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L’espace et ses usages : quels enjeux dans le territoire de l’Axe-Seine au

4.3 Les zones naturelles protégées, appellations d’ori- d’ori-gines contrôlées (AOC) et protégées (AOP) : des

4.3.2 Les zones naturelles protégées : l’Axe-Seine un territoire au patrimoine naturel exceptionnel

Aux oppositions potentielles liées à l’implantation des technologies de CTSC dans un es-pace périurbain, à celles liées aux impacts d’un tel dispositif technique sur l’image d’un produit, s’ajoute selon nous une troisième source d’opposition potentielle : la protection des milieux na-turels exceptionnels. Ici ce n’est plus l’image d’un produit qui est atteinte, mais l’image d’un territoire. Ce dernier pouvant mobiliser celle-ci afin de développer l’activité touristique par exemple. Pour identifier des espaces de ce type dans l’Axe-Seine, nous avons localisé les parcs naturels régionaux ainsi que les Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques, Faunistiques et Flo-ristiques (ZNIEFF). Comme nous disposons de peu d’informations concernant l’éventuel tracé d’implantation de ces infrastructures, nous avons privilégié la localisation de ces deux types d’espaces naturels protégés car ils ont une emprise au sol relativement importante. Avec l’évo-lution du projet et la précision du tracé des infrastructures, nous pensons toutefois qu’une attention aux réserves naturelles ou aux zones Natura 2000 sera nécessaire.

Parc des Boucles de la Seine Normande, Parc du Vexin Français : deux parcs naturels régionaux sur le territoire de l’Axe-Seine.

Selon le dictionnaire de l’urbanisme (Merlin et Choay 2000, p. 570-573), les parc naturels régionaux (PNR) ont plusieurs objectifs. Ils doivent à la fois contribuer à la sauvegarde du patrimoine naturel et culturel, mais aussi à la détente des populations des villes voisines et à l’aménagement des espaces ruraux. Une charte élaborée par la région, et soumise à la com-mission interministérielle des parcs régionaux permet l’agrément d’un parc pour une dizaine d’années. Elle fixe à la fois les limites d’un parc, ainsi que les objectifs du parc en termes de protection de l’environnement, de protection du paysage ou de lutte contre les nuisances. Un non-respect de cette charte conduirait à un retrait de l’agrément du PNR. La carte suivante (Figure 30) représente le nord du territoire français. Deux parcs naturels régionaux sont locali-sés au cœur de l’Axe-Seine : le Parc Naturel Régional des Boucles de la Seine Normande et le Parc Naturel du Vexin Français.

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Le parc naturel régional des boucles de la Seine Normande s’étend sur 82 000 hectares. Une population de 80 000 habitants réside au sein du parc (PNR Boucles de la Seine Nor-mande 2014, p. 8.). Sa particularité est sa très grande proximité entre les deux pôles urbains de Rouen et du Havre. Cette proximité entraîne une pression des activités économiques sur le milieu naturel. Les auteurs de la charte de gestion du parc évoquent notamment les activités d’extraction du granulat dans la vallée de la Seine. Selon eux sensibiliser les entreprises aux im-pacts environnementaux des activités économiques est crucial. Le rôle de ce parc est de concilier ces différentes activités en préservant le milieu naturel et le cadre de vie (Op. cit., p. 8). Le parc naturel régional du Vexin Français s’étend quant à lui sur 71 062 hectares (PNR du Vexin Français 2007, p. 7). Il se caractérise à la fois par des paysages naturels marqués par des grandes cultures (blé, orge, colza), mais aussi un patrimoine naturel et architectural préservé. Chaque village du parc du Vexin français possède un ou plusieurs monuments protégés au titre des monuments historiques11. Ce parc se situe aux portes de l’agglomération parisienne. De fait, il doit faire face à la pression foncière et maîtriser cette urbanisation afin de conserver l’ar-chitecture typique des bourgs ruraux (Op. cit., p. 10). Les auteurs de la charte du Parc Naturel Régional du Vexin Français insistent également sur la nécessité de réglementer l’exploitation des carrières (Op. cit., p. 29), mais aussi d’accompagner la gestion des déchets.

Au-delà de leurs spécificités respectives, l’existence de ces deux parcs naturels régionaux in-duira probablement des contraintes réglementaires vis-à-vis de l’implantation des technologies de captage, transport et stockage du CO2. Comme nous l’avons signalé, la mission des parcs est de protéger un patrimoine rural et naturel exceptionnel. En tant qu’ infrastructures indus-trielles, l’utilisation des technologies de CTSC semble peu cohérente avec les valeurs défendues par les parcs naturels régionaux davantage proches de la ruralité et du patrimoine naturel. Nous faisons donc l’hypothèse que les valeurs intriquées dans les technologies de CTSC associées au monde industriel, et celles défendues dans les parcs naturels régionaux sont peu compatibles. Nous estimons que les enjeux relatifs aux impacts environnementaux du stockage géologique de CO2 feront l’objet d’un débat dans l’éventualité d’une implantation des technologies de CTSC au sein de ces parcs naturels, ces derniers étant chargés de protéger ce milieu.

Les Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques Faunistiques et Floristiques dans l’Axe-Seine.

L’inventaire des Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques Faunistiques et Floristiques (ZNIEFF) a été lancé en 1982. Il est actuellement disponible sur le site internet de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel. Cette institution est gérée par le Muséum National d’Histoire Naturelle et plus précisément par son service Patrimoine Naturel12.

L’inventaire des ZNIEFF a pour objectif de décrire et d’identifier des secteurs de fortes ca-pacités biologiques et un bon état de conservation. Il joue un rôle clé dans la politique de protection de la nature et doit être consulté avant de réaliser des opérations d’aménagement du

11. http ://www.pnr-vexin-francais.fr/fr/le-parc/territoire/ Consulté le 16 juin 2015. 12. http ://inpn.mnhn.fr/partenaires/organisme-gestionnaire. Consulté le 17 Juin 2015.

territoire13. Les experts du Muséum National d’Histoire Naturelle distinguent deux types de Zones Naturelles d’Intérêts Ecologiques Faunistiques et Floristiques (Elissalde-Videmont et Horellou 2007). Le premier type de ZNIEFF est défini ainsi :

« Secteurs de superficie en général limitée, définis par la présence d’espèces, d’as-sociations d’espèces ou de milieux rares, remarquables ou caractéristiques du patri-moine naturel national ou régional » (Op. cit., p. 22).

Les auteurs de ce document précisent ensuite que ces zones doivent être des unités écologique-ment cohérentes et abriter obligatoireécologique-ment une espèce, ou un habitat remarquable rare justifiant d’une valeur patrimoniale plus élevée que les milieux environnants. Ces ZNIEFF de type 1 sont par exemple des formations végétales de taille réduite (pelouses, prairies, bois de ravin, marais), des espaces accueillant plusieurs espèces rares ou remarquables, ou encore des zones étendues de fort intérêt patrimonial homogène (massifs forestiers).

Les ZNIEFF de type 2 sont quant à elles définies ainsi par les experts du Muséum d’Histoire Naturelle :

« Grands ensembles naturels riches ou peu modifiés, ou offrant des potentialités biologiques importantes ». (Op. cit., p. 23)

Ils précisent ensuite que ces zones contiennent des milieux naturels formant un ensemble avec une cohésion élevée. Ces zones prennent par exemple en compte les territoires des espèces animales à grand rayon d’action (rapaces, oiseaux migrateurs, grands mammifères) ou encore, les zones abiotiques naturelles permanentes ou transitoires très faiblement anthropisées. Ils citent notamment la très haute montagne, les zones volcaniques actives ou les éboulis instables (Op. cit., p. 23-25).

La carte suivante (Figure 31) représente les Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques Faunistiques et Floristiques présentes dans l’Axe-Seine.

Sur cette représentation cartographique nous observons que la surface des ZNIEFF est plus importante en aval de l’Axe-Seine qu’en amont. Cette carte montre aussi que ces zones longent la vallée de la Seine jusqu’à Paris. Par ailleurs, au nord-ouest et au sud-ouest de cette agglomération nous observons aussi des surfaces importantes faisant partie de Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques Floristiques ou Faunistiques. Au regard des incertitudes relatives aux impacts environnementaux des technologies de CTSC, l’implantation de ces infrastructures dans ce type d’espace serait susceptible d’entraîner des oppositions, notamment de la part des associations de défense de l’environnement.

Figure 31 – Les Zones Naturelles d’Intérêts Écologiques Faunistiques et Floristiques dans l’Axe-Seine.

Les dimensions observées jusqu’ici montrent que les usages de l’espace dans le territoire de l’Axe-Seine sont multiples. A chacune de ces dimensions sont associés des enjeux particuliers relatifs à la protection de l’environnement, l’économie locale ou encore, la préservation du cadre de vie. Bien qu’une utilisation de ces technologies dans le territoire soit pertinente au regard de la part des émissions de CO2 industriel dans ce territoire (36,7%), il ne faut pas minimiser les contraintes relatives à l’implantation de ces infrastructures. Pour compléter cet état des lieux initial, intéressons-nous aux enjeux révélés par de précédents débats publics ayant eu lieu dans l’Axe-Seine.

4.4 Les débats publics dans l’Axe-Seine : révélateurs

d’en-jeux territoriaux.

Le débat public tel qu’il existe en France est une exception européenne (Subra 2014, p. 284). Cette procédure est instaurée par la loi Barnier de 1995, et complétée par la loi relative à la loi « Démocratie de proximité » de 2002 (Op. cit., p. 284-285). Cette dernière modifie le seuil des projets susceptibles de faire l’objet d’un débat public. Avant 2002, seuls les projets d’intérêt national portés par un maître d’ouvrage public pouvaient faire l’objet de cette procédure. Suite à la loi de 2002, les projets de taille plus réduite (coût supérieur à 150 millions d’euros et infrastructures linéaires à partir de 20 km) peuvent faire l’objet d’un débat public, bien qu’il ne s’agisse pas d’une obligation réglementaire. En revanche, la loi de 2002 introduit l’obligation

réglementaire d’organiser un débat public pour les projets d’un coût supérieur à 300 millions d’euros et 40 km pour les infrastructures linéaires (Op. cit., p. 294-295).

Pour Subra (Subra 2014), l’instauration de la procédure du débat public répondait avant tout à la nécessité pour l’État de reprendre la main et de poursuivre l’aménagement du territoire dans un contexte de plus en plus conflictuel. Selon ce géographe, il s’agissait d’anticiper les oppositions avant la procédure d’enquête publique et la déclaration d’utilité publique d’un projet (Op. cit., p. 288-289). Cependant, comme le souligne Subra, le débat public est un moment du conflit d’aménagement où il est possible de faire bouger les lignes pour chacun des acteurs en présence. Ces rapports de force exprimés par les acteurs en présence s’inscrivent dans des rapports sociaux antérieurs et postérieurs au débat. L’issue d’un débat public est par exemple décisive pour l’image d’un maître d’ouvrage. Comme le rappelle Subra par exemple, EDF ne poursuit pas son projet de ligne THT Boutre-Carros afin de préserver son image sur le plan national (respect de la démocratie et protection de l’environnement), dans la perspective d’autres aménagements (Op. cit., p. 302-303).

Au regard de ces propos introductifs, s’intéresser aux précédents débats publics dans l’Axe-Seine se justifie pleinement. L’analyse de ces débats nous permettra identifier à la fois les acteurs impliqués, mais aussi de comprendre les enjeux territoriaux soulevés par ces derniers. Ainsi, dans l’éventualité de l’implantation des technologies de CTSC éclairerons-nous les rapports de forces et les enjeux territoriaux dans l’Axe-Seine. Bien que source partielle d’informations14, les cahiers d’acteurs réalisés lors de ces débats nous permettrons de comprendre ces enjeux et ces rapports de forces.

Dans un premier temps, nous donnerons un aperçu général des projets ayant fait l’objet de débats public dans l’Axe-Seine depuis 2003. Puis dans un second temps, nous nous focaliserons sur trois projets d’aménagement qui participent pleinement à la construction de l’Axe-Seine.

4.4.1 Le débat public : une procédure davantage utilisée en