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Chapitre 2 : Les réservoirs naturels et les vecteurs biologiques du virus de la PPA

1. Les suidés sauvages

1.2. Les potamochères (Potamochoerus sp)

1.2. Les potamochères (Potamochoerus sp)

Le potamochère (Potamochoerus) est un artiodactyle de la sous-famille des Suinae.

Potamochoerus larvatus et Potamochoerus porcus sont les deux représentants du genre Potamochoerus dans le monde. Ils ne sont rencontrés qu’en Afrique et à Madagascar. Ces deux espèces diffèrent par la couleur de leur pelage et leur distribution géographique. Le Potamochoerus porcus est aussi appelé sanglier rouge des rivières. Il a un pelage assez clair et possède une raie dorsale blanche bien distincte (Figure 14). Il se trouve seulement en Afrique de l'ouest et en Afrique centrale, du sud-ouest du Sénégal (région de Casamance) à l'est de la République Démocratique du Congo (Figure 15). Une diminution des populations de potamochères existe à l'ouest et à l'extrême nord, du fait de l'activité humaine (chasse en excès et destruction de l'habitat).

P. larvatus est de couleur marron, plus foncé que P. porcus, sans masque blanc et avec un museau plus long (Figure 16). Il s'étend au sud de la République Démocratique du Congo, à l'est de l'Afrique du sud et à Madagascar (Figure 17).

Très peu d'études ont été conduites sur ces deux espèces. La majeure partie des informations ont été acquises à partir des observations réalisées sur les P. larvatus d’Afrique du Sud

(Seydack, 1990 ; Vercammen et al, 1993). Les deux espèces vivent en petits groupes

familiaux comportant 4 à 10 individus. Toutefois dans certaines régions équatoriales, des groupes de plus de 30 individus ont été rapportés pour P. porcus, alors que P. larvatus forme de petits troupeaux. Les deux espèces sont sédentaires et territoriales (Vercammen et al,

l’habitat. La densité de potamochères dans plusieurs régions d’Afrique du sud se situe entre 0,35 et 0,5 animaux/km² et dépasse les 3 individus/km² dans certaines zones de forêt tropicale humide. Le cycle de reproduction du potamochère est saisonnier. Des facteurs tels que la disponibilité alimentaire, la photopériode ou la température pourraient intervenir dans le déclenchement des chaleurs. En Afrique australe, la majorité des naissances ont lieu au début de la saison des pluies (entre octobre et décembre). Comme chez d’autres espèces de suidés sauvages, la possibilité de 2 mises-bas par an existe dans les zones intertropicales bénéficiant de deux saisons de pluies. Au sein d’une unité familiale, seul le couple dominant monogame se reproduit, une fois la maturité sexuelle atteinte vers 20 mois de vie. Au terme d’une gestation de 110-120 jours (Seydack, 1990, 1991), soit environ 4 mois, la femelle très agressive donne naissance à 3 ou 4 petits en moyenne, bien que des portées de 6 à 8 animaux aient été décrites. La dispersion des jeunes se produit entre 1,5 et 2 ans d’âge. Essentiellement nocturnes, les potamochères passent souvent la journée à dormir dans leur bauge. Les potamochères vivent partout du moment qu'ils peuvent trouver une végétation abondante et de l'humidité. Ils sont rencontrés dans toutes les zones forestières d'aspect guinéen et dans les zones soudaniennes aux abords des fleuves où il leur arrive de cohabiter quelquefois avec des phacochères. Concernant la cohabitation potamochères-porcs domestiques, il a été plusieurs fois rapporté dans différentes régions d'Afrique (Burkina Faso, Gabon ou Zaïre) (Simoons,

1953 ; Vercammen et al, 1993) et à Madagascar que les potamochères avaient la capacité de

s'hybrider avec les porcs domestiques (Vercammen et al, 1993 ; Kingdon 2003) (Jori,

communication personnelle). Le porc domestique possède pourtant 34 paires de

chromosomes et le potamochère 38 (Malander, 1980). Étant donné la distance génétique entre ces deux organismes, il est peu probable que leurs hybrides soient fertiles. Cependant,

plusieurs éléments laissent penser l’existence effective dans la nature d’hybrides issus du croisement de potamochères avec des porcs en divagation. Ces cas ont été signalés dans plusieurs pays d’Afrique comme le Burkina Faso, le Gabon et le Zaïre (Simoons, 1953 ;

Vercammen et al, 1993).

Concernant l'épidémiologie de la PPA, le rôle des potamochères est moins important que celui des phacochères puisqu'ils sont moins nombreux que ces derniers. Ils ont une prévalence d'infection inférieure à celle des phacochères (Wilkinson, 1988). Certains auteurs estiment que le taux de prévalence de l'infection par le virus de la PPA chez les potamochères est dix fois moindre que celui observé chez les phacochères (Mansvelt, 1963). En outre, il a été suggéré que le virus de la PPA circulait seulement occasionnellement ou « à bas bruit » chez

les potamochères (Jori et al, 2007). Comme les phacochères, les potamochères infectés ne présentent aucun signe clinique et peu de lésions tissulaires (Anderson et al, 1998)

(Haresnape et al. 1985; Jori et al. 2007; DeTray 2008). Dans le tissu lymphoïde, une faible

apoptose et une dissémination « à bas bruit » du virus à d'autres tissus lymphoïdes sont observées (Oura et al, 1998). Cette dissémination est favorisée par une virémie relativement longue (35 à 91 jours) par rapport à celle des phacochères. Il a été prouvé aussi que le virus de la PPA persistait dans les tissus lymphatiques pendant au moins 34 semaines avec une quantité de particules virales allant de 102 à 104,9 HAD50/ml après l'infection (Anderson et al,

1998).

Concernant la capacité des potamochères à transmettre le virus de la PPA directement aux porcs domestiques, elle a pu être démontrée expérimentalement mais l’inverse ne semble pas possible, même si le porc domestique secrète une quantité importante de virus (Anderson et

al, 1998). Cette observation suggère que le potamochère ne pourrait pas être infecté

facilement par contact direct. Toutefois, cette hypothèse n'a jamais été confirmée. En conditions naturelles, si des porcs domestiques infectés meurent dans les zones de pâturage des potamochères, ces derniers pourraient être contaminés en ingérant des carcasses des porcs. L'inverse a déjà été observé pour des potamochères infectés dont les carcasses ont été ingérées par des porcs domestiques car suffisamment de particules virales persistaient dans les tissus infectés de potamochères (Anderson et al, 1998; Penrith et al, 2004).

La transmission horizontale du virus de la PPA entre potamochères n’est pas évidente expérimentalement, suggérant que ces animaux exigent des doses plus élevées de virus que les porcs domestiques pour être infectés (Anderson et al, 1998).

Enfin, la transmission du virus de la PPA de potamochères infectés à des tiques molles de l'espèce O. moubata a été démontrée expérimentalement (Anderson et al, 1998). Cependant, en conditions naturelles, il est peu probable que des potamochères cohabitent avec des tiques molles ornithodores puisqu'ils ne creusent pas de terriers favorables à l'hébergement de tiques molles mais fabriquent plutôt des nids dans la bauge, trop humide pour les tiques (Morel,

1969). Néanmoins, dans certaines régions d'Afrique où l’habitat de P. larvatus chevauche

celui du phacochère et de O. moubata, le contact entre potamochères et tiques molles pourrait avoir lieu (Anderson et al. 1998; Roger et al. 2001).

Enfin, si l'hypothèse d'hybridation entre porcs domestiques et potamochères s'avérait exacte, la manière dont ces hybrides pourraient se comporter vis-à–vis du virus de la PPA serait à

Figure 14 : Potamochoerus porcus

Figure 15 : Distribution géographique de Potamochoerus porcus (http://www.ultimateungulate.com/Artiodactyla/ Potamochoerus_porcus.html)

Figure 16 : Potamochoerus larvatus

Figure 17 : Distribution géographique de Potamochoerus larvatus (Source: www.ultimateungulate.com/Artiodactyla/

Potamochoerus_larvatus.html)