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Chapitre 2. La notion de compétence

2.3. La transversalité des compétences

Trois approches différentes vont être examinées dans cette section.

2.3.1. La transversalité en termes de potentiel ou ressources à mobiliser

Beaucoup d’auteurs s’accordent sur l’idée selon laquelle l’aspect transversal d’une

compétence est ce qui permet le transfert d’une compétence acquise dans un contexte

particulier dans une ou plusieurs autres situations plus ou moins analogues. Mais d’autres

distinguent transférabilité et transversalité d’une compétence.

Rey définit le caractère transversal des compétences comme une sorte « de potentialité

invisible, intérieure, personnelle, susceptible d’engendrer une infinité de performances. »

(Rey & Develay, 1996, p. 17). Selon cette perspective, trois éléments sont à retenir :

premièrement, la compétence n’est pas transversale à priori, mais peut, sous certaines

conditions, le devenir (c’est le cas lorsqu’un individu, repérant une analogie entre une

nouvelle situation et une situation connue, mobilise ou recompose ses ressources afin de

réagir de façon adaptée face à la nouvelle situation). Et deuxièmement, la transversalité d’une

compétence est liée à la métacognition.

2.3.2. Transversalité : un processus de co-transformation

Plus récemment, Le Boterf (2011), propose de définir la compétence transversale en termes de

processus de co-transformation et non comme une somme ou une simple addition de

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ressources. Il écrit : « […] Penser cette notion de compétence c’est raisonner en termes de

combinatoire et non d’assemblages des compétences. ». Par exemple, dans une situation

d’apprentissage, le transfert de compétence entre l’expert et l’apprenant est un processus de

co transformation et non comme simple transport de la compétence d’une situation à une

autre. D’abord, il faut distinguer les savoirs, les connaissances et les ressources. Les savoirs

sont des connaissances formalisées. Ce sont des corpus objectivés qui renvoient aux théories,

procédures, méthodes, modes opératoires etc. En revanche, chacun construit, organise,

s’approprie ses connaissances d’une certaine façon des savoirs. Dans cette conception de

compétence, les connaissances sont difficiles à transmettre directement : elles doivent être

transformées en savoir pour devenir des objets transmissibles. Quant aux ressources, elles

comprennent à la fois le savoir-faire et le savoir-y-faire. Ce sont toutes ces habiletés qui

s’acquièrent par l’expérience accumulée, par la récurrence des apprentissages de situations

similaires ou proches. « Ce sont la virtuosité et l’acuité acquises au cours du temps » (Le

Boterf, 2011, p. 71). Le savoir-y-faire est difficile à verbaliser, c’est un savoir dit « tacite »

synonyme de savoir« incorporé ». Et puis qu’inscrit dans son corps, l’explicitation de ce

savoir-y-faire est difficile pour l’expert. Il ne peut y arriver que partiellement. La transmission

de savoirs est pensée en termes de processus de co-transformation entre expert et l’apprenant.

Cette transmission n’est pas directe, elle est circulaire et nécessite un travail de construction :

du côté de l’expert, la création d’un savoir objectivé, puis l’appropriation de ce savoir par

celui qui apprend. Il y a de part et d’autre, une double transformation du contenu des savoirs.

La Figure 1 représente ce processus de transformation des savoirs.

Figure 1 : Transférer : une double transformation (Source : Le Boterf, 2011, p. 73).

Mettre en forme S’approprier

Conceptualiser Reconstruire

Transformer Transformer

Savoir de l’expert Savoir de l’apprenant

l’apprenant l’apprenant

Savoir construit

construit

construit

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L’analyse de Le Boterf nous a apporté un éclairage intéressant sur le mécanisme de transfert

de compétence dans un contexte particulier, celui de la formation. Nous examinons à présent

les apports de la psychologie différentielle sur cette notion de transversalité.

2.3.3. Transversalité : Facteur général vs facteurs spécifiques

Selon la perspective différentielle et du point de vue opérationnel, les aptitudes sont abordées

en termes de facteur. Les psychologues différentialistes distinguent d’une part le facteur

général et d’autres parts, les facteurs spécifiques.

En effet, de nombreux travaux réalisés en psychologie différentielle ont permis de mettre en

évidence l’existence d’un facteur général qui rend compte des corrélations positives entre

différents tests et qui témoignent d’une compétence générale à l’œuvre (dans l’échantillon des

tests recueillis), et d’autres facteurs définis comme des compétences spécifiques relatives à tel

ou tel champ (spatial, verbal, numérique, etc.). Ainsi, l’aptitude intellectuelle générale telle

qu’elle est définie par Spearman est requise pour la réussite de nombreuses activités mettant

en jeu la capacité de raisonnement ou d’autres types de processus cognitif.

En situation scolaire comme en situation professionnelle, la valeur prédictive de ce facteur

général est relativement élevée (Schmidt & Hunter, 1998). Dans cette perspective, la

compétence générale se distingue donc de la compétence spécifique par le fait que la première

est transférable dans de nombreuses situations alors que la deuxième, comme son nom

l’indique, est spécifique à un contexte donné ou à une tâche particulière. Cette idée est en

accord avec la conception de Rey et Develay (1996) sur la transversalité des compétences.

En résumé, sans être exhaustive, nous avons présenté différentes conceptions de la notion de

compétence. Nous avons aussi tenté de préciser la notion de compétence transversale et de

clarifier l’un des processus du transfert de ces compétences dans un contexte particulier, celui

de la formation. La notion de compétence soulève une question cruciale, relative à son

évaluation que nous abordons au chapitre de discusison générale (chapitre 12).

Nous entamons à présent l’étude de deux registres de compétences particuliers : les

compétences créatives et les compténces adaptatives considérées comme des compétences à

s’orienter tout au long de la vie. D’abord, nous examinons la notion de créativité d’une

manière gérérale, puis nous tentons d’analyser le concept de créativité au regard des différents

contextes en orientation.

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