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C. L’étude de Pascal Monin

3. Le système éducatif libanais

3.4. Les différents types d’écoles

Au Liban, l’enseignement est libre à condition qu’il ne touche pas aux mœurs et à la dignité des confessions, en vertu de l’article 8 de la constitution libanaise en 1943.

Le système d’enseignement étant libéral, il se trouve au Liban une grande variété d’établissements. Mais toutes les écoles suivent, dans les grandes lignes, la politique fixée par l’Etat qui impose une langue étrangère dès l’école maternelle. Les élèves apprennent à lire et à écrire en deux langues : soit l’arabe et le français, soit l’arabe et l’anglais. Cependant, cette caractéristique n’exclut pas les écarts considérables entre les institutions. En effet, les types d’enseignement sont étroitement liés aux types d’écoles et il faut en préciser certaines caractéristiques.

3.4.1. Les écoles officielles

Les écoles officielles constituent 50,1% du secteur de l’éducation et accueillent 37, 9% des élèves libanais, 70,1% de ces écoles enseignent le français comme langue étrangère.

Elles sont subventionnées par l’Etat, sous la dépendance directe du ministère de l’éducation nationale et elles assurent un enseignement général et professionnel. Elles sont installées dans diverses régions du Liban : Beyrouth 2,6%, Mont- Liban et banlieues de Beyrouth 11%, autres villes 36,5%.

Les élèves qui fréquentent ces écoles viennent majoritairement de couches sociales défavorisées et d’un niveau d’instruction moyen assez modeste, cela apparaît à travers les métiers des parents, le niveau socio- économique des familles…

Autrefois, les enseignants étaient formés dans les Ecoles Normales d’instituteurs, ce qui assurent à ces membres une bonne formation pédagogique et permettait, par la suite, à l’école publique de garantir une qualité d’enseignement acceptable. Mais aujourd’hui, après une vingtaine d’années de guerre, cette situation s’est radicalement modifiée. Pour combler le vide laissé par beaucoup d’enseignants retournés dans leurs régions pour des raisons de sécurité, on a dû recruter des diplômés non formés, de manière à assurer un enseignement qui n’a plus été contrôlé, ni au niveau de l’établissement, ni au niveau des examens officiels. Cette situation a entraîné une dégradation dans le secteur de l’école publique.

Dans cette dégradation de l’enseignement public, c’est l’enseignement des langues étrangères qui a été le plus touché et, plus particulièrement, le français qui se trouve enseigné dans 70%

de ces écoles.

Au manque de professeurs formés, s’ajoute l’absence de matériel pédagogique (matériel audiovisuel, supports pédagogiques...). De plus, c’est un enseignement qui se déroule la plupart du temps, dans des salles exigües et mal éclairées où l’on peut trouver une quarantaine d’élèves dans 20 m2.

Toutefois, l’éducation nationale a déployé beaucoup d’efforts pour intégrer des méthodes d’enseignement interactives et s’inspirant de l’approche communicative, à travers des manuels conçus par le service de ce ministère. Mais faute de contrôle pédagogique par l’administration et de formation des instituteurs, ces efforts n’ont pas abouti aux résultats espérés.

3.4.2. Les écoles privées payantes.

Les écoles privées payantes constituent 36,5% du secteur de l’éducation. Le français est la première langue enseignée par 61,3% de ces écoles, qui accueillent 49, 6% des élèves libanais. Ces écoles sont très variées et elles assurent un enseignement à tous les niveaux scolaires. Elles regroupent des élèves de toutes les religions, ne reçoivent aucune aide de l’Etat et fixent le montant de frais de scolarité, qui est le plus souvent considérable par rapport au revenu libanais moyen.

Ayant souvent des objectifs très précis dus à une compétition réelle entre les établissements et une image à valoriser, les écoles privées s’imposent toujours des investissements importants au niveau humain et matériel. Ainsi, le personnel administratif et les enseignants de ces écoles sont souvent qualifiés. On assure aux instituteurs une formation continue, comportant généralement des stages en France ou dans les centres culturels français au Liban. La compétence des enseignants et la qualité de leur travail sont aussi contrôlées en permanence.

En conséquence, les salaires dans ces écoles sont bien plus élevés que la moyenne.

Partout des laboratoires de langue, des salles de travail et des supports pédagogiques sont mis à la disposition des enseignants et à la portée des étudiants. Outre les séances d’enseignement habituelles, les élèves ont aussi la possibilité d’utiliser des documents écrits ou audio-visuels d’une façon autonome. Ajoutons enfin que le milieu social, qui soutient l’école et les méthodes utilisées dans ces établissements, maintient un niveau de motivation chez élèves qui y sont scolarisés.

3.4.3. Les écoles privées gratuites.

Les écoles privées gratuites se trouvent en nombre très limité au Liban (13.4% du secteur de l’éducation) et 12.5% des élèves libanais fréquentent ce type d’école. Elles sont fondées par des associations religieuses qui les co-subventionnent avec l’Etat. Elles sont fréquentées par les catégories sociales défavorisées et exigent une somme d’inscription qui ne peut être changée que sur décision gouvernementale.

Des maîtres inspecteurs sont envoyés par le ministère, chaque année, pour contrôler le nombre des élèves, leur niveau et les finances de l’école. Dans cette catégorie d’écoles, l’enseignement s’avère de niveau assez modeste et même parfois moindre que l’école publique

3.4.4. Les composantes de l’école privée.

Deux composantes dominent le secteur de l’enseignement privé : la composante laïque et la composante confessionnelle.

-la composante confessionnelle : la gestion de ces écoles et parfois l’enseignement lui-même sont assurés par des institutions religieuses. C’est un phénomène très répandu chez les différentes communautés chrétiennes, où l’on trouve deux types d’écoles :

-les écoles rattachées aux différentes églises libanaises : grecque orthodoxe, maronite et arménienne.

-les écoles des missions religieuses étrangères : Les Jésuites, Les Frères de la Sainte Famille, Les Carmélites, Les Evangélistes...

Citons aussi les écoles et les lycées de Dar- El- Fatwa et ceux des autres communautés musulmanes, relativement peu nombreux mais qui sont en voie de multiplication.

La fin de la guerre (1990) a vu la prolifération des écoles religieuses chiites, qui, au début du troisième millénaire, sont parvenus à égaler les écoles des missionnaires quant à l’enseignement des langues étrangères (les écoles Al Moustafa par exemple).

La composante laïque : On y trouve la Mission Laïque Française, dont les écoles sont installées dans toutes les grandes villes du Liban. Les élèves de ces lycées ont une très bonne formation et un bon niveau en français qui leur permettent de réussir dans les différentes universités. De plus, le taux de réussite des élèves au baccalauréat français en est un témoin.

Ces écoles scolarisent actuellement près de 17000 élèves et bénéficient des enseignants ou d’administratifs détachés par Paris.

- Les 5 Lycées de la Mission Laïque Française (MLF) : le Grand Lycée de Beyrouth (fondé en 1909), le lycée d’Al- Maayssra à Nahr- Ibrahim (créé en 1994, à 30 Km au Nord de Beyrouth), le Lycée Verdun (Beyrouth de l’Ouest), le Lycée de Tripoli (fondé en 1973 dans le Nord) et le Lycée franco- libanais à Habbouche (fondé en 1997 au Sud).

- Le lycée Abdel Kader, un établissement relevant simultanément de la MLF et de la Fondation Hariri.

- Le lycée Abdallah Rassi, un établissement privé situé à Halba, chef lieu du caza de Akkar dans le Nord du Liban, non loin de la frontière syrienne. Ce lycée est lié à la MLF par une convention signée en 1995.

- Et 4 collèges privés : Louise Wegmann (laïque), le Collège Protestant (laïque), Notre-Dame de Nazareth (école catholique) et Notre- dame de Jamhour (école catholique).

Les 5 lycées de la Mission Laïque Française, le lycée Abdel Kader, le lycée Abdallah Rassi et le Collège Protestant font partie du réseau de l’Agence pour l’Enseignement français à l’étranger (AEFE) au Liban et relèvent par conséquent de la compétence de cette agence. Ce qui signifie que, dans ces écoles, l’enseignement est identique à celui dispensé en France.

Elles rentrent ainsi dans le cadre des institutions scolaires subventionnées, placées sous la tutelle du Ministère français des Affaires Etrangères dont dépend l’AEFE, elles doivent également scolariser obligatoirement les enfants de nationalité française.

Parallèlement à ces écoles du réseau de l’AEFE, le Ministère des Affaires Etrangères français a homologué d’autres écoles francophones libanaises, ce qui leur permet de recevoir des aides de la France sous forme financière ou par l’envoi de professeurs titulaires de l’Education Nationale française. Au total, 12 établissements ont été homologués jusqu’en 1996 aux côtés des 7 établissements relevant de l’AEFE. Ces 19 écoles de très haut niveau scolarisent plus de 31000 élèves dont la majorité est de nationalité libanaise.

Ces établissements privés de haut niveau scolaire accueillent surtout des enfants issus de milieu aisé. Les parents financent en partie ces écoles en payant des frais de scolarité annuelle élevées qui dépassent, et de loin, le minimum vital nationalement. Elles sont encore réservées à une élite économique et culturelle, et pratiquent une sélection rigoureuse à la rentrée pour garantir le niveau et limiter le nombre de nouveaux admis.

Face à cette diversité d’écoles, quels facteurs assurent-ils le succès d’un établissement ? Pourquoi y- a- t- il un décalage entre le niveau d’élèves de différentes écoles ? Le taux d’échec scolaire et l’insuffisante rentabilité sont-ils dus pour une grande partie à l’enseignement du français ?