager l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer.

1.1 Le contexte de l’étude

Le cancer est à l’origine de 30,2% de tous les décès au Canada et il représente la principale cause de mortalité, surpassant les maladies cardiovasculaires (19,7%) (Société canadienne du cancer [SCC], 2017). Il y aurait environ 206 200 nouveaux cas de cancer diagnostiqués par année et 80 800 décès liés à cette maladie, ce qui signifie qu’une personne sur deux développera cette maladie et qu’une personne sur quatre en mourra (SCC, 2017). Selon le rapport d’impact de la Société canadienne du cancer 2016/17, on prévoit que le nombre de nouveaux cas de cancer montera en flèche d’ici 2030, ce qui pourrait être expliqué en grande partie par le vieillissement de la population canadienne (SCC, 2017). En 2017, 89% de tous les nouveaux cas ont été diagnostiqués chez les Canadiens de 50 ans et plus. Selon les données de la SCC (2017), le cancer du poumon est la forme de cancer la plus fréquemment diagnostiquée dans la population canadienne. En 2017, 28 600 Canadiens ont en fait reçu un diagnostic de cancer du poumon, représentant 14% de tous les nouveaux cas de cancer. Il faut noter que le cancer du poumon est encore la principale cause de décès par cancer, et ce tant chez les hommes que chez les femmes, ce qui représente 26% de tous les décès par cancer chez les deux sexes (SCC, 2017). En plus d’être le cancer le plus meurtrier, le cancer du poumon est associé à un taux de survie à cinq ans nettement plus faible (17%) que celui du cancer colorectal (64%) et du sein (87%), lesquels correspondent respectivement au deuxième et au troisième types de cancer les plus fréquents au Canada (SCC, 2017). Ce faible taux de survie à cinq ans peut être expliqué par l’absence de dépistage pour détecter la maladie à un stade précoce et non-métastatique (SCC, 2018).

À n’en pas douter, le cancer est, de manière générale, une maladie grave qui affecte le patient sur les plans physique (douleur, perte d’appétit et perte de poids, fatigue, nausées et vomissements, difficulté à respirer, etc), psychologique (état de choc, anxiété, peur, tristesse, désespoir, etc), social (isolement, précarité financière, sentiment de solitude, etc) et spirituel (préoccupations sur le sens de la vie, remise en question du système de valeurs et de croyances, etc) (Cheng et al., 2012; Heydarnejad, Hassanpour, & Solati, 2011; Montazeri et al., 2008; Ringdal & Ringdal, 2017; Üstündag & Zencirci, 2015) et qui génère des besoins de toutes sortes (besoin d’information, besoin d’une écoute attentive et d’une présence accueillante, besoin de

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4

sécurité , besoin de maintien du lien social, etc) (Ayala de Calvo & Sepulveda-Carrillo, 2016; Hatamipour, Rassouli, Yaghmaie, Zendedel, & Majd, 2015; Mayer, Nasso, & Earp, 2017; Melhem & Daneault, 2017). À cela s’ajoute, pour les patients atteints de cancer, le rapport à une réalité qui peut être vécue comme une catastrophe : la possibilité de leur mort (Taché, Selye, & Day, 1979). Pour cette clientèle, le cancer est en effet un événement traumatisant et préoccupant en lien étroit avec la mort. Il faut noter que cette étape de la vie induit chez le patient atteint de cancer un vécu de souffrance, de séparation et de rupture et donne lieu à une véritable onde de choc émotionnel. C’est la raison pour laquelle, le patient atteint de cancer accepte parfois mieux l’irréalité de son immortalité que la réalité de sa mort possible (Neimeyer, 1994). Mais le cancer en tant que maladie mortelle le place face au futur et à la durée de sa vie et menace son être, son avoir et son pouvoir, ce qui risque de le plonger dans un type d’anxiété particulier : l’anxiété de la mort. Dans les prochaines sections, avant même de définir le concept de l’anxiété de la mort, il s’avère utile d’aborder le concept de la mort et du mourir. Puis, le terme anxiété sera aussi défini et les principales manifestations cliniques de l’anxiété seront présentées.

1.2 Le concept de la mort et du mourir

Aujourd’hui, la mort est encore considérée comme l’extrême pointe du sensible, un passage horrible qui coïncide avec une longue souffrance (Le Guay, 2008) et « l'irréparable qui anéantit soudainement nos projets et dissipe brutalement nos songes d'une gloire terrestre » (Eigeldinger, 1968, p. 54). Cette étape de la vie est le paradoxe des paradoxes. D’une part, la mort est considérée comme un phénomène naturel ; une réalité inévitable à laquelle personne ne peut échapper et, d’autre part, cette dernière est perçue comme un sujet tabou qui doit être occulté, refoulé et gardé sous le silence complet (Le Guay, 2008). En fait, « tout dans nos comportements nous conduit à l’oublier, à la mettre de côté tant nous portons en nous la conviction secrète et inavouée d’être immortel, comme réponse à l’inacceptable, l’insupportable, l’impensable de la mort » (Clément-Hryniewicz, 2012, p. 736).

La mort est une transition liée étroitement à la pensée de l’être humain, à son esprit, à son passé, à son vécu, mais aussi à son avenir. La mort est aussi définie par rapport à la vie ; elle est en lien étroit avec la vie de l’être humain. Darbord (1988) soutient en effet que la mort est « le corrélat de la vie : on dit la vanité de l’existence pour souligner l’imminence de son contraire » (p. 227).

Il faut préciser que les notions de « mort » (death) et de « mourir » (dying), parfois employées dans la littérature de manière interchangeable, présentent des distinctions conceptuelles. Lavoie, De Koninck, et Blondeau (2009) ont posé trois constats concernant la mort. Cette dernière, qui est le sort commun à tous les individus, correspond d’abord à une nécessité biologique inhérente à la condition humaine. Par la suite, la mort marque la fin de l’existence de la personne et correspond à la privation de sa vie. Dans ce sens, Jankélévitch (1977) soutient que l’instant mortel est « tout-dernier parce que depuis l’instant de la

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propre le sujet a cessé d’être en général » (p. 317). La mort s’oppose alors à tout ce qui est indéfini et éternel. Enfin, la mort est un événement incompréhensible qui peut être qualifié comme « un mystère absolu, un indescriptible qu’il faut saisir en tant que tel » (Lavoie, De Koninck, & Blondeau, 2009, p. 72). Pour Jankélévitch (1977), la mort est d’ailleurs « le point de tangence du mystère métempirique » (p. 10). Le mourir, quant à lui, est considéré par Lavoie, De Koninck, et Blondeau (2009) comme une situation limite qu’on ne peut pas modifier. Il est à noter que le mourir peut se présenter sous plusieurs aspects. Comme l’évoquent Lavoie, De Koninck, et Blondeau (2009), le mourir « se vit parfois sous l’enseigne de la résignation ou de la lutte, d’autres fois sereinement ou sous le joug de la souffrance » (p.76). Le mourir peut-être, de manière générale, conceptualisé comme un ensemble d’actes éminemment personnels qui permettent à l’individu de saisir « laborieusement la possibilité de faire sienne cette réalité qu’il n’a pas choisie, mais qui le concerne pourtant au plus haut point : sa mort » (Burdin, 1997, p. 71). Contrairement à la mort, qui survient après le mourir et qui n’appartient pas à l’existence de la personne (la « mort au-delà »), le mourir est alors le processus ou l’expérience qui précède la mort et qui fait partie intégrante de l’existence de cette dernière (la « mort en deçà »). Il faut souligner que Jankélévitch (1977) réserve le terme de la « mort sur le moment » à l’instant qui sépare la mort en deçà de la mort au-delà et qui marque la fin définitive de la vie.

Il faut préciser que cette réflexion conceptuelle sur la mort et le mourir vient éclairer les principales distinctions entre les deux notions. Cependant, dans le langage courant, ces différences ne seront pas perçues facilement par tous.

1.3 Définition et manifestations cliniques de l’anxiété

Avant de définir l’anxiété de la mort des personnes atteintes de cancer, il est jugé utile de définir l’anxiété de manière plus large et de présenter ses principales manifestations cliniques.

1.3.1 Définition de l’anxiété

Afin d’avoir une meilleure compréhension du concept d’anxiété, il est jugé pertinent de le différencier de celui de la peur. L’anxiété se distingue en fait de la peur tant sur le plan conceptuel que sur le plan clinique. L’anxiété désigne, de manière générale, une émotion déplaisante, persistante et diffuse associée à l’anticipation d’une situation imprévue, indéfinissable et indéterminée (Bay & Algase, 1999; Whitley, 1992). Pour Graziani (2008), l’anxiété est en effet une émotion désagréable caractérisée par l’incertitude (ou l’ambiguïté) et associée à la confrontation avec un danger dont les limites ne sont pas bien définies. En sciences infirmières, l’anxiété a également été définie en faisant référence à son objet non identifiable et flou. Selon la North American Nursing Diagnosis Association (NANDA, 2013), l’anxiété est en effet définie

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comme un vague sentiment de malaise et d’appréhension généré par l’anticipation d’un danger imminent qui se caractérise par sa nature inconnue ou non spécifique pour la personne. Il s’agit d’un signal destiné à protéger cette dernière contre l’agression de ce danger et à la préparer à réagir face à une situation menaçante, en activant son système nerveux autonome. Dans ce sens, Graziani (2008) considère l’anxiété comme « le produit de l’évaluation cognitive et correspond à un ensemble de cognitions et affects face à une situation menaçante : sentiment d’appréhension, perception d’un danger imminent, activation de divers systèmes psychophysiologiques » (p. 10).

La peur, quant à elle, peut se définir comme une émotion d’anticipation qui exerce un effet restrictif sur la vie d’une personne en empêchant l’actualisation de son potentiel (Peiffer, 1994). Contrairement à l’anxiété, la peur est généralement épisodique et disparaît une fois que le danger est écarté (Graziani, 2008). Selon le psychologue Gower (2005), la peur est une réaction émotionnelle humaine normale. Il s’agit d’une réaction protectrice tout à fait naturelle qui implique à la fois l’esprit et le corps de l’être humain. Bloch et al. (1997), quant à eux, ont défini la peur comme « un état dont l’objet est bien connu du sujet, c'est-à-dire un état qui a un contenu émotionnel et représentatif de son objet » (p. 73). Selon ces auteurs, pour qualifier cet objet, il est possible d’utiliser l’un des deux conceptions béhavioristes suivants : un déclencheur ou un stimulus.

En sciences infirmières, le diagnostic infirmier de peur a été établi, en 1973, pendant la première conférence de la NANDA International. La peur a d’abord été décrite selon les quatre niveaux suivants : légère, modérée, sévère et panique (Whitley, 1992). Par la suite, en 1980, ces quatre niveaux ont été remplacés par une seule catégorie : « l’habilité de l’identification de l’objet de la peur ». Selon la NANDA (2013), la peur désigne en effet « une réponse à la perception d’une menace consciemment identifiée comme un danger » (p. 405).

Nous pouvons constater qu’il existe des distinctions conceptuelles entre les concepts d’anxiété et de peur. De manière générale, par contraste avec la peur, qui désigne une réaction émotionnelle face à un objet spécifique, connu et identifiable, l’anxiété est une réaction émotive dont l’objet est mal différencié cognitivement. Dans ce projet, l’objet de l’anxiété est la mort. Tel qu’il a été souligné dans la section précédente, la mort est considérée par Jankélévitch (1977) et Lavoie, De Koninck, et Blondeau (2009) comme un mystère et un événement difficile à décrire. Dans ce sens, la mort représente une transition qui est mal différenciée cognitivement. En raison de cette mystérieuse inconnue, l’approche de la mort peut donc devenir plus effrayante pour les patients atteints de cancer.

1.3.2 Les principales manifestations cliniques de l’anxiété

L’anxiété est aujourd’hui devenue familière et semble faire partie intégrante de notre vie. Cette réaction émotionnelle peut produire à la fois des symptômes physiques et psychologiques (Berthoz & Krauth-Gruber, 2011).

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L’activation de divers systèmes psychophysiologiques peut d’abord se manifester sous un aspect somatique. L’anxiété peut alors donner lieu à des troubles cardiovasculaires (tachycardie, palpitations, serrements dans la poitrine, perte de connaissance incomplète, etc), respiratoires (dyspnée, sensation de constriction, boule dans la gorge, etc) et digestifs (perte d’appétit, nausées, spasmes intestinaux, etc). La personne anxieuse peut également présenter une tension motrice (douleurs musculaires, contraction des muscles, fatigabilité, paresthésies, sensation de fourmillements, etc) et une hyperactivité neurovégétative (transpiration excessive, sécheresse buccale, etc) (Dauchey & Chauffour-Ader, 2002; Pautex et al., 2007; Sadler, 2014; Whitley, 1992).

À ces réactions physiques, se greffent souvent d’autres réactions psychologiques ou émotionnelles qui peuvent s’exprimer sur le plan affectif, cognitif et comportemental. Les manifestations affectives de l’anxiété peuvent inclure la sensation d’être tendu et oppressé, un sentiment d’impuissance persistant, ainsi qu’un sentiment pénible d’insécurité, d’appréhension et d’inquiétude (Dolbeault, Dauchy, Brédart, & Consoli, 2007; Pautex et al., 2007). Dans certaines circonstances, ces réactions peuvent inclure des comportements plus intenses, tels que des pleurs et la tendance à dramatiser certaines situations et à éviter le contact avec l’entourage. La personne peut aussi perdre l’intérêt et le plaisir envers les activités de la vie quotidienne qu’elle aime. Il faut préciser que l’anxiété peut également entraîner des manifestations cognitives, telles que des difficultés de concentration, des troubles du sommeil, etc (Dolbeault et al., 2007; Pautex et al., 2007; Whitley, 1992).

L’anxiété constitue ainsi une émotion déplaisante qui peut se traduire par de nombreux symptômes physiologiques ou psychologiques en réponse à un événement imprévisible. Cet événement est vécu par l’individu comme pénible et paralysant.

1.4 Définition et mesure du concept de l’anxiété de la mort

Après avoir défini l’anxiété et présenté ses principales manifestations cliniques, nous définissons dans cette section l’anxiété de la mort et nous présentons les principaux outils qui permettent de mesurer ce concept.

1.4.1 Définition de l’anxiété de la mort

Il n’existe pas de définition universellement acceptée de ce concept, mais les différentes définitions répertoriées présentent tout de même plusieurs éléments communs. Pour essayer d’appréhender le mieux possible le concept de l’anxiété de la mort, nous présentons d’abord la définition proposée par Moorhead, Johnson, Maas, et Swanson (2013). Dans le Nursing Outcomes Classification (NOC), ces auteurs ont en effet défini l’anxiété de la mort comme « un sentiment vague d’inconfort ou de peur engendré par la perception, réelle ou imaginaire, d’une menace à son existence » (p. 586). L’anxiété de la mort désigne, pour Tomer et Eliason (1996), une émotion désagréable provoquée par l’anticipation de la disparition de soi. Selon Firestone et Catlett (2009), l’anxiété de la mort peut se définir comme un mélange de nombreux

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processus de pensée et d’émotions douloureuses. Plus spécifiquement, pour Lo et al. (2011), l’anxiété de la mort est une réaction émotionnelle désagréable dans laquelle l’individu éprouve la peur, la panique et la terreur face à l’anticipation de sa propre mort. Carpenito-Moyet (2008), quant à elle, considère l’anxiété de la mort comme une réaction émotionnelle provoquée par l’anticipation de la mort ou du mourir. Nyatanga et de Vocht (2006) ont défini l’anxiété de la mort comme une émotion désagréable qui peut s’exprimer en plusieurs préoccupations d’origine existentielle. Pour ces auteurs, l’anxiété de la mort peut être éprouvée par la personne suite à l’anticipation de sa propre mort ou de la mort des autres. Enfin, Lehto et Stein (2009), quant à eux, ont caractérisé l’anxiété de la mort en fournissant les six attributs suivants: 1) la peur de l’extinction, 2) l’acceptation cognitive de la mort, 3) une émotion qui ne fait pas partie de l’expérience consciente, 4) une émotion dont le niveau peut varier en fonction des stades de développement et de la crise identitaire, 5) les croyances, les valeurs, les rituels, les comportements et les traits distinctifs propres à chaque culture jouent un rôle protecteur contre cette émotion, et 6) une émotion qui constitue une source de motivation.

Il faut noter que la diversité de ces définitions témoigne de la complexité du concept de l’anxiété de la mort. Néanmoins, on peut constater que la plupart des auteurs considèrent l’anxiété de la mort comme une émotion désagréable. Ils insistent également sur le fait que cette émotion difficile est provoquée par l’anticipation de la mort. En s’appuyant sur ces deux constats, on peut alors proposer la définition synthétique suivante : l’anxiété de la mort est une réaction émotionnelle désagréable qui peut être éprouvée par la personne suite à l’anticipation de sa propre mort.

Il faut préciser que le concept de l’anxiété de la mort est parfois utilisé de manière interchangeable avec celui de peur de la mort, autant en clinique que dans la littérature (Abdel-Khalek, 2002; Becker, 1973; Cicirelli, 2002; Feifel & Branscomb, 1973). Cependant, certains auteurs (Hoelter, 1979; Lehto & Stein, 2009; Wong, Reker, & Gesser, 1994) ont proposé des distinctions explicites entre ces deux concepts. À titre d’exemple, selon Wong, Reker, et Gesser (1994), la peur de la mort se caractérise par son caractère spécifique et conscient, alors que l’anxiété de la mort est plus générale et difficilement accessible à la conscience.

Après avoir défini l’anxiété de la mort, nous présenterons dans la section qui suit les principaux outils utilisés dans la littérature scientifique pour mesurer ce concept.

1.4.2 Mesure du concept de l’anxiété de la mort

Au sein de la littérature, le concept de l’anxiété de la mort a été mesuré selon deux différentes approches : unidimensionnelle et multidimensionnelle. D’une part, plusieurs auteurs (Abdel-Khalek, 1998; Bengtson, Cuellar, & Ragan, 1977; Kalish, 1986; Krause, Rydall, Hales, Rodin, & Lo, 2015; Royal & Elahi, 2011; Shinn et al. 2009; Thorson, Horacek, & Kara, 1987) ont caractérisé ce concept comme une entité homogène et unidimensionnelle. À titre d’exemple, dans leur étude, Bengtson, Cuellar, et Ragan (1977) ont mesuré

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l’anxiété de la mort des participants en utilisant une seule question (« How afraid are you of death ? Would you say you are: not at all afraid? /somewhat afraid? /or very afraid? ») (p. 79). Récemment, Krause et al. (2015) ont élaboré le DADDS, un questionnaire unidimensionnel comportant 15 énoncés qui décrivent des préoccupations ou pensées en lien avec la mort et le mourir.

Il faut noter que d’autres auteurs (Abdel-Khalek, 2004; Collett & Lester, 1969; Conte, Weiner, & Plutchik, 1982; Florian & Kravetz, 1983; Hoelter, 1979; Leming, 1980; Neale, 1973; Nelson & Nelson, 1975; Spilka, Minton, Sizemore, & Stout, 1977; Thorson & Powell, 1992; Tomás-Sábado & Gómez-Benito, 2005; Wittkowski, 2001) ont, d’autre part, considéré l’anxiété de la mort comme un concept hétérogène, complexe et multidimensionnel qui peut s’exprimer en plusieurs préoccupations ou pensées. Pour mesurer ce concept, ces auteurs se sont d’ailleurs efforcés d’en déceler les différentes dimensions. Citons en premier lieu Neale (1973) qui a catégorisé l’anxiété de la mort en neuf dimensions : 1) la peur de la douleur, 2) de l’indignité, 3) d’être un fardeau, 4) de ce qui arrive au corps après la mort, 5) du jugement, 6) de l’inconnu, 7) de perdre la maîtrise de soi, 8) de l’incomplétude, et 9) de la séparation. Hoelter (1979), quant à lui, a développé le questionnaire du Multidimensional Fear of Death Scale (MFODS) permettant d’évaluer l’anxiété de la mort, à partir de huit sous-échelles suivantes : 1) la peur du mourir, 2) des morts, 3) d’être détruit, 4) de la mort des personnes significatives, 5) de l’inconnu, 6) de la mort consciente, 7) du devenir du corps après la mort, et 8) de la mort prématurée. Le questionnaire du Multidimensionality of Death Anxiety (MDA) (Nelson & Nelson, 1975), composé de 20 énoncés, permet de mesurer l’anxiété de la mort selon les quatre dimensions suivantes : 1) l'évitement de la mort, 2) la peur de la mort, 3) le déni de la mort, et 4) la réticence à interagir avec les personnes mourantes. Enfin, le questionnaire multidimensionnel du Fear of Personal Death Scale (FPDS), qui a été développé par Florian et Kravetz (1983), comporte trois dimensions principales (interpersonnelle, intrapersonnelle et transpersonnelle). Ces dimensions permettent essentiellement d’évaluer la peur de perdre l’identité sociale, de manquer des événements futurs, de perdre le plaisir, d’être oublié, de l’incertitude de l’existence après la mort et de la punition.

Il faut noter que les dimensions et les préoccupations précitées ont certains points communs. De manière générale, elles font référence à : 1) des regrets et à des affaires non terminées (manquer des événements futurs et la peur de l’incomplétude), 2) le futur, l’inconnu et l’incertitude (la peur de ce qui arrive après la mort, la peur de l’inconnu et l’incertitude de l’existence après la mort), 3) les relations interpersonnelles (la peur de la séparation, la peur d’être oublié et la peur de la perte de l’identité sociale), et 4) la mort douloureuse ou non préparée (la peur de la douleur et la peur de la mort prématurée). Les dimensions et les préoccupations présentées plus haut viennent alors clarifier plus encore le concept de l’anxiété de la mort. On peut en fait définir l’anxiété de la mort comme un état émotionnel désagréable et complexe qui peut s’exprimer suite à l’anticipation de la mort par un sentiment d’inachèvement, d’incertitude face à l’inconnu, de perte dans les relations et la peur de souffrir. Également, en se basant sur les préoccupations présentées précédemment, on peut constater que l’anxiété de la mort est un phénomène prégnant qui

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mérite l’attention toute particulière des infirmières en oncologie pour bien accompagner les patients atteints de cancer et les aider à se sentir mieux.

1.5 L’anxiété de la mort des patients atteints de cancer

Cette section présente la prévalence de l’anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer ainsi que les principaux impacts de cette émotion difficile sur cette clientèle.

1.5.1 La prévalence de l’anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer

L'anxiété de la mort des patients atteints de cancer est jusqu'à présent un sujet encore peu étudié. Il existe d'ailleurs un nombre limité d’études empiriques qui rapportent la fréquence de cette émotion difficile chez cette clientèle. Il faut souligner que la majorité de ces études sont récentes.

L'étude de Karampour, Fereidooni-Moghadam, Zarea, et Cheraghian (2017) a utilisé un devis quantitatif corrélationnel, auprès d'un échantillon de convenance composé de 118 patientes atteintes de cancer du sein, provenant des hôpitaux, situés en Iran. L'étude a montré que l'anxiété de la mort était éprouvée par 67% de ces participantes. L'étude quantitative descriptive d'Ali, Osmany, Khan, et Mishra (2014) s'est déroulée en Inde, dans un centre de traitement du cancer, auprès de 60 patients (30 hommes et 30 femmes). Selon cette étude, 21,7% des participants ont éprouvé l'anxiété de la mort. L'étude quantitative descriptive de Vehling et al. (2017), qui a été effectuée auprès de 382 patients atteints d’un cancer avancé, provenant d'un centre hospitalier de la région de Toronto, a montré que 27,2% des participants présentaient un niveau modéré d'anxiété de la mort. Les résultats de l'étude ont montré que les principales pensées ou préoccupations rapportées par les patients étaient les suivantes : « the impact of my death on my loved ones » (65,4%), « be prolonged or drawn out » (55,3%), « happen with a lot of pain or suffering » (54,8%) et « being a burden to others » (51,2%) (Vehling et al., 2017, p.3). L’étude quantitative corrélationnelle de Bastani, Farnood, et Haqhani (2016) a été réalisée auprès de 16 personnes âgées atteintes de cancer, provenant d’un centre hospitalier de la région de Toronto. D’après les résultats de l’étude, 42,3% des patients présentaient un niveau élevé d’anxiété de la mort. Au Texas, à partir d’un échantillon de 254 femmes atteintes d’un cancer ovarien avancé, l'étude de Shinn et al. (2009) a montré que 55,8% des participants éprouvaient l'anxiété de la mort. Enfin, en Iran, l’étude de Salehi, Zahabi, Zahabi, et Mahmoudi (2017), comportant un devis corrélationnel, a été réalisée auprès de 48 patientes atteintes d’un cancer du sein avancé. Selon cette étude, 72,9% des patientes présentaient un niveau élevé d’anxiété de la mort. Ainsi, en plus d'être associée à différentes préoccupations ou pensées, l'anxiété de la mort des patients atteints de cancer est présente dans des proportions allant de 22% à 73%. Cependant, dans la plupart des études précitées, on ne sait pas à quel niveau (faible, légère, modéré ou élevé) cette émotion douloureuse est éprouvée par cette clientèle. Pour les trois études qui le précisent, un seul niveau (modéré ou élevé) a été fourni par les auteurs. Également, dans la majorité des études présentées plus haut, l’anxiété de la mort

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a été mesurée auprès de patients atteints de cancer de tous types confondu. Cela ne permet alors pas de connaître le portrait de cette émotion difficile selon les types de cancer. En se basant sur ces constats, on peut donc dire qu’on n’a pas encore un portrait global de l’anxiété de la mort chez les patients atteints de cancer.

1.5.2 Les impacts de l’anxiété de la mort sur les patients atteints de cancer

L’anxiété de la mort est une émotion puissante qui peut affecter les différentes dimensions (physique, psychologique, sociale et spirituelle) de la qualité de vie des personnes atteintes de cancer.

Selon l’expérience de Neimeyer (1994), il semble que l’anxiété de la mort peut augmenter la perception de la souffrance physique chez les patients atteints de cancer. Plus précisément, l’anxiété de la mort modifierait la façon dont la sensation douloureuse est intégrée et perçue. Cette émotion douloureuse peut aussi augmenter la détresse psychologique des patients atteints de cancer et affecter la capacité de cette clientèle à faire face aux différents problèmes liés à l’approche de la mort (Neimeyer, 1994). Cette émotion difficile peut en effet donner lieu à des sentiments de culpabilité, de désespoir, d’injustice et d’impuissance qui sont difficiles à vivre (Adelbratt & Strang, 2000; Neimeyer, 1994; Safdar & Rahman, 2016; Tong et al., 2016). Sur le plan social, l’anxiété de la mort peut pousser le patient atteint de cancer à réduire ses contacts sociaux et à présenter une indifférence vis-à-vis de sa situation. Il peut aussi devenir peu chaleureux et peu disponible émotionnellement (Neimeyer, 1994). Selon Bouregba et Lebret (2008), le patient atteint de cancer peut alors faire preuve d’indifférence à l’égard des besoins de ses proches. Ces auteurs soutiennent, dans ce sens, que l’anxiété de la mort « entraîne des inhibitions de contact et de la pensée et un état d’indifférence qui altèrent profondément les relations du patient à son entourage » (p. S427).

Il semble que l’anxiété de la mort peut également augmenter la détresse spirituelle des patients atteints de cancer (Neimeyer, 1994). La NANDA (2008) a défini la détresse spirituelle comme « la perturbation de la capacité de ressentir et d’intégrer le sens et le but de la vie à travers les liens avec soi-même, les autres, l’art, la musique, la nature ou une force supérieure » (p. 79). Pour Smucker (1996), la détresse spirituelle est souvent caractérisée par une crise existentielle qui se manifeste par l’interrogation sur le sens de la vie. Selon Villagomeza (2005), la détresse spirituelle se caractérise par la remise en cause des valeurs et des croyances des personnes atteintes de cancer. O'Brien (2018), quant à elle, précise que la détresse spirituelle de cette clientèle s’accompagne d’une diminution de la volonté de vivre et d’une perte du sentiment de paix et de dignité.

L’anxiété de la mort constitue alors une émotion complexe qui peut s’exprimer en différentes pensées ou préoccupations et qui semble affecter la qualité de vie des patients atteints de cancer dans ces différentes dimensions (physique, psychologique, sociale et spirituelle). C’est pourquoi le soulagement de cette émotion devrait faire partie intégrante des objectifs des soins infirmiers en oncologie (Phaneuf, 2002). Les

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infirmières en oncologie, de par leur présence constante auprès du patient, semblent occuper une position clé, afin de prendre des initiatives et de poser des interventions qu’elles jugent nécessaires pour soulager l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer. Il faut préciser que les infirmières en oncologie peuvent aider cette clientèle à mieux appréhender sa souffrance et à trouver le plus grand nombre de ressources pour qu’elle puisse y faire face, et ce grâce à leurs interactions répétées avec cette dernière (Kissane, Bultz, Butow, & Finlay, 2010). Également, compte tenu de leurs compétences relationnelles et professionnelles, les infirmières en oncologie peuvent jouer un rôle dans l’accompagnement du patient, en lui montrant qu’il est digne d’être accueilli, qu’il mérite de l’intérêt et que son vécu est pris en compte (Burke, 2009; Gibson, Soanes, & Sepion, 2004).

Il faut préciser que le nombre d’études portant sur les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie spécifiquement auprès de patients atteints de cancer qui éprouvent l’anxiété de la mort est assez limité. Dans la section suivante, nous présenterons donc les principales interventions d’accompagnement qui sont habituellement utilisées par les infirmières en oncologie auprès de patients atteints de cancer et qui pourraient potentiellement être employées auprès de ceux qui éprouvent l’anxiété de la mort.

1.6 Les interventions d’accompagnement des infirmières en oncologie

Cette section présente les principales interventions mises de l’avant par les infirmières en oncologie pour accompagner les patients atteints de cancer, selon des recommandations d’experts ou d’auteurs clés dans le domaine. De manière générale, ces interventions infirmières font référence à la relation d’aide, la prise en charge de la douleur, le soutien à la famille et aux proches et l’accompagnement spirituel.

1.6.1 La relation d’aide

Au chevet du patient atteint de cancer qui éprouve l’anxiété de la mort, l’infirmière en oncologie rencontre un patient souffrant, vulnérable, désirant, craintif et demandant. C’est pourquoi la relation d’aide qui s’établit entre elle et le patient doit s’articuler autour d’une démarche rigoureuse qui prend racine dans un ensemble de valeurs humanistes. Les outils de base de l’infirmière en oncologie sont l’ouverture, la disponibilité, l’attention, l’empathie, l’authenticité, le respect, la compassion, l’écoute et le silence. Également, par sa présence humaine et chaleureuse, l’infirmière en oncologie peut aider la personne atteinte de cancer à parler de ses différents problèmes et à exprimer librement les principales pensées ou préoccupations associées à sa mort possible (Kisvetrová, Klugar, & Kabelka, 2013; Johnston & Smith, 2006; Mok & Chiu, 2004; Penson et al., 2005).

Prendre en charge l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer n’est pas une activité professionnelle comme une autre. Si toute personne a besoin de vivre une relation humaine faite d’échanges gratifiants, le patient atteint de cancer qui expérimente l’anxiété de la mort ressent en effet davantage encore son importance (Phaneuf, 2002). Il faut préciser que chaque patient atteint de cancer qui éprouve cette émotion

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difficile a besoin d’être considéré comme une personne à part entière et non de se voir réduit à n’être qu’un objet de soin. Pour soulager adéquatement l’anxiété de la mort du patient, il ne suffit pas de seulement connaître les mécanismes physiologiques et les symptômes de cette émotion désagréable, de maîtriser les techniques de communication et tout ce qui s’en suit. Il existe une autre réalité, non pas d’ordre technique, mais purement humaine : l’attention envers la personne. Cette dernière dépend de l’habilité de l’infirmière en oncologie à établir une véritable relation d’aide avec le patient (Hughes, 2009).

Pour ce faire, l’infirmière peut aider la personne à exprimer ses craintes, ses préoccupations associées à sa maladie et à sa mort possible (Phaneuf, 2002). La détresse psychologique du patient atteint de cancer qui éprouve l’anxiété de la mort peut alors être mise en mots. L’infirmière en oncologie peut normaliser les émotions éprouvées par le patient, en lui faisant savoir qu’il n’est pas seul à les éprouver face à sa mort possible. Elle peut aussi lui fournir des explications claires qui lui permettront de comprendre sa maladie et son traitement et de mieux s’adapter à sa situation difficile. Pour ce faire, l’infirmière doit établir avec le patient une réelle communication permettant de créer un climat de confiance qui favorise l’accès à ses émotions. La capacité d’écoute et la compréhension empathique prennent ici tout leur sens pour rassurer le patient et l’aider à retrouver son équilibre (Legg, 2011; Mårtensson, Carlsson, & Lampic, 2010; Ryan et al., 2005). Un dialogue nourri de questions ouvertes est aussi indispensable pour intervenir avec efficacité auprès du patient atteint de cancer. Les questions ouvertes constituent en effet des outils précieux pour la collecte des données et pour la relation d’aide. Elles confèrent une grande richesse aux échanges entre l’infirmière et la personne atteinte de cancer. Les questions ouvertes laissent également beaucoup de liberté au patient pour exprimer ses craintes, ses préoccupations et ses émotions (Ryan et al., 2005).

1.6.2 La prise en charge de la douleur

La prise en charge de la souffrance physique des patients atteints de cancer constitue l’un des principaux piliers de l’activité des infirmières en oncologie. La douleur est en effet l’un des principaux symptômes rencontrés en oncologie. De fait, les patients atteints de cancer font, à un moment ou un autre de l’évolution de leur maladie, l’expérience de la douleur. La douleur peut affecter les différentes dimensions de la qualité de vie des patients atteints de cancer (McMillan, 1996; Thunberg, Carlsson, & Hallberg, 2001) et touche entre 45% et 90% de cette clientèle (Arthur, Nguyen, Hui, Bruera, & Sriram, 2012; Covarrubias-Gómez, Hernández-Martínez, Ruiz-Ramírez, & López Collada-Estrada, 2014; Teunissen et al., 2007; Van den Beuken-van Everdingen et al., 2007). Tel que discuté précédemment, l’anxiété de la mort peut s’exprimer par la peur de souffrir lorsque la mort approche (Neimeyer, 1994). Ainsi, nous estimons que le fait de se préoccuper de la douleur physique de la personne atteinte de cancer et de la soulager adéquatement pourrait peut-être aider également à prévenir ou soulager l’anxiété de la mort chez certains. De plus, en soulageant la douleur physique des personnes atteintes de cancer, nous pouvons penser que les infirmières en oncologie pourraient peut-être les aider à exprimer plus librement les différentes préoccupations

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associées à l’approche de la mort. Par conséquent, cela pourrait améliorer leur bien-être psychologique (Bondier, Mathieu-Nicot, Mariage, Bioy, & Aubry, 2017).

1.6.3 Le soutien à la famille et aux proches

La personne atteinte de cancer doit interagir de manière continue et efficace avec son entourage (famille, amis et soignants), afin d’y tirer les ressources nécessaires qui lui permettraient de réussir à surmonter les problèmes liés à l’approche de la mort, et ce tout au long de l'évolution de sa maladie. Cependant, selon Neimeyer (1994), l’anxiété vécue par cette dernière face à l’approche de sa propre mort peut affecter sa capacité à le faire et, conséquemment, son bien-être social. Elle aura alors besoin du soutien des membres de sa famille et de ses proches, qui n’y sont pas nécessairement préparés. L’infirmière peut intervenir en habilitant la famille et les proches, afin qu’ils soient eux-mêmes en mesure d’accompagner la personne qui éprouve l’anxiété de la mort.

Le soutien à la famille et aux proches peut prendre différentes formes, soit un soutien informatif ou cognitif (donner de l’information, des conseils et des avis, aider la personne à résoudre un problème, etc), un soutien instrumental (aide matérielle et financière, assistance technique, etc), un soutien affectif ou émotionnel (favoriser l’expression des craintes, des pensées ou des préoccupations, chercher à réconforter la personne, manifester de l’empathie et de la bienveillance, etc), un rehaussement de l’estime de soi (montrer à la personne qu’elle est estimée, reconnue, acceptée et respectée par les autres) et un soutien lié à l’appartenance (sentiment de reconnaissance, attachement profond envers l’entourage, etc) (Bernad, Zysnarska, & Adamek, 2010; Chalifour, 1999; Rose, 1990).

Le soutien à la famille et aux proches peut aussi aider le patient atteint de cancer qui éprouve l’anxiété de la mort à s’engager dans des rapports d’échanges réciproques (Chalifour, 1999; Flanagan & Holmes, 2000; Naseri & Taleghani, 2012). Impliquer la famille dans le parcours de soins peut contribuer à maintenir la dynamique familiale. À n’en pas douter, la famille peut en fait jouer un rôle important dans l’accompagnement des patients atteints de cancer (expression d’intérêt à l’égard de la santé du patient, communication ouverte, soutien émotionnel, expression d’affection et d’amour, présence rassurante et chaleureuse, etc) (Vrontaras, 2018).

1.6.4 L’accompagnement spirituel

L’évaluation de la dimension spirituelle s’inscrit dans la prise en charge globale des patients atteints de cancer qui éprouvent l’anxiété de la mort. En fait, comme il a été précisé plus haut, vécue comme une menace à leur vie, à leur intégrité et à leur bien-être, il semble que l’anxiété de la mort puisse augmenter la détresse spirituelle de cette clientèle (Neimeyer, 1994).

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Il faut noter que la détresse spirituelle occupe une place centrale dans le discours des soins infirmiers sur la spiritualité (Jobin, 2012). Selon Cicely Saunders, pionnière des soins palliatifs au Royaume-Uni, la détresse spirituelle s’inscrit dans le cadre de la douleur totale (total pain) (Richmond, 2005). Cette douleur totale signifie « que pour celui ou celle qui la vit, la douleur est totale en ceci qu’elle atteint l’être tout entier sans qu’il lui soit possible de dire précisément où elle siège, et de quoi elle se compose » (Schaerer, 2007, p. 163). La détresse spirituelle des patients atteints de cancer peut, de manière générale, se manifester par différents besoins. Taylor (2002) a fourni quatre différentes catégories de besoins spirituels, soit : 1) les besoins liés à soi (le besoin de sens et d’un but dans la vie, le besoin d’espoir, le besoin de dignité, le besoin de développer des habiletés d'adaptation, le besoin de se confier et d’être pardonné, etc); 2) les besoins liés aux autres (le besoin de pardonner les autres et le besoin de s’adapter à la perte des êtres aimés); 3) les besoins liés à la transcendance (le besoin de croire en l’existence de Dieu ou d’une Puissance ultime, le besoin de servir Dieu, le besoin de reconnaître la présence de Dieu à travers l'expérience, etc); et 4) les besoins interpersonnels (le besoin d’être respecté et valorisé, le besoin de comprendre les fonctions et les responsabilités, etc).

Le rôle des infirmières en oncologie ne consiste pas à satisfaire tous les besoins spirituels de la personne atteinte de cancer qui éprouve l’anxiété de la mort. Il s’agit plutôt de l’accompagner dans ce cheminement, en lui fournissant des interventions qui relèvent de son domaine de compétence et de ses responsabilités. L’accompagnement spirituel des patients atteints de cancer qui expérimentent l’anxiété de la mort peut en effet se traduire en plusieurs actions possibles, tels que la présence authentique, la prière, la création d’un climat paisible, inspirer l’espoir, la méditation, l’écoute active, la clarification des valeurs et des expériences du patient, la validation des sentiments, des pensées et des réflexions du patient, le développement d’une relation de confiance, une réponse empreinte d’ouverture aux croyances exprimées par le patient, etc (Taylor, 2002; Taylor & Mamier, 2005).

Tout comme les aspects physique, psychologique et social, la dimension spirituelle apparaît ainsi comme une dimension essentielle pour soulager adéquatement l’anxiété de la mort des patients atteints de cancer, et ce, dans une approche holistique. L’évaluation de la dimension spirituelle chez cette clientèle peut en effet être considérée comme un adjuvant de la relation thérapeutique, en ce qu’elle facilite notamment le maintien au cours du temps de l’estime de soi, donne du sens à tout ce qui est vécu et préserve l’espoir. Il faut préciser que ces interventions font partie intégrante d’une approche humaniste qui souligne l’importance des valeurs humaines, telles que le respect, la gentillesse et l’amour et valorise l’expérience subjective et personnelle du patient et la présence de l’espoir chez ce dernier.

En résumé, le cancer constitue encore aujourd’hui un enjeu de société d’importance. Les interventions des infirmières en oncologie ne cherchent pas uniquement la guérison du patient atteint de cancer, mais elles comprennent aussi l’amélioration de sa qualité de vie. Comme nous l’avons déjà montré dans ce chapitre, l’anxiété de la mort est un phénomène présent chez certaines personnes atteintes de cancer dans des

Figure

Figure 1. Étapes du processus de traduction et d’adaptation transculturelle du DADDS.
Tableau 3. Caractéristiques sociodémographiques des participants de la phase principale de l’étude (n =  28)
Tableau 6. Analyses statistiques effectuées sur l’échelle totale de l’EDM en cas de suppression d’un énoncé (n = 28)
Tableau 7. Niveaux d’anxiété de la mort des participants (n = 28).
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Références

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