• Aucun résultat trouvé

Le type de partenariat identifié dans le cas à l’étude

CHAPITRE 4 LA DISCUSSION

4.2 Le type de partenariat identifié dans le cas à l’étude

Comme il a été présenté précédemment, les relations de partenariat entre l’État et le tiers secteur ont fait l’objet de plusieurs études au Québec et dans le monde. La typologie produite par Jennifer Coston (1998) et reprise par la suite par Proulx, Savard et Bourque (2005) pour être adaptée au contexte québécois permet de classifier les types de partenariat entretenus entre les acteurs.

D’abord, reprenons les résultats obtenus pour les dimensions d’intensité des relations et de symétrie des rapports de pouvoir. Ces deux indicateurs démontrent que la relation étudiée se

Dimensions Indicateurs Observations Résultats

Intensité des relations inter organisationnelles

(1) Contacts entre les partenaires (fréquence, durée, déroulement des rencontres)

Fréquents Durables Forts/positifs

Élevée (2) Outils/mécanismes de liaison utilisés (réunion,

courriel, conversation téléphonique)

Communication régulière (rencontres, courriels) (3) Satisfaction des partenaires face à la relation de

partenariat Élevée

Formalisme de la relation

(4) Type d’entente ou de protocole entre les organisations (présence d’un contrat, d’une entente verbale, aucune entente) et structure de la démarche

Informelle Volontaire Verbale

Structurée Plutôt informelle (5) Les modes de fonctionnement et les rôles endossés

par chacun des acteurs Formels (6) Type(s) de relation entretenu entre les acteurs à

l’extérieur de l’intervention. type formel et informel Contacts fréquents de Symétrie des

rapports de pouvoir

(7) Consultation des partenaires dans la planification des

actions Oui Symétrique

(8) Perception des partenaires face à leur capacité d’influence dans la prise de décision

Positive Forte influence Ouverture de l’État au pluralisme institutionnel

(9) Niveau de connaissance des organismes partenaires

entre eux Élevé

Ouverture (10) Perception des partenaires face au respect des

cultures et des valeurs respectives Positive (11) Perception des partenaires quant à la reconnaissance

de l’expertise de chacun Bonne reconnaissance Positive (12) Nature et ampleur des changements Bouleversements importants

Rigueur budgétaire Fermeture (13) Impacts des changements sur la communauté Fragilise le partenariat Nombreux

111

situe à un degré élevé d’intensité des relations, combiné à des rapports de type symétrique. Cette combinaison caractérise les relations situées à la droite du continuum de la typologie, que nous avons vu précédemment. De façon générale, Proulx, Bourque et Savard (2005) décrivent ces types de partenariat comme étant des relations plutôt structurées où les deux parties évoluent dans une relation « gagnante-gagnante». Aussi, les types de partenariat situé à droite du continuum s’inscrivent généralement dans une relation d’ouverture au pluralisme institutionnelle. Cette affirmation correspond à nos observations dans le cas à l’étude en ce qui concerne la dimension d’ouverture au pluralisme institutionnel à l’échelle locale (Bourque, Proulx et Savard, 2005; Coston, 1998). Ainsi, à première vue, la relation de partenariat étudiée correspondrait aux modèles qui se situent à droite du continuum. Regardons maintenant plus en détail les trois types de partenariat que l’on retrouve à la droite du continuum.

Le rapport appelé de coexistence est défini comme une relation dans laquelle « l’établissement ou l’organisme public est ‘sympathique’ à l’égard des activités des organismes du tiers secteur dans un champ d’activité donné, mais n’est pas nécessairement proactif pour les soutenir. Le rapport se limite souvent à des échanges d’information dans une ‘coexistence non contraignante’ » (Proulx et Savard, 2012, p. 28).

Le rapport de supplémentarité, qui se situe légèrement plus à droite sur le continuum, est quant à lui présent lorsque « l’établissement ou l’organisme public met en place des services publics en fonction des ‘préférences moyennes’ de la population, mais accepte de soutenir en partie les ‘préférences minoritaires’ prises en charge par les organismes du tiers secteur » (Proulx et Savard, 2012, p. 28). Dans ce type de rapport, le tiers secteur offre des services non offerts par l’État afin de répondre à la demande non comblée. En ce sens, l’organisme peut être appelé à collaborer avec l’État lors de l’élaboration de politiques ou programmes dans leurs champs d’expertise. Dans le rapport de supplémentarité, l’État reconnaît le rôle endossé par le tiers secteur, et vice versa.

Enfin, le rapport situé à l’extrême droite du continuum est dit de coconstruction. Proulx et Savard (2012, p. 28) définissent ce rapport de la façon suivante :

112

Dans le rapport de coconstruction, l’établissement ou l’organisme public partage ses responsabilités et ses opérations avec des organismes du tiers secteur, mais, par opposition à la sous-traitance, chacun des acteurs conserve son autonomie, ses valeurs et sa mission. La coconstruction implique également une participation des organismes du tiers secteur à l’élaboration des politiques publiques. Les relations entre les deux types d’organisation sont également beaucoup plus formelles et feront souvent l’objet d’une entente écrite liant les deux organisations.

De prime à bord, les types de supplémentarité et de coconstruction semblent davantage correspondre à la relation établie entre les acteurs dans le cas à l’étude, car, contrairement au type coexistence, les deux premiers types impliquent un fort degré d’intensité des relations entre l’État et le tiers secteur. Au contraire, le type coexistence suggère une intensité plus faible des relations, ce qui va à l’encontre des résultats obtenus pour la relation de partenariat étudiée. Afin d’approfondir notre analyse, le tableau suivant reprend chacun des six types de partenariat État-tiers secteur selon les quatre dimensions retenues. Il permet ainsi de saisir chaque type de partenariat suggéré dans la typologie de Coston (1998) revue par Proulx, Bourque et Savard (2005).

Tableau 5. Synthèse de la typologie de Coston, adaptée au contexte québécois

Type rapport à

l’État institutionnel Pluralisme Degré d’intensité des rapports

Degré de formalisme des

rapports

Rapports de pouvoir Compétition Résistance Aucun lien Informel Avantage à l’État Asymétrique

Sous-traitance Ouverture Modéré à élevé Formel Avantage à l’État avec influence du tiers secteur

Tiers Parti Ouverture Peu élevé Informel Avantage à l’État avec influence du tiers secteur

Coexistence Ouverture Peu élevé Informel Influence du tiers secteur

Suplémentarité Ouverture Modéré à élevé Plutôt informel Autonomie du Symétrique tiers secteur

Coconstruction Ouverture Élevé Formel

Symétrique Autonomie du

tiers secteur Source : Proulx Bourque et Savard (2005).

À la lumière des informations contenues dans le tableau de référence, nous concluons que le type de partenariat se situe à la fois dans un type de supplémentarité et de conconstrucion.

113

En effet, la relation de partenariat à l’étude ne semble pas s’inscrire dans un seul type, mais bien à mi-chemin entre les deux, car il emprunte à la fois des caractéristiques de l’un et de l’autre. À ce sujet, Proulx, Bourque et Savard (2005, p. 33) formulent l’observation suivante :

D’entrée de jeu, soulignons que, pour la typologie de Coston comme pour tout exercice consistant à classer des phénomènes dans des catégories quelconques, aucun de ceux-ci n’existe à l’état pur et que, par conséquent, aucun des secteurs considérés ici ne correspond en tous points aux caractéristiques identifiées par Coston pour différencier chacun des types de rapports à l’État. Toutefois, tous se rapprochent de l’un ou de l’autre sous plusieurs aspects, certains plus que d’autres.

Ainsi, il nous apparaît plus adéquat de situer la relation de partenariat étudiée dans un rapport hybride, afin de dresser un portrait juste des rapports entretenus entre les partenaires impliqués dans la démarche à l’étude.

Reprenons brièvement chacune des composantes afin d’exposer notre analyse. D’abord, les dimensions des rapports de pouvoir et d’ouverture au pluralisme institutionnel sont identiques pour les deux types de partenariat retenu. Ainsi, les deux modèles suggèrent que la relation de partenariat s’inscrit dans un rapport de pouvoir symétrique où le tiers secteur conserve son autonomie, ce qui correspond aux observations effectuées dans la relation de partenariat à l’étude. Aussi, selon les types supplémentarité et coconstruction, l’État se montre ouvert au pluralisme institutionnel, ce que nous avons également pu observer. Notons que, en ce qui a trait à la dimension d’ouverture au pluralisme institutionnel, nous la traitons ici à l’échelle locale. Les observations effectuées concernant la dimension à l’échelle nationale feront l’objet d’une prochaine section.

Concernant la dimension du formalisme des relations, le type supplémentarité suggère que l’État et le tiers secteur entretiennent des relations de type mixte qui tendent davantage vers des relations informelles. Cette description fait sens avec les résultats obtenus pour la relation de partenariat à l’étude. Cet aspect revêt un caractère important, car il rappelle que la relation étudiée est peu normée, par l’absence de contrat ou de toute forme d’entente écrite entre les parties. Ainsi, nous considérons que la relation de partenariat instaurée dans l’intervention en développement des communautés à l’étude s’apparente au type de supplémentarité en ce qui a trait à la dimension du formalisme des relations. La dimension d’intensité des relations

114

inter organisationnelle correspond quant à elle davantage au type de coconstruction. En effet, dans ce modèle l’intensité est dite « élevée » tout comme dans la relation de partenariat étudiée où l’on a pu constater ce fort degré d’intensité notamment par la fréquence des contacts entre les acteurs et leur proximité.

Ces éléments d’analyse nous permettent de situer le type de partenariat présent dans l’intervention en développement des communautés à l’étude dans une formule hybride, au carrefour de deux types de partenariat que sont la supplémentarité et la coconstruction. Les deux prochaines sections permettront d’approfondir les caractéristiques principales du type de partenariat supplémentarité-coconstruction et ce qu’il peut nous révéler sur les relations de partenariat établies dans le cas à l’étude.