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Contributions et limites de la revue de la littérature critique sur la diversité

Chapitre II. Le cadre conceptuel: Épistémologie bi-disciplinaire

I. 4.1.1.2 Linguistique/Symbolique

I.5. Contributions et limites de la revue de la littérature critique sur la diversité

I.5. Contributions et limites de la revue de la littérature critique sur la diversité

Nous avons examiné la recherche organisationnelle sur la gestion de la diversité. Il s’agit de réfléchir sur la contribution des différentes théories de management qui se sont intéressées à la gestion de la diversité dans l’organisation. Quoique cette revue de la littérature apporte une richesse pour la poursuite de notre propos, elle englobe aussi des limites, que nous exposons dans ce qui suit.

I.5.1. La contribution pratique

L’étude critique que nous venons d’effectuer nous informe sur le sens que l’Organisation, sujet d’étude, octroie à la diversité à travers la terminologie, la dimension et la pratique qu’elle met en place pour la gérer. Dans cette perspective,

34Considérant le mandat des organisations internationales, on ne saurait réduire le discours sur la diversité uniquement à une tendance éthique. Bien que les organisations internationales a sans but lucratif ont une mission humanitaire qui dépasse l’enjeu économique, on ne peut se dispenser de l’économie pour atteindre ses objectifs.

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il sera question de comprendre l’angle d’intérêt sur lequel se construit la diversité dans l’Organisation.

En effet, la revue de la littérature portera notre attention sur la formulation privilégiée par l’Organisation pour aborder la diversité. Il sera question alors de savoir si elle focalise sur la catégorisation, qui objectivise les membres de la diversité ou si elle reconnaît leur expérience subjective pour une meilleure gestion. Par ailleurs, il sera question de savoir si la pratique de la diversité est déterminée par une approche morale ou si elle privilégie une logique économique qui s’inspire du « Business case for diversity » ou encore si elle combine les deux approches (Prasad et al., 2006).

I.5.2. Limites : universalisme des théories en management

La critique la plus fondamentale qui intéresse notre propos concerne la suppression du volet culturel dans les travaux du domaine organisationnel sur la diversité. Comme le soulèvent Jack et al., (2008), lorsque la diversité est utilisée, elle peut se référer, automatiquement, à une pratique occidentale, voire américaine, qui atteste du « parochialism of U.S management theory » (p. 873). D’une perspective théorique, même si les acteurs de la diversité sont redevables aux études critiques qui lui octroient une légitimité éthique dans l’organisation, grâce à l’approche morale (Moral case for diversity), la culture demeure tout de même négligée, sinon ignorée. Voilà ce qui constitue de l’exclusion à nos yeux. Soulignons dans cette perspective, qu’une de nos références principales : «Handbook of Workplace Diversity» (2006), fait l’impasse sur la culture, à l’exception d’un article35.

35 Mir, R., Mir, A., et Wong, J. D. (2006). « The Cultural Logic of Global Capital », dans The Handbook of Workplace Diversity, sous la dir. Alison Konrad, Pushkala Prasad et Judith Pringle, London: Sage Publications, p. 167-188.

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Dans cette perspective, Feely et Harzing (2003) portent à notre attention l’absence de la diversité des langues dans les théories de management (p. 48). Elles énoncent à ce propos: « We believe that companies underestimate the importance of

language as a management issue » (p. 41). Dans cette littérature, la langue

anglaise assume un rôle universel. Elle est considérée comme celle qui facilite les interactions interpersonnelles dans l’organisation (Feely et Harzing, 2003). En revanche quand il s’agit des langues autres, elles sont automatiquement associées à la barrière communicationnelle à cause des mauvaises interprétations et des incompréhensions qu’elles peuvent générer (Brett et al., 2006). Stuart Hall (2008) propose même qu’un sentiment conflictuel interne émergerait dans l’interaction avec le « différent » à cause de la carence de ses outils de compréhension : « Négocier avec la différence de l’autre révèle toujours l’insuffisance radicale de

son système de sens et de signification » (p. 396). Ainsi, peu nombreuses sont les

études en management qui ont fait de la langue une problématique organisationnelle qui mérite d’être examinée et gérée afin d’améliorer les relations intra-organisationnelles.

Comme le soulignent Yeganeh et Su (2006) en négligeant l’élément culturel36, les

théories de management ne laissent pas de place aux individus en tant que tels pour développer une réelle complicité entre les différentes identités culturelles :

The idea that any kind of cultural difference is necessarily

subversive to organizational performance is an oversimplification that fails to take account of synergetic interactions between two different cultures (p. 370).

D’une perspective praticienne, l’approche du « Business case for diversity » a aussi regardé la culture en termes de danger. En effet, les conseillers chargés de mettre en pratique les meilleures stratégies pour gérer la diversité, ont entamé leur

36 Dans ce paragraphe, nous avons associé la culture à la langue afin de mettre en perspective la carence de l’intérêt des études en gestion de la diversité pour la culture. Il est toutefois important de souligner qu’il existe d’autres aspects dans la culture à part la langue comme les traditions ou les modes de vies.

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mission en l’abordant comme élément déstabilisant dans l’interaction entre les employés, C’est pourquoi Hannerz (1992) a qualifié les bureaux de formation de : «Culture-shock prevention industry » (p. 51-52, cité par Søderberg et Holden, 2002 : 105). Dans cette logique, la culture se présente comme un obstacle qu’il devient urgent d’outrepasser.

Partant de ce constat, la définition universelle et occidentale de la diversité vue dans la littérature du domaine organisationnel doit être complétée par une définition qui considère la culture et le contexte pour construire une définition plus précise en lien avec notre sujet sur la diversité culturelle.