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Chapitre 1 : Généralités sur la peste porcine africaine (PPA)

1. Agent pathogène

1.4. Transmission et réplication du virus de la PPA

1.4.1. Les différents modes de transmission

Le virus de la PPA peut être transmis de porc malade à porc sain (Figure 4) directement par voie orale, nasale, oculaire, par scarification cutanée, par voie intramusculaire, intraveineuse, sous-cutanée ou intra-péritonéale (Penrith et al, 2004) ; (Mc Vicar et al, 1984). Chez l'animal contaminé, le virus est présent dans le sang et toutes autres sécrétions et excrétions (conjonctivales, génitales, urinaires et fécales). Compte tenu de la grande résistance du virus de la PPA dans l'environnement extérieur et dans les milieux biologiques, sa transmission de porc à porc peut aussi avoir lieu indirectement via un vecteur mécanique tel que les locaux, les véhicules, les instruments ou les vêtements souillés (Crucière, 2003 ; Wilkinson, 1989 ;

Sanchez-Vizcaino, 1992) ou par la consommation par un porc sain de viande de porc

contaminée (Figure 4) quelle que soit sa forme et son mode de conservation (Wilkinson,

1989).

Le virus de la PPA peut enfin être transmis à un porc par la piqûre d'un vecteur biologique : les tiques molles du genre Ornithodoros dont certaines espèces constituent aussi des réservoirs naturels du virus (Figure 4). Colonisant indifféremment les terriers et d’autres habitats des suidés sauvages en milieu naturel, et les fissures et fondations des porcheries en milieu domestique, ces tiques peuvent transmettre le virus de la PPA d'un porc infecté à un porc sain, d'un suidé sauvage réservoir à un ses congénères, ou encore d'un suidé sauvage à un porc domestique et ainsi permettre le passage du virus du cycle dit « sauvage » de la maladie au cycle « domestique » de transmission (Figure 4).

Chez la tique elle-même, la transmission du virus d’une tique infectée à une autre tique peut se faire de manière trans-stadiale, transovarienne et transsexuelle (Figure 4). Dans la transmission trans-stadiale, l’infection contractée persiste de stade en stade durant le développement de la tique, par exemple du stade larvaire au stade nymphal jusqu’au stade adulte. Dans le cas des transmissions transovarienne et transsexuelle, la contamination se produit d’une tique à une autre. Dans le premier cas, la tique transmet la maladie à sa descendance. La transmission est dite aussi "verticale". Dans le second, rarement observé, le passage de l’agent infectieux se fait du mâle vers la femelle lors de l’accouplement

(Plowright 1970b ; Plowright 1974 ; Kleiboeker 1998).

Une seule expérience témoigne le passage de virus d’un suidé sauvage (potamochère) contaminé à un porc sain (Anderson et al, 1998). Des essais expérimentaux ont démontré que la diffusion aérienne du virus en milieu ouvert est peu probable (Plowright, 1981). Cette voie

d’infection ne semblerait possible que dans certains endroits où la consommation de gibier est fréquente et où les porcs domestiques sont nourris avec des eaux grasses ou des abats de gibier infecté.

A Madagascar, la plupart des fermes sont de petites d'exploitations où presque aucune mesure sanitaire n'était jusqu’alors appliquée. La transmission du virus est en général directe d’un porc malade vers un porc sain ou indirecte par du matériel souillé. Beaucoup d’opportunités de contacts existent avec des porcs infectés ou du matériel souillé: la divagation des porcs parfois très forte dans certaines régions de production, contact lors des échanges commerciaux ou pendant la saillie, contact avec des animaux d'autres espèces présents sur les lieux et se déplaçant d’un élevage à un autre (poules, chiens, rats, etc..) et agissant comme des vecteurs mécaniques d’introduction de la maladie dans les élevages (Costard et al, 2009). La transmission du virus aux porcs malgaches via une tique molle ornithodore a été suggérée mais reste à être démontrée.

A BCDECCEFB EA C

A BCDECCEFB EA C

ABCD EF ABCD

AB CDEA FB

DB AD CDEA C D

CD AD A

C A A

D C A A

C A A CDEA FA

DB AD

DB CBBC D

DB C A A

FDF CADDA

B AB C AB CDEA FB B DA

F C F CA A

A C F CA A C F

C A A

D C A A

C A A

Indirecte vectorielle

Figure 4 : Cycle de transmission du virus de la PPA chez les différents hôtes (le porc domestique, la tique molle et le potamochère)

1.4.2. Réplication et pathogénie

Plusieurs études sur l'infection aiguë de porcs par le virus de la PPA ont montré que la principale voie de pénétration virale est classiquement la muqueuse pharyngienne et les amygdales. Le virus passe ensuite dans les nœuds lymphatiques rétro-pharyngiens à partir desquels il se dissémine rapidement dans le sang. L’infection généralisée apparaît environ 30 à 48h après l’exposition au virus (Colgrove et al, 1969) et 24 à 48h avant les premiers signes cliniques dus à la virémie. Dans les formes aigües de maladie, la concentration de virus dans le sang peut atteindre 108HAD50/ml et ceci 72h après l’introduction du virus.

La multiplication secondaire du virus se fait dans tout l’organisme, en particulier dans la rate, le foie, les nœuds lymphatiques, la moelle osseuse et le poumon. A ce stade de l’infection, les souches virales modérément et hautement pathogènes se multiplient principalement dans les monocytes et les macrophages du système phagocytaire mononucléaire qui sont les cibles principales pour la réplication virale in vivo (Malmquist et Hay, 1960 ; Colgrove et al, 1969

; Fernandez et al, 1992 a, b ; Oura et al, 1998b).

La réplication du virus a été aussi observée dans les cellules endothéliales (Wilkinson et

Wardley, 1978) ; Villamandos et al. 1995 a, b, c,), les hépatocytes (Gomez-Villamandos et al, 1995d), les cellules épithéliales des tubules rénaux (Gomez-(Gomez-Villamandos et al, 1995), les granulocytes neutrophiles (Carrasco et al, 1996), les cellules

mégacaryocytaires (Colgrove et al, 1969, Edwards et al, 1985b), les cellules épithéliales du thymus (Pan I, 1987), les cellules fibroblastiques et les cellules musculaires lisses des veinules et des artérioles (Gomez-Villamandos et al, 1995a).

Le virus provoque une grave lymphopénie (De Tray et al, 1957) par apoptose des lymphocytes alors qu’ils ne sont pas affectés par le virus. Il a été démontré récemment que la production des cytokines pro-inflammatoires par les macrophages infectés est fortement dirigée pour induire l'apoptose sur des populations de lymphocytes (Oura et al, 1998 ;

Salguero et al, 2002, 2005).

La pathogénie du virus de la PPA est expliquée, dans les stades précoces de l’infection, par la destruction massive des monocytes et des macrophages qui libèrent des produits actifs perturbant l’hémostase (Plowright et al, 1994). En outre, le virus peut s'attacher sur les érythrocytes et les plaquettes sanguines (phénomène d'hémadsorption), provoquant des

coagulation intra vasculaire disséminée. La destruction des cellules endothéliales avec la prolifération de lysozymes et de débris de cellules phagocytaires provoque une nécrose de la membrane capillaire à laquelle les plaquettes se sont fixées (Gomez-Villamandos et al,

1995b). Elle donne naissance ainsi à des hémorragies.

L’œdème alvéolaire noté dans les stades finaux de la maladie est la conséquence de l’activation des macrophages intra-vasculaires pulmonaires. Le virus est excrété principalement au niveau de l’appareil respiratoire supérieur 1 à 2 jours avant l’apparition de la fièvre et persiste jusqu’à la mort de l’animal.

Contrairement aux porcs domestiques, les suidés sauvages réservoirs hébergent une quantité très faible de virus dans leurs tissus. Le système lymphatique semble être privilégié. Seuls les jeunes, qui s’infectent peu de temps après la naissance, présentent une virémie susceptible de permettre la transmission du virus à une tique fixée, par piqûre mais jamais par contact direct à un autre suidé.

Chez la tique, le virus se réplique tout d’abord au niveau de l’épithélium de l’estomac moyen. Après 15 à 21 jours, l’infection se généralise. Le virus gagne les glandes salivaires et les glandes coxales, dont les sécrétions sont contaminantes. Les tiques sont infectieuses pendant une période allant jusqu’à 8 ans, peuvent rester sans se nourrir à l’état quiescent pendant près de 5 ans (Fernandez Garcia, 1970; Oleaga-Perez, 1990; Boinas, 1995). Elles peuvent vivre jusqu’à plus de quinze ans (Encinas et al, 1999).