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4. RECENSION DES ÉCRITS

4.1. La vaccination

4.1.3. Vaccination et niveau de connaissance

La littérature montre en effet qu’il existe des relations complexes mais certaines entre le niveau de connaissance des parents et le statut vaccinal de l’enfant, la

compréhension des liens entre le savoir des parents et leur décision de faire vacciner leurs enfants étant encore loin d’être complète.

Il reste notamment à mieux comprendre les liens entre la demande pour la vaccination et la perception des bénéfices que les parents se font soit en relation à la vaccination elle-même soit à la perception du risque associé à l’absence de vaccination (Jheeta & Newell, 2008). Il est bien sûr important de noter que la connaissance revêt plusieurs aspects qui ne sont pas toujours clairement définis et que les éléments de la connaissance sont tantôt généraux tantôt spécifiques. Dans certains cas, les parents avouent une méconnaissance totale du sujet (Torun & Bakirci, 2006) : on peut penser que des connaissances générales comme celles relatives à l’importance de la vaccination peuvent se révéler utiles dans de tels cas (Samuelsen, 2001). Pour leur part, Atkinson et Cheyne (1994)

ont noté que les mères peuvent fort bien connaître les maladies et l’importance de la vaccination sans qu’elles décident pour autant de faire vacciner leurs enfants. Les éléments sur lesquels doit porter l’éducation se situent, dans ces différentes situations, bien au-delà du simple transfert de connaissance au sujet des bienfaits de la vaccination.

Les recherches qualitatives ayant abordé ce sujet font ressortir ces différents aspects. Dans une revue de recherches qualitatives ayant ciblé des pays développés, les analyses de Mills et al. (2005) montrent de façon détaillée que dans toutes les recherches couvertes, une relation peut être établie entre le niveau de connaissance, d’information ou de

communication et la participation à la vaccination. Les problèmes liés aux effets secondaires, aux soupçons de conspiration, à la connaissance des dates et places des séances de vaccination et des maladies concernées sont tous déterminants. Ces auteurs estiment qu’en général les barrières identifiées peuvent être levées avec une amélioration de l’information et de la connaissance des parents sur certaines questions. Certains auteurs (McCormick, Bartholomew, Lewis, Brown, & Hanson, 1997) notent dans leur recherche que les parents n’avaient en général aucune compréhension des maladies pour lesquelles leurs enfants doivent être vaccinées. Cependant, le plus gros problème selon ces auteurs est celui de savoir le calendrier vaccinal à savoir la fréquence des vaccinations. Pour ce faire, les mères prennent des repères comme la période de scolarisation comme période butoir de fin de la vaccination. Samuelsen (2001) pour sa part notait que la participation à la

vaccination moderne n’était pas basée sur une connaissance des maladies spécifiques mais sur l’idée que la vaccination est bonne pour la santé. Streefland et al. (1999b) rapportent comme cause de non-participation des mères à la vaccination, le fait qu’elles sont mal informées ou pas informées sur la date de la session de vaccination de même que les mauvaises expériences avec les effets secondaires.

Les recherches quantitatives qui se sont penchées sur la question de la connaissance ont essayé de quantifier certains aspects de cette connaissance. Ainsi Fitch et Racine (2004) ont indiqué que de nombreux parents détenaient des conceptions inexactes quant à la nécessité pour l’enfant de recevoir l’ensemble des vaccins (23%), quant aussi aux effets des vaccins sur le système immunitaire (37%) et quant à la sécurité des vaccins (19%). D’autres travaux (Cassell, Leach, Fairhead, Small, & Mercier, 2006) ont montré que de 40% à 50% des parents non scolarisés de Gambie n’avaient pu donner le nom d’aucune des maladies

cibles du programme de vaccination. Ces auteurs rapportent aussi que les parents cherchaient à faire vacciner leurs enfants non pas du fait de leur connaissance d’une

maladie spécifique mais beaucoup plus du fait de la connaissance des bienfaits globaux que procure la vaccination.

Certains chercheurs ont observé l’existence d’une différence de couverture

vaccinale entre les enfants dont les parents possèdent un bon niveau de connaissance sur la vaccination et ceux dont les parents en avait peu ; leur analyse conclut que la proportion d’enfants pas complètement vaccinés est 2.4 fois plus élevée chez les parents dont le niveau de connaissance était considéré comme faible (Makoutode et al., 2002). Les recherches et interventions visant à améliorer la connaissance des parents se sont principalement centrées sur les sujets suivants : la date et lieux des vaccinations ; les dangers des maladies ; les bénéfices par rapport aux coûts (McDivitt et al., 1997; Zimicki et al., 1994) ; la présence ou non de l’équipe de vaccination (F. T. Cutts, 1991) ; et l’importance de vacciner l’enfant (Brugha & Kevany, 1996b). Zimicki et al. (1994) ont noté que l’amélioration de la

couverture vaccinale suite à la campagne de rougeole aux Philippines était essentiellement liée à l’amélioration du niveau de connaissance des parents qui expliquait 70% de la variation de la couverture vaccinale entre l’estimation au début et à la fin de l’intervention.

Le constat que l’on pourrait tirer de ces travaux est que le niveau de connaissance des parents déterminerait la vaccination de l’enfant. Cependant, ces différents liens établis par les chercheurs ne doivent pas faire oublier qu’il existe toujours un écart entre les connaissances et les comportements concrets des personnes : l’expérience montre que l’adoption de saines habitudes de vie met en jeu beaucoup d’autres facteurs que le seul savoir (Bandura, 2004; Hornik, 1989; Yanovitzky & Stryker, 2001). Dans le domaine spécifique de la vaccination, Atkinson et Cheyne (1994) ont démontré, dans une étude faite en Zambie, que seulement 57% des mères connaissaient la nécessité des trois doses du vaccin contre la polio alors que 90% des enfants étaient de fait vaccinés ; ils ont trouvé la même relation entre la couverture du vaccin contre le tétanos et le niveau de connaissance des mères sur cette maladie. Atkinson et Cheyne (1994) concluent de leurs études qu’il est essentiel d’établir une distinction entre « acceptation », « connaissance » et « motivation », estimant même que ce sont les expériences positives qui influencent la continuation et la fidélisation à la vaccination.

Dans la très grande majorité des études, qu’elles soient quantitatives ou qualitatives, la question du temps que la mère doit consacrer à la vaccination est considérée comme un facteur central. Ce temps donné à la vaccination est en effet un temps qui est enlevé à d’autres activités que la mère se doit d’accomplir. Si le temps ne pose pas, dans certaines situations, de problèmes particuliers, il est certain que le temps pris pour faire vacciner un enfant, notamment si le trajet jusqu’au lieu de la vaccination est long, doit être estimé avec attention (Streefland et al., 1999a) ; il faut aussi prendre en compte le temps d’attente au niveau des services de santé. La question devient plus importante si la marge d’autonomie de la mère est assez restreinte au sein de la famille. La relation entre la connaissance des parents et la vaccination de l’enfant doit toujours être soumise à un jugement d’opportunité à l’égard des avantages que représente la vaccination pour l’enfant face à d’autres activités dont bénéficie l’ensemble de la famille.