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DEUXIEME SECTION : PRESENTATION DES DONNÉES RELATIVES AUX ACTEURS DE

Chapitre 1. PRESENTATION DETAILLEE DES PRODUCTEURS ET DE LEURS

I. Typologie des producteurs

I.1 Objectif et présentation générale des méthodes de classification et de

caractérisation

I.1.1 Objectif

Il s’agit, dans ce contexte intra et périurbain de notre étude, de comprendre et classer la diversité des systèmes de production agricoles et des systèmes d’activité économique des ménages agricoles entendus ici comme constitués des agriculteurs et de leur conjoint, le cas échéant.

En fait, nous aboutirons à une typologie des systèmes de production et d’activité, en passant par une typologie des exploitations. Donc, au-delà d’une simple description statistique ou d’une focalisation sur certains systèmes de production tels que les systèmes d’élevage ou maraîchers, nous proposons, à l’image de l’étude faite sur l’agriculture de l’agglomération d’Antananarivo par Ramamonjisoa et al. (2006), une approche de la diversité des exploitations agricoles en croisant une description des systèmes de production et des systèmes d’activités des ménages agricoles.

L’intérêt d’une telle typologie est de montrer, de façon organisée, la diversité des producteurs et de donner aux décideurs les fondements d’une action possible sur l’agriculture de Dakar.

Pour définir "une exploitation agricole" au Sénégal, nous faisons référence à l’article 16 du chapitre 5 de la Loi d’Orientation Agro-Sylvo-Pastorale (LOASP, 2004) du Sénégal portant sur le « statut juridique des exploitations agricoles » et qui stipule que « l’exploitation agricole est définie comme une unité disposant de facteurs de production (terre, bâtiments, cheptel, matériels, main-d’œuvre, etc.) qui sont utilisés par un exploitant exerçant un métier de l’agriculture. (…) les activités exercées dans le prolongement de la production agricole, telles que la transformation, le conditionnement, la conservation, le stockage et la vente des produits provenant de l’exploitation, sont considérés comme agricoles aux termes de la présente loi » (Pages 18-19). Le rappel de cette définition nous semble important dans le cadre de notre étude.

Concernant les systèmes de production, comme l’écrivent Cochet et Devienne (2006), « depuis une trentaine d’années, l’élaboration de typologies d’exploitations a été l’une des méthodes les plus employées, en France, pour aborder cette diversité et tenter de l’expliquer. De nombreuses démarches ont été proposées, tant par les économistes que les géographes et les agronomes. (Carles et Tertian, 1972 ; Brossier et Petit, 1977 ; Capillon et Manichon, 1979 ; Deffontaines et Petit, 1985 ; Gristofini, 1985 ; Jouve, 1986 ; Cerf et al., 1987 ; Brossier et al., 1990 ; Perrot et Landais, 1993a, 1993b) » .

La différenciation entre ces méthodes (méthodes statistiques, type d’échantillonnage, méthodes à dire d’experts, à dire d’acteurs,…) reposant sur la façon dont cette typologie va être effectuée et interprétée. Selon ces auteurs, l’échelle d’analyse pertinente du concept de système de production ou farming system est celle de l’unité de production qu’est l’exploitation agricole familiale caractérisée par les ressources terre (surface et localisation au sein de l’écosystème cultivé ou type de « terroir »), la main- d’œuvre, (importance, nature, formation…), le capital de l’exploitation (bâtiments,

matériel, plantations, cheptel reproducteur…). Cependant, ils estiment qu’il vaut mieux appliquer le concept de système de production « à un ensemble d’exploitations ayant accès à des ressources comparables, placées dans des conditions socio-économiques semblables et qui pratiquent une combinaison donnée de productions et pouvant être représentées par un même modèle ». Dans notre étude, nous appliquerons le concept de système de production, compris comme une combinaison de systèmes de culture et parfois de systèmes d’élevage, à l’ensemble des exploitations de notre zone d’étude.

Le concept de systèmes d’activité rend compte de la combinaison d’activités agricoles et non agricoles des ménages agricoles. Selon Blanchemanche (2002), cette combinaison concerne plus de 60% des ménages agricoles en Europe et, avec l’émergence de la multifonctionnalité de l’agriculture, elle est « parfois appréhendée comme une voie pour maintenir, sur l’ensemble du territoire, des familles et des exploitations agricoles par la mise en place d’un dispositif fiscal et réglementaire spécifique ». Ainsi, en prenant le ménage, au sens du couple, comme entité de référence, l’auteur distingue les activités de diversification qui mobilisent 40% des exploitations selon le RGA de 2000 et qui sont effectuées « dans le prolongement de l’acte de production (transformation) ou qui ont pour support l’exploitation (l’accueil), des activités salariées, hors de l’agriculture, impliquant soit le chef d’exploitation (20% des chefs d’exploitation en 1997) ainsi qualifié de double-actif, soit sa conjointe (33% en 2000) ».

De leur côté, N’Diénor et Aubry (2004) et Ramamonjisoa et al. (2006) distinguent trois cas de figures en fonction de la combinaison des systèmes de production et d’activité. Ainsi, « le groupe A rassemble des ménages qui se consacrent seulement aux activités agricoles et para-agricoles ; le groupe B où le chef d’exploitation est à temps plein sur ces activités, et au moins un résident exerce une activité extérieure et le groupe C où le chef d’exploitation exerce une activité extérieure au moins à mi-temps ». On précise qu’on entend par activité para-agricole, une activité autre que l’activité agricole mais dont la réalisation nécessite l’utilisation des ressources et des compétences de l’exploitation.

Comme cette combinaison d’activités est une spécificité souvent présente en périurbain, nous allons reprendre cette classification en A, B et C en sachant que, dans le groupe B, c’est généralement la "conjointe" qui apporte un revenu supplémentaire dans le ménage.

La représentativité de ces trois systèmes d’activité : A, B et C nous donnera une vision plus exacte de l’implication des producteurs dans l’activité agricole, en particulier et dans l’économie urbaine, en générale. A travers l’annexe 3, nous donnons la liste des métiers non agricoles exercés par des producteurs de notre échantillon. Ces activités extérieures sont effectivement liées à la proximité urbaine.

I.1.2 Méthode de classification et de caractérisation I.1.2.1 Méthode de classification

Nous partirons de trois groupes d’éléments pertinents pour la recherche dans ce contexte urbain : d’un côté, les facteurs de production, parmi lesquels on choisit ceux qui sont déterminants par leur rareté en milieu urbain ou leur usage très concurrentiel avec la ville : la terre, l’eau, la main-d’œuvre et le capital financier, de l’autre, le ou les types de productions agricoles fondés sur la combinaison de ces productions et nous conduisant à parler de système de production "pur" ou de "polyculture" et la destination de la production et, enfin, les systèmes d’activité des producteurs et de leur conjoint, le cas échéant. Voyons, maintenant, comment nous allons caractériser les éléments de chacun de ces groupes.

I.1.2.2 Caractérisation des différents critères

Pour les facteurs de production, nous caractériserons la terre à la fois par son utilisation ou pas par l’agriculture en distinguant agriculture de pleine terre et agriculture hors sol et en précisant sa superficie et/ou son statut foncier.

L’eau sera caractérisée par son origine : céane, puits, eau courante distribuée par la Société des Eaux (SDE), eau usée urbaine ou eau du Barrage Ponty et, dans quelques cas, l’eau de puits est combinée à celle de céane ou celle de la SDE. L’eau sera aussi caractérisée par sa nature : douce, chargée et son usage : arrosage et/ou abreuvage. Cependant, dans ce chapitre, nous présenterons son utilisation de façon globale, par les grands types de producteurs avant d’en arriver à la typologie approfondie des producteurs à partir des autres ressources. Aussi, l’importance de la ressource en eau dans le contexte des Niayes nous conduira à distinguer un autre type spécifique de système de production : la pêche qui s’y exerce et qui n’est cependant pas de l’aquaculture.

Nous qualifierons la main-d’œuvre selon son statut et sa durée d’utilisation sur l’exploitation en distinguant main-d’oeuvre salariale, familiale et entraide de producteurs qui peuvent être permanente ou saisonnière.

Etant donné qu’il est essentiellement petit et manuel, nous présenterons le matériel de façon globale et nous signalerons les rares cas où du gros17 matériel est utilisé.

Le type de production (combinaison des productions) nous permettra de voir si l’agriculteur s’investit dans un seul type de production végétal ou animal : spécialisation ou s’il combine au moins deux productions : "polyculture".

Enfin, le système d’activité nous permettra de voir si l’agriculteur et son conjoint, s’il en a un, ne vivent que de l’agriculture ou s’ils sont aussi impliqués dans une activité non agricole liée à la ville.

Le choix de ces critères repose sur le fait que ce sont ceux que nous jugeons les plus pertinents en milieux urbain et périurbain car ils peuvent renseigner autant sur l’état de la concurrence sur les ressources productives (M’Baye et Moustier, 1999) que sur les caractéristiques du marché urbain.

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Nous entendons par gros matériel notamment les motopompes utilisées pour l’irrigation, en l’absence de matériel mécanique (tracteurs, outils de traction mécanique).

En effet, les productions réalisées nous renseigneront sur la demande urbaine, le marché urbain (Adam, 1999) ; les éléments matériels et techniques nous montreront le niveau d’équipement de cette agriculture et sa contribution au "recyclage" des déchets agricoles, animaux et urbains et, lorsqu’il nous est donné, l’investissement permettra d’appréhender la valeur de ces exploitations urbaines et périurbaines.

Aussi, pour une exploitation donnée, ses "arguments" en termes de superficie et de statut foncier, de contribution à l’autoconsommation ou à l’approvisionnement des marchés urbains, à l’emploi et à l’assainissement urbains seront édifiants sur son implication dans l’écosystème urbain. Au-delà, nous aurons des éléments nouveaux sur l’implication concrète de l’agriculture dakaroise dans cet écosystème.

Donc, la combinaison des trois groupes d’éléments : facteurs de production, types de production et systèmes d’activité nous permettra, in fine, d’appréhender les situations de l’agriculture à Dakar. Avant d’en arriver là, voyons comment chaque élément sera classé et caractérisé.

I.1.3 Classification et caractérisation des variables retenues I.1.3.1 Les facteurs de production

I.1.3.1.1 La terre

S’agissant de la typologie que nous allons effectuer, pour la terre, nous retenons comme critère de classification, sa superficie, St et, comme critère de caractérisation, son statut foncier.

Concernant la superficie, une classification basée sur les superficies d’exploitations de l’ensemble des zones de Niayes du Sénégal, de Dakar à Saint-Louis (Fall et al, 2001) permettait de distinguer trois types d’exploitations :

« - les petites exploitations de moins d’1 ha ; - les exploitations moyennes de 1 à 20 ha ;

- et les exploitations modernes pouvant atteindre 50 à 80 ha » pour lesquelles les auteurs précisent qu’ « elles sont concentrées dans les régions de Dakar (Sébikotane), Thiès (Pout, Mboro) et Saint-Louis ».

Etant donné (i) que les petites exploitations prédominent dans notre zone d’étude, (ii) que celle-ci ne couvre pas la communauté rurale de Sébikotane, (iii) que les résultats de notre échantillon n’indiquent pas d’exploitation supérieure à 20 ha et (iv) que notre objet d’étude n’est pas basé sur les rendements mais sur la capacité de l’agriculture à gérer les espaces ouverts dakarois qui l’incluent, nous choisissons, dans notre classification définitive, de regrouper les quinze classes que nous avions construites au départ et variant de « moins de 500 m² à 20 ha » pour en faire les deux classes de notre étude : « moins d’1 ha » et de « 1 à 20 ha » (voir annexe 4a). Ainsi, en retenant aussi comme unité de mesure l’hectare, nous adopterons les modalités « petite » pour la classe de « moins d’1 ha » et « moyenne » pour celle de « 1 à 20 ha » tout comme indiqué dans la classification de Fall et al.

Dans le graphique 5 ci-dessous, nous représentons ces deux classes (le tableau correspondant est en annexe 4b).

Effectif des exploitations par classe de superficie

0 20 40 60 80 100 Moins d'1 ha 1 à 20 ha Classe de superficie Ef fectif Effectif

Sur 127 superficies d’exploitations exprimées, soit 71%, le graphique montre que 92 sont inférieures à 1 hectare et 35 varient entre 1 et 20 hectares. Les 53 superficies manquantes, soit 29%, concernent les exploitations hors sol (principalement les microjardiniers et les petits éleveurs) mais aussi des " exploitations spécifiques" comme celles des pêcheurs.

D’un autre côté, pour les cultures hors sol qui sont localisées dans les espaces domestiques, nous considérerons la classe où la superficie de terre effectivement utilisée est nulle : St = 0. Mais dans ce groupe des productions hors sol, pour les microjardins, nous avons estimé nécessaire de les classer suivant la superficie totale de leurs conteneurs, Sc et à laquelle il sera possible d’attribuer un mode de tenure. Avant notre classification, voyons, dans l’encadré ci-dessous, celle qui a été effectuée, en 2002, par le Projet Microjardins.

« La taille des micro-jardins était en moyenne de 3 à 5 m² environ pour permettre aux populations les plus démunies de pouvoir se prendre en charge au-delà de la période de gratuité des intrants et du matériel du programme 2002. En effet, cette dimension des jardins familiaux demande un budget de fonctionnement de sept cent cinquante (750) Fcfa pour réaliser un (1) m² de laitue au bout de 45 jours de culture. Une production de 5 à 10 kg au m² peut être obtenue selon la période de l'année.

La taille des micro-jardins peut être plus importante pour certains acteurs qui visent la production pour la commercialisation ou pour disposer d'une gamme variée de légumes. La taille des micro-jardins varie entre 5 et 10 m².

L'unité économique familiale est de 50 m² et permet à une famille de mener des activités qui lui engendrent des revenus. Les micro-jardins deviennent une petite et moyenne entreprise lorsque la taille moyenne est supérieure ou égale à l'unité économique. Cette dimension de micro-jardins permet de mener des activités suffisamment rentables et de créer des emplois permanents ainsi que des emplois indirects liés à l'approvisionnement (fournisseurs d'intrants et de matériels) et à la commercialisation des produits frais (légumes) micro-jardins. »

Encadré 5. Distinction des tailles de Microjardins par le programme MJ en 2002.