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urbains à Toulouse ?

3. Un quartier d’étude toulousain en situation d’inégalité environnementale

Toulouse dans un processus d’amélioration de sa qualité urbaine

Quatrième ville française en terme de population, Toulouse s’inscrit actuellement dans un processus d’amélioration de sa qualité urbaine. La ville a en effet lancé de nombreux programmes de réhabilitation urbaine. L’ensemble des quartiers de logements sociaux - Reynerie, Bagatelle, Bellefontaine, Empalot, Les Izards - connait une restructuration urbaine importante avec le Grand Projet de Ville. Le projet Eurosudouest consiste quant à lui à rénover le quartier de la gare. Un important projet de transformation du centre-ville est également en cours sous la direction de l’architecte urbaniste de renom, Joan Busquets.

Comme la plupart des villes françaises, Toulouse a connu une urbanisation rapide dans les années 1970. Ville partagée en deux par le fleuve de la Garonne, cette urbanisation rapide a particulièrement touché le secteur de la rive gauche, donc la majorité du tissu urbain date de cette époque. Le secteur de la rive gauche a été construit dans la précipitation dans une logique d’urbanisme souvent peu maitrisé. Ce secteur souffre en particulier d’une trame viaire publique pauvre – avec notamment de nombreuses impasses - car l’urbanisme s’est construit sur la base d’emprises foncières importantes. Ce mode d’urbanisme a également contribué à créer une pénurie d’espaces publics dans ce secteur et de nombreux délaissés urbains.

Le quartier de Tabar-Papus-Bordelongue-Tours de Seysses : un territoire d’étude morcelé par une urbanisation peu règlementée

Le terrain d’étude est un quartier toulousain qui se situe sur la rive gauche de la Garonne en bord de rocade.

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Le quartier est inscrit dans un processus d’amélioration de sa qualité urbaine. Il a fait partie jusqu’en 2014 de la zone urbaine sensible (ZUS) de Faourette-Bagatelle- Bordelongue. Grâce à la politique de la ville, il a bénéficié d’un traitement renforcé en matière d’entretien des espaces publics et d’animation sociale, avec la présence notamment de la régie de quartier. Il a bénéficié également de nombreuses études urbaines, avec l’organisation de multiples réunions de concertation pour évoquer la requalification urbaine du quartier. On note cependant qu’aucune rénovation d’envergure n’est à l’ordre du jour dans le quartier.

Le quartier rassemble 4 micro entités résidentielles : Tabar, Papus, Bordelongue et les Tours de Seysses.

Figure 5 Les 4 micro entités du quartier d’étude : Tabar, Papus, Bordelongue, Tours de Seysses (Conception : Delphine Chouillou)

Le quartier est issu de vagues d’urbanisation successives qui ont eu lieu entre 1960 et 1970.

Figure 6 La construction du quartier d’étude (Conception : Delphine Chouillou)

En l’absence de plan d’urbanisme à l’époque, c'est par opportunité foncière sur des terrains très étendus que le quartier s’est construit, ce qui explique en partie l’effet de micro entités et la segmentation territoriale actuelle. Le quartier est exclusivement résidentiel, il y a très peu d’espaces publics et de services. Par ailleurs, la marchabilité y est difficile à cause notamment de la fermeture de la résidence des Tours de Seysses et des grandes infrastructures routières - rocade, route de Seysses - qui segmentent le quartier.

L'habitat du secteur est composé d'un patchwork d’entités typo-morphologiques correspondant aux 4 micro entités et à des périodes successives d'urbanisation :

- Papus : des pavillons privés ouvriers des années 60,

- Tabar et Bordelongue : des immeubles collectifs des années 60 et 70 abritant des logements d’habitat social

- Les Tours de Seysses : une copropriété privée fermée de moyen standing construite en 1972.

Ces ensembles résidentiels présentent différents statuts d’habitation - propriétaire, locataire, locataire social - et sont diversement exposés aux nuisances environnementales. Les logements d’habitat social – Tabar et Bordelongue – se trouvent les plus exposés aux nuisances car ils se situent à proximité immédiate de la rocade. Cette proximité exceptionnelle à la rocade s’explique par les temporalités de construction du quartier. La rocade a en effet été construite après la construction des logements sociaux.

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Un quartier qui subit de fortes nuisances environnementales

Le quartier de Tabar-Papus-Bordelongue-Tours de Seysses a été choisi car c’est un

quartier résidentiel dont les logements sont les plus proches de la rocade. Il subit donc des nuisances environnementales exceptionnelles dans le contexte toulousain.

Figure 7 Le quartier d’étude vu du ciel (Conception : Delphine Chouillou)

Quartier en front de rocade, il subit de fortes nuisances sonores. Le quartier est en effet impacté de jour comme de nuit par les nuisances sonores provenant du trafic autoroutier comme en attestent les cartes de niveau sonore issues du PPBE de Toulouse Métropole 2017-2021 (plan de prévention du bruit dans l’environnement).

Figure 9 Les zones du territoire de Toulouse Métropole impactées par les nuisances sonores provenant du trafic routier en cumulé sur 24h (Source : Toulouse Métropole)

Figure 10 Les zones du territoire de Toulouse Métropole impactées par les nuisances sonores provenant du trafic routier la nuit (Source :

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Ce quartier est d’autant plus soumis à des nuisances sonores qu’il se situe sous le couloir aérien de l’aéroport de Toulouse-Blagnac.

Figure 11 Les nuisances sonores liées à l’aéroport de Toulouse Blagnac (Source : Direction générale de l’aviation civile)

Les nuisances sonores impactent particulièrement ce quartier car c’est un quartier résidentiel dense. Les logements de ce quartier sont en effet les plus exposés aux nuisances sonores à Toulouse.

Figure 12 Les logements toulousains impactés par les nuisances sonores en 2016 (Source : Toulouse Métropole)

La rocade est également une source de pollution de l’air. Les experts d’Atmo Occitanie (ex ORAMIP) qui est l’organisme expert en charge de la mesure de la qualité de l’air dans la métropole, estiment que les lieux les plus pollués de la métropole se situent en bord de rocade (cf. présentation lors d’une réunion dans le projet ANR EUREQUA en février 2013).

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Un quartier qui se différencie socialement du reste de Toulouse

Le quartier d’étude se démarque également du reste de Toulouse car les revenus des habitants sont extrêmement bas. Deux des 4 micro entités qui composent le quartier accueillent une population particulièrement démunie. Le revenu fiscal par unité de consommation à Tabar et à Bordelongue n’est que de 10 000 euros (Insee 2013) quand la médiane de Toulouse est à 20 271 euros et que son premier décile est à 9 613 euros (Insee 2014).

Cette double exposition à la fois à des problématiques environnementales et sociales fait écho à la notion « d’inégalité environnementale » qui est spécialement visible en milieu urbain (Emelianoff, 2006; Faburel, 2010). En 2017, une étude de l'Observatoire Régional de la Santé a montré que ce quartier était l’illustration de ce phénomène (Observatoire régional de la santé Midi-Pyrénées avec Atmo Occitanie, décembre 2017).

Figure 13 La disparité de la qualité de l’air à Toulouse Métropole (Source : Observatoire régional de la santé Midi-Pyrénées avec Atmo Occitanie, décembre 2017)

Par ailleurs, le quartier pâtit d’une image négative avec la présence de trafic de drogue dans le quartier.

Des disparités sociales locales

Les 4 micro entités sont non seulement différenciées par leur forme urbaine, mais également par leurs caractéristiques sociales, comme le montrent les données carroyées de l’INSEE de 2013. Quatre carreaux de 200 mètres par 200 mètres correspondent aux 4 micro entités de Tabar, Papus, Bordelongue, Tours de Seysses.

Figure 14 Les 4 carreaux INSEE correspondant aux 4 micros quartiers de Tabar, Papus, Bordelongue, Tours de Seysses

Tabar Papus Bordelongue Tours de Seysses

Ratio [(Nbr. de ménages à bas revenus) / (Nbr. de

Ménages)] 0.66 0.09 0.69 0.31

Revenu fiscal par UC

moyen des individus (€) 10 335 19 952 10 027 14 993 Part des ménages en

logement collectif (%) 100 2 97 95

Part des ménages proprié-

taires (%) 20 80 21 64

Part des personnes de plus

de 65 ans (%) 9 32 9 15

Part des personnes de

moins de 18 ans (%) 35 15 33 27

Part des ménages de plus

de 5 personnes (%) 17 6 22 10

Part des ménages d’une

seule personne (%) 23 36 12 40

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Le quartier d’étude est socialement fragmenté avec des disparités importantes notamment entre les entités de logements sociaux de Tabar et de Bordelongue et les entités de logements privés de Papus et des Tours de Seysses.

Tabar et Bordelongue sont des entités quasi exclusivement composées de logements sociaux où les familles ont de bas revenus. La proportion de ménages à bas revenus est 7 fois plus importante à Tabar et Bordelongue qu’à Papus et 2 fois plus importante que dans les Tours de Seysses. Les revenus y sont 2 fois moindres qu’à Papus et 1,5 fois moindres que dans les Tours de Seysses. Papus se démarque dans le quartier d’étude en étant composé exclusivement d’habitat individuel occupé par des personnes âgées propriétaires occupants.

Des associations de quartier pour l’amélioration de la qualité de vie

Le quartier compte la présence d’un comité de quartier actif, le comité de quartier Papus-Tabar-Bordelongue, dont les revendications se concentrent sur l’amélioration environnementale du quartier. Dans une lettre qui a été adressée à chaque candidat lors des élections municipales de mars 2014, le comité fait état de « problèmes environnementaux ».

Le comité de quartier formule tout d’abord des demandes concernant la réduction de la pollution de l’air dans le quartier en faisant le lien avec les encombrements sur le périphérique, le transit routier dans le quartier et le transit aérien. Afin de réduire la circulation automobile dans le quartier, il demande la construction d’un échangeur au niveau de Bordelongue, la réduction de la vitesse à 30km/h dans le quartier et l’augmentation de la fréquence des bus, ainsi que le recouvrement de la rocade et la limitation de la vitesse à 70km/h pour protéger le quartier de la pollution de l’air.

Ces demandes font aussi écho au 2ème point de revendication, la lutte contre le bruit,

avec la demande de la création d’un « observatoire du bruit ». Le comité de quartier participe au collectif contre les nuisances aériennes de l’agglomération toulousaine (le CCNAAT) « qui s'opposent à l'augmentation du trafic aérien de l'aéroport de Toulouse-Blagnac, source de pollution sonore et atmosphérique »2. Un sonomètre a en outre été placé dans le quartier à l’initiative du comité de quartier pour mesurer les nuisances sonores liées au trafic aérien. Ces mesures ont permis d’établir une carte de bruit du passage des avions.

2 www.ccnaat.fr

Figure 15 Une carte de bruit réalisée par le comité de quartier

Cette carte montre que les nuisances sonores des avions sont continuelles dans le quartier, de 6 heures à 23 heures. Elle montre également que même si les vols sont interdits la nuit, des vols sont tout de même effectués (en témoigne les quelques points jaunes sur les horaires de 23 heures à 6 heures). Cette carte permet au comité de quartier d’appuyer leurs observations grâce à un instrument de mesure et d’en alerter les pouvoirs publics.

Le comité de quartier déplore également l’absence d’espaces verts dans le quartier et demande la création d’un grand espace vert dans la zone d’activité à côté de la cité de Bordelongue.

L’association Partage est également présente dans le quartier : ses locaux se situent dans la micro entité Bordelongue. Ses activités se concentrent sur l’organisation d’activités pour favoriser le lien entre les habitants. L’association a pour but également de soutenir les populations fragiles en mettant en place de la formation et de l’accompagnement pour la demande d’aides sociales.

Le quartier compte également la présence d’association d’habitants comme Vivre à Tabar, B2LG (association pour les jeunes de Bordelongue) ou encore les Chibanis de Bordelongue (association pour les anciens de Bordelongue). L’association Vivre à Tabar a organisé jusqu’en 2014 des manifestations dans le quartier de Tabar comme un carnaval annuel et des lotos. Elle assurait aussi jusqu’à 2014 des permanences à Tabar dans le local de la « Chapelle Mexicaine » place André Mattieu qui appartient au bailleur social propriétaire de Tabar (Patrimoine). Les associations B2LG et Chibanis de Bordelongue sont des associations d’habitants qui organisent des évènements pour les jeunes ou les anciens de Bordelongue.

4. Des enquêtes in situ sur les acceptions des

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