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M E T HOD OL OGI E

4.5 Un futur opérationnel commun ?

Dès lors que les synergies et les limites des deux « mouvements » ont été soulignées, il s’agit de discuter des perspectives stratégiques et opérationnelles communes. Cette partie est plus descriptive qu’analytique. Quel rôle devraient ou pourraient jouer APRÈS-VD et l’ESS dans le dispositif du RTE ? Comment est-ce que les acteurs perçoivent une mise en commun des forces entre le RTE et l’ESS ? Quelles sont les opportunités stratégiques ?

Abordons d’abord la perspective des acteurs de l’ESS. « C’est à nous d’ouvrir les œillères, et de voir que « ah y’a eux qui pourraient nous soutenir, et eux avec qui on pourrait faire un partenariat, » etc. Ça va vraiment avec l’économie symbiotique dont je parle : faire des synergies avec plein d’acteurs » (Brenet, entretien no 2). L’autre membre du comité d’APRÈS-VD est aussi ouvert à travailler collectivement : « stratégiquement et intuitivement, c’est super important de construire ce canal ensemble, RTE et ESS. (…) Ce sera une pièce importante [le RTE] qui répond à un besoin profond. Profitons-en » (Burnand, entretien no 1). Il précise sa pensée :

« Le RTE, c’est le pionnier de cette question. C’est le coup de bélier qui va vers la forteresse politique pour faire entrer la transition écologique dans le débat et de manière intelligente ou complète, c’est-à-dire qu’elle donne les recettes, les solutions, les médicaments par son aspect qualitatif ; c’est pas juste du financier que tu arroses pour financer tel produit vert ou entreprise verte. C’est tout un dispositif, une conception de l’économie, de la société, ce que je disais tout à l’heure pour parler de l’ESS en fait. C’est pas du green washing, c’est à rebrousse-poil de ça. Aussi comprendre qu’il y a une bonne façon de faire l’économie, qui régénère, qui respecte le cycle de la nature. Pour moi, le RTE c’est le bon bélier, vraiment » (Burnand, entretien no 1).

Cette actrice s’accorde avec cela :

« C’est une superbe opportunité. Ça ouvre vraiment un cadre officiel en termes de soutien et financement de projets. J’ai l’impression que ce serait un acteur solide dans le domaine de la transition écologique.

A tous les niveaux on peut collaborer : financement, accompagnement, entre autres. Ou politique aussi.

Y’a tellement de synergies possibles. On porte la même vision je crois, je pense que ça s’en rapproche profondément. Donc à partir de là, y’a plein de possibles projets qui peuvent émerger » (Brenet, entretien no 2).

Elle affirme son souhait en disant « je pense qu’on peut vraiment mettre les deux ensemble, pour créer quelque chose de cohérent et complet pour l’accompagnement de projets, » ou encore :

« APRÈS-VD présente déjà un écosystème d’acteurs qui mettent en avant l’ESS, c’est un réseau d’acteurs, un réseau de compétences, voilà. Il faut mettre en valeur ce réseau là en faisant partie du dispositif RTE. Ce serait dommage de pas créer ces symbioses, ces synergies entre nos différents types de réseaux. Que ce soit les membres de l’ESS ou du RTE, ils seront sûrement super intéressés de discuter ensemble (sourire). Donc pour moi, la place d’APRÈS-VD est super importante au sein du RTE et pour l’accompagnement de ces projets » (Brenet, entretien no 2).

Concrètement, l’ESS pourrait amener une certaine expérience dans la pratique d’une économie alternative :

« L’ESS serait un bon moyen, un bon canal de collaboration puisqu’on serait au fait de la gestion durable, sociale, collaborative des projets. Donc ce serait bien que dès le début, on ait cette fonction de cadrage et qu’on aide les gens dans le dispositif du RTE, qu’on connaisse bien le RTE comme acteur partenaire, et pis qu’on ait cet avantage-là pour les gens qui viendraient vers nous. (…) Après, plus techniquement, on aura l’expérience empirique de nos membres qui marchent de la viabilité

économique. Je pense qu’on sera d’une grande aide pour associer viabilité financière et projets écologiques. (…) Donc oui une collaboration fait sens ; ça répondrait à divers besoins quand t’es entrepreneur ou créateur d’entreprises » (Burnand, entretien no 1).

En retour, APRÈS-VD deviendrait plus attractif avec la possibilité pour ses membres de bénéficier d’un RTE :

« On m’a dit explicitement : « si APRÈS-VD proposait une forme de micro-crédit, ce genre de services, nous on deviendrait tout de suite membre. » Ce serait vraiment incitatif pour les projets qui sont en train d’émerger par-ci par-là, qu’APRÈS-VD propose des solutions en termes de financement. (…) Oui, de facto, APRÈS-VD sera mis en avant à travers le RTE » (Brenet, entretien no 2).

Le responsable financement de la BAS y voit également un moyen pour la banque de développer ses activités, tout en créant une dynamique et une communauté autour de la transition écologique :

« Oui, je pense qu’à terme, ça peut générer des nouveaux clients. (…) Notre stratégie de développement aujourd’hui c’est de viser vraiment les gens qui sont très proches de notre public cible et des valeurs qu’on essaie de mettre en avant, donc évidemment, une coopérative de transition, bah ce serait un public cible parfait pour la banque alternative. Donc je pense que y’aurait un fort intérêt vis-à-vis de ça. (…) À court terme, si une initiative de ce type démarrait, je verrais tout à fait la banque alternative s’inscrire dans le cadre de cette communauté. Peut-être pour échanger sur la manière de travailler de la BAS, proposer éventuellement d’héberger des comptes, et de s’ouvrir à cette communauté. Donc d’être un

membre actif de cette communauté via un partage d’expériences. Et d’accompagner les clients qui pourraient l’être via les financements, peut-être dans un deuxième temps » (Donninger, entretien no 4).

Pour les acteurs de l’ESS, il est clair qu’APRÈS-VD a un rôle à jouer dans le dispositif du RTE. « Pour moi, il devrait y avoir un membre du comité d’APRÈS-VD qui soit inclus dans un groupe de travail qui bosse sur l’implémentation du RTE, pour que ce soit vraiment une réflexion collective, avec l’ensemble des acteurs locaux de l’économie de demain au sens large » (Brenet, entretien no 2). De manière similaire, cet acteur indique :

« Ce je que j’aurais envie de dire dans l’état actuel de mon ignorance, dans le pilotage de ce projet [du RTE], quelque part il devrait y avoir APRÈS-VD, parce que je pense qu’il y a d’abord une place institutionnelle à prendre pour VD ; ce n’est pas encore un interlocuteur fort comme APRÈS-GE sur le canton de Genève. Donc là y’a une place à gagner. Je pense que par ce biais-là, y’a probablement un champ possible » (Huot, entretien no 7).

Ou encore :

« Il me semble que l’ESS a un rôle intellectuel à jouer, un rôle think tank, d’analyse de dossiers, de conseiller scientifique. C’est plutôt le statut intellectuel qui me paraît… des gens à qui on peut demander conseil, des informations, des compétences. Voilà. C’est le rôle que je verrais pour l’ESS dans le RTE » (Maillefer, entretien no 6).

Abordons maintenant la perspective des acteurs du RTE, beaucoup plus sommaire mais tout aussi explicite. En effet, les deux principaux acteurs du RTE se manifestent en faveur d’une collaboration avec l’ESS. « Je pense que typiquement, APRÈS-VD, ou en tout cas une représentation, devrait faire partie du comité de pilotage. En tout cas, un moment ou à un autre, intervenir dans les discussions, ça c’est clair » (Paul, entretien no 8). La directrice de la fondation Zoein corrobore ce propos :

« Je pense qu’effectivement, c’est deux « mouvements » qui partagent un certain nombre de valeurs, de pratiques, une certaine éthique. Même si l’ESS, ils comptent avec une tradition du 19ème et le RTE bah c’est tout neuf, tout jeune. Mais y’a tout ce partage de bases qui existe, donc y’a une certaine cohérence en fait, entre les deux. Par exemple, si on imagine le développement d’un projet pilote dans le canton de Vaud, il pourrait y avoir une collaboration entre ces deux mouvements, parce que des structures qui appartiennent à l’ESS pourraient expérimenter avec le RTE. C’est un terreau fertile pour pouvoir développer des projets comme le RTE… sans pour autant se fermer les portes à d’autres structures, qui n’adhèrent peut-être pas à la chambre de l’ESS, mais qui partagent cette éthique, ces valeurs » (Serlavós, entretien no 9).