• Aucun résultat trouvé

Chapitre VII. Les acteurs de la diversité culturelle se racontent

Niveau 3 (a) Individuel

I. La voix des gestionnaires

Nous allons mettre en perspective la voix des gestionnaires à travers des entrevues effectuées avec trois membres de l’équipe de direction ; la haute direction et deux gestionnaires de deux différents départements. Les trois gestionnaires ont en commun le fait qu’ils ont vécu des expériences professionnelles internationales avant d’intégrer l’Organisation. Ce que nous avons constaté lors des rencontres est que, afin de nous expliquer la diversité culturelle, les gestionnaires l’abordent à travers un prisme externe (Asie, Amérique du Sud, Afrique). Les rencontres avec le management étaient ainsi caractérisées par un mouvement de « push and pull ». À chaque fois que nous voulions ramener la discussion sur l’interne de l’Organisation, les répondants poussaient le sujet vers l’extérieur du contexte organisationnel.

I.1. La haute direction, une large expérience internationale

Le Gestionnaire principal possède une riche connaissance de la diversité culturelle grâce à son expérience internationale. Il a travaillé sur plusieurs continents. Parlant quatre langues, le gestionnaire estime que les langues servent à instaurer une meilleure interaction avec l’autre. Pour lui, elles constituent : «Une façon de

s’ouvrir et c’est une expérience d’humilité ». Professionnellement, elles représentent un atout pour les fonctionnaires internationaux : « Tu as un certain

avantage et tu te positionne dans une situation où tu t’entends mieux avec les gens avec qui tu travailles ».

Ce répondant nous a accordé la toute première entrevue. Elle s’est effectuée en français dans son bureau et a duré une heure et demie de temps. Elle a été enregistrée et retranscrite intégralement par la suite. Voici un extrait de la rencontre.

170

Je viens d’une culture qui cherche le consensus. Le [pays duquel il vient] sont des sociétés féministes. En France, je vois qu’on cherche le conflit (…) En réalité chercher le « consensus » m’a toujours facilité les choses. Je n’ai jamais eu des problèmes pour que je dise que culturellement ça ne va pas (…) En réalité, nous sommes tous dans le même bateau et il faut trouver les meilleures façons pour avancer (…) Mais là, nous sommes dispersés et malgré la petite taille de l’[Organisation], nous avons 35 nationalités à peu près et je ne compte pas toutes les doubles nationalités.

Discutant de la gestion de la diversité culturelle, le répondant a précisé :

Il y a une identité, mais elle n’est pas exprimée ici. (…) Et par conséquent, moi je trouve la gestion de tous ces employés plutôt facile (…) Nous sommes tous humains et ce qui est important c’est de voir l’autre personne comme un être humain et le respecter dans son humanité.

Partageant son avis sur les politiques organisationnelles, le gestionnaire principal a dit :

Si on y met l’accent [sur l’identité], cela veut dire que les choses peuvent aller de

l‘autre côté. Il faut être conscient des dimensions concrètes. Il ne faut pas spécifier par la race, le genre, etc, car spécifier trop, je ne sais pas si c’est le chemin correcte. Mais ce qui est important c’est de savoir qu’il y a une dimension culturelle qui influence parfois fortement le comportement des gens et leur action.

Concernant les problèmes rencontrés lors de l’exercice de sa fonction de manager, le répondant a invoqué l’inexistence de difficultés due à la culture internationale qui prime dans ce type d’organisations. En effet, malgré la présence de multiples nationalités, la neutralité identitaire des employés se fait ressentir dans les propos du gestionnaire. Par ailleurs, en réponse à la question sur « le temps et l’énergie consacrés à la gestion de la diversité culturelle », il avoue ne pas y dédier beaucoup d’efforts. Faisant un lien avec son identité culturelle, il affirme qu’il préfère temporiser les conflits afin de créer un environnement propice au travail. La vision du répondant en est donc une qui favorise un traitement basé sur l’égalité et le respect de l’altérité.

171

I.2. Gestionnaire 2, expert développement des données134

L’entrevue avec ce gestionnaire de langue maternelle anglaise, s’est déroulée intégralement en anglais, à l’exception de quelques phrases. Elle a duré 53 minutes et s’est effectuée dans son bureau. L’entrevue a principalement porté sur la tolérance linguistique envers les employés qui ne parlent pas la langue anglaise. Voici un extrait.

People work in the International Organizations for different raisons. Among them, missions objectives; save the World, improve the life of everybody as disadvantaged people (...). There is also the financial and tax benefits. But if people are taking advantages only of these benefits, they won’t be happy for long. I think the interesting part is the prestige of working for an International Organization. But we have to know that in many OECD (Organisation de

Coopération et de Développement Économique) countries, if you say the Unesco it

is not well recognized. Instead, in the developing countries, there, the name of Unesco is many stronger, it has a recognition factor. It depends of people where they come from and their backgrounds.

En réponse à la question sur le temps et l’énergie alloués à la gestion des membres de la diversité culturelle, le répondant a souligné :

It depends (...) from a management point of view, to run the organisation, the tasks can cause complexities. Part of our site you have is to be more sensitive to the culture, interacting, seeking for feed-back, collaborating. But at the end, it makes us stronger. You have to be more conscious when you make communication and you have to be more precise (...) People find ways to communicate. You don’t have to be perfect (...)When you do some team building exercise, for some cultures, it is very difficult to sollicitate feed-back from some people, because of their culture.

Pour ce qui est de la question sur les politiques organisationnelles concernant la diversité culturelle, le répondant a dit : It helps people to know the acceptable and

not acceptable behaviour in the Organisation, so I think it is important.

134 Nous soulignons que nous n’avons pas adopté le vocabulaire de l’Organisation concernant les fonctions des répondants, pour des raisons de confidentialité.

172

Pour ce gestionnaire la diversité culturelle ne constitue pas un frein. Plutôt, elle renforce la dynamique professionnelle ; « Make us stronger ». Seulement, pour lui, il y a des difficultés dont il faut être conscient pour bien gérer les membres de la diversité culturelle. Parmi elles, il mentionne, la langue. En outre, la diversité culturelle exhorte à faire preuve de sensitivité culturelle et d’être plus conscient des différences culturelles, comme dans l’animation des réunions.

I.3. Gestionnaire 3, psychologue, conseiller

C’est une entrevue par téléphone que nous avons réalisée avec ce gestionnaire. Européen, le répondant a vécu plusieurs années en Afrique du nord avant de faire partie de l’Organisation. Parlant quatre langues, l’entrevue a duré plus qu’une heure, réalisée en anglais et en français, dont voici un extrait.

Diversity is an obligation in the sense of recruitment. The difficulty in hiring is to find somebody who has strong professional qualifications, having experience for Africa, for instance and corresponding to the sense of balance. I think the last thing is who fit the job. We account of culture, origin and background too. We may find someone who has strong qualifications and suitable for the position (...) I like culture language. For me, the World can mean differently, to understand the way people operate and the real meaning of the World, it means different mentalities.

Concernant la question sur le temps et l’énergie alloués à la gestion de la diversité culturelle, le gestionnaire a précisé :

On ne peut pas être quelqu’un qui n’est pas. Je suis ouvert dans ma façon de gérer. Elle laisse voir que je ne suis pas quelqu’un qui se fâche (…) Il faut être ouvert. Il faut être conscient des différences culturelles et, en termes de gestion, les traiter comme des individus (…) Je ne suis pas quelqu’un qui voit les conflits, Il faut trouver le moyen de travailler avec tout le monde (….) C’est mieux de ne pas rester dans les préjugés culturel, sinon on peut tomber dans le racisme.

173

Le gestionnaire a dit préférer l’expertise à la culture dans les pratiques de recrutement de la diversité culturelle. Cette dernière prend beaucoup de signification chez le répondant qui la définit à partir du prisme de la langue. En outre, il a reconnu le rôle de l’histoire et de l’expérience dans le construit de la diversité culturelle. Il a appelé à s’écarter des clichés culturels liés aux pays car pour lui, la culture change : « Les Asiatiques sont maintenant plus ouverts » et qu’il faut être flexible face à ces transformations culturelles.