Historique de la démarche - Présentation du cas à l’étude

CHAPITRE 3 PRÉSENTATION DES RÉSULATS

3.1 Présentation du cas à l’étude

3.1.3 Historique de la démarche

Afin de bien saisir le cas à l’étude, il apparaît pertinent de présenter un bref historique des principales étapes survenues au cours de la démarche et des interventions en ayant découlé. Les entrevues menées auprès des participants ont permis d’approfondir ces éléments afin de dresser un portrait de l’évolution de la démarche au fil du temps. Un document de référence produit par l’ASSS MCQ a également été utilisé afin de documenter certains aspects précis de l’historique de la démarche d’intervention (Boisvert, 2007). La figure suivante présente un récapitulatif des principales étapes de la démarche de développement des communautés à l’étude. Les étapes présentées seront par la suite abordées plus en détail.

Figure 4. Les principales étapes de la démarche de développement des communautés

Historique de la démarche – Résumé

 Interventions intensives dans le quartier par le CSSS et son équipe de quartier. Plusieurs organismes communautaires présents en soutien à la population.

 Constat commun: la situation dans le quartier est problématique. Plusieurs citoyens vivent dans des conditions précaires et sont en situation de vulnérabilité.

 Inscription de l’intervention en soutien au développement des communautés au plan stratégique du CSSS.

 Production du portrait des différents secteurs du CSSS selon les données par territoire de l’ASSS et de Statistique Canada.

 À l’issue de la production du portrait : Identification du quartier comme secteur vulnérable selon les indices de défavorisation (sociale et matérielle).

 Les intervenants formulent une volonté d’intervenir dans le quartier de façon plus intensive et structurée.

 L’ASSS MCQ propose à différentes communautés du Québec de procéder au test d’un outil en développement à ce moment qui s’appelle fiche d’appréciation du potentiel des

communautés.

 Le test de l’outil est effectué dans le quartier (auprès des intervenants, et non des citoyens) et permet l’identification de certains besoins de la population.

 Sur la base des données ainsi produites, les intervenants amorcent certaines interventions pour répondre aux besoins identifiés. Les interventions alors posées sont limitées.  Pendant ce temps, L’ASSS MCQ peaufine l’outil pour en arriver à une version finale.  Annonce d’une formation dispensée par le RQDS et L’ASSS MCQ portant sur l’utilisation

concrète de l’outil auprès de la population.

 Les organisations intéressées du secteur assistent à la formation.

 À l’issue de la formation, les organisations se regroupent au sein d’un comité de mise en œuvre afin de procéder à la consultation populaire (en utilisant l’outil développé).  Forum citoyen.

 Compilation des données. Identification des principaux besoins de la population du quartier.  Formation de cinq comités : jardin communautaire, animation et organisation du territoire,

journal de quartier, soutien à la lecture et à l’écriture et habitation.  Les partenaires s’impliquent au sein des comités souhaités.

Les premiers pas : vers une intervention structurée en développement des communautés Après discussion avec les participants rencontrés, nous constatons qu’il est plutôt ardu d’identifier le moment exact au cours duquel les interventions pour soutenir le développement du quartier ont débuté. En effet, les participants nous apprennent que, depuis plus de dix ans, des interventions particulières sont posées auprès des citoyens du secteur par

différentes organisations locales. Au départ moins structurées, ces interventions ont évolué au fil du temps pour devenir une démarche de soutien au développement des communautés organisée et concertée entre les acteurs du milieu. Les participants soulignent que les premières interventions posées par le milieu communautaire et le CSSS Du Coin agissaient en soutien direct à la population du quartier, déjà identifiée comme une population vulnérable aux prises avec de nombreuses difficultés économiques et sociales comme l’exprime une participante rencontrée :

Il y a au moins une bonne dizaine d’années où on connaissait, statistiquement, mais aussi de ressenti, les difficultés de la population dans le quartier [Nom du quartier], qui s’ancraient de plus en plus dans une vulnérabilité. » (Participante #4)

Le CSSS Du Coin posait alors des interventions particulières dans le quartier par la présence d’une équipe d’intervenants dédiée à la population du quartier. Il s’agit de l'équipe de quartier, équipe qui regroupe des professionnels du CLSC et du Centre jeunesse (CJ) dans le but de rejoindre plus facilement la population locale. Notons également une présence accrue d’organismes communautaires dans le secteur ou à proximité de celui-ci qui intervenaient auprès des résidents du quartier de façon soutenue.

Ainsi, la démarche de développement des communautés à l’étude est issue de plusieurs interventions préalablement posées par les organismes du secteur, soucieux de la situation de vulnérabilité vécue par la population locale. Ces interventions ont ensuite mené à la mobilisation des partenaires vers une démarche collective et structurée de développement des communautés.

Les entrevues nous apprennent que la situation de vulnérabilité du quartier était source d’inquiétude pour plusieurs intervenants et qui, en conséquence souhaitaient poser des actions concrètes et structurées en vue de l’amélioration des conditions de vie et de bien-être de la population du quartier. Un constat est alors formulé par les acteurs du milieu : plusieurs interventions sont effectuées dans le secteur, mais les réels besoins ressentis par la population sont peu connus. Parallèlement, les CSSS de la région, en collaboration avec l’ASSS MCQ, entament une démarche générale de documentation des territoires par quartier. À l’issue de cette démarche, un portrait de chaque territoire est produit. Ce portrait permet alors de mieux

comprendre les réalités vécues dans le quartier ciblé et confirme les constats effectués par les intervenants quant à la situation de vulnérabilité vécue par la population locale. À la lumière de ces informations, les intervenants formulent une intention claire d’agir en soutien à la population du quartier.

La collaboration entre les organismes du milieu et l’ASSS MCQ se poursuit par la suite. En effet, le CSSS du Coin ainsi que certains organismes du quartier s’associent à l’ASSS MCQ dans le cadre de travaux effectués dans le domaine du développement des communautés. Plus précisément, les intervenants du milieu sont interpellés afin de participer à une démarche de recherche portant sur l’élaboration d’une grille d’identification des réalités vécues dans une communauté et du potentiel de cette communauté à agir sur son propre développement. Cet outil est appelé fiche d’appréciation du potentiel des communautés (Boisvert, 2007). L’outil produit étant relativement récent, une période de test devait avoir lieu. L’expérimentation de la fiche a donc eu lieu dans le quartier permettant alors de documenter les réalités vécues dans le secteur selon les indicateurs présents dans la grille d’évaluation de la fiche. Ceci s’est notamment actualisé par la distribution d’un sondage auprès de différents acteurs du quartier. Cet outil permettait entre autres de décrire certaines réalités du secteur et d’approfondir le potentiel de cette communauté à se développer (Boisvert, 2007). Une participante rencontrée situe la période d’expérimentation de la fiche d’appréciation du potentiel de développement des communautés dans le temps et explique le déroulement de la période de test :

2005-2007, avec les nouveaux recensements, on avait des nouvelles données, par quartier, et là, la démarche était vraiment enclenchée pour la grille de potentiel, et les tests [de l’outil] ont dû arriver vers 2005-2006. […]Donc on essayait la grille, on la documentait, on essayait de dire : ah, ce libellé-là, il est pas tout à fait représentatif, il est pas à notre goût, on le comprend pas, il faut ajouter un commentaire. On était davantage dans ces zones-là, que de l’appliquer pour avoir des réponses du milieu. Mais forcément, à faire l’exercice, on a eu quelques réponses malgré tout. Et on a déjà commencé un peu, à construire autour de ça. Mais il avait toujours été dit [à l’agence de santé et de services sociaux], il faudra refaire la démarche dans le quartier pour vraiment savoir, et valider avec les résidents si nos pistes, nos leviers sont bons.On ne pouvait pas le refaire coup sur coup non plus. Donc on a attendu un certain délai, on a entre-temps mis déjà l’épaule à la roue sur certains dossiers. (Participante #4)

La période de test de l’outil a ainsi donné lieu à une première période de consultation de certains acteurs du secteur et à l’identification de diverses pistes d’actions. Par contre,

l’opinion des citoyens était peu abordée lors de cette première consultation, comme l’indique une participante rencontrée :

Parce que la première fois, les citoyens étaient pas tellement là non plus, juste au test de l’outil. Mais on avait des représentants d’organismes oui, mais pas nécessairement des citoyens, l’approche était comme pas encore définie. (Participante #4)

Il s’agit là des premières actions posées en vue de la mise sur pied d’une démarche structurée d’intervention en soutien au développement des communautés dans le secteur.

La poursuite des actions : vers une démarche concertée en développement des communautés La première démarche de test de l’outil a permis de mobiliser les différentes organisations présentes dans le quartier et d’augmenter la connaissance des réalités vécues dans le secteur. Une fois les résultats obtenus, les acteurs du milieu souhaitaient utiliser les nouvelles connaissances obtenues concernant le quartier pour agir en soutien à la population locale, comme l’indique l’extrait suivant :

C’est beau d’identifier des potentiels, il faut que ça se traduise en action. Mais c’est beau l’action, mais il faut du soutien, parce que sinon l’action c’est se donner bien de la misère pour peu de résultats. Donc c’est parti un peu comme ça, à travers le temps. (Participante #4)

Par la suite, l’ASSS MCQ et le Réseau québécois de développement social (RQDS) ont procédé à l’élaboration d’une formation visant à accompagner et à outiller les milieux désirant entreprendre une démarche de développement des communautés. Une fois la formation structurée, les intervenants du secteur ont été conviés à y participer. Le CSSS a alors convié les organisations intéressées. L’invitation a été formulée à l’ensemble des partenaires d’un comité territorial de concertation en développement social déjà présent pour l’ensemble de la ville. Les partenaires issus de cette concertation et intéressés à enclencher des actions concrètes dans le quartier ciblé se sont ainsi joints à la période de formation comme l’indique l’extrait suivant :

Ça, ça vient de, je fais partie d’un comité de développement social qui inclut presque tous les organismes de la ville, les partenaires de la ville, par exemple le CLE, la Commission scolaire, le collège, CDC, etc. Et, le CSSS est là-dedans. Cette démarche-là, nous avait été parlée par le CSSS et nous invitait à, si on avait un intérêt, à participer à une formation de deux jours. (Participante #2)

La formation a eu lieu en 2012 et elle avait pour objectif de familiariser les intervenants au concept de développement des communautés comme stratégie d’intervention sur les déterminants sociaux de la santé et aux indicateurs de développement des communautés. La formation permettait entre autres d’outiller les partenaires pour que ceux-ci soient en mesure d’actualiser une démarche de développement des communautés dans leur secteur. Parmi les thèmes abordés lors de la formation, la grille de potentiel de développement des communautés, expérimenté dans différents quartiers de la région, était présentée en vue d’une appropriation de l’outil par les intervenants. À l’issue de cette formation, les partenaires ont affirmé leur désir d’entamer une démarche d’intervention en soutien au développement des communautés et de procéder à une deuxième période de consultation grâce à l’outil développé par l’ASSS, incluant cette fois-ci les citoyens. L’extrait suivant témoigne de cette volonté de la part des partenaires :

Comme de fait, ceux qui ont participé à la formation se sont dit : ah, quel bel outil, on le fait ensemble. Et on le structure pour être sûr que l’on fait non seulement la démarche ensemble, mais on va aussi soutenir ce qui va venir après. (Participante #4)

Une deuxième démarche de consultation a ainsi été enclenchée, avec le désir de sonder directement les citoyens. Cette seconde consultation est alors organisée sous forme de forum citoyen. En vue de l’organisation du forum, les partenaires se sont regroupés dans le cadre d’un comité de mise en œuvre de la démarche.

Après ça, on a consulté les gens. Il y a eu deux étapes, une de jour et une de soir, avec des gens d’un petit peu tous les milieux, des citoyens, des employeurs, des gens qui ont déjà habité le quartier, des commerçants du quartier, des intervenants, des gens des écoles, des garderies, c’était assez varié la participation. Bon, après ça, là c’était la collecte de données, mais après ça, on a refait une rencontre pour partager aux gens le résultat de la collecte de données. Puis, là on a, il y a des constats qui sont ressortis de là. (Participante #1)

À l’issue de ce forum, cinq volets d’intervention sont identifiés sur la base des besoins nommés par les participants. Les partenaires du Comité de mise en œuvre de la démarche identifient par la suite les priorités pour lesquelles leur organisation souhaite s’impliquer. Cela donne lieu à la formation de comités qui travailleront sur les volets d’intervention ressortie lors du forum. Ces comités sont formés à la fois des partenaires et de citoyens du secteur. Au total, ce sont cinq comités qui voient le jour afin de mettre en place et supporter

les actions de soutien aux gens du quartier. Une participante rencontrée résume chacun de ces comités :

Il y a quelque chose sur la littéracie, les gens voulaient vraiment qu’on fasse quelque chose pour aider les familles défavorisées pour avoir le plus d’outils possible pour aimer l’école, pis pas décrocher trop vite. Donc il y a ça. Il y a, ben tu sais, on n’a pas nommé le mot littéracie, c’était plus éveil à la lecture et à l’écriture. Ensuite, il y a des jardins, les gens ont démontré qu’ils avaient le goût d’avoir un jardin communautaire ou collectif, ça, c’était aux gens du futur comité à décider. Il y avait de l’animation du territoire aussi. Ils nous ont dit, ça serait le fun s’il y avait, dans les parcs existants, des choses, pour qu’il y ait toujours quelqu’un. Pis quand c’est animé, ben tu as moins de gens qui vont là pour la drogue ou pour la boisson. Pis il y en avait un autre, c’était le journal de quartier l’autre. (Participante #1)

En plus de ces comités, des actions sont également entreprises dans le domaine de l’habitation. Ces interventions ont été entamées pour agir sur différentes problématiques identifiées au cours de la période de consultation telles que le sentiment de sécurité, la dévitalisation du secteur et l’image du quartier et le taux d’effort. Le schéma suivant présente l’organisation des différents comités issus de la démarche.

Figure 5 Organisation de la démarche de développement des communautés

Comité de mise en

oeuvre de la

démarche

Comité du jardin communautaire Journal de quartier Comité d'animation et d'orgnaisation du territoire Comité de soutien à la lecture Comité habitation

Les suites de la démarche : vers une intervention consolidée en développement des communautés

Au moment où la collecte de données a eu lieu, les interventions se poursuivent au sein des différents comités de travail. Les participants rencontrés partagent les nombreuses actions qui ont vu le jour pour répondre aux besoins initialement identifiés. Le quartier peut maintenant compter sur un jardin collectif, des fêtes de quartier (été, hiver), un projet d’éveil à la lecture et à l’écriture, et plus encore. Les interventions se poursuivent dans le quartier afin d’améliorer les conditions de vie des citoyens. Le Comité de mise en œuvre travaille, au moment de la collecte de données, à la mise sur pied d’une activité de reconnaissance qui vise à souligner la participation des citoyens dans les différents projets mis sur pied. Les entrevues ont permis de questionner les participants sur leur degré de satisfaction face à la démarche de développement des communautés. À ce sujet, une participante répond :

Oui, je dirais que oui parce que regarde, on a pu mener à terme tous les dossiers, et ils cheminent. Pis ça avance. Puis la communauté nous dit qu’ils sont satisfaits et qu’ils ont aimé ça. (Participante #1)

Forts de l’expertise développée dans cette première démarche de développement des communautés, les partenaires ont entrepris, depuis, de nouvelles démarches d’intervention en soutien au développement des communautés dans d’autres quartiers de la ville. Un comité d’orientation est présent et regroupe plusieurs partenaires. Ce comité a pour mandat d’identifier les secteurs sélectionnés pour entamer les démarches de développement des communautés qui suivront, sur la base des indicateurs présents dans chacune d’entre elles. Deux nouveaux secteurs ont pu bénéficier d’une telle démarche. Dans chacun de ces secteurs, de nouveaux partenaires se sont joints aux démarches afin d’agir de façon concertée sur le développement de ces communautés.

Aussi, présente sur le territoire, on peut maintenant compter sur une instance de concertation qui réunit l’ensemble des décideurs intéressés par le développement de celui-ci. Cette instance de concertation agit en soutien aux initiatives locales et permet un plan de développement concerté et appuyé par les décideurs.

L’ensemble des grandes instances du territoire se sont quand même réseauté dans un conseil stratégique, les partenaires. […] Le [Nom de l’instance de concertation] aide beaucoup entre autres pour mettre ça sur la table et le

maintenir. Mais ça nous aura pris aussi quelques années à placer les pions pour réussir à aboutir. Ce n’est pas venu du jour au lendemain. (Participante #4)

Comme le démontre l’historique de la démarche, les interventions posées sont issues de la concertation de différentes organisations du milieu ayant à cœur le développement du quartier et le bien-être de ses résidents. Plusieurs partenaires ont ainsi été impliqués dans l’évolution et l’actualisation des interventions. La présentation de ces différents acteurs fait l’objet de la section suivante.

3.1.4 Les partenaires impliqués dans la démarche de développement des

Dans le document Le partenariat État-tiers secteur : une étude de cas en développement des communautés (Page 74-82)