• Aucun résultat trouvé

Education populaire à l’environnement : le dialogue des savoirs et les transformations des modes d’appropriation ethnoécologiques de la nature, vers la durabilité et la résilience ? Le cas des paysans indigènes boliviens de l’ayllu Urinsaya face aux risqu

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Education populaire à l’environnement : le dialogue des savoirs et les transformations des modes d’appropriation ethnoécologiques de la nature, vers la durabilité et la résilience ? Le cas des paysans indigènes boliviens de l’ayllu Urinsaya face aux risqu"

Copied!
625
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: tel-03121030

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-03121030 Submitted on 26 Jan 2021

HAL is a multi-disciplinary open access

archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Education populaire à l’environnement : le dialogue des

savoirs et les transformations des modes d’appropriation

ethnoécologiques de la nature, vers la durabilité et la

résilience ? Le cas des paysans indigènes boliviens de

l’ayllu Urinsaya face aux risques climatiques et à la

dégradation des sols

Boujemaa Allali

To cite this version:

Boujemaa Allali. Education populaire à l’environnement : le dialogue des savoirs et les transformations des modes d’appropriation ethnoécologiques de la nature, vers la durabilité et la résilience ? Le cas des paysans indigènes boliviens de l’ayllu Urinsaya face aux risques climatiques et à la dégradation des sols. Education. Université Paris-Est, 2019. Français. �NNT : 2019PESC0023�. �tel-03121030�

(2)

1 Thèse de doctorat

Domaine : Sciences de l’éducation Réalisée par ALLALI Boujemaa

Education Populaire à l’Environnement :

Le dialogue des savoirs et les transformations des modes d’appropriation ethnoécologiques de la nature, vers la durabilité et la résilience ? Le cas des paysans indigènes boliviens de l’ayllu Urinsaya face aux risques

(3)

2 Remerciements

Je tiens à remercier Marcel Pariat et Pascal Lafont d’avoir encadré et accompagné mon travail de thèse.

Je tiens à remercier également tous les doctorants avec lesquels nous avons discuté et débatu de notre travail de thèse : Hervé Boursiquot, Raphaèl Chadrèque, Théodule Sankara, ect.

Enfin, je remercie Jérome Mbiatong et Florent Acotchou pour toutes les discussions qui ont enrichi ma réflexion.

(4)

3

SOMMAIRE

Introduction : ... 16

Partie 1 : Du projet de thèse à l’émergence de la question de départ ... 19

A/ Le travail de recherche de Master et le choix de l’Education Populaire en Bolivie dans le projet de thèse ... 19

I/ Le choix de l’Education populaire ... 19

1. Le stage de master 2 en Bolivie ... 19

2. L’intérêt suscité par l’EP pendant le stage ... 20

3. La construction d’une posture critique face à l’EP ... 23

4. Le choix du terrain de recherche en Bolivie ... 25

B/ Le choix des questions environnementales dans les dispositifs de l’Education Populaire ... 26

1. La médiatisation des questions environnementales ... 26

2. Les défis de l’éducation à l’environnement ... 27

3.L’EP et les questions environnementales : l’EPE ... 28

C/ Le choix de l’agriculture parmi les questions environnementales : quelle pertinence pour le projet de recherche ? ... 30

I/ La diversité de ses questions environnementales et de ses enjeux ... 30

1. Les questions environnementales ... 30

2. Les enjeux du développement ... 31

3. Les liens entre les enjeux de l’agriculture et les objectifs de l’EP ... 31

4. La question des savoirs locaux des paysans ... 33

D/ La fixation de la question de départ : réflexions, enjeux et justifications ... 34

(5)

4

1. La polysémie du concept « développement durable »... 35

2. L’EPE et la durabilité ... 36

3. L’agriculture durable et l’EPE ... 38

II/ La question de la conscientisation et du changement social ... 40

III/ La question de l’innovation et de la diffusion agricole ... 44

1. Définition du concept « innovation » ... 44

2. L’EPE et la question de l’innovation ... 45

IV/ La question de départ : pertinence et limites ... 47

1. La justification de la pertinence de la question de départ ... 47

2. Les limites de la question de départ ... 49

E. La recherche exploratoire ... 50

I/ La première étape de la recherche documentaire : ... 50

1. La recherche documentaire en lien avec la délimitation du terrain de recherche ... 51

2. La recherche documentaire en lien avec le contexte des paysans pauvres de Bolivie. ... 52

II/ Les entretiens exploratoires ... 55

1. Les objectifs et la méthodologie des entretiens ... 55

2. Les conditions de réalisation des entretiens ... 57

3. Présentation des personnes interviewées ... 61

III/ Les observations ... 62

1. Les objectifs et la méthodologie de l’observation ... 62

1.1 Les objectifs ... 62

1.2 La méthodologie ... 62

2. Description des objets et du contexte d’observation ... 64

2.1 La visite d’observation des communautés de l’ayllu Urinsaya ... 64

2.2 La visite de la « feria » de Pongo ... 66

2.3 La visite d’obersvation de trois communautés de la municipalité de Huarina ... 66

(6)

5

IV/ La seconde phase de la recherche documentaire : les pistes nouvelles

ou à approfondir ... 68

1. Les risques climatiques ... 69

2. La vulgarisation agricole et l’adoption de l’innovation ... 70

3. Le contexte des communautés de l’Ayllu Urinsaya ... 72

4. Le modèle de l’agroécologie ... 73

Partie 2 : le contexte des paysans indigènes de l’ayllu Urinsaya : entre permanences et changements ... 74

A/ les enjeux et les défis de l’agriculture mondiale ... 74

I/ Les questions actuelles ... 74

1. La croissance démographique et la demande alimentaire mondiale ... 74

2. Les menaces des dégradations environnementales sur l’agriculture et le demande alimentaire mondiale ... 76

II/ Les Politiques et modèles agricoles depuis la fin de la seconde guerre mondiale ... 76

1. Le modèle productiviste ... 76

2. Les modèles alternatifs au productivisme ... 77

III/ L’agriculture, la sécurité alimentaire et la pauvreté dans les pays en développement : enjeux et défis ... 78

1. La pauvreté et la sous-alimentation affectent surtout les paysans... 78

2. Les causes de la pauvreté et de la sous-alimentation des paysans ... 79

B/ Agriculture, paysans et développement rural en Bolivie ... 80

II/ Le contexte rural des paysans indigènes boliviens ... 80

1. Des conditions naturelles contraignantes pour les agriculteurs boliviens 80 1.1 Les sols ... 80

1.2 L’agrobiodiversité ... 82

1.3 Les ressources hydriques et les changement climatiques ... 82

1.4 La Disponibilité de l’eau, changements climatiques, la production agricole et la sécurité alimentaire : enjeux et défis ... 84 1.4.1 Disponibilité de l’eau, changement climatique et production agricole 84

(7)

6

1.4.2 Changements climatiques et sécurité alimentaire ... 85

2. La situation démographique de la population rurale ... 86

3. Les principales données économiques sur l’agriculture ... 86

4. Les populations rurales face à des inégalités socio-économiques très marquées ... 87

4.1. Description des principales inégalités socio-économiques ... 87

4.2 Les enjeux des inégalités socio-économiques pour les populations rurales ... 88

5. Les structures agraires : quelques données générales... 90

5.1 La concentration des exploitations agricoles et la marchandisation des terres ... 90

5.2 Une majorité de parcelles individuelles au détriment de la propriété communale ... 91

III/ Les politiques agraires ... 92

1. les politiques agraires de 1953 à 2005 ... 92

1.1 Etat des lieux de la situation agraire avant la réforme de 1953 ... 92

1.2 La réforme agraire de 1953 ... 93

1.3 Les politiques néolibérales de 1985 à 2005 ... 94

1.4 La réforme agraire de la loi INRA (1996) ... 95

2. Les politiques agraires mises en place par le MAS depuis 2005 ... 96

2.1 La poursuite incomplète de la politique des terres de la loi INRA ... 97

2.2 La loi de la Révolution productive communautaire agricole (2011) ... 99

2.2.1 Les finalités de la loi ... 99

2.2.2 Les questions environnementales et écologiques de l’agriculture ... 101

2.2.3 La formation et les processus d’innovation des paysans ... 103

2.2.4 La reconnaissance des peuples indigènes ... 105

2.3 Les politiques publiques de gestion des risques climatiques et d’adaptation ... 108

2.3.1 Bref historique : ... 108

(8)

7 2.3.3 Le Plan Stratégique pour le secteur agricole de gestion du risque et

d’adaptation au changement climatique (2012) ... 111

IV/ L’agriculture paysanne et indigène ... 113

1. Definitions ... 114

2. Une typologie de l’agriculture paysanne indigène bolivienne ... 116

2.1 « les producteurs de subsistance » ... 116

2.2 Les petits producteurs de matières premières subordonnés à l’agrobusiness ... 117

2.3 Les petits producteurs spécialisés orientés vers le marché interne ... 117

3. L’organisation socio-politique et culturelle des communautés paysannes indigènes ... 118

3.1 L’héritage historique ... 118

3.2 Les autorités indigènes traditionnelles ... 120

3.3 Les syndicats agraires ... 121

C/ Les paysans de l’Altiplano face aux risques climatiques et à la dégradation des sols... 122

I/ Les concepts du risque, de la menace et de la vulnérabilité ... 122

1. Les risques ... 122

2. Les menaces ... 122

3. les vulnérabilités ... 123

II/ Les menaces climatiques sur l’Altiplano bolivien ... 126

1. L’identification et la description des menaces climatiques ... 126

1.1 Les inondations ... 126

1.2 La sécheresse ... 126

1.3 Les gelées ... 126

1.4 La grêle ... 127

2. Des menaces climatiques inégales dans le temps et l’espace ... 127

3. Les effets des menaces climatiques ... 128

4. Les changements climatiques : des menaces plus imprévisibles ... 129

(9)

8

4.2 Les effets des changements climatiques ... 129

III/ Les différentes formes de vulnérabilité des paysans ... 131

1. La vulnérabilité naturelle, écologique, physique ... 131

2. La vulnérabilité économique et sociale... 132

3. La vulnérabilité politique et institutionnelle ... 133

3.1 La vulnérabilité politique : la centralisation gouvernementale des politiques d’adaptation aux risques climatiques ... 133

3.2 La vulnérabilité institutionnelle ... 134

4. La Vulnérabilité éducative : une politique de prévention insuffisante . 135 IV/ Les différentes stratégies des paysans face aux risques climatiques et à la dégradation des sols ... 137

1. Les stratégies traditionnelles défensives ... 138

1.1 Les bio-indicateurs : l’épreuve de la prédiction du climat ... 139

1.2 Les stratégies de la dissémination des risques et de la diversité... 141

1.3 Les limites et les défis des stratégies traditionnelles : les savoirs locaux à l’épreuve des transformations socioéconomiques et environnementales ... 143

1. Les nouvelles stratégies ... 145

1.1 La formation, l’innovation et l’« Empowerment » ... 146

1.2 Les nouvelles formes d’organisation des paysans ... 149

1.3 Les solutions de l’agriculture productiviste ... 149

1.4 La diversification des activités économiques ... 150

D/ Le cas des communautés paysannes de l’ayllu Urinsaya ... 151

I/ Le contexte de l’ayllu Urinsaya ... 151

1. Les conditions naturelles ... 151

2. Les caractéristiques sociodémographiques des paysans de l’ayllu ... 152

3. L’organisation sociopolitique et l’identité culturelle ... 154

3.1 Les autorités indigènes et syndicales ... 154

3.2 Les relations de réciprocité ... 155

3.3 Les fêtes traditionnelles ... 156

(10)

9 5. Les savoirs paysans liés à la gestion des risques climatiques et des sols 159

5.1 Les principales caractéristiques des savoirs paysans indigènes ... 159

5.2 Le cas des bioindicateurs ... 162

II/ Les formations à l’agroécologie et aux risques climatiques : une nouvelle stratégie des paysans de l’Ayllu Urinsaya ... 163

1. La description du modèle de l’agroécologie ... 163

2. Les programmes de formation de la fondation AGRECOL ... 164

2.1 Le programme « Gestion des Risques Agricoles Communale » (GRAC) ... 165

2.1.1 La genèse du programme ... 165

2.1.2 Les finalités et les contenus pédagogiques des formations ... 167

2.2 Le programme « Fertilisation des sols » ... 170

Partie 3 : La problématique et les hypothèses ... 175

A/ La problématique ... 176

I/ La construction de la problématique ... 176

1. Les problématiques possibles autour des champs de transformations de l’EPE ... 176

1.1 Les transformations sociopolitiques et socio-environnementales ... 177

1.2 Les transformations culturelles ... 180

1.3 Les transformations technologiques ... 181

1.4 Les transformations de la recherche agronomique ... 181

2. La justification du choix des transformations des modes d’appropriation ethnoécologique de la nature... 182

2.1 Les programmes d’EPE d’AGRECOL ... 183

2.2 Les risques climatiques et la dégradation des sols ... 186

3. Les problématiques possibles autour de la transformation des modes d’appropriation de la Nature : quel(s) déterminant(s) ? ... 187

3.1 Les stratégies éducatives ... 188

3.2 Les caractéristiques individuelles des apprenants ... 190

(11)

10

4. Le choix du dialogue des savoirs ... 192

4.1 Le dialogue au centre de la démarche éducative et pédagogique d’AGRECOL... 193

4.2 Le dialogue au centre des principes de l’EP et de l’EPE ... 195

4.3 La transmission traditionnelle des savoirs des peuples indigènes par le dialogue ... 196

4.4 L’évolution des paradigmes de la recherche agronomique, de la vulgarisation agricole et le principe de la participation ... 197

4.5 Le changement climatique et le dialogue des savoirs ... 200

II/ Les approches théoriques et l’explicitation de la problématique ... 203

1. L’approche sociopolitique de l’éducation : la conception politico-pédagogique de Freire ... 205

1.1 La situation d’oppression des catégories populaires... 206

1.2 Eduquer au changement ... 208

1.3 Les liens entre l’approche sociopolitique de l’éducation et les transformations socio-environnementales ... 211

2. L’approche pédagogique de Freire : le dialogue comme facteur de transformation des savoirs et de la réalité ... 212

2.1 L’ « éducation bancaire » et de la diffusion agricole classique : les rapports de pouvoir de domination ... 214

2.2 Le dialogue critique, problématisant, conscientisant, créateur et transformateur ... 216

2.3 Le dialogue et les étapes du processus éducatif ... 221

2.3.1 Partir de la réalité des apprenants : le dialogue et la « recherche de l’univers thématique » ... 221

2.3.2 Le dialogue et la conscientisation critique ... 223

2.3.3 Le dialogue et la problématisation critique de la réalité ... 224

2.3.4 Le dialogue et les actions de transformation de la réalité ... 230

3. La pédagogie du dialogue des savoirs et la durabilité (l’EPE et E. Leff) ... 232

3.1 Les théories de l’EPE : la reconfiguration du système de savoirs, le dialogue des savoirs et la durabilité ... 234

(12)

11

3.1.1 La reconfiguration du système des savoirs ... 234

3.1.2 La pédagogie du dialogue des savoirs et la durabilité ... 235

3.2 Le dialogue des savoirs, la rationalité environnementale et la durabilité plurielle ... 237

3.2.1 La question des savoirs au centre des crises environnementales ... 237

3.2.2 Le dialogue des savoirs pour construire des durabilités plurielles .... 238

4. L‘approche ethnoécologique de l’appropriation de la Nature ... 241

4.1 Les savoirs locaux des peuples indigènes ... 242

4.1.1 La justification du choix du concept « savoir local » ... 242

4.1.2 Définition et origine du concept « Savoir local » ... 243

4.2 La description de l’approche ethnoécologique de l’appropriation de la nature ... 246

4.2.1 L’approche ethnoécologique de V.M. Toledo et N. Barrera-Bassols 247 4.2.2 L’approche ethnoécologique et l’objet de la recherche ... 248

B/ Le modèle d’analyse de la recherche ... 250

1.L’hypothèse principale ... 251

1.1 L’hypothèse principale ... 251

1.1.1 La signification de l’hypothèse principale ... 251

1.1.2 Opérationnalisation du concept « dialogue des savoirs » : variables et indicateurs ... 253

1.1.3 Opérationnalisation du concept « appropriation ethnoécologique de la nature » : les variables et indicateurs ... 256

2. Les sous-hypothèses ... 258

2.1 La première sous-hypothèse ... 258

2.2 La deuxième sous-hypothèse ... 263

2.3 La troisième sous-hypothèse ... 270

2.4 La quatrième sous-hypothèse ... 273

Partie 4 : La méthodologie de la recherche et les résultats ... 278

A/ La méthodologie de la recherche ... 278

(13)

12

1 Une recherche de type causale et relationnelle ... 278

2 Une méthode de recherche qualitative ... 280

3 Une démarche multi-référentielle et interdisciplinaire ... 282

4 Le terrain de recherche et l’échantillonnage ... 284

4.1 Le terrain de recherche ... 284

4.2 L’échantillonnage ... 285

II Les outils de recueil de données ... 287

1 Les entretiens semi-directifs avec les paysans et les agents d’AGRECOL ... 287

1.1 Justification et objectifs des entretiens semi-directifs ... 287

1.2 La construction du guide d’entretien ... 288

1.3 Le profil des publics ... 289

1.4 Les modalités pratiques des entretiens semi-directifs ... 290

2. Les autres outils recueil de données... 291

2.1 La recherche documentaire ... 291

2.1.1 Les documents institutionnels ... 291

2.1.2 Les productions pédagogiques des paysans ... 292

2.1.3 Les photographies ... 293

2.2 Les notes du chercheur ... 293

3. Les limites de la méthodologie de recueil de données ... 294

3.1 L’absence de mobilisation de la technique d’observation ... 294

3.2 Les contraintes des entretiens semi-directifs ... 294

4. La méthode d’analyse des données qualitatives ... 295

B/ Les résultats ... 297

I. Un dialogue des savoirs intermittent ... 297

1. La place du dialogue des savoirs dans la démarche pédagogique des formations d’AGRECOL ... 297

1.1 Le dialogue des savoirs dans les discours institutionnels de la fondation ... 297

(14)

13 1.2 Une mobilisation inégale du dialogue des savoirs dans la planification

de la démarche pédagogique ... 299

1.2.1 Le programme GRAC ... 299

1.2.2 Le programme fertilisation des sols ... 302

1.3 Une mobilisation inégale du dialogue des savoirs dans la pratiques pédagogiques ... 305

1.3.1 Le programme GRAC ... 305

1.3.2 Le programme « Fertilisation des sols » ... 311

2. La prise en compte de la réalité paysanne par les acteurs externes ... 313

2.1 Une prise en compte incomplète : le cas de la grille d’évaluation des sols 314 2.2 Les thèmes pris en compte par les agents externes ... 316

2.2 Les réalités paysannes non prises en compte par les agents externes320 3. la valorisation des savoirs locaux par les formateurs ... 327

3.1 Une typologie des savoirs locaux valorisés dans les formations ... 327

3.2 Le processus de sélection des savoirs locaux valorisés ... 328

3.3 Les justifications de la valorisation des savoirs locaux ... 335

II La transformation des savoirs, la durabilité et la résilience ... 337

1. Les nouvelles connaissances socioécologiques ... 337

1.1 Les connaissances liées au sol ... 337

1.1.1 Les propriétés des sols : les nouvelles connaissances et la conscientisation sur l’érosion ... 338

1.1.2 Les effets des intrants agrochimiques : la production de connaissances objectives et de la conscientisation ... 346

1.2 Les connaissances liées aux risques climatiques ... 353

1.2.1 La création de nouvelles connaissances sur le pronostic du temps : les bioindicateurs ... 353

1.2.2 Les menaces climatiques ... 361

1.2.2 La vulnérabilité individuelle et communautaire ... 366

1.2.3 La distance entre le cadre cognitif des paysans et les concepts des agents externes ... 369

(15)

14

1.3 La validation de la sous-hypothèse 1 ... 372

1.3.1 La domination des savoirs scientifiques : un obstacle majeur pour la production de connaissances socioécologiques ... 372

1.3.2 Le dialogue favorise le renouvellement des connaissances socio-écologiques et la conscientisation sur la durabilité ... 374

2. L’adoption des nouvelles pratiques agroécologiques ... 376

2.1 Les indices de l’adoption des pratiques agrécologiques ... 378

2.2 Les processus d’adoption des pratiques agrécologiques ... 391

2.2.1 Le partage des bonnes pratiques ... 391

2.2.2 Les expérimentations et les discussions générées ... 396

2.2.3 Les autres processus d’adoption des pratiques agroécolgiques ... 400

2.3 La validation partielle de la sous-hypothèse 2 ... 403

2.4 La validation de la sous-hypothèse 3 ... 412

2.5 La validation de la sous-hypothèse 4 ... 415

2.5.1 Le renforcement de quelques compétences de l’analyse du milieu ... 416

2.5.2 La capacité de résolution de problème ... 420

Conclusion : ... 423

Bibliographie... 426

Annexes ... 442

Annexe 1: les entretiens exploratoires ... 442

Entretien 1.1 ... 443 Entretien 1.2 ... 454 Entretien 1.3 ... 463 Entretien 1.4 ... 474 Entretien 1.5 ... 488 Entretien 1.6 ... 500

Annexe 2 : les entretiens liés à la problématique de la recherche ... 509

Entretien 2.1 ... 510

Entretien 2.2 ... 521

(16)

15 Entretien 2.4 ... 537 Entretien 2.5 ... 546 Entretien 2.6 ... 556 Entretien 2.7 ... 565 Entretien 2.8 ... 576 Entretien 2.9 ... 581 Entretien 2.10 ... 588

Annexe 3 : autres documents ... 598

3.1 Document méthodologique du plan « GRAC » (Quispe, Aguilar, 2010) ... 599

3.2 Les cartes participatives modélisées : les menaces climatiques dans la communauté de Chunu Chununi ... 601

3.3 Les documents pédagogiques sur les bonnes pratiques ... 605

3.4 Photographies réalisées par les paysans sur leurs parcelles affectées par la grêle ... 621

3.5 Photographies de l’actvité de l’évaluation de la biomasse sur les parcelles expérimentales ... 623

(17)

16

Introduction :

Le travail de thèse s’inscrit dans la continuité du travail de recherche, qui fut réalisé dans le cadre du Master 2 Sciences de l’Education, en 2009-2010, et qui portait sur un dispositif d’Education Populaire, en Bolivie. Le dispositif étudié était destiné à former des individus, vivant dans des quartiers populaires des grandes villes, à la participation citoyenne. Le travail de thèse n’aborde pas la construction des compétences citoyennes, telles qu’elle a été étudié dans le travail de recherche de master 2, mais des compétences liées à l’agriculture durable. En effet, je souhaitais orienté l’objet d’étude la thèse vers les questions environnementales, et en particulier celles qui concernent l’agriculture car elle cette activité concentre des enjeux et défis considérables. Ces derniers le sont d’autant plus pour les paysans pauvres et vulnérables, qui sont les principales victimes des changements climatiques (GIEC, 2014). Le choix du terrain d’étude s’est orienté vers les paysans vulnérables de l’agriculture familiale, qui vivent sur l’Altiplano bolivien. Le questionnement de départ qui émergea fut le suivant :

Les processus d’EPE peuvent-ils permettre aux paysans de l’agriculture familiale de l’Altiplano de renforcer leurs capacités à construire des solutions durables face à leurs problématiques environnementales, sociales, politiques et culturelles ? Dans quelle mesure ?

Le terrain d’étude porte précisément sur des communautés indigènes ( quechuas), qui appartiennent à la « tribu » ( « ayllu » en quechua) Urinsaya, et qui vivent dans le département de Cochabamaba. Ces paysans ont suivi plusieurs formations, depuis les années 1990, avec des acteurs issus du modèle productiviste et/ou avec ceux qui défendent l’agroécologie. Ce sont donc des paysans qui vivent dans des zones géographiques enclavées et marginalisées, mais qui sont aussi ouverts à des influences extérieures. Le terrain d’étude ne concerne pas tous ces paysans, mais seulement ceux qui ont suivi un des deux programmes de formation en agroécologie, mis en place par la fondation

(18)

17 AGRECOL Andes. Ces programmes sont les suivants : « Gestion des Risques Agricoles Communale » (GRAC) et « La fertilisation des sols ». Ces derniers visent à construire des compétences en agroécologie afin de répondre aux risques climatiques et à la dégradation des sols. Ce sont des programmes qui mobilisent la démarche éducative dialogique, issue des mouvements de l’Education populaire (Freire, 1970), de la « IAP » ou « Recherche-Action-Participation (Fals borda 1992), et du « De Campesino a campesino » (Holt-Gimenez, 2006). Le travail de thèse analyse la mobilisation du dialogue dans les formes pédagogiques (utilisées par les formateurs de la fondation AGRECOL) et leurs liens avec la construction de formes d’appropriation de la nature durables et résilientes. Les réferences théoriques mobilisés dans l’analyse sont multiples, elles s’appuient sur les idées éducatives de Freire (1970, 1973), sur la conception du dialogue des savoirs du mouvement de l’EPE (Education Populaire à l’Environnement) et d’E. Leff (2004 (a) (b)), sur l’approche ethnoécologique de la nature de Toledo (2008), sur la psychologie de l’enironnement (Weiss et al., 2006).

(19)
(20)

19

Partie 1 : Du projet de thèse à l’émergence de la question de départ

A/ Le travail de recherche de Master et le choix de l’Education Populaire en Bolivie dans le projet de thèse

I/ Le choix de l’Education populaire

1. Le stage de master 2 en Bolivie

Dans le cadre du master 2 en Sciences de l’Education à l’UFR SESS de Créteil, j’ai réalisé un stage de six mois (mars-septembre 2010) dans un réseau d’organisations sociales, nommé UNITAS, à La Paz, en Bolivie. Ce stage a donné lieu à la construction d’un travail et d’un mémoire de recherche. En mars 2010, je n’avais pas encore pris la décision de commencer un travail de thèse de doctorat, ce dernier constituait une éventualité parmi d’autres projets professionnels.

Ma mission de stage consistait à réaliser le suivi et l’évaluation d’un programme de formation politique, destiné à des personne impliquées ou travaillant dans des organisations sociales, situées dans des zones urbaines populaires des six plus grandes villes de Bolivie. L’objectif du programme était de former des « leaders » politiques capables de porter et de défendre les revendications des zones urbaines populaires, auprès des institutions publiques. Le programme s’appuyait sur une démarche socio-politique et pédagogique, empruntée au mouvement socio-éducatif de l’Education populaire, qui s’est développé en Amérique Latine, à partir des années 1960. Le mouvement de l’Education populaire n’est pas un mouvement centralisé, planifié et organisé par des acteurs sociaux. Il correspond davantage à un ensemble d’acteurs issus des mouvements sociaux latino-américains diverses (organisations ouvrières, paysannes, indigènes, citoyennes, etc…), qui décident d’utiliser des principes éducatifs, pédagogiques et sociopolitiques largement inspirés des textes de Paulo Freire, pour conduire à la conscientisation, l’émancipation et à la transformation de la réalité des catégories populaires.

Pour Freire (1970), la démarche de la pédagogie critique repose sur trois étapes : partir de la réalité des éduqués (leur vie quotidienne, leurs

(21)

20 préoccupations, leurs perceptions du monde, leurs savoirs, etc…), réfléchir de manière critique sur elle et construire des actions pour la transformer. Autrement dit, elle s’appuie sur l’articulation de la pratique avec la réflexion, la théorie. Freire explique que cette démarche établit un dialogue entre la pratique et la réflexion critique. Le dialogue est au centre de cette démarche, elle concerne aussi les interactions entre les éduqués, ou entre ces derniers et les éducateurs. Il défend l’idée de la construction collective de la connaissance grâce au dialogue, il s’inscrit dans les théories socioconstructivistes de l’apprentissage.

2. L’intérêt suscité par l’EP pendant le stage

Au cours des six mois passés dans le réseau UNITAS, j’ai pu découvrir, observer et analyser cette démarche éducative grâce notamment à des entretiens et des séquences d’observation-participante, qui se déroulaient sur des sessions de formation de deux jours. Durant ces cessions, deux postures s’entremêlaient :

j’avais une forte curiosité pour ces dispositifs mais j’avais aussi un regard critique car je réalisais un travail de recherche sur ces dispositifs. Cette double posture avait fortement contribué à mon choix de fixer mon projet de recherche de la thèse sur le mouvement de l’EP.

Ma curiosité émanait de la richesse du dialogue, des interactions sociales utilisées par les éducateurs pour construire les connaissances avec les stagiaires. Elles provenaient des procédés pédagogiques utilisés pour favoriser la participation de chaque participant, en s’appuyant par exemple sur des éléments de la culture populaire (le théâtre de rue, les programmes de radio, les chants populaires, etc…). Les éducateurs s’appuyaient sur une pédagogie active. Par exemple, au début de chaque séance de formation, ils mettaient en place des jeux de dix minutes ( les « dinamicas ») pour favoriser la confiance, le lien social dans les groupes, et permettre à chacun d’avoir moins peur de s’exprimer en public, ou de participer à une activité. Ils animaient l’activité dite du « mur des lamentations »1 pour faire émerger les préoccupations et revendications des

participants dans leur vie quotidienne, ou encore ils organisaient des travaux de résolution de problème en groupe, avec une présentation finale sous la forme de scènes de théâtre, d’articles de presses, de dessins, etc… Mon projet de thèse

1 Chaque stagiaire reçoit deux fiches pour écrire en quelques mots ce qu’il pense, ensuite chaque fiche est fixée

sur un tableau. Enfin les stagiaires discutent et tentent de classer ces fiches afin d’arriver à une forme de catégorisation.

(22)

21 visait à explorer davantage l’éventail des pédagogies actives inspirées de l’EP afin d’approfondir la compréhension des interactions sociales dans les processus d’apprentissage, leurs conditions d’émergence, leurs formes, leurs effets, leurs freins et leurs limites. Je souhaitais analyser de manière plus précise les rapports aux savoirs des stagiaires et leurs conséquences sur les apprentissages.

Ma curiosité envers l’EP dépassait le cadre des procédés pédagogiques, elle concernait également ses nombreux apports dans les mouvements sociaux d’Amérique Latine depuis les années 1960, et dans la construction de sociétés plus démocratiques et pacifiques face aux régimes autoritaires ou aux dictatures. Le coordinateur régional du CEAAL (Consejo de Educacion de Adultos de America Latina) au Mexique, Lopez (2004, p.100) synthétisa ces apports de la manière suivante : « l’EP a été présent dans les processus de promotion des organisations communautaires et de gestion des mouvements sociaux et a apporté à la genèse, au développement et à la capacité d’action de ces entités organisées de nos sociétés ». Il insistait sur le fait que l’EP fait partie de l’histoire des mouvements sociaux, et qu’il fera partie de son futur si elle parvient à intégrer des approches alternatives, pour faire face aux multiples défis imposés par la globalisation. Il détaillait une série d’apports historiques de l’EP. L’EP a participé activement dans la formation des cadres des organisations sociales2 en relevant qu’une partie de ces dirigeants sociaux ou

communautaires sont devenus des dirigeants politiques , par exemple dans le cadre des partis politiques, de la fonction publique de l’Etat ( dans les affaires concernant les processus électoraux, les Droits humains, etc…) ou territorial. Les éducateurs populaires ont aussi réalisé un travail considérable de promotion des organisations sociales auprès des publics défavorisés et marginalisés (du fait de leur situation géographique ou de leur exclusion sociale, économique et politique) afin de les mobiliser aux changements. Pendant les périodes de transition démocratique des pays latino-américains (depuis les années 1980 principalement), l’EP a favorisé la constitution d’organisations citoyennes autour de la lutte pour le retour à la démocratie, la transparence des processus électoraux et la défense des droits humains. Une partie de ces organisations a ensuite revendiqué davantage de processus de participation des citoyens, dans les institutions démocratiques (c’est le cas au Brésil, où les mouvements sociaux

(23)

22 ont influencé la Constitution de 1988 dans ce sens). L’EP a mené de nombreuses actions de communication et de création culturelle (en s’appuyant sur la diversité des cultures populaires locales), pour conscientiser les catégories populaires, sur des thèmes divers comme les droits humains, la violence, la promotion du vote. La diffusion sociale des principes de la participation a pénétré les organisations mais aussi les écoles, les institutions et programmes gouvernementaux, les entreprises, les institutions religieuses. L’EP a fortement inspiré les pratiques et les principes de l’éducation à l’environnement, aux droits humains, à la paix, à la démocratie, à l’égalité du genre, à l’interculturalité. Lopez (2004) insistait aussi sur les limites de l’action de l’EP et sur les défis qu’elle devait relever, à l’aube du vingt et unième siècle, après les années 1990 marquées par la fin du monde bipolaire, l’accélération des phénomènes de globalisation (culturelle, économique, etc…) ou encore la conférence mondiale de l’ONU sur l’Environnement et le développement, en 1991, à Rio. Les défis qu’il décrivait en 2004 soulignaient déjà les limites de l’action du mouvement de l’EP.

Selon lui, L’EP devrait aider les mouvements sociaux à repenser le politique, sa vision du monde et de la société, à travers une perspective à la fois locale et globale et des échelles (politiques, administratives, économiques…) différentes. Elle devrait montrer la tension et l’articulation entre les contextes, les processus locaux, nationaux et mondiaux. Lopez (ibid.) proposa aux organisations sociales de tisser des liens à l’échelle internationale pour créer des échanges et des espaces de rencontre. Dans cette perspective, l’EP devrait impulser des processus éducatifs pour développer une vision du monde comme un système de connections.

L’EP devrait aussi aider à repenser le paradigme de la transformation sociale : la lutte entre les riches et les pauvres, entre oppresseurs et opprimés telle qu’elle s’exprimait dans la lutte des classes de la théorie marxiste devrait être dépassé car le monde bipolaire (socialisme et capitalisme) n’existe plus. Les nouveaux mouvements sociaux qui apparaissent, depuis les années 1980, mettent en place d’autres paradigmes de la transformation tels que l’égalité des sexes, la reconnaissance des identités culturelles ou indigènes, le commerce équitable, l’économie solidaire, encore la protection de l’environnement. Durant les années

2000, les acteurs de l’EP en Bolivie ont tenté de s’adapter à l’émergence des nouveaux paradigmes des mouvements sociaux. La UNITAS, par exemple a développé plusieurs projets sur la défense des droits et de la culture des populations indigènes (programme NINA), elle a aussi créé un programme de promotion de l’égalité des sexes.

(24)

23

Mon projet de thèse fait écho à ces défis de l’Education Populaire, et notamment aux questions environnementales pour lesquelles j’avais un grand intérêt. Après avoir travaillé surtout sur les questions sociopolitiques

dans un contexte urbain, dans le cadre du master, je souhaitais comprendre comment les organisations sociales, qui intègrent la protection de l’environnement, pourraient utiliser, transposer et /ou transformer les idées de l’EP dans leurs démarches de conscientisation, de sensibilisation et de d’éducation auprès de leurs publics. Je voulais savoir si le mouvement de l’EP disposait d’outils intellectuels, ou pouvait en créer des nouveaux, afin de prendre en compte et d’analyser les questions environnementales avec une approche systémique (interactions entre les sphères écologiques, sociales, culturelles, politiques) multi scalaire (combiner les échelles locale, nationale et globale) et critique (sans tomber dans le militantisme idéologique et écologique). Comment la relation Homme-Nature pouvait-elle être repensée par le mouvement de l’EP ? Mes lectures exploratoires me conduiront à la

découverte d’auteurs, qui ont tenté de construire un cadre conceptuel, à travers ce qu’ils nomment l’Education Populaire à l’Environnement, pour tenter de répondre à ces questions.

3. La construction d’une posture critique face à l’EP

Mon travail de recherche de master m’a permis de construire un regard et une posture critiques face à l’EP, pour dépasser le regard admiratif, que je portais sur cette démarche éducative.

J’avais notamment été surpris par certaines difficultés liées à l’application des idées de l’EP, dans les processus de formation pour adultes. J’avais observé des activités pédagogiques où le dialogue des savoirs était moins présent ou absent. Par exemple, pour expliquer des problèmes socio-économiques ou sociopolitiques de la Bolivie, les éducateurs utilisaient souvent l’approche marxiste. Ces situations conduisaient davantage à la diffusion de dogmes idéologiques qu’a la construction collective d’une lecture critique de la réalité, qui est l’une des finalités éducative dans la démarche de Freire (1970). J’avais également constaté que les contenus du programme de formation politique n’avaient pas été discutés avec les participants, comme le préconise Freire dans son projet d’éducation pour l’émancipation socio-politique3. La première étape

3 Mon tuteur de stage m’avait dit que ce travail avait été réalisé mais il ne m’a jamais donné le compte rendu de

ce travail et mon recueil de donnée (pour le mémoire de master) auprès des stagiaires n’en a trouvé aucune mention.

(25)

24 de la démarche de Freire qui consiste à partir de la réalité des éduqués, pour construire les contenus de l’éducation, n’avait donc pas été appliquée, même si, au cours des séances de formation, les éducateurs interrogeaient la réalité des « éduqués » pour connaitre leurs perceptions et opinions sur leurs problématiques sociales. Mon travail de recherche de master avait conduit à repérer des décalages entre les besoins de formation des dirigeants d’organisations sociales et ses contenus pédagogiques. Ces décalages s’expliquaient en partie par le manque de dialogue entre la UNITAS et les stagiaires, dans la construction des contenus de la formation politique.

De plus, les organisations partenaires de la UNITAS, qui étaient chargées de mettre en place le programme de formation politique dans les villes, se plaignaient du manque de dialogue et de concertation entre elles et la UNITAS. L’une d’entre elles avait même fini par abandonner le programme de formation politique.

Les situations que j’avais observées montraient quelques décalages entre les principes éducatifs de Paulo Freire et le programme de formation politique de la UNITAS, qui s’en inspire. La question du dialogue ne m’apparaissait pas encore comme un objet de recherche pour un travail de thèse, mais elle avait attiré mon attention car j’avais observé des difficultés liées à sa mise en place et son rôle dans le processus éducatif. Tout au plus, je pensais qu’il serait intéressant de réaliser un travail de thèse sur les démarches pédagogiques utilisées dans les organisations sociales, participant au mouvement de l’Education Populaire.

Les problèmes que j’avais observés étaient en relation avec la réflexion critique de Kane (2004) sur le rôle et les défis du mouvement de l’EP. Il s’attaque essentiellement à la relation entre la posture des éducateurs et la question idéologique. A partir de son travail de recherche effectué sur les éducateurs du mouvement de l’EP, il a dégagé leurs différentes orientations idéologiques telles que le nationalisme, le marxisme, le féminisme, la social-démocratie, etc… Il explique que l’orientation idéologique de l’éducateur influence le processus éducatif. Selon lui, elle agit notamment sur sa conception de la conscience critique, sa manière de problématiser la réalité (un nationaliste ne pose pas les mêmes questions qu’une féministe), les contenus de ses paroles qui vont alimenter le dialogue et peuvent influencer les analyses des autres participants. Il ne reproche pas aux éducateurs d’avoir une idéologie précise, mais il critique ceux qui imposent leurs idées aux autres dans le processus éducatif, il s’attaque donc aux conséquences des discours idéologiques sur les pratiques éducatives, aboutissant à des postures de manipulation. Il insiste sur l’absence de débats et de discussions sur la question idéologique dans le

(26)

25 mouvement de l’EP, sur la nécessité de reconnaitre que le terme d’EP se rapporte à différentes courants de pensée et philosophies. Selon lui, les acteurs du mouvement de l’EP devraient reconnaitre qu’il existe en son sein une variété de motivations idéologiques distinctes même s’il existe un compromis dans ce mouvement autour de l’éducation comme vecteur changement politique. Il préconise davantage de recherches sur la relation entre l’orientation idéologique de l’éducateur et ses conséquences sur ses pratiques éducatives.

Mon projet de thèse a pris en considération les observations, les analyses critiques sur l’EP, issues de mon stage de master et de sources documentaires, afin de me détacher d’une posture partisane et admirative qui risquait de nuire à l’objectivité de ma démarche de recherche. Il est à noter que les sources documentaires critiques sur le mouvement de l’EP ne sont pas très nombreuses (la revue Piragua reste une des exception, elle a consacré plusieurs articles sur l’héritage et les activités de l’EP), la plupart insiste davantage sur ses apports et ses effets positifs sur l’émancipation des populations locales.

4. Le choix du terrain de recherche en Bolivie

Plusieurs raisons expliquent le choix de la Bolivie pour mon terrain de recherche. Tout d’abord j’avais réalisé mon stage de master en Bolivie, j’avais construit une connaissance solide du contexte (social, politique, culturel, etc…) bolivien et un réseau de professionnels travaillant dans le cadre de l’EP, qui était susceptible de me fournir l’accès à des informations et à des ressources humaines utiles pour travail de recherche. Je connaissais les espaces qui offraient de la documentation sur les activités de l’EP et le contexte bolivien : les libraires spécialisées, les centres de documentation des ONG (par exemple celui de la CENDA) et les bibliothèques universitaires

De plus, le Bolivie est un pays où le mouvement de l’EP est très présent à travers la formation pour adultes, dans différentes domaines : la démocratie, la citoyenneté, la défense des droits indigènes, des femmes, des paysans, des ouvriers, etc… Je pouvais donc avoir accès à une multitude de processus éducatifs et un terrain de recherche très riche en expériences et en activités liées à l’EP. Cette richesse s’expliquait en partie par l’absence de politiques publiques forte dans ces domaines. Les activités de l’EP se développaient donc pour combler cette absence, dans des espaces extérieurs au système éducatif public.

(27)

26 Elles apparaissaient comme des espaces de formation alternatifs et d’émancipation sociopolitique. A partir de 2005, le pouvoir politique ( au niveau local et national) en Bolivie est concentré entre les mains du MAS, un parti qui avait aussi pour objectif l’émancipation sociopolitique des catégories populaires, ce public constituant une grande parte partie de sa base électorale. Ce contexte me conduisait à m’interroger sur la possibilité de l’Etat bolivien à collaborer avec les acteurs de l’EP pour améliorer les conditions de vie des catégories populaires. Les nouvelles politiques sociales, économiques, culturelles, agricoles, sanitaires allaient-elles signifier une disparition progressive des activités du mouvement de l’EP ? Une nouvelle phase de coopération ? A ce sujet, mon tuteur de stage de master m’avait confié son inquiétude concernant la participation politique des catégories populaires. Il constatait, à travers son activité professionnelle, que cette participation politique se réduisait car les catégories populaires feraient entièrement confiance aux réformes gouvernementales du MAS pour améliorer leurs conditions de vie. La présence du MAS au pouvoir questionnait donc la présence, le rôle et l’activité des acteurs de l’EP. Leur rôle avait été essentiel dans la formation des dirigeants des organisations sociales, qui se sont mobilisées pour lutter contre les gouvernements libéraux dans les années 1990 et la première moitié des années 2000. Ces mobilisations sociales avaient conduit à l’arrivée au pouvoir du MAS en 2005. Les apports de l’EP ont été importants dans les bouleversements sociopolitiques que la Bolivie a connus dans les années 2000. Mais je souhaitais savoir si le mouvement de l’EP était capable de répondre à de nouveau défis, tels que ceux énumérés par Lopez (2004) et notamment celui des questions environnementales. Cette réflexion allait constituer une étape essentielle dans la construction de mon projet de thèse et de ma question de départ.

B/ Le choix des questions environnementales dans les dispositifs de l’Education Populaire

1. La médiatisation des questions environnementales

En septembre 2011, après la soutenance de mon mémoire de master, j’ai commencé à réfléchir de manière plus précise sur mon projet de thèse. A cette date, les questions environnementales étaient très médiatisées, de nombreuses émissions de radio et de télévision traitaient ce thème. Pendant les années 2000

(28)

27 de nombreux livres (Hulot 2006, Brown 2007) destinés au grand public furent publiés autour des thèmes environnementaux. Moi-même, je fus sensibilisé par tous ces médias sur ces questions à partir du milieu des années 2000. Face à ce nouveau flux d’informations, il était difficile de construire une position critique car les phénomènes environnementaux étaient complexes, imprévisibles, parfois mal connus, et les connaissances liées à ces phénomènes faisaient l’objet de débats et controverses (notamment la question des changements climatiques). En tant qu’enseignant d’histoire-géographie, je fus interpelé par la gravité des impacts des activités humaines sur l’environnement (par exemple les impacts sanitaires de l’utilisation des pesticides ou du diesel), par les mécanismes irréversibles du changement climatique4, par la dégradation rapide de la

biodiversité et des ressources naturelles (en particulier l’eau pour un certain nombre de zones géographiques) qui interrogeait la pérennité des modèles économiques à l’échelle de la planète. Face à l’ampleur et à la complexité de ces phénomènes, l’éducation à l’environnement me paraissait être confrontée à de nouveaux défis majeurs.

2. Les défis de l’éducation à l’environnement

Il me semblait intéressant d’observer comment elle pourrait répondre à ces défis. Mes interrogations furent les suivantes : Les objectifs de l’éducation à l’environnement vont-ils évoluer ? Quelles démarches pédagogiques seraient adaptées aux nouveaux défis environnementaux comme celui du changement climatique ? Comment lier les questions écologiques, sociales et économiques dans ces processus éducatifs ? Comment éduquer à des phénomènes complexes avec un esprit critique? Qui doit ou peut assurer l’éducation à l’environnement ? Etc...

La question de l’éducation à l’environnement s’est alors imposée dans mon projet de thèse mais aussi dans mes perspectives professionnelles. Je souhaitais, après le travail de thèse, participer à la construction de processus éducatifs pour répondre à l’ampleur des défis environnementaux. Et le projet de thèse me permettrait de mieux comprendre ces processus éducatifs, ses effets, ses limites mais aussi de favoriser la construction d’une posture critique pour ne pas tomber dans le piège de l’enfermement idéologique qui peut découler de la posture du militant écologiste.

4 Dans les années 2000 par exemple, les connaissances scientifiques sur les causes, les mécanismes et les impacts

du changement climatique progressent, une partie provient du troisième (2001) et du quatrième (2007) rapport du GIEC.

(29)

28

3.L’EP et les questions environnementales : l’EPE

La question de départ se précisait, je souhaitais que mon projet de thèse aborde les questions environnementales et l’Education Populaire. J’ai réalisé des recherches documentaires pour savoir s’il existait des processus d’Education Populaire impliqués dans les questions environnementales en Amérique Latine et particulièrement en Bolivie. Cette recherche m’a permis de comprendre que les acteurs de l’Education Populaire (EP), à partir des années 19605, ont

progressivement intégré des questions environnementales dans leurs réflexions (Tréllez, 2006 a.) mais sans collaborer avec les acteurs de l’Education Ecologique, qui s’occupaient uniquement des questions écologiques, à travers une approche conversationniste. Le mouvement de l’EP tenta alors de lier les questions du développement à celle de l’environnement. Les relations entre ces deux mouvements d’Education se développèrent à partir des années 1970, les acteurs de l’EP ont tenté de promouvoir, au sein du mouvement de l’Education Ecologique, la prise en compte des problématiques socio-politiques afin de réfléchir davantage sur les liens Société-Nature. L’éducation à l’environnement en Amérique Latine, en tant que mouvement social et démarche éducative, se construit à partir de ces interactions, des expériences de l’EP, de l’Education Communautaire et participative6 et de l’Education Ecologique, elle a une

composante militante et engagée dans le changement social, la transformation des modèles économiques de développement (Tréllez, 2006 A.). Elle émerge à partir de ces apports latino-américains et mais aussi à partir des réflexions issues des différentes conférences de l’ONU sur les questions environnementales (la première se déroula en 1972, à Stockholm).

Au milieu des années 1990, se produit une nouvelle expérience autour de la création du réseau REPEC (Red de Educación Popular y Ecología) par le CEAAL (Consejo para la Educación de Adultos de América Latina). Ce réseau réunit des acteurs (chercheurs, pédagogues, éducateurs) de l’EP et de l’EE dans le but d’étudier les convergences entre les problématiques sociopolitiques et environnementales. Leurs travaux ( Reyes 1994, Castro 1994, etc…) conduisent

5 Cela coïncide avec les débuts de la médiatisation des problèmes écologiques à travers le monde et des

mouvements sociaux promouvant la protection de la Nature tels que les organisations écologistes ou le mouvement hippie.

(30)

29 à l’élaboration d’un nouveau concept : l’Education Populaire à l’Environnement (EPE)7.

Reyes (1994) explique que l’EPE est une synthèse des approches écologiques de l’EE et des approches sociopolitiques de l’EP. Cette synthèse ne correspond pas à la seule addition de deux démarches, elle est plus complexe : elle inclut l’idée de transformer le système des savoirs et les paradigmes de la connaissance pour aboutir à une compréhension renouvelée de l’environnement et à des relations harmoniques dans le système Société-Nature. Leff (1995) précise que l’EPE va au-delà de l’EP pour créer de nouvelles forme de construction, de transmission et d’appropriation des savoirs, cela implique alors la nécessité d’introduire dans les sciences de l’Education les concepts de l’environnement et de l’analyse de la complexité, les méthodes de l’interdisciplinarité, transformant ainsi les pratiques pédagogiques. Catsro (1994) parle de processus formation permanent pour évoquer l’EPE, depuis une perspective politique, combinant des éléments théoriques et pratiques. L’objectif est de modifier les attitudes, d’améliorer la compréhension et d’enrichir le comportement des catégories populaires dans ses relations socioculturelles et avec le milieu biophysique, dans la perspective de la construction de sociétés durables.

Outre ces reflexions, la REPEC a impulsé le Programme Latino-Américain de formation d‘éducateurs populaires à l’environnement dans de nombreux pays tels que l’Uruguay, l’Argentine, le Brésil, etc..(Gaudiano, 2001).

Ma recherche documentaire m’a permis de confirmer mon choix de projet de thèse liant l’Education populaire et les questions environnementales car elle a révélé leurs interactions historiques en Amérique Latine, depuis les années 1960. Les questions environnementales à l’échelle du monde et de l’espace latino-américain étant nombreuses, il me paraissait nécessaire d’en choisir une pour pouvoir préciser davantage l’objet de recherche de la thèse. Les questions qui m’intéressaient étaient liées aux ressources naturelles (leurs accès et leurs différentes formes gestion), au changement climatique (notamment leurs impacts sur les sociétés humaines), aux interactions entre la biodiversité et les activités humaines et aux différentes formes de pollution.

(31)

30

C/ Le choix de l’agriculture parmi les questions environnementales : quelle pertinence pour le projet de recherche ?

I/ La diversité de ses questions environnementales et de ses enjeux

La lecture de deux documents m’a conduit à me diriger vers la question agricole, ce sont l’ouvrage de Griffon (2006) et le rapport de la Banque mondiale sur le développement dans le monde (Banque Mondiale, 2008). La lecture de ces documents m’a amené à comprendre que la diversité des questions environnementales, dans le domaine de l’agriculture, ne pouvait traitée indépendamment de ses questions socio-politiques, économiques et culturelles.

1. Les questions environnementales

L’agriculture n’était pas un thème auquel j’avais pensé pour mon projet de thèse, c’est en parcourant l’ouvrage de Griffon (ibid.), que je me suis rendu compte de la diversité des problématiques environnementales, sociales, politiques, économiques et culturelles de l’agriculture mondiale. Griffon y décrivait les différentes formes de dégradations environnementales qui

affectaient l’agriculture mondiale : érosion, pollutions et appauvrissement des sols, difficultés d’accès à la terre et à l’eau pour les paysans, changement climatique, processus de déforestation et de sécheresse, perte de biodiversité, etc…Il analysait leurs enjeux pour l’agriculture mondiale, la lutte contre la

pauvreté, la sécurité alimentaire et la sous-alimentation des paysans, bref des

enjeux de développement. Il insistait sur le défi complexe que devait relever l’agriculture mondiale qui consiste à augmenter sa production et à assurer la

sécurité alimentaire mondiale dans un contexte de dégradations environnementales accrues et d’accroissement démographique rapide à l’échelle de la planète, avec une estimation de la population mondiale située entre 9 et 11 milliards d’habitants en 2050 ( ibid.). Cette analyse me fit prendre conscience de la richesse, de la diversité et des enjeux des problématiques environnementales de l’agriculture. L’agriculture m’apparut alors comme un thème à la croisée de nombreuses questions environnementales fondamentales, et notamment celles qui m’intéressaient et que j’ai énumérées auparavant, à savoir les ressources naturelles, le changement climatique, la biodiversité et les pollutions. Elle était également à la croisée des enjeux écologiques, socio-politiques, économiques et culturels tels que la lutte contre la sous-alimentation et la pauvreté, leur manque

(32)

31 de représentation politique et les différentes formes de dévalorisation de l’identité, de la culture et des savoirs paysans.

2. Les enjeux du développement

Après la lecture de l’ouvrage de Griffon, j’ai consulté d’autres ouvrages (Dufummier 2011, Treyer 2011) sur l’agriculture mondiale qui confirmaient la complexité et l’importance de ses défis. Un document m’avait particulièrement intéressé, c’était le rapport de la banque mondiale sur le développement dans le monde, rédigé en 2008. Il insistait sur une statistique fondamentale : les trois quarts des populations pauvres dans les pays en développement vivent dans des zones rurales, soit 2,1 milliards de personnes qui survivent avec moins de 2 dollars par jour, la plupart tirant leur subsistance de l’agriculture. M. Griffon (2006) cite une statistique en relation avec la précédente : plus de 800 millions de personnes situées dans les pays en développement souffrent de sous-alimentation, parmi celles-ci 600 millions vivent de l’agriculture sur un petit lopin de terre ou même sans terre.

Ces statistiques montrent le poids de l’agriculture dans les questions de développement, en particulier dans la lutte contre la pauvreté et la faim. Le rapport de la banque mondiale (2008) rappelle que l’agriculture contribue au développement en tant qu’activité économique et moyen de subsistance, « des estimations réalisées à partir d’un échantillon de pays montrent que l’augmentation du PIB due à l’agriculture est au moins deux fois plus efficace dans la réduction de la pauvreté que l’augmentation du PIB due à d’autres activités économiques » (Banque Mondiale 2008, p7). Il recoupe aussi l’analyse de M. Griffon sur la dévalorisation sociale du monde paysan, particulièrement celui de l’agriculture familiale à l’échelle mondiale, sur son manque de poids politique qui a facilité l’émergence des politiques publiques plus favorables au pouvoir d’achat et à la sécurité alimentaire des populations urbaines.

3. Les liens entre les enjeux de l’agriculture et les objectifs de l’EP

(33)

32

Les enjeux écologiques, socio-politiques, économiques, culturels de l’agriculture présentaient des liens étroits avec les objectifs socio-politiques de l’EP tels que l’émancipation sociale et politique des catégories populaires

pour satisfaire leurs besoins, la valorisation de leurs différentes formes de savoirs. J’ai décidé de commencer une recherche documentaire pour savoir si les acteurs de l’EP avaient bien traité des problématiques agricoles, paysannes ou rurales (en Amérique Latine et en Bolivie) car j’avais une connaissance des actions de l’EP limitées aux zones urbaines. J’ai découvert que Paulo Freire s’était engagé dans les processus d’alphabétisation du monde rural au Brésil, pays dans lequel s’est développé le mouvement social « Sin tierra » (Sans Terre), qui luttait pour l’accès des paysans pauvres de l’agriculture familiale à la terre, et qui reposait en grande partie sur les démarche d’éducation et de conscientisation de l’EP. Freire (1973) avait aussi développé une réflexion sur la diffusion agricole pour favoriser les réformes agraires, à partir des principes de l’EP, et notamment ceux du dialogue et de la communication entre les paysans et les promoteurs agricoles (les agronomes).

J’ai parcouru le site internet du réseau UNITAS car j’avais de vagues souvenirs sur ses programmes destinés au monde rural, j’avais travaillé uniquement sur des problématiques urbaines. La UNITAS développait plusieurs programmes socio-politiques reposant sur la démarche de l’EP, à l’intention des paysans indigènes, pour favoriser leur conscientisation, leur lutte contre la pauvreté, leur accès à la terre, leur accès aux droits politiques et la défense de leurs cultures. La relecture de mon mémoire de master m’avait aussi permis de rappeler le rôle essentiel joué par les organisations paysannes, au début des années 2000, dans les mouvements sociaux qui ont conduit à l’élection de premier président indigène, en Bolivie. Ces organisations avaient élaboré, dans le monde rural, des actions de sensibilisation et de conscientisation inspirées des méthodes de l’EP (source) pour porter les revendications des paysans indigènes.

Une recherche documentaire sur internet m’avait montré qu’il existait de nombreux dispositifs d’EP destinés aux paysans boliviens. L’un d’entre eux était « La plataforma del suelo » ( la plateforme du sol ), un réseau qui regroupait différentes organisations sociales, syndicales, indigènes et paysannes du monde rural bolivien. Cette plateforme avait pour but de conscientiser ces organisations et de former ses dirigeants sur les questions de l’accès à la terre en utilisant les principes éducatifs de l’EP.

(34)

33 L’ensemble de ces recherches me démontrait l’existence de nombreux processus de conscientisation des paysans de l’agriculture familiale8, en

Amérique Latine, mis en place par surtout par des acteurs de la société civile (organisations paysanne, indigènes, syndicales, des ONGs nationales ou internationales) et qui s’inspirent des principes de l’EP ou de ceux de la Théologie de la Libération. Ces processus de conscientisation du monde rural se sont développés et continuent de se développer en dehors du système de l’éducation formelle, ce sont essentiellement des dispositifs d’éducation non formelle.

4. La question des savoirs locaux des paysans

Une expérience issue de ce stage a eu un effet important sur la construction de l’objet de la recherche de mon travail de thèse autour de l’agriculture. La directrice du réseau UNITAS m’avait proposé de participer à une session de formation sur les méthodes de recherche-action, organisée par une autre institution sociale de La Paz et destinée aux acteurs qui travaillent dans les dispositifs d’Education Populaire. Le matin de cette journée de formation, j’ai rencontré une éducatrice qui évoquait la disparition progressive des savoirs traditionnels des paysans indigènes. Elle évoquait notamment les savoirs traditionnels qui étaient liés à la gestion des risques climatiques. Ce problème m’avais interpelé et lorsque je suis retourné à mon lieu de stage, j’ai discuté de cela avec une bénévole du réseau UNITAS. Elle connaissait cette problématique et quelques jours plus tard, elle m’avait apporté un livre qui la décrivait et qui faisait l’éloge de ces savoirs indigènes. J’ai lu ce livre (Regalsky, 2010) et découvert les savoirs traditionnels des paysans de l’Altiplano sur les risques climatiques. Par exemple, cet ouvrage décrivait comment les paysans prévoyaient le temps et fixaient la date des semailles à partir de l’observation du comportement des plantes, des animaux et du mouvement des astres. Ces savoirs étaient au centre des stratégies de gestion des risques climatiques, et avaient donc une portée considérable sur les rendements agricoles, car ce sont eux qui déterminent la date des semailles, dans un contexte climatique incertain et extrême. Regalsky analysait les causes de l’érosion de ces savoirs.

(35)

34 J’avais été surpris par leur diversité, leur richesse et surtout par leur originalité parce que ce n’était pas des savoirs scientifiques, universels. J’avais une forme d’admiration pour ces savoirs car je me demandais comment des savoirs non scientifiques pouvaient être aussi efficaces. En effet, c’était ces savoirs qui, pendant des siècles et dans des conditions naturelles extrêmes, avaient permis aux paysans indigènes de pratiquer l’agriculture, de subvenir à leurs besoins, de faire vivre leur communauté.

J’étais persuadé que la question de la disparition progressive de ces savoirs pourrait constituer un objet de recherche intéressant pour un projet de thèse car elle impliquait directement la survie et la pérennité des communautés paysannes indigènes. Ma posture admirative était remise en cause par mes interrogations et mes doutes. Je m’interrogeais sur les liens entre la disparition des savoirs traditionnels et le changement climatique. Ces savoirs pouvaient-ils encore fonctionner face aux changements climatiques ? La préservation de ces savoirs constituait-elle une réponse afin que les paysans puissent d’adapter aux changements climatiques ?

A cet instant je n’avais pas de réponses à ces questions ( car je n’avais lu qu’un livre avec une approche « partisane » des savoirs traditionnels) et je n’avais pas encore construit de liens avec l’Education populaire, ils se construiront pendant ma recherche exploratoire mais le processus de questionnement et de réflexion avait commencé.

D/ La fixation de la question de départ : réflexions, enjeux et justifications

Les choix qui viennent d’être explicités m’ont amené à construire mon travail de thèse autour de plusieurs thèmes : l’Education Populaire à l’Environnement, l’agriculture, les paysans pauvres de Bolivie et leurs préoccupations socio-politiques, environnementales et économiques. Je souhaitais comprendre comment les processus d’EPE tentent de répondre aux préoccupations socio-politiques, environnementales, économiques des paysans boliviens pauvres de l’agriculture familiale. J’ai précisé cette réflexion pour aboutir à une question de

Références

Documents relatifs

MOLDOVA - Université de médecine et de pharmacie « Nicolae Testemiteanu » ROUMANIE - Université des Sciences Agricoles et Médecine Vétérinaire de Cluj-Napoca. GEORGIE

Les acteurs de votre traitement : Votre rôle d’acteur, c’est : VOUS ÊTES UN ACTEUR DU CIRCUIT DU MÉDICAMENT.. Indiquer les médicaments que vous prenez à votre médecin et à

Pour vous procurer un carnet de suivi AVK : demandez à votre pharmacien ou à votre médecin.. AP-HM – Réalisation SCQIP – Validation COSEPS – Juin 2013 plaquette phamacie3_Mise

En consultation d’anesthésie, vous pouvez poser toutes les questions sur votre anesthésie à l’anesthésiste.. Participer au choix de votre

[r]

Pour éviter les erreurs de transfusion, de médicaments, de chirurgie, d’examen, … je donne correctement mon identité. Mon identité de naissance est la seule

Pour éviter les erreurs de transfusion, de médicaments, de chirurgie, d’examen, … je demande et je vérifie l’identité des patients dont j’ai la charge. L’identité de

Pour signaler les évènements indésirables associés aux soins!. rendez-vous