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Chapitre 6 : Discussion

6.2 Phase principale : les interventions infirmières et l’anxiété de la mort

6.2.1 Anxiété de la mort et évaluation préliminaire des qualités métriques de l’EDM

L’étude de validation originale du DADDS (Krause et al., 2015) a été réalisée auprès de 59 patients, provenant d’un centre hospitalier de la région de Toronto, atteints de plusieurs types de cancers (tumeur endocrine et cancers du sein, gastro-intestinal, de l'appareil génito-urinaire, gynécologique et du poumon). Il faut préciser que les patients recrutés dans la présente étude présentaient un niveau plus faible d’anxiété de la mort, comparativement à l’échantillon de l’étude de Krause et al. (2015) (M = 25,79; é.t. = 11,58 et M = 34; é.t. = 20, respectivement). Mais cela s’explique probablement par les difficultés de recrutement et la faible taille d’échantillon. Il est fort possible que les personnes atteintes de cancer qui avaient un niveau plus élevé d’anxiété de la mort aient refusé de participer. On doit alors considérer les scores obtenus dans ce projet comme préliminaires. La majorité des participants de la présente étude se situaient à un niveau d’anxiété de la mort léger (n = 18; 64,29%) ou modéré (n = 6; 21,43%). Seulement deux participants (7,14%) affichaient un niveau très faible et deux un niveau élevé (7,14%), alors qu’aucun ne présentait un niveau extrême. Concernant les participants de l’étude de Krause et al. (2015), ils présentaient une plus grande variation d’anxiété de la mort, avec la répartition suivante selon les différents niveaux : très faible (n = 11; 18%), léger (n = 14; 23%), modéré (n = 16; 27%), élevé (n = 13; 22%) et extrême (n = 6; 10%). Ainsi, les participants de la présente étude affichaient peu de variabilité au niveau de l’anxiété de la mort et certaines catégories étaient peu ou pas représentées, contrairement à l’étude de Krause et al. (2015). Ces différences peuvent s’expliquer notamment par les difficultés de recrutement éprouvées dans ce projet. On note en effet

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un très faible taux de participation de 11,43%, tandis que le taux de participation était plus élevé (18,67%) dans l’étude de Krause et al. (2015). Il se peut que les personnes qui éprouvaient des émotions difficiles et de la détresse liée à un niveau d’anxiété de la mort plus élevé aient refusé de participer à la présente étude. Dans ce projet, les deux pensées ou préoccupations qui entraînaient le plus de détresse pour les patients atteints de cancer étaient que la mort puisse « arriver avec beaucoup de douleur ou de souffrance » (énoncé 14 de l’EDM) (m = 2,46; é.t. = 1,58) et « l’impact de ma mort sur mes proches » (énoncé 9 de l’EDM) (m = 2,39; é.t. = 1,20). Tout comme cette étude, l’étude de Krause et al. (2015) montrait que la préoccupation décrite dans l’énoncé 9 du DADDS (« The impact of my death on my loved ones ») était l’une des deux préoccupations les plus inquiétantes (M = 3,3; é.t. = 1,7) pour les patients atteints de cancer. Cette préoccupation était suivie par celle décrite dans l’énoncé 8 (« Being a burden to others ») (M = 2,8; é.t. = 1,7) de cet outil. Les deux préoccupations les plus angoissantes pour les patients recrutés dans l’étude de Krause et al. (2015) étaient donc de nature relationnelle. Les deux préoccupations qui entraînaient le moins de détresse pour l’échantillon de la présente étude étaient les suivantes : « Arriver soudainement ou de façon inattendue » (énoncé 11 de l’EDM) (m = 1,29; é.t. = 1,24) et « les occasions manquées au cours de ma vie » (énoncé 6 de l’EDM) (m = 1,32; é.t. = 1,42). Les résultats de l’étude de Krause et al. (2015) indiquaient que la préoccupation décrite dans l’énoncé 11 (« Happen suddenly or unexpectedly ») du DADDS était également l’une des deux préoccupations par rapport à laquelle les patients ont indiqué éprouver le moins de détresse (M = 1,2; é.t. = 1,6).

Les résultats des analyses préliminaires effectuées sur l’EDM montrent que cet outil présente une bonne consistance interne, avec un coefficient d’alpha de Cronbach de .86 (DeVellis, 2012). La moyenne des corrélations inter-items est de .28 (é.t. = .16), avec des indices de corrélations qui affichent un lien positif allant de faible à modéré tel qu’attendu (à l’exception de deux corrélations négatives, soit les énoncés 2 (« ne pas avoir dit tout ce que je voulais dire aux personnes qui comptent pour moi ») et 13 (« arriver alors que je suis seul »), r = -.09, et les énoncés 8 (« être un fardeau pour les autres ») et 15 (« arriver très bientôt »), r = -.24). De plus, l’indice d’alpha de Cronbach n’augmente pas mais diminue légèrement lorsqu’on supprime des énoncés, ce qui est souhaitable (à l’exception des énoncés 8, 9 ou 13, puisque l’indice d’alpha de Cronbach demeure inchangé lorsqu’on supprime chacun de ces trois énoncés, laissant penser qu’ils contribuent peu à la consistance interne de l’EDM). Ainsi, de manière générale, on constate des qualités métriques préliminaires satisfaisantes pour cet instrument, tout en notant certains indices qui s’écartent des valeurs attendues. Mais étant donné la faible taille d’échantillon et les difficultés de recrutement éprouvées, ces valeurs doivent être considérées comme préliminaires et devront faire l’objet d’autres validations ultérieures.

Les résultats de l’étude de Krause et al. (2015) effectués sur la version anglaise originale du DADDS montraient que cet outil a une bonne consistance interne (α = .95) (DeVellis, 2012), tout en étant plus élevée que celle de l’EDM. Pour obtenir plus d’information au sujet des analyses effectuées sur le DADDS, nous

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avons contacté l’un des auteurs (Dr Christopher Lo) ayant procédé à la validation de cet outil. Le niveau de corrélation entre les énoncés du DADDS variait de faible (r = .23) à élevé (r = .86). Le niveau moyen de corrélation entre les énoncés était élevé (r = .54; é.t. = .13), notamment si on le compare à celui trouvé dans la présente étude. Aucun lien négatif n’a été observé entre les énoncés du DADDS. Enfin, comme mentionné par Krause et al. (2015), en cas de suppression de chacun des 15 énoncés de cet outil, aucun changement substantiel n’a été observé au niveau de la valeur initiale du coefficient alpha de Cronbach, incluant les énoncés 8 et 9.

On note ainsi des différences entre les résultats de la présente étude et ceux de l’étude de Krause et al. (2015) quant aux qualités métriques de l’EDM et du DADDS. De manière générale, l’indice d’alpha de Cronbach et les corrélations inter-items du DADDS sont plus élevés que ceux de la version finale québécoise de cet outil (EDM). Certaines pistes d’explications peuvent être soulevées pour tenter de mieux comprendre ces différences. Tout d’abord, la taille de l’échantillon de cette recherche était plus petite par rapport à celle de l’étude de Krause et al. (2015). De plus, la présente étude a été réalisée auprès d’un échantillon homogène de personnes atteintes uniquement de cancer du poumon, qui présentait peu de variabilité au niveau de l’anxiété de la mort. Également, les critères de sélection spécifiques à cette étude excluaient les patients nouvellement diagnostiqués d’un cancer du poumon et ceux en phase palliative, ce qui n’était pas le cas dans l’étude de Krause et al. (2015). Finalement, on note la présence d’un possible biais de sélection dans la présente étude, en raison du très faible taux de participation. En définitive, il semble nécessaire de poursuivre les recherches pour évaluer et déterminer les qualités métriques de l’EDM, tout en tenant compte des considérations évoquées précédemment pour améliorer ces études, notamment au niveau du recrutement des participants. On peut cependant conclure que les résultats préliminaires obtenus s’avèrent satisfaisants à ce stade-ci, tant au niveau de la consistance interne de l’outil que de la performance de ses énoncés (la majorité des corrélations inter-items sont du niveau souhaité et le retrait de chaque énoncé pris un par un n’améliore pas la consistance interne).